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Humilité et contenance

par Abdou BENABBOU

Quand l'humilité est absente, la voie devient libre pour le plus bas des folklores. L'étalage de l'assurance d'un tout savoir n'est pas seulement une grandiloquente prétention mais relève surtout d'une pathologie psychiatrique. Nombreux énergumènes donnent libre cours à leurs certitudes toujours dépouillées de non-sens et s'estiment détenir une contenance capable de légitimer une hauteur humaine sans se rendre compte qu'au contraire, plus on en sait et plus on ne sait rien.

Ni don ni innée, elle est signe de sagesse et de bonne éducation mettant en relief les racines d'une noblesse et les traits d'une hauteur humaine. Témoignage d'une modestie évidente, elle représente la plus belle et efficace ressource naturelle pour donner une force incommensurable à la civilité et à la concorde. Lorsqu'elle est effacée, elle peut devenir violence et un déni de l'écoute des autres et difficiles partages des espaces communs.

Quand le verbe devient outrance, il annihile la connaissance. Il affiche la condescendance et engage au repli pour que les liens entre les hommes deviennent désœuvrés. Il y a un peu de ça dans nos proximités et on accuse probablement à la légère notre «sanguinité» ou les cicatrices que le colonialisme nous a infligées. La bravade des mots et l'impertinence des égos ne sont que manifestations de faiblesse et d'incompétences soulignées.

A la rencontre de la majorité des êtres asiatiques, on est souvent surpris par leur modestie en découvrant chez eux une réelle grandeur d'âme rarement perturbée au point de nous demander si elle n'est pas leur essentielle source d'énergie. Le sourire et la délicatesse seraient leur principale arme et leur savoir enveloppé de discrétion est autrement plus puissant que toutes les énergies conventionnelles.

Le culte de la fanfaronnade ne figure pas dans leur menu quotidien. Sans doute parce qu'ils ont conscience que le savoir est infini et que plus l'homme s'en abreuve et plus sa dimension humaine rapetisse.