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Dans le tableau
foncièrement noir de la mise en application de la loi 08-15, la daïra d'Es-Sénia détient la triste palme. Les chiffres ne mentent pas
: dans cette subdivision administrative, l'état d'exécution de ce dispositif de
régularisation est le pire du pire, avec des indicateurs de contre-performance
les plus élevés à l'échelle de la wilaya.
Ce n'est pas «au pif» que l'inspecteur général de wilaya a, dans son rapport d'audit sur la mise en œuvre de la loi 08-15 du 20 juillet 2008 fixant les règles de mise en conformité des constructions et de leur achèvement, ouvert le chapitre «situation détaillée daïra par daïra» par la circonscription d'Es-Sénia. Les symptômes d'un mauvais fonctionnement du mécanisme y sont si patents qu'on peut aisément parler du «cas Es-Sénia». Cela ressort nettement à la lecture du grand tableau récapitulatif des nombres des dossiers recensés aux différentes phases du circuit de traitement, depuis le dépôt jusqu'à la décision, regroupant les neuf daïras de la wilaya. Et en attendant d'en savoir un peu plus en détail, puisque la séance a été reportée du fait que la réunion du conseil exécutif du mercredi 23 octobre a largement dépassé le temps convenu, il est bien connu dans le milieu lié aux affaires du foncier que la subdivision d'Es-Sénia n'est pas un modèle de diligence dans la chose liée à la 08-15 tout en particulier. Les chiffres parlent d'eux-mêmes. Il faut d'abord remarquer que la daïra d'Es-Sénia, qui chapeaute la ville éponyme du chef-lieu ainsi que les deux communes d'El-Kerma et de Sidi Chahmi, est le plus grand réceptacle de demandes de régularisation dans le cadre de la 08-15, avec un volume cumulé ayant atteint quelque 14.774 dossiers déposés. Et ce, loin devant la daïra de Bir El-Djir (10.320), Oran (6.186), Aïn El-Turck (5.558), Oued Tlélat (3.269), Gdyel (2.554), Boutlélis (1.432), Béthioua (1.197) et Arzew (1.087). LE CAS SINGULIER D'ES-SÉNIA Mais quelles sont en fait les causes de ce «pic» enregistré au niveau de la daïra d'Es-Sénia, lié à la demande sur la 08-15 en tant que dispositif mis en place par l'Etat en 2008 et prorogé par à-coups jusqu'au 31 décembre 2024, dans le but de mettre de l'ordre dans le paysage urbain et le cadre bâti via une régularisation (qui soit la plus souple et la moins contraignante possible, sans préjudice à certains principes et sans dépassement de certaines lignes rouges ayant trait au domaine public de l'Etat, à la sécurité et à l'économie nationales, en premier lieu) mais aussi dans un esprit de paix sociale en relation avec le confortement des citoyens dans leur droit de propriété immobilière ? La réponse réside probablement dans le profil assez déstructuré et donc plus propice aux constructions non conformes et/ou carrément illicites d'une bonne partie du territoire urbain coiffé par la daïra d'Es-Sénia. En clair, le lien est tout fait avec Chteïbo, cet immense espace pavillonnaire considéré comme étant le plus grand recasement du pays et qui pose encore et toujours aux pouvoirs publics d'innombrables casse-têtes liés à la sururbanisation, la forte croissance démographique, l'occupation des sols et la viabilité, tout à la fois. La forte pression dont fait face les administrations auxquelles échoit la prise en charge des dossiers au titre de la 08-15 au niveau de la daïra d'Es-Sénia, au premier rang desquelles figure la direction des Domaines d'Oran-Ouest, maillon central du circuit, est donc tout à fait logique. UN OBJECTIF DE RÉSULTAT Ce qui l'est moins, en revanche, c'est le nombre très réduit des dossiers acceptés, 3.168, sur le volume total réceptionné, 14.774 dossiers (9.122 dossiers «avec acte» et 5.652 «sans acte»), soit seulement 21% de cas validés. L'on peut a priori objecter à ce «raisonnement» deux contre-arguments. Le premier : l'Administration (foncière) n'est pas tenue par un résultat de validation, en ce sens qu'elle ne peut «accepter» un cas «non acceptable», mais plutôt un résultat de traitement. Ce qui est un contresens puisque la raison d'être de la loi 08-15 est l'objectif de résultat au bout du chemin, avec à la clé un dispositif législatif très souple, sauf pour un administrateur qui veut couper un cheveu en quatre. Le deuxième : il y a aussi 5.376 dossiers acceptés «avec réserves». Là aussi, il s'agit d'un contresens. Et il suffit de pousser l'enquête pour connaître, d'abord, la nature de ces réserves et, ensuite, combien des 5.376 dossiers acceptés «avec réserves» ont été débloqués après la levée des réserves. Ceci alors que 1.542 autres dossiers ont été rejetés, 326 en instance au niveau de la daïra et 3.025 au niveau de la commune. Quant au reste du lot, il a été transféré vers les Domaines (3.880 dossiers), l'Agence foncière (56) et la DUAC (120). Au niveau du siège de la daïra d'Es-Sénia, la situation présente les mêmes signes de lourdeur et de décisions défavorables, avec la présence au service de la régularisation par la 08-15 d'un gros tas de courriers en instance, dont certains datant de plusieurs années, en provenance notamment de l'Inspection des Domaines Oran-Ouest, en attente d'une décision, et ce, qu'elle qu'en soit la suite réservée. Après avoir minutieusement et méthodiquement disséqué la situation, non sans passer au crible tous les éléments d'information et de diagnostic y compris ceux du compte-rendu de l'Inspection générale de wilaya dans un souci d'asseoir les décisions qu'il devait prendre a postériori sur des bases solides, le wali Saïd Sayoud a donné séance tenante un faisceau d'instructions à l'ensemble des responsables concernés. Un ultimatum jusqu'au 31 décembre 2024 a été signifié à l'effet de liquider en totalité les dossiers en instance. PLUS D'EXCUSES APRÈS LES MESURES FACILITATRICES DE SAÏD SAYOUD Les chefs de daïra sont tenus d'établir et de notifier les décisions pour l'ensemble des dossiers en instance à leur niveau. Pas de rejet en dehors des rares cas énoncés dans la loi. Toute «interprétation» des textes dans le sens d'une suite «défavorable» à l'aboutissement de la régularisation du dossier sera sévèrement sanctionnée. Des mesures coercitives seront prises à l'encontre de tout responsable qui s'avèrerait «coupable» d'une décision de rejet ou d'émission de réserves infondées, arbitraires ou abusives et ce, dans le seul but d'entraver la bonne marche du dossier. Toutes les instructions, notes et circulaires, émises à l'effet d'alléger les procédures de la 08-15, d'en accélérer le rythme de traitement et d'en étendre le champ des cas régularisables, parmi lesquelles celle la plus récente datant de juillet 2024 qui stipule explicitement que «les constructions édifiées sur des anciennes terres agricoles sont concernées par la régularisation par la 08-15», doivent faire l'objet d'une large diffusion en interne. Des directives ont été également notifiées aux responsables concernés pour ce qui est de certains dossiers précis, dont certains cas «en suspens» concernant l'Agence foncière, la daïra d'Oran et la direction des Domaines d'Oran-Est. |