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«Les psalmodies
au cœur de la fête du Mawlid»
Le peuple algérien à l'instar des peuples musulmans s'apprête à fêter le Mawlid En Nabaoui Acharif, en ce jour du Mardi 19 octobre 2021. Constantine est comme toutes les médinas et régions de notre pays est attachée depuis les siècles à célébrer la fête de la naissance du Prophète Mohamed (qssl) dans la ferveur et l'allégresse familiale. Comme chacun le sait, cette fête intervient chaque année, le douzième jour du mois lunaire Rabie El Awal soit le 19 octobre 2021. Cette célébration intervient cette année dans un contexte où le monde musulman vit une situation des plus tragiques au regard des guerres qui le secouent le Machrek et des tentatives de déstabiliser la région du Maghreb et du Sahel. La sacralite du Mawlid ennabaoui acharif Nous étions enfants durant la période coloniale et on se rappelait que nous fêtons ce Mawlid pour marquer notre appartenance à une Nation qui tient à son identité et ses traditions. On allait à l'école coranique porter des œufs colorés, des bougies, les friandises et les gâteaux du terroir telle la «Tamina» que nous offrons à notre taleb pour célébrer cette naissance. On entonnait le Med'h «Zad El Nabi Wa Frahna Bih» suivi de «Ya Kaâba ya Beït Rabi Mah Laki», que nous retrouverons plus tard lorsque la télévision en noir et blanc, apparait dans notre petite lucarne, feu Abderamane Aziz par sa voix limpide déclamant ce chant sacré éternel. La medina dans sa spiritualité ancestrale Aujourd'hui comme hier, cette fête religieuse revient dans l'ambiance du moment. Constantine qui s'apprête à vivre ce moment ô combien significatif dans l'imaginaire de tout musulman. Le Mawlid dans la médina coïncide avec la mise en route du dernier trançon du tramway de la nouvelle ville Ali Mendjeli rendant fluides les moyens de communication surtout dans cette ville où fleurissent les plus grands campus universitaires où les étudiants peuvent voyager de la nouvelle vers la vieille ville. Ses ruelles étroites et ses souks tels Rahbat Essouf, Souk el Asr, Souika, sidi Bouanaba, sidi al Djalis, sidi Mabrouk, Aouinet el foul, la nouvelle ville Massinissa et Ali Mendjli, le Khroub et les villages avoisinants se parent dans un décor que nous retrouvons dans les mosquées et zaouias. Les familles constantinoises se préparent à rendre cette fête joyeuse surtout pour les enfants. On s'apprête à déguster les saveurs de jadis. «Tridet Attadjin» avec de la viande de mouton ou de bœuf en plus de la volaille. La cuisine se fait plus succulente. Les fillettes aux mains d'anges se mettent le henné que les mamans et grands-mères s'appliquent à malaxer cette poudre avec quelques doses d'eau de fleurs d'oranger. Les garçons quant à eux trouvent leur joie dans les pétards et des cierges. Le Prophète de l'Islam Mohamed El Amine (qssl) Voici venu le moment de la cérémonie où les mosquées et zaouias se remplissent de fidèles qui déclament des panégyriques et med'h qui glorifient Dieu et son Prophète Mohamed (qssl). Outre la Burdâ et la Hamzyia, le texte de Hassan Al Barzandji recuilli dans «?iqd Al Jawahir» se récite notamment à Constantine. Les retransmissions à travers les chaînes TV rappellent la vie du Prophète. Sa naissance et son allaitement par Halima Assaâdia alors qu'il perdit son père Abdallah puis sa mère Amina et passe sous la protection de son oncle Abou Talib. Orphelin à l'âge de cinq ans, il perd son grand père abd el Moutalib alors qu'il avait huit ans, son oncle Abou Talib le prend en charge et l'initiera dans le