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Il est fréquent que la
préfecture, saisie par un étranger ayant la qualité de conjoint de Français ou
entré en France au titre du regroupement familial, retire -en cas de violences
conjugales ayant entraîné la rupture de la communauté de vie- la carte de
séjour du ressortissant étranger marié séjournant régulièrement en France et
dont le droit au séjour est associé au statut de leur conjoint, que ce soit en
tant que conjoint de Français, ou en tant que de bénéficiaire du regroupement
familial.
Pourtant, la loi reconnaît un droit au séjour autonome au ressortissant étranger victime de violences conjugales. Toutefois, la circulaire du 27 octobre 2005 relative au droit au séjour en France des étrangers relevant de régimes juridiques spéciaux rappelle que ces dispositions ne sont pas applicables aux ressortissants algériens. Néanmoins, ce texte indique que le préfet peut faire usage de son pouvoir d'appréciation lorsqu'il sera en possession d'éléments attestant que la communauté de vie a cessé à la suite de violences conjugales. L'instruction ministérielle du 9 septembre 2011 relative au droit au séjour des personnes victimes de violences conjugales et à la mise en œuvre des articles L.313-12, L.316-3 et L.431-2 du CESEDA prévoit la distinction de deux régimes : Concernant un ressortissant étranger victime de violences conjugales et ayant rompu la vie commune pour s'en protéger : a)- La faculté de renouveler son titre de séjour portant la mention «vie privée et familiale» : Ce régime s'applique aux ressortissants étrangers mariés séjournant régulièrement en France et dont le droit au séjour est associé au statut de leur conjoint, que ce soit en tant que conjoint de Français (article L.313-11 4°), ou en tant que bénéficiaire du regroupement familial (article L.313-11 1°). Toutefois, la circonstance qu'une personne atteste être victime de violences conjugales ne suffit pas à elle seule à fonder la décision du préfet de renouveler ce titre. Le pouvoir d'appréciation de l'administration reste donc entier. Le préfet est tenu à examiner l'ensemble de la situation personnelle de l'étranger concerné et les éléments justificatifs des violences invoquées (dépôt de plainte, jugement de divorce, condamnation du conjoint pour ce motif, ou la justification par tous moyens, témoignages, attestations médicales...). b)- Sur la possibilité d'une première délivrance de titre de séjour : Les mêmes articles du CESEDA disposent qu'en cas de violence commise après l'arrivée sur le territoire du conjoint étranger d'un Français ou bénéficiaire du regroupement familial, mais avant la première délivrance de la carte de séjour temporaire, le conjoint se voit délivrer, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, une carte de séjour temporaire portant la mention «vie privée et familiale». La réalité de ces violences doit être établie dans les mêmes conditions que ci-dessus. Dans cette circonstance, le préfet est tenu de délivrer le titre de séjour et son pouvoir d'appréciation s'exercera lors de la demande de renouvellement de ce titre. Concernant les personnes victimes de violences conjugales et bénéficiant d'une ordonnance de protection : a)- Sur la possibilité de renouveler un titre de séjour «vie privée et familiale» : La loi n°2010-769 du 9 juillet 2010 relative aux violences faites spécifiquement aux femmes, aux violences au sein des couples et aux incidences de ces dernières sur les enfants a introduit une nouvelle procédure à l'article 515-9 du code civil : l'ordonnance de protection prononcée par le juge aux affaires familiales. Le CESEDA a été modifié en conséquence et prévoit désormais en son article L.316-3 les dispositions applicables à une personne étrangère, qu'elle soit en situation régulière ou irrégulière, mariée, liée par un pacte civil de solidarité ou vivant en concubinage. Contrairement au développement dans le titre 1, la délivrance du titre de séjour est de plein droit, en raison de l'existence d'un acte formel de l'autorité judiciaire (l'ordonnance de protection), sans marge d'appréciation du préfet sur ce point. b)- Sur la possibilité d'une première délivrance du titre de séjour : L'étranger bénéficiant d'une ordonnance de protection qui se présente en préfecture pour obtenir la délivrance d'une carte de séjour temporaire «vie privée et familiale» se voit délivrer ce titre dans les plus brefs délais, sauf si sa présence constitue une menace à l'ordre public, et dès lors qu'il n'existe pas de doute sur l'identité de la personne titulaire de l'ordonnance de protection et sur l'authenticité de celle-ci. Dans ces deux circonstances, et sous cette réserve touchant à l'ordre public, le préfet est tenu de délivrer ce titre. Par conséquent, l'instruction ministérielle rappelle que les préfets ne peuvent pas exiger systématiquement la production d'une ordonnance de protection pour instruire une demande de renouvellement ou de délivrance d'une carte de séjour temporaire «vie privée et familiale» déposée dans le contexte d'une rupture de la communauté de vie en raison de violences conjugales. L'absence d'une ordonnance de protection conduit à instruire la demande en appréciant l'ensemble des éléments produits à l'appui du dossier qui sont de nature à justifier la revendication d'un droit au séjour autonome. Le cas particulier des ressortissants algériens : Le droit au séjour des ressortissants algériens est entièrement régi par l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié. Ils ne bénéficient donc pas expressément des dispositions de l'article L.316-3 du CESEDA et par conséquent, aucun des deux dispositifs décrits au point 1 ne leur est applicable. Toutefois, conformément à la jurisprudence constante du Conseil d'État (Avis du Conseil d'Etat du 22 mars 2010, n°333679, Djilali Saou), les préfets peuvent, dans l'exercice de leur pouvoir discrétionnaire, tenir compte, parmi d'autres éléments, de la circonstance de violences conjugales, attestée par tout moyen, en particulier par ordonnance de protection, pour décider du droit au séjour d'un ressortissant algérien. * Avocat au barreau de Paris |
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