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Le racisme est une monstrueuse
poupée gigogne qui, une fois libérée, n'épargne aucune cible... (Edwy Plenel)
La parole et les comportements racistes se sont totalement libérés depuis une décennie en France et aujourd'hui, c'est sous l'impulsion d'une noria d'esprits chagrins qui entretiennent un discours haineux et abrasifs depuis 1989, date de la première polémique sur le «voile islamique», que le débat politique hexagonal ayant trait à l'islam et à la communauté musulmane française ne cesse d'enfler, de se déformer et de se crisper jusqu'à s'inscrire désormais dans une phase d'indigence intellectuelle prononcée et de jachère spirituelle. Une belle illustration de cet état de fait se trouve consacrée par l'entrée en fanfare du vindicatif Finkielkraut, chantre de l'islamophobie, à l'Académie française et la stupide émergence d'un B.H. Lévy qui, entre la provocation et l'accompagnement d'agressions militaires contre deux Etats arabo-musulmans souverains, se découvre une subite vocation de dramaturge de souk. Le contexte est tellement favorable qu'il entraîne dans son sillage bien d'esprits brillants et d'intelligences confirmées dans un naufrage vertigineux, assumant désormais au grand jour la fanaison précoce de leurs esprits critiques et cartésiens en s'agglomérant à la horde des extrémistes de droite et des laissés pour compte par l'intelligentsia française ainsi que la nuée de «politiciens alimentaires», depuis l'apparition de ces vulgaires nouveaux philosophes prédateurs et de ces gouvernants toxicos-jetables estampillés de gauche. Situation tragique à en mourir, en totale contradiction avec l'esprit et l'aura d'une France qui s'auto flagelle et drape d'abandons compulsifs toutes ses valeurs et l'épaisseur de son histoire ! Ainsi donc, à l'aune des attentats terroristes, un nouveau sport national se développe à une allure vertigineuse sous couvert de vocables pudiques tels anti-terrorisme, prévention de la radicalisation et tutti quanti, alors même qu'il recèle en son sein un puissant ressentiment latent de rage et de rejet d'ampleur à l'égard de la communauté d'origine musulmane, cible de toutes les frustrations et déviances d'une partie de la société prise dans la tourmente d'une phase dégénérescente et régressive. Le contexte s'y prêtant à merveille et l'alibi étant imparable, bien des reclus et déchets de la société française s'y engouffrent sans pudeur, trouvant ici même un champ d'expression vindicatif, stigmatisant et hautement raciste pour exorciser leurs échecs et les ratés de leurs existences, sans que la justice ni le code de procédure pénale ne daignent frémir un seul instant pour appliquer en toute logique et simplicité les lois antiracistes. Bien au contraire, on assiste ainsi à l'installation «ordinaire» de la délation chez le petit peuple et c'est désormais le citoyen lambda qui se découvre une âme de «lanceur d'alerte» à l'envers, qui s'autorise d'appeler les services de sécurité dès qu'un burkini ou un foulard dit «islamique» fait son apparition sur une plage. Cela se passe aujourd'hui et à Nice dans le prolongement de l'oukase municipal pris par le maire (Témoignage de la policière municipale syndicaliste F.O. Cynthia Foucault, publié sur le site Yahoo le 26/08/2016). Cette fonctionnaire territoriale affirme clairement : «Les gens désignent directement les dames qui portent le burkini aux patrouilles ». De B. Bardo à N. Morano Et pour pousser l'anecdote jusqu'au bout du bout afin de souligner avec force le ridicule de la situation, il y a lieu de retenir que, profitant de l'aubaine, ne voilà-t-il pas une fois de plus deux « ex-starlettes » pathétiques, l'une puant la naphtaline, relevant de la nébuleuse people et l'autre, produit de la gadoue politicienne, toutes deux disparues des radars médiatiques depuis fort longtemps et qui, pour regagner en visibilité, n'ont rien trouvé de mieux que de convoquer une fois de plus un anti-islamisme primaire et débile, se plaçant dans le vent de la xénophobie, pour jeter l'opprobre sur la deuxième religion française, pratiquée par plus