commerce caravanier des chameaux. Il travaillera pour le compte de Khadidja 40 ans d'âge une richissime femme dont il se marie avec elle à l'âge de 25 ans. Le Prophète Mohamed (qssl) alors qu'il avait 40 ans en l'An 610, il prend retraite dans une grotte au Djebel Hira où il médite et prie. Dans sa méditation l'Archange Gabriel lui apparaît, alors qu'il ne sait ni lire ni écrire, durant 22 ans, Sidna Jibril (Gabriel) lui dicte le Message divin : le Saint Coran. C'est la Révélation. Il part pour Médine où malgré les luttes des clans rivaux, il réussit à imposer le Message divin et son pouvoir politique et religieux. Il mène les campagnes militaires pour rallier les différentes tribus et réunifier les rangs. L'Armée musulmane entre à La Mecque par le chant «Talaâ Al Badrou ?Alaïna», commencement de l'Année hégirienne. Il meurt en 632 au retour du pèlerinage. Le Mawlid odeur de sainteté contre l'hérésie Quinze siècles après certains trouvent à dire que célébrer cette fête est une hérésie. La visite des Awlyia Asssalihine en portant les bougies se conjuguent avec les prières et l'hymne au Prophète Sidna Mohamed (qssl). L'ambiance festive est entourée de tous les soins où l'odeur de benjoin et de l'ambre donne à la spatialité de la médina cette odeur de sainteté. Les rites traditionnels sont célébrés à Constantine dans un décor d'urbanité où les senteurs ambrées se répandent dans les maisons comme si le moment est de vivre le temps d'une vie où le Prophète jeûnait le jour de sa naissance en psalmodiant et en entamant le tadjouid de versets coraniques. Les psalmodies au cœur d'une fête du Mawlid Comme dans les zaouia jadis de sidi Rached, à la Rahmania, chez les Aïssaoua, chez les Hansala, la Tidjanya est...la même ferveur à Tlemcen où j'ai assisté au cérémonial du Mawlid chez les Darkaoua et Habria lors d'un Colloque international sur le Soufisme qui s'est déroulé à l'Université Belkaïd qui coïncida avec la fête du Mawlid où nous retrouvons les mêmes traditions de deux villes jumelles. Bien que chacune de nos régions célèbre à sa manière cette fête comme par exemple à Alger, c'est Sidi Abderahmane Athaâlibi Al Wali Assalah qui inaugure la fête à partir de la zaouia par les femmes de La Casbah qui lui donnent un éclat particulier. Dans le Titteri c'est Médéa qui le fête dans les psalmodies et chants religieux. A Bouira, Bordj Bou Arréridj, et à Sétif les us et coutumes lui préparent le couscous de famille dans une ambiance festive où s'entonnent des chants en la gloire de Dieu et du Prophète où les femmes s'empressent à visiter le saint patron Sidi Al Kheïr. Au M'zab Ghardaia l'encens de tous les Med'h et le Tajouid où le baroud donne un air festif en plus de la spiritualité qui l'entoure. Dans le Saoura, Béchar dans la zaouia des Kénadza de sidi Bouziane et la Karzazia nous offrent un spectacle dans toute sa sacralité. A Adrar dans la Zaouia Sidi Mohamed el Kébir ou Sidi Erragani, à Témacine, à Aïn Madhi, Laghouat, et Guemmar dans la Tidjania, à Ain Essafra, Labiod Sid Cheikh, Boussamghoun, le même rituel célébré, à Annaba Souk Ahras, Tébessa et à Collo, Aïssaoua où le récital glorifie Dieu et son Prophète Mohamed dont j'ai eu à assister aux chants sacrés sans oublier Koléa et Cherchell dont les organisateurs vont célébrer cette fête religieuse, ce jeudi au Palais de la Culture ?Moufdi Zakaria' où un récital illuminé par les dhik'r et les bougies vont remémorer cet événement au son de la zorna et des med'h, dans un décorum où nos grands-mères s'appliquent à mettre le henné sur les mains de nos petites filles anges de la