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Voici maintenant terminé l'endroit ou l'envers du décor. Alors, faisons
ce saut à l'intérieur même de cette grande école,suffisamment contemplée tout à
l'heure de l'extérieur. Rentrons donc au cœur de ce laboratoire à ciel ouvert
des plantes et végétations, de ces races et espèces végétales et animales.
L'institut d'antan qui a pour l'occasion changé de nom pour désormais s'appeler l'école nationale supérieure agronomique (ENSA) garde quand même un œil ouvert sur la politique économique du pays du moment et une oreille tendue vers l'histoire récente du monde de l'agriculture du pays. Son nouveau nom allègrement affiché, est bien porté par son fronton, juste au dessus de sa portée d'entrée. Il fait référence au constat ainsi établi. Il met les pendules à l'heure, côté politique. Cependant, l'histoire de notre défunte révolution agraire n'en a pas été totalement effacée à travers ce nouveau nom acquit contre celui troqué et définitivement révoqué. A bien scruter le cadre de la porte principale de plus près, on y retrouve sur notre droite, scribouillé dans calligraphie maladroitement affichée et presque invisible sinon illisible le nom de feu Kasdi Merbah, né Khalef, notre ministre de l'agriculture du début des années quatre-vingts du siècle dernier. Du passage de l'illustre responsable de la sécurité militaire, à l'époque en charge du département de l'agriculture, le monde rural n'en retient que cette scission des grands domaines autogérés de l'état, découpés en petites entités portant désormais le nom d'exploitation agricole collective (EAC) et exploitation agricole individuelle (EAI). Ces dernières étaient alors générées par la loi 87/19 portant sur le statut foncier agricole national. Les plus érudits parmi ce monde rural y voyaient, eux, déjà le prélude à une fin de la gestion socialiste des entreprises (GSE) ainsi que bien évidemment celle de l'autogestion et de la révolution agraire. Le reste, profitant de l'aubaine, ne pouvait sur le champ s'apercevoir du désordre que cela allait produire, et plus grave encore répercuter sur la bourse du consommateur avec ces prix des produits agricoles qui allaient prendre pour longtemps encore le sens vertical de l'ascenseur. Mais avant de pouvoir même pénétrer à l'intérieur de l'enceinte de ce haut lieu du savoir rural et agricole, il est question de demander une autorisation express faite à deux niveaux distincts de responsabilité. Cela pour bien entendu ne pas avoir à violer l'immunité et l'espace de son calme légendaire et vie privée. Si le ticket d'accès est facile à récupérer ou à avoir sur simple fait de décliner au poste de garde son identité, l'autre laissez-passer est par contre très difficile à avoir. Il faut le demander auprès de trois érudits écrivains ayant longtemps étudié, officié ou tout simplement marqué de leur plume, présence ou talent la vie quotidienne de l'ex INA et de l'actuelle ENSA. Dans ce contexte, mes pensées vont tout droit au défunt Ait Amara, à Ellyès Mesli et à Ali Brahimi. Ces trois noms-là -à moins que j'en oublie d'autres encore- ont incontestablement marqué de leur empreinte l'école au plan de la vulgarisation de son enseignement et fait l'effort nécessaire en contribuant au développement du secteur national agricole. Avant même de nous adresser au portier pour nous annoncer, saluons tout de même bien comme il le faut le mérite qu'on leur doit, et surtout l'histoire glorieuse qu'ils depuis écrite. Le premier a fait honneur au monde rural dans son côté communication et relationnel. Le second s'est plutôt -comme tout haut cadre de l'état resté fidèle à son poste et engagement- satisfait dans celui conventionnel. Tandis que le dernier, en bon paysan ou tout simplement aimant la vie en campagne, en parle souvent dans la presse, affranchi de cette émotion débordante d'amour charnel et éternel vis-à-vis de ces contrées paysannes. Ce sont trois «produits» du terroir n'ont donc absolument rien à voir avec ces autres dossiers qui moisissent, occasionnellement tirés du tiroir, consultés tout juste pour servir d'alibi ou de contre-miroir à un état d'esprit fait de ces discussions sans probable fin, se déroulant dans les couloirs de nos administrations. Ils sont nés ou nous parlent fréquemment de l'ex INA, je veux dire ! Complètement investis et fortement impliqués de cette noble mission qui consiste à satisfaire le plus