de onze pour cent de citoyens. Il s'agit bien évidement, pour ne pas les nommer, d'une starlette fossilisée du cinéma, Brigitte Bardo, véritable bêtise sur pattes qui se déclare amie des bêtes et ennemie de l'homme en dorant ses rides depuis un demi-siècle déjà au soleil de la Côte d'Azur ainsi que la «rejetonne» d'un camionneur de banlieue, en l'occurrence Nadine Morano, tragique erreur de la nature importée par inadvertance d'Italie le soir d'une beuverie mémorable de routiers ritals, matière hautement toxique et dangereuse pour l'épanouissement du vivre-ensemble et pour la tranquillité et la quiétude des Françaises et des Français tout court. Il est devenu ainsi récurent de nos jours que des seconds et troisièmes couteaux anonymes, pour capter les sunlights des médias, enfourchent sans complexe ni retenue tout ce qui peut désigner le bouc émissaire idéal pour servir de punching-ball à leurs reproches, leurs frustrations et leurs haines, versant consciemment dans l'amalgame et l'insulte. Souvent pris en état de récidive légale et parce que le laxisme de l'appareil judiciaire est manifeste à leur égard, ils ne daignent plus s'embarrasser de prudence ou de retenue donnant libre court à des allégories fantasmagoriques piochées dans les poubelles de l'approximation et de l'ignorance, nourrissant sciemment et à haute voix la confusion des genres. Cela se passe aussi bien au niveau du petit peuple comme Georgette, la franchouillarde poissonnière de Vaison-la-Romaine, que du locataire de Matignon ou du chef de «Les Républicains», prétendant à la magistrature suprême, en passant par ces néo-français, véritable avant-garde fasciste, devenus en l'espace d'une génération les porte-drapeaux de la bête immonde, sévissant à l'Assemblée Nationale, au gouvernement ou dans plusieurs instances des plus grandes villes de France, du nord au sud. Les médias ne sont pas du reste puisqu'ils alimentent à longueur d'onde, 24 heures sur 24 pour les chaînes d'infos en continu, aussi bien la rumeur que des faits mal interprétés et quelquefois s'emparent d'une vérité biaisée qui va dans le sens du vent. Leurs plateaux en un rien de temps se transforment en réceptacle d'une faune bigarrée «bardée» de titres et de labels aussi pompeux que douteux qui viennent déblatérer dès que l'annonce d'une attaque au couteau se produit ici ou là et dont se serait rendu coupable un détraqué mental se déclarant musulman d'origine ou de conviction. Le concept de réactivité devant tant de célérité devient sujet à caution et limite caduc parce qu'il va bien falloir admettre que ces spin doctors de service ne doivent pas habiter plus loin que les coulisses de ces chaînes soumises à la grande finance et au puissant lobby qu'il est interdit de nommer sous peine de prison. Tout est si bien rodé qu'il y a lieu d'affirmer sans grand risque d'erreur que les leçons sont toujours bien apprises et les mises en scène finement élaborées par d'obscures officines d'ici et d'ailleurs, exécutées à la perfection, chaque fois que l'actualité l'exige. De N. Sarkozy à M.C. Valls Et voilà une fois de plus qu'on impute à tort à la présence d'une femme musulmane bien sûr en burkini, et par conséquent à l'Islam, les causes d'une esclandre entre trois frères Marocains et des habitants d'une bourgade voisine pour une bataille de territoire avec une tentative «d'appropriation de la petite plage attenante au village de Sisco en Haute Corse», selon les propos mêmes du procureur de la République de Bastia. Une fois l'information diffusée sur les ondes il s'est trouvé illico des maires plus rapides que «Lucky Luke» pour prendre dans la minute qui suit des arrêtés municipaux interdisant la baignade en burkini sur les plages qu'ils administrent. Il s'en est suivi alors un véritable lâché de fachos-racistes qui, depuis, s'adonnent à cœur joie dans la presse et les réseaux sociaux pour verser leur vomi et engager un pseudo-débat sur l'Islam de France coincé volontairement entre les quelques millimètres de tissu du string et les diverses déclinaisons du burkini, omettant d'évoquer les véritables causes de la rixe en Corse. En