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Affaire Kamel Daoud: « Des avocats français cherchent à délocaliser en France le procès»

par El-Houari Dilmi

Le procès de l'écrivain Kamel Daoud se trouve au cœur d'une tentative de délocalisation en France. L'avocate Fatima-Zohra Benbraham a révélé, jeudi, que des avocats français « sont en train de tout mettre en œuvre pour délocaliser, en France, le procès opposant l'auteur Kamel Daoud à sa cliente, Saâda Arbane ». Intervenant sur les ondes de la Chaîne 3 de la Radio nationale, l'avocate a déclaré qu'une « frange d'avocats français est en train de me contacter pour me demander de délocaliser le procès en France ; c'est un véritable scandale », s'est-elle indignée. « Je suis en train de leur répondre, les uns après les autres, en leur demandant s'ils sont de véritables avocats, des professionnels du droit, ou alors des politiciens habillés en robe d'avocat », a-t-elle ajouté. Jeudi dernier, Me Benbraham a annoncé qu'une procédure judiciaire est engagée à l'encontre de Kamel Daoud et de sa femme. Deux plaintes ont été déposées au Tribunal d'Oran pour « violation du secret professionnel, diffamation des victimes du terrorisme et violation de la loi sur la réconciliation nationale ». Saâda accuse Kamel Daoud d'avoir « volé son histoire pour écrire son dernier roman « Houris » avec la complicité de sa femme, psychiatre de son état, chez qui elle consulte depuis près de 10 ans.

«La nationalité d'origine prime»

Selon Maître Benbraham, ces avocats ont formulé cette demande sous prétexte que Daoud est titulaire de la nationalité française. « Une nationalité qui, d'ailleurs, n'a pas été demandée, mais octroyée par les plus hautes autorités françaises », a indiqué l'avocate. « Daoud n'a jamais demandé la nationalité française, elle lui a été octroyée par décret présidentiel. Cela veut dire que le président Macron lui a donné la nationalité en pensant bien qu'un jour il en aura besoin », a ajouté l'invitée de la Radio. L'avocate de Saâda Arbane a encore indiqué que « dans ce cas figure, c'est la nationalité d'origine (algérienne) qui prime, non pas la nationalité acquise, Daoud est Algérien de père en fils, c'est donc une nationalité d'origine et non pas une nationalité octroyée. Il n'a jamais demandé la déchéance de sa nationalité et l'Algérie n'a jamais déchu un citoyen algérien de son droit de nationalité», a-t-elle rappelé. Pour mieux étayer ses arguments, Maître Benbraham a révélé que les avocats qui ont pris attache avec elle, « ont également contacté sa cliente (Saâda Arbane) pour tenter de la convaincre afin que le procès se tienne à Paris et non pas à Oran : si nous allons passer devant un juge français, qui n'a aucune possibilité d'accéder au dossier, il va clôturer le dossier faute de preuves et l'affaire sera morte », a prévenu l'avocate.

«Le dossier médical a disparu »

En attendant la convocation de Kamel Daoud et de sa femme , pour la tenue du procès à Oran, là où tous les faits se sont déroulés, notamment l'écriture du livre, « il semblerait bien que le dossier médical de Saâda Arbane a disparu », selon l'avocate algérienne. « Apparemment le dossier médical a disparu, vraisemblablement, la femme de Daoud a pris les documents pour les remettre à son mari et n'ont pas été restitués à l'hôpital, par la suite, le juge d'instruction va enquêter pour savoir quand, pourquoi et comment ce dossier a disparu », a encore souligné l'invitée de la Radio, avant de poursuivre : « L'hôpital risque de se constituer partie civile contre madame Daoud, qui était fonctionnaire dans cet établissement. C'est un fait extrêmement grave, car c'est un vol de documents administratifs puni par la loi ». Dans le souci d'avoir une meilleure visibilité sur cette affaire, Me Benbraham a affirmé avoir tenté d'entrer en contact avec Kamel Daoud et sa femme, pour avoir leur version de l'histoire, « toutefois, personne n'a répondu à mes sollicitations », a-t-elle révélé. « Depuis que j'ai fait éclater ce dossier et que j'ai apporté toutes les preuves, personne d'entre eux n'a répondu. Et qui ne dit rien consent, cela veut dire que nous sommes sur le bon chemin et nous allons dans le sens du droit», a-t-elle conclu.