précieux des besoins et les plus utile et fertile de nos rêves humains : celui de restituer à cette terre des expériences vécues, des vérités sues ou intentionnellement tues, des techniques longtemps recherchées ou savamment entretenues. A mesure que le battant droit de la porte-cohére d'entrée pivote sur lui-même, s'ouvre à nos yeux une image féerique sortie directement du Paradis, faite de verdure et de palmiers géants soigneusement alignés et bien coupés et entretenus, vieux certes mais tenant bien sur leurs racines et surtout rigueur au temps. L'allée principale lèchement goudronnée qui se faufile entres ces grands sentinelles du Sahara, bien arrosée la veille ou tôt le matin à grand jet d'eau, vous accueille au seuil de la porte d'entrée comme pour vous souhaiter la bienvenue, arborant ce sourire généreux et innocent propre au paysan algérien. Nous y entrâmes alors, mon fils et moi : l'un se remémorant encore l'image longtemps emmagasinée dans ma mémoire pour rapidement la confondre avec la photographie réelle du moment qui défilait par fragment et séquences sous mes yeux, et l'autre, vraiment flatté, ahuri et ébloui par tant de gaieté et de plaisir de se retrouver dans un lieu aussi paradisiaque, souriait abondamment. Au moment où je tentais de repérer les lieux, le jeune bachelier qui m'accompagnait les découvrait pour la première fois de sa vie. Alors que j'esquissais encore un coup d'œil par ci, lui, amusé, posait son regard hagard tantôt longuement par-là, tantôt faisant le même signe et la même chose vaguement dans l'autre sens balayant son regard sur ce paysage boisé et fortement ombragé qui l'accueillait si bien. Et au fil de nos pas et petites foulées, sans cesse renouvelés, nos regards se croisèrent un moment pour se confondre à eux-mêmes juste après. Ils s'écartèrent un instant pour nous revenir embués de cette joie de se retrouver de nouveau comblés par ce plaisir immense où études et désirs personnels vont dans le même sens et tendent vers la même finalité. En bons paysans que nous sommes et avons longuement vécu ensemble, nous aurions du nous y amener munis ou porteurs d'un bouquet de fleurs du terroir pour l'offrir à celui qui nous accueillait déjà à l'entrée, afin de partager avec cette magnifique verdure et le champ apaisant des oiseaux gerbant sur les palmes de ces longs et rustiques arbres des pays chauds la ferveur de la fête offerte en guise de cadeau de bienvenue à tout visiteur des lieux. Ces roses presque artificielles cultivées et murissant à proximité de la grande ville nous auraient certainement beaucoup éloignés du statut à accorder au présent admis et offert en pareille occasion ou circonstance, nous avons donc préféré renoncer à ce apparemment soupçonneux projet qui allait après tout faire de nous de vrais-faux campagnards en quête de crédibilité citadine. Après tout, ce n'était pas la saison du printemps, et les fleurs cultivées en hors-saison ne sont pas un pur produit de la campagne Algérienne ou du terroir. Du moins dans sa version originale ou originelle. Nous appartenons -faut-il au besoin encore une fois le signaler- au monde traditionnel de l'univers rural dans sa version bio et en sommes tout fiers. Soudain apparait un immeuble sur notre gauche, avec plus loin encore un autre sur le côté opposé, suivi par un autre dans le même sens ou prolongement. Au besoin, le côté écologique de l'école nous salue bien et nous présente les anciens immeubles gravement dressés au milieu de ces près formant les locaux de l'ancienne INA et le siège de l'actuelle ENSA. Passées les formalités d'usage, je cédai alors ainsi le petit paysan ramené avec moi tôt le matin à ce petit bout de Paradis terrestre. Je le faisais, très convaincu d'avoir enfin placé mon pion là où je voulais étudier trente-six ans plus tôt ! Mais aussi très conscient de l'avoir pour quelques années mis ou remis entre de bonnes mains. Ces mains habiles, de fermier, de céréalier ou de maraicher en feraient de lui -j'en suis complètement convaincu- plus tard un vrai et digne paysan algérien. Un fellah doué et intelligent. Un travailleur de la terre aimant sa terre natale et surtout son pays de naissance. Un ingénieur qualifié qui aura à sa charge la lourde responsabilité et l'insigne honneur de recouvrer à l'Algérie son autosuffisance alimentaire. Il aura également à recouvrer à sa patrie ses nombreux repères traditionnels et séculaires perdus depuis au