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«Le destin des
langues, comme celui des Hommes, est de vivre, d'évoluer au contact d'autres
cultures et, probablement, de mourir un jour, en laissant, sinon une
descendance, au moins un héritage génétique?»(1).
Une langue est définie dans Le Petit Larousse Illustré 2007 comme étant un système de signes verbaux propre à une communauté qui l'utilisent pour s'exprimer et communiquer entre eux. Un langage est une faculté propre à l'homme d'exprimer et de communiquer sa pensée au moyen d'un système de signes vocaux ou graphiques. Une langue est vivante si elle est actuellement parlée, elle est dite morte si elle n'est plus parlée. Il est certain que ces trois langues exercent un pouvoir et une influence sur les vies sociale et/ou économique et/ou industrielle et/ou scientifique. Une quatrième langue vivante, l'amazigh ou le berbère, a fait son entrée doucement mais sûrement dans l'enseignement, au moins dans les régions berbérophones du pays. La société Algérienne est aussi le produit d'une histoire en trois temps : La tradition, la colonisation et l'indépendance. De nos jours, et dans le monde, l'enseignement supérieur est de plus en plus marqué par une tendance à la marchandisation et à la commercialisation. Cette orientation est soutenue par les organisations économiques et financières internationales telles que l'OMC, la Banque mondiale, le FMI et l'OCDE, mais aussi par les mondialistes. L'OMC, par l'Accord Général sur le Commerce des Services (AGCS) a posé les jalons de cette mondialisation dont l'anglais semble être la langue officielle (2). La Francophonie est un thème d'actualité. Pour la France, l'enjeu politique lié au maintien de l'usage du français dans le monde est capital (3). L'Algérie est une nation qui est soucieuse de cultiver sa propre langue officielle, l'arabe. Par l'introduction du système LMD, il parait que l'enseignement supérieur était une offre des services commercialisables proposée dès 1992 à la banque mondiale (4) et qu'on risque de proposer une seconde fois à l'OMC. Les universités divulguent le savoir par leurs enseignements et le font progresser par la recherche. Une société dans laquelle la production et la dissémination de l'information et du savoir scientifique sont assurées et dans laquelle la transmission et l'utilisation du savoir expérientiel sont optimisées est dite «société du savoir ». L'article de Brahmi (2) m'interpelle pour contribuer modestement par cet écrit. L'ARABISATION A L'EDUCATION NATIONALE A ETE UN ENJEU BEAUCOUP PLUS POLITIQUE La langue d'un pays est une partie intégrante de son patrimoine national, au même titre que son territoire, son emblème, sa géographie, ses paysages, sa culture, son histoire, son pétrole, son gaz et toutes ses ressources. La défendre, c'est défendre l'indépendance nationale. La langue arabe doit être un des supports de l'identité et la spécificité nationale algérienne. Le Maghreb en général et l'Algérie en particulier cultive la langue arabe. Seulement, l'«arabe littéraire» n'est pas la langue que véhicule quotidiennement le peuple algérien. De nos jours, dans la communauté algérienne, généralement polyglotte, ni l'arabe classique, ni le français ne sont des langues de communication. On communique en «algérien» appelé aussi « dardja », un arabe dialectal formé aussi de la langue berbère. Le français s'est imposé comme l'instrument de sélection universitaire scientifique. Il représente un handicap lourd pour nos étudiants. Nos universités manquent de cadres pédagogues et administratifs pour mener à bien les politiques décidées. En Algérie, que fait le «Haut Conseil à l'Arabisation» ? Pour le rayonnement et l'épanouissement de la langue arabe, pourquoi cette institution effacée, sûrement budgétivore, qui n'a jamais fait de vagues, n'a pas joué un rôle d'avant-gardiste comme le «British Council » qui a fait de l'anglais la langue du «Monde»? Si elle fait quelque chose, c'est en catimini. Elle doit promouvoir les universités algériennes et diffuser la langue