|
![]() ![]() ![]() L'économie sans homme libre n'est qu'un cours de statistiques
par Sid Lakhdar Boumediene ![]() Je n'ai
cessé de le répéter et j'avais très envie de le faire comprendre avec
insistance à mes étudiants mais il y a toujours le risque de paraître vouloir
distiller une opinion politique lorsque vous appuyez très fort sur un point. Et
d'ailleurs ce ne serait pas pédagogique car l'éducation à l'économie est une
ouverture vers toutes les questions qu'elle pose, sans en privilégier
certaines. Cependant, malgré tout, la compréhension d'un cours d'économie passe
par la prise en compte d'une base fondamentale sans laquelle rien ne pourrait
la faire comprendre.
L'économie c'est d'abord l'homme car sans lui il n'y a rien de possible dans la recherche de sa définition. Marx, comme beaucoup d'autres, bien avant lui, posait le postulat que la création de richesse (ce qui est un objectif majeur de l'économie) est l'effet combiné du capital et du travail. Cela est une évidence depuis la nuit des temps, l'humanité possédait le capital de la nature et des animaux et les êtres humains la capacité de la cueillette et de la chasse afin de survivre. En fait, le débat économique démarre de cette première imbrication des deux. Et l'un de ses questionnements qui a des conséquences en politique est de savoir à qui l'on doit le plus cette richesse, le capital constitué de biens ou la force de travail ? Et surtout de quelles conditions naît la meilleure allocation du travail ? Aucun raisonnement ne pourrait contredire le fait que l'homme sera d'autant plus performant que lorsqu'il est libre dans ses savoirs comme dans ses choix dans n'importe quelle activité et pensée. Rien ne peut se créer sans cette liberté. Ce n'est pas pour rien que les plus grandes avancées de l'homme sont le fait de ceux qui ont pu s'extraire d'un enfermement, c'est-à-dire les savants en tout domaine. Même s'ils étaient confinés dans une société totalitaire dans son dogme et sa terreur, y compris lorsqu'ils adhéraient eux-mêmes au système, ils s'en sont extraits par la liberté de leur recherche, scientifique ou philosophique. L'économie n'est rien sans l'homme qui est sa cause et son objectif. Raison pour laquelle il me prend régulièrement d'entrer en colère contre de très nombreux économistes algériens, très respectueusement, ce qui n'est pas incompatible. C'est d'ailleurs une dérive partagée dans l'ensemble du monde. Ils se restreignent au noircissement du papier qui fait état d'un fleuve de références sur les grands noms en économie et qui abreuvent la contribution de statistiques, de statistiques et encore de statistiques. Jamais ils ne font la jonction avec l'indispensable constat du niveau de liberté politique qui libère les hommes qui, à leur tour, seront les moteurs de l'économie par leurs savoirs et les innovations qui en découlent. Aucune analyse n'est faite sur les restrictions de la liberté si ce n'est par les intervenants en économie politique. Cette dernière étant toujours suspectée pour son manque d'objectivité. On leur a dit qu'ils étaient des économistes, ils s'engouffrent dans le piège de l'emprisonnement des théories, des formules et des tableaux de chiffres. Le font-ils pour impressionner, pour justifier de leur niveau universitaire (que personne ne conteste par ailleurs, ils sont très souvent brillants) ou tout simplement par une crainte d'aborder des sujets compromettants pour leur carrière? Je leur suggère de revenir à la racine et à la simplicité des savoirs en économie, soit l'homme libre comme identifiant majeur. Je les félicite pour leur haute technicité économique mais je ne suis pas certain de pouvoir le faire pour leur enfermement, loin de la base de l'économie. Et plus on est haut, plus on se doit d'être simple dans ses raisonnements. C'est mon avis pour tous les autres domaines. C'est ce que nous disaient aussi nos grands professeurs d'antan. Les économistes algériens sont incontestablement dans cette hauteur, alors qu'ils reviennent au comportement de ce statut par la simplicité de la modestie. L'économie n'est pas seulement une science savante de théories et de statistiques mais le moyen de permettre aux hommes libres de produire et de créer. |
|