profit de cette société qui ne sait que consommer ce que les autres produisent, pour rechigner plus tard à faire ce nécessaire effort à bien travailler la terre ! Cette société-là a besoin d'une refondation profonde et totale pour être en adéquation avec son temps et surtout pour définitivement s'écarter de cette mentalité qui consiste à déboiser au lieu de reboiser ou pavoiser, d'écraser au lieu d'entretenir et longuement arroser, d'oser et de s'imposer au lieu d'exploser ou d'imploser. Ces jeunes de nos jours qui quittent sur un simple coup de tète ou de rancœur leur patrie -me suis-je dis- n'aiment pas leur pays ou quoi ? A vrai dire, ils n'aiment pas beaucoup ou si peu cette grande terre nourricière. N'aiment pas non plus leurs dirigeants ou élus pour leur avoir tout le temps menti. A leur sujet comme à celui de leurs projets d'avenir ! En quelques sortes, les «Hittistes» de la fin des années quatre-vingts sont aujourd'hui de vulgaires «Harragas». Tandis que les commerçants à la sauvette et autres trabendistes de la même époque ou de quelques années auparavant sont à présent à la tète d'une fortune et contrôlent l'essentiel de notre commerce extérieur. En clair : le savoir -ni jadis, ni aujourd'hui, ni peut-être même demain- ne mènera à la richesse ou fortune ostentatoire envisagée. Sinon au bien-être social, tout juste à une vie calme et austère. Voilà pourquoi l'agriculture est considérée telle cette dernière roue d'une charrette qui peine à avancer. Même si paradoxalement elle demeure ce secteur grand pourvoyeur des industries agro-alimentaires du secteur secondaire. L'élite d'aujourd'hui la boude parce que nos dirigeants l'ont complètement négligée des années durant au profit d'autres secteurs plus lucratifs, budgétivores et peu pourvoyeurs d'emplois. Moins pénibles et contraignants et plus rémunérateurs et très motivants. Au fait, connaissez-vous un quelconque bachelier détenteur d'une moyenne oscillant autour de 17 ou de 18 venir de son propre gré s'inscrire à l'ENSA à l'instar de ce qui se passe à l'INI ou en médecine et pharmacie ? Connaissez-vous également une quelconque progéniture des pontes du pouvoir ou de ces nouveaux hommes d'affaires et d'histoires du pays passer par cette même grande école pour tracer plus tard son avenir professionnel ? Niet répondront d'abord les étudiants inscrits en première année déjà ! Pourquoi donc tout cela ? Est-ce le fait même que ces filières-là sont au contraire toutes destinées à ces «fils de pauvres» et «fils d'indigènes du XXIème siècle», donnant tout son sens à cette dernière appellation ou catégorie de gens? A celui qui néglige la terre, rendez-vous est déjà pris avec la misère, dit un dicton du terroir. Sauf que le produit de notre brut a tout détruit du sens accordé à cette sagesse. La terre est très sensible à la présence de l'homme dans sa sphère et périphérie. Et au moindre appel ou geste de ce dernier fait en sa direction, elle répond présente et au garde-à-vous tel un soldat bon pour le service, prêt à attaquer. Généreuse, plutôt très généreuse à souhait, elle est tout le temps sur ses gardes veillant bon œil bon pied sur notre trésor éternel. Celui qui nous assure vie et survie, prospérité et pérennité. Et lorsque c'est toute une gouvernance qui se met à ignorer les fonctions et vertus de la terre recouvrée grâce au sang de nos valeureux martyrs, il n'y a aucune raison de voir plus tard y jaillir la moindre étincelle du progrès souhaité à cause de ce dédain affiché à son égard. Pas même le besoin d'espérer un quelconque changement dans nos mentalités rétrogrades et totalement dégradées, bradant à longueur de temps nos principales richesses jusqu'à vouloir et parfois réussir à habiller tout un peuple riche de pauvreté. Quel scandale économique ! Quelle sècheresse d'esprit qui fait même fuir vers l'autre continent ce vent annonciateur de pluies bienfaitrices pour nos terres dont le monde de villes aujourd'hui leur fait la gueule ! Quel culot pour ces citadins qui se croient tous revenus d'Andalousie pour revendiquer à eux touts seuls la propriété d'Alger ! Devant tant de dépassements et de fausses considérations du monde de l'agriculture, on ne peut nous, paysans de père en fils, que rester circonspects ! Ce monde-là citadin par vocation ou par procuration et logique prétention qui hait la nature ne nous appartient pas. C'est sur ! Et même certain ! Ce monde-là, devons-nous nous