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La douce coulée d'un rêve

par Abdou BENABBOU

Supposons ! Supposons puisque les suppositions s'ancrent au plus haut niveau des Etats pour dérouter les réalités évidentes. L'Egypte s'aventure à soumettre un financement pour la reconstruction de Gaza. Elle propose l'irréalisable et les autres disposeront. On a avancé une projection sur 53 milliards de dollars sans que l'on sache sur quelles bases la somme a été retenue, ni comment elle sera collectée et encore moins comment elle sera utilisée. Projeter des architectures sur une terre spoliée, brûlée et calcinée oblige au questionnement pour se demander s'il ne s'agit pas là d'une mauvaise plaisanterie.

Il est question de la construction de 200.000 logements, de zones industrielles, d'un port, d'un aéroport et d'autres infrastructures comme s'il s'agissait de la douce coulée d'un rêve n'exigeant aucune obligation. Et l'incongru dans la bravade du président égyptien est qu'il ne s'en tient à aucune réserve.

Comment donc peut-on concevoir une espèce de plan Marshall pour Gaza totalement rasée délibérément pour déporter plus de deux millions de Palestiniens et faire comme si le ciel prêtera sa miséricorde ? Pourtant tous les Etats arabes ne sont pas dupes et on peut leur prêter un minimum de jugeote et croire qu'ils sont maintenant convaincus que le sionisme n'acceptera pas la reconstruction de ce qu'il a détruit. L'idée de vouloir reconstruire des infrastructures pour une population chassée de sa terre par la force des bombardements atteint le summum du saugrenu. Un tel engagement très aléatoire est une mauvaise manière de courir derrière une bonne conscience alors que l'histoire a gravé dans le marbre les complicités et les compromissions.

L'infortuné président Sissi et ses homologues ont de toute évidence la manie de prendre par la queue les problèmes. La reconstruction de Gaza ne peut se réaliser qu'avec la naissance d'un Etat palestinien libre et souverain.