arabe et la culture algérienne ou maghrébine. On reconnait que l'enseignement supérieur algérien est moins attractif pour des étudiants maghrébins ou Moyen-Orientaux ou étrangers. Certes aussi, le repli sur soi est contraire aux valeurs d'universalisme. ACQUISITION DU SAVOIR PAR LES LANGUES ETRANGERES Les trois langues arabe, français et anglais ne peuvent-elles pas cohabiter en Algérie pour émanciper le peuple respectivement en culture, pédagogie et recherche ? Pourquoi nos étudiants et enseignants présentent-ils des «frustrations» devant l'acquisition des langues française et anglaise ? Les étudiants et enseignants algériens doivent s'orienter vers le «multilinguisme». L'apprentissage des langues étrangères dès l'école est une ouverture de l'esprit de l'élève. Sans maîtrise d'autres langues que la langue maternelle ou la langue officielle du pays, on ne peut espérer une place dans le monde d'aujourd'hui et de demain, économiquement, culturellement et politiquement. L'apprentissage d'une ou plusieurs langues étrangères est indispensable pour notre développement. Il n'est pas question d'entreprendre une bataille au français ou à l'anglais. Il faut faire de ces langues une association mutuellement bénéfique si ce n'est très indispensable à leur survie. Il est nécessaire d'entreprendre une révolution pédagogique des enseignements. Pour que nos étudiants apprennent à lire et à écrire, il faut qu'ils comprennent et parlent au moins l'arabe, le français et l'anglais. DE LA MOBILITE DANS LE SYSTEME LMD Pourquoi a-t-on adopté le LMD français ? Pour entre autre, favoriser la mobilité des étudiants et des professeurs. Pour nos étudiants, trouver un stage en France n'est pas aisé. Dans la mobilité, il faut que les étudiants ne soient pas livrés à eux-mêmes. Il leur faut une université d'accueil avec des choix possibles. Sur le terrain, la réalité est autrement plus rigide. L'Algérie n'est pas une destination qui séduit et qui fait rêver. La mobilité ne sera que dans un seul sens. Même pour ceux qui ont obtenu des visas pour la France et à plusieurs reprises, l'octroi de nouveaux visas se fait par la confection de dossiers volumineux, lourds, faramineux et décourage parfois le plus téméraire. Participer à une conférence scientifique en France, pays de la francophonie et de la promotion de l'enseignement du français, est devenu impossible ou décourageant pour beaucoup de professeurs d'universités ou de leurs étudiants. Normalement, la présentation d'un ancien visa, la lettre d'acceptation d'une communication et la demande et les frais de visa sont suffisants. Comment peut-on s'offusquer quant à l'utilisation dans des écrits de «e-mail» à la place de «courriel» et ne pas s'indigner quand la majorité des conférences scientifiques en France exige que les articles soumis soient rédigés in ENGLISH et à PARIS(SE)? Comment ne pas s'indigner quand presque toutes les revues scientifiques françaises ne publient plus en français ? Elles le font en majorité en anglais. Le cas le plus invraisemblable est celui de l'ancienne revue scientifique de langue française RAIRO, revue d'automatique, informatique et recherche opérationnelle qui s'est «anglicanisée» et se dénomme actuellement RAIRO Operations Research Journal. DU DILEMME DE LA LANGUE D'INSTRUCTION Brahmi (5) a écrit : « Et pourquoi l'arabisation avait- elle concerné l'enseignement supérieur, à l'exception du cursus biomédical et des autres études scientifiques dès la deuxième année ? C'est qu'il y a moult problèmes. D'abord parce que l'arabe s'écrivant de droite à gauche et les équations mathématiques dans le sens inverse, l'élève peut aisément perdre sa boussole, en «baladant» sa main et son regard, de droite à gauche et de gauche à droite, puis en combinant les caractères arabes et latins. «Au risque de se répéter (6), on vous fournit un exemple où l'enseignant et son étudiant sont aux antipodes. Dans l'expression algébrique «a- b» qui est supposée positive et représentant un «profit» d'une entreprise, l'étudiant arabisant, la lit « b - a» (car il lit