dire, est étranger à l'Algérie ! Ainsi donc, notre pauvreté la plus sure, la plus dure à avaler et la plus délicate à dévoiler est plutôt dans nos esprits, parfois malveillants, souvent très calculateurs et condescendants. Notre retard est, en fait, enfoui dans nos mentalités fixées à l'heure de notre histoire, à chaque fois convoquée à dessein pour appuyer un clan tout indiqué dans la haute sphère de la pyramide du pouvoir. Notre société n'est pas résolument tournée vers son avenir qui l'attend de pied ferme. Elle ne fait cependant que vaguement spéculer sur son histoire belle et rebelle, profonde et très féconde, qu'on n'arrête pas de la manipuler et constamment l'instrumentaliser, parfois à chaque seconde, à chaque occasion de la moindre ronde du chef en balade quémandée aux fins fonds de ces contrées éloignées et longtemps ignorées par l'histoire et nos gouvernants, toujours les mêmes à être en poste et en scelle sur ce cheval de trot, ce pur Arabe à qui l'on interdit pourtant ces courses et chevauchées pour les besoins de la mission, malgré l'avancée remarquable des sciences, des consciences, des libertés sous tous leurs nombreux aspects et surtout du temps, ce précieux indice qu'on néglige bien souvent. Il n'est par ailleurs nul besoin de répéter assez souvent que le pauvre a toujours travaillé pour le riche, et la campagne pour la ville. Et même durant notre glorieuse révolution, ce sont plutôt les ruraux qui avaient le plus supporté et souffert des hostilités et misères de la guère. Paradoxalement, après l'indépendance, ce fut la ville qui devait le plus en profiter ! Naturellement donc, l'homme est quelque part né injuste vis-à-vis du monde rural. Injuste envers même notre terre nourricière, faut-il bien corriger ! C'est de là d'ailleurs que prend forme notre ingratitude envers la campagne, sans compter bien évidemment celle enregistrée tout récemment -tenez-vous bien !- envers même nos propres parents et patrie. Où en est donc l'amour du pays ? Où en est donc l'éducation de la famille ? A quelle déchéance de l'humanité assistons-nous aujourd'hui, à un moment où plutôt tout est facile dans la vie en société ! A un moment où tout est fait de manière à mieux nous unir, renforcer et raffermir entre nous l'idée d'être né l'un pour l'autre et le tout pour la nation et le pays ! La campagne riche en ressoures naturelles, généreuse à souhait dans la récompense de l'effort voué à la terre, participe donc à l'accumulation accélérée de cette rente que détient pour elle toute seule la ville, sans pouvoir si peu en profiter en guise de ristourne pour son dur labeur. Le citadin, devenu par la force des choses, ingrat ou même radin, profite donc de l'usufruit tiré de nos campagnes mais ne remercie pas pour autant ces travailleurs ruraux, allant parfois jusqu'à les insulter au regard de leur comportement qu'il juge incommodant. Rural ! Ces ruraux sont donc au mieux, considérés tels des arriérés ou arrivistes, au pire humiliés vilipendés, houspillés et expédiés manu militari de la ville et ses venelles. Et pourtant la ville dans son expansion spatiale a toujours illégalement empiété sur le territoire de nos campagnes pour rendre ses habitants des fainéants, les exproprier, et plus tard leur tuer cette envie innée de vouloir travailler leur terre, confisquée à jamais pour les besoins d'hégémonie territoriale de la ville sur la campagne. Ainsi donc, la ville récupère à son propre profit et au rabais de leur prix ces terres de nos campagnes pour y ériger et y planter illico presto cette «culture du béton» devenue si chère à l'Algérien d'aujourd'hui, laquelle borne l'esprit à tout son monde, contraint d'abandonner au travers de son nouveau comportement la verdure de la nature au profit de ce gris hostile et particulièrement laid. L'INA, pour revenir à nos moutons, fermes, champs de blés et surtout sujet d'analyse, tant à travers l'histoire que par le nom qui lui sied et dont elle était toute fière de le porter des années durant, continue aujourd'hui, contre vents et marées, de distiller ce précieux savoir-faire rural à ces étudiants en perte de vitesse et de boussole dans un monde qui pivote autour de lui-même, lui parvenant tels des dépaysés au sein de cet environnement paysan au premier degré que boude la majorité des Algériens, parce que jugé trop sévèrement bien à l'écart de tout progrès social où baigne à longueur de temps la ville. On y dispense