soirée du jeudi. A Constantine la Zaouia Rahmanyia dont le Mokadem est Bachtarzi, les khouans entonnent des litanies ou liturgies (Med'h et les Psalmodies) dans une parfaite diction s'accompagnent d'El Borda et d'El Hamzia d'El Bousseïri ou celle de Hassan Al Barjanzi. En Kabylie les habitants célèbrent le Mawlid dans une ambiance de med'h et de chants religieux, de même que dans la vallée de la Soummam où cette fête est suivie de rituel gloire à Dieu et à son Prophète Mohamed (qssl). A Tlemcen c'est surtout la visite du Saint Patron Sidi Boumediene qui donne l'ampleur de l'événement où les femmes depuis le mausolée entonnent les chants religieux au cri de youyou dans la plénitude de sa natalité. A Cherchell, Miliana, Koléa, à Oran sidi El Houari, à Mascara, Saïda, Mecheria, Aïn Sefra c'est le même rituel qui glorifie Dieu et son Prophète (qssl). A Souk Ahras, Tébessa, Batna, Msila, El Oued Souf, toutes les zaouias donnent au sceau du Prophète toute la sacralité dans une des méditations des mouloudyiates». Dans la méditation et la piété la fête du Mawlid qui est le commencement de la Nativité de la religion de l'Islam, le Prophète est né à La Mecque, le 12ème jour du mois Rabi Al Awal correspondant au mois de Mai 570 de JC. Ce sont les Fatimides qui ont, en l'An 975 de l'ère chrétienne, fêtaient le commencement du Mawlid. Le mawlid une célébration historiquement millénaire Les Tribus berbères de l'époque telles les Sanhadja, les Zénata, les Maghraoua, les Houara et surtout les Kétama ont fêté la naissance du Prophète et dont elles seront l'ossature de l'armée fatimide. Les Kétama fondent alors la ville du Caire et construisent Al Azhar Echarif. A ceux qui considèrent la célébration du Mawlid comme une hérésie, c'est-à-dire une «Bidâa», innovation blâmable, en Egypte c'est El Malik El Mouzaffar, beau-frère de Salah Eddine Al Ayoubi, maître d'Ibril qui lui consacra un cérémonial particulier. Les Mamelouks l'institutionnalisent et Damas suivra. Au Maghreb cette fête commencera avec les Mérénides où le Sultan Youcef Ben Yacoub promulgue par un décret royal en 1292 le Mawlid, fête d'Etat. A Tlemcen note Dr Sari Ali Hikmet dans son livre «Les mille nuits du Mouloud», le Mawlid est célébré dans le palais du Mechouar en 1359 par le Sultan Zianide Abou Hamou Moussa II. Sous les Hafsides le Mawlid est fêté dès le XIVe siècle. Après il sera institué par le Sultan de l'empire ottoman Mourad III en 1588. La fête du Mawlid est une fête sacrée. Elle a un sens spirituel, social culturel et cultuel. Le Prophète Mohamed est envoyé comme Miséricorde pour les mondes. Et si tous les clubs sportifs musulmans de l'époque, le MCA donna le la, en choisissant la date de fondation du Club le 07 Août 1921, le jour même du Mawlid en prenant comme sigle «Mouloudia». Il sera repris par de nombreux clubs comme le MOC dont l'honneur revenait à notre vénéré Cheïkh Al Imam Abdelhamid Ben Badis. Le MCO, le MOB suivront la voie... même si les autres formations sportives tel le CSC... sans pour autant prendre le sigle de Mouloudia, le célèbrent dans toute la ferveur et la piété , c'était l'époque où le sport et la culture devenaient des porte-drapeaux qui singularisent notre appartenance à la Ouma el Islamia, façon de traduire notre combat pour affirmer cet attachement à notre identité et à notre personnalité nationale, qui diffèrent de ce que le colonialisme voudrait nous lier aux Gaulois comme ancêtres . telle est notre célébration du Mawlid Annabaoui Echarif , hymne à la gloire de notre Prophète Mohamed QSSL . *Chercheur universitaire, ancien ministre |