de droite à gauche), la trouve négative (pour les non-initiés, si a - b est positive, b - a est négative) et représentera pour lui une «perte» (la négation d'un profit est une perte) pour l'entreprise. Le «dilemme » de la langue d'instruction qui empoisonne la vie universitaire relève du discours Kafkaïen et s'énonce comme suit : « Nous recevons des étudiants qui, en français, ne savent ni lire, ni écrire, ni parler. Ils sont arabisés. Des enseignants universitaires scientifiques de rang magistral sont à majorité francisants, dans leur majorité ils ne maîtrisent ni l'arabe ni l'anglais. De nos jours, l'anglais est la langue universelle de la science. Doit-on obstinément continuer à dispenser à nos étudiants des cours en français qu'ils n'assimilent pas? Doit-on envoyer tous les étudiants et les enseignants algériens pour une année de langue en Angleterre ou aux USA? Doit-on arabiser tous les enseignants francisants? Doivent ils, nos étudiants, faire une année de langue française avant d'entamer le cursus pédagogique? Ils seront considérés comme des étrangers dans un pays d'accueil. «. Nous avons soulevé ce problème depuis 2007. Personne de responsable n'a essayé de l'étudier ou de se pencher sérieusement dessus pour le résoudre. Voilà le mal qui ronge l'université scientifique où la communication n'existe pas. C'est utopique! Conclusion : La prédominance de l'anglais-américain dans les sciences et les technologies en a fait que la langue française est en net recul dans le monde. La pratique du français se maintient en Afrique par contre elle est en déperdition ou en grave difficulté en union européenne même. Les populations de l'Afrique et du Maghreb représentent 46,3% de la population de la francophonie. La langue dominante, l'anglais, tend de plus en plus à être le fait de l'impérialisme dominant. La mondialisation n'est qu'une «américanisation» de tous les secteurs stratégiques (2). La créativité scientifique du monde arabo-musulman était enracinée dans la culture, dans toutes ses dimensions, linguistique et littéraire, philosophique et religieuse (l'astronomie, les mathématiques et l'islam) (1). « Une langue vaut par ce qu'elle véhicule, son signifié, et peu importe son signifiant, anglais, arabe ou français. » dixit la professeure orthophoniste Zellal dans une communication privée. De nos jours, la langue arabe n'a pas encore une place prédominante dans le milieu scientifique. Il faut qu'on travaille, qu'on réfléchisse, qu'on publie des contributions scientifiques en arabe. On doit obliger de ce fait les autres scientifiques, américains et européens, à nous lire et en arabe. * Universitaire Références : 1- JP Asselin de Beauville et P. Chardenet. La diversité linguistique dans la production et la diffusion du savoir : constats et propositions. III Séminaire interaméricain sur la gestion des langues- «Les politiques linguistiques au sein des Amériques dans un monde multipolaire»- Rio de Janeiro- 29-31 mai 2006. (2) Babacar Niasse. L'enseignement supérieur à l'heure de la mondialisation : état des lieux, stratégies et qualité dans les établissements privés d'enseignement supérieur au Sénégal. Thèse de Master, Année académique 2008, spécialité : Formation et éducation/gestion.pilotage et évaluation des systèmes éducatifs, soutenue le 27 Janvier 2009 à la FASTEF, UCAD, Dakar, Sénégal. (3) N°3204. Assemblée Nationale (française). Rapport d'information. Déposé en application de l'article 145 du Règlement PAR la commission des affaires étrangères sur la politique éducative extérieure de la France et présenté par Mme Odette Trupin. (4) Jacques Attali. Demain, qui gouvernera le Monde ? Edition Hibr, 2011, p.237. [5] Rachid Brahmi. De la problématique algérienne des langues d'enseignement. Le Matin.dz. http://www. lematindz.net/news/12223-de-la-problematique-algerienne-des-langues-denseignement.html [6] Ali Derbala. Le système LMD, un descendant du BMP. El Watan, Rubrique Idées-débats, Dimanche 10/06/2007 et lundi 11/06/2007, p.23. |
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