cependant avec la même rigueur qu'autrefois et jadis ce précieux savoir et cet enseignement de qualité dont la majorité de ses étudiants, en quittant les bancs de leur université, n'auront probablement jamais la faculté et le privilège de le mettre rapidement en pratique et à l'essai au vu de ce chômage galopant qui frappe de plein fouet nos esprits et nos champs, restés si souvent en jachère si ce n'est à moitié cultivés ou faiblement exploités et peu entretenus ou insuffisamment sarclés. Notre agriculture se comporte donc à l'image de nos esprits : tâtonnante et frileuse au milieu d'un climat pourtant assez chaud et où l'effort est plutôt fait à l'économie de nos moyens physiques et financiers. A l'INA -je venais de le remarquer moi-même il règne toujours cette atmosphère de discipline de fer propre à la caserne instaurée au tout début du siècle dernier par ces Français de pieds-noirs venant étudier ou apprendre à leur progéniture ces métiers de l'agriculture dont ils exportaient leur produit vers la métropole, comme vins et céréales, légumes et agrumes à profusion tout en s'en empiffrant localement et à satiété. L'INA était alors leur laboratoire tout indiqué par où passaient toutes ces expérimentations à plus tard tenter en plein-champ pour de nouveau tester ces produits-maison conçus sous forme de clones, races ou encore espèces variétales végétales ou même animales. C'était l'époque où notre agriculture faisait vivre tous les Algériens et beaucoup de peuples étrangers dont les Français qui nous gouvernaient. Ce fut donc l'époque où notre terre était si généreuse et où l'INA était cette école si respectée et régulièrement inspectée jusqu'à rayonner de tout son poids et prestige sur toute l'Afrique pour apprendre les principes de base de ces métiers agricoles d'antan à ces ingénieurs et autres techniciens devenus entre-temps fermiers qualifiés, vignerons en puissance, et arboriculteurs de qualité. Durant les deux premières décennies de l'Algérie indépendante, l'école ou plutôt l'institut en question gardait tant bien que mal ce statut tout à fait privilégié, puisqu'alors jusque-là bien considéré. Ce sont plutôt les années quatre-vingts qui virent l'école flirter avec les profondeurs de la régression mentale et sociale ainsi que celle de l'esprit de nos responsables, abandonnant à jamais la révolution agraire et le monde de l'agriculture de manière générale. A un moment donné, notre économie se résumait au brut et au centenaire sans la moindre halte dan nos champs. On était les champions de «l'import-import ! On le reste encore ! Du moins dans nos esprits, tout le temps tournés vers l'occident ! Aujourd'hui, complètement dépouillé de son prolongement à l'échelon local et régional avec la disparition des ex ITMA et surtout de l'ITA de Mostaganem, l'INA d'El Harrach, tel un objet flottant en pleine mer ou océan, plane en surface sur l'oued d'El Harrach d'où elle tire d'ailleurs le suffixe de son nom, dans ce voyage inconscient perdant donc tout contact avec ses bases avancées régionales formatrices du monde paysan qui faisaient naguère la fierté de tout pays et du secteur considéré. En perdant donc ses vases communicants installés à l'intérieur même de ces fermes et champs de blés à cause de cette déstructuration effrénée du tissu agricole du pays longtemps entretenu, l'INA venait pour l'occasion de complètement se déconnecter de son monde paysan ! Un maillon a quelque part bien sauté. Il faut rapidement y remédier. Sinon penser à le remplacer. A-t-on vraiment idée de l'objet manquant ? Irons-nous encore à l'aventure en quête d'une autre solution ? Tant qu'on dispose de cette manne financière du pétrole, tout devient possible. Et même les écarts de folie ne sot pas à exclure ! Pendant ce temps-là l'INA -j'aime bien ce nom, peut-être parce que je suis nostalgique !- tient encore tète à son temps et rigueur à ce monde très hostile à son développement. Le défi est pour elle toujours là, présent, à tout instant ! Son décollage est peut-être imminent ! Peut-être que demain la lecture du titre de notre exposé se fera dans les deux sens les plus conventionnels de l'expression usitée ? Qui sait? ? L'espoir reste tout de même permis? quitte à attendre encore une autre génération ! * Universitaire et écrivain. Il a déjà publié aux éditions El-Maarifa (Algérie) et Edilivre (France) un ouvrage intitulé : «Le Sud : capitale d'un avenir prometteur». |