réalité tout est bon et à saisir au bond dès lors qu'il permet de pointer du doigt l'Islam et les musulmans français. Et à chaque incident, le discours gras et baveux revient nourrir à profusion les polémiques et donner du grain à moudre aux racistes de tout poil. Cependant, pour faire preuve de bonne foi et afin de ne pas glisser vers une généralisation stupide et inopérante, il est à noter qu'il s'est toujours trouvé des esprits droits et des Justes de tous bords qui prennent la parole en temps opportun pour recadrer le débat et apporter une note dissonante au discours nauséabond dominant et polluant les débats. Olivier Roy est de ceux-là. Professeur d'Université à Florence (Italie), spécialiste de l'Islam et auteur de «La laïcité face à l'Islam» (2005) et de «En quête de l'Orient perdu» (2014), intervenant sur le burkini, il estime pour sa part que celui-ci, «loin d'être un retour en arrière, est révélateur d'une alliance entre modernité et religion». Prenant à revers tous les prétendus néo-exégètes de pacotille de l'Islam et intellectuels à la petite semaine des plateaux télé, il leur assène sans crier gare : qu'y a-t-il de choquant «qu'une jeune fille, conseillère financière, arrive au travail en étant voilée. (Pourquoi n'arrive-t-on pas à) comprendre que des femmes qui réussissent affichent des signes religieux. Si on pose la question du voile à l'université, c'est certes parce que des étudiantes le portent, mais, c'est surtout, parce que ces jeunes filles (musulmanes) sont désormais visibles dans l'espace public». Enclenchant sur la notion et la perception sociale de la laïcité il soutient que celle-ci a sensiblement évolué depuis la promulgation de la loi de 1905 et que dans «son essence, la laïcité ne devait pas chasser le religieux de l'espace public, mais seulement organiser la gestion des lieux de culte. Aujourd'hui la laïcité est devenue une idéologie politique, qui sert à confiner la religion dans l'espace privé en lui substituant une «morale laïque»» de cour et de lobbying qui n'a mis sous surveillance qu'une seule et unique religion, l'islam. Le reste ne mérite pas qu'on s'y attarde parce qu'il n'est que littérature de gare. Du New York Time au Guardian Dans ce contexte, l'espace anglo-saxon, largement en avance philosophique, économique, humaniste et sur les droits de l'homme par rapport à l'espace latin, vis-à-vis du monde musulman, prend en défaut le débat français sur cette nouvelle religion nommée pompeusement «laïcité» pour tourner en ridicule le personnel politique hexagonal et les décisions prises contre toute manifestation d'appartenance ou de pratique religieuse paisible. En France il semble que tout est prétexte pour nourrir un débat hideux et inflammable sur l'Islam en invoquant à tout bout de champ le principe de laïcité. Partant de là, la presse anglo-saxonne tourne ainsi en dérision à travers presque toutes ses dernières «Unes» les approches et la frilosité de ce pays «donneur de leçon» face à des «broutilles» qui torpillent la sagesse, la pondération et le vivre-ensemble par un discours politique ambigu pour les uns, consciencieusement tendancieux pour les autres (élus et gouvernants socialistes) et un simple copié-collé du programme extrémiste du FN pour les tenants de la droite dite classique sous la férule du parti «Les Républicains», son chef et sa cour. Outre atlantique et outre manche on ne comprend pas du tout ce qui peut pousser une si grande puissance politique et économique à se fourvoyer ainsi, mettant en cause l'ADN de ses institutions en portant un sérieux coup à sa démocratie, à sa modernité et à son esprit républicain. Des outrances pareilles discréditent tout autant le personnel politique bas de gamme en place ou en embuscade qui arme ainsi tous les extrémismes en commençant par Daech qu'on est sensé combattre. Et c'est en ces termes que la version internationale du New York Time titrait ironiquement en Une, le samedi 13 août «La France a trouvé la dernière menace à la sécurité: le burkini». Quant au quotidien britannique The Independent, il évoque une décision «mauvaise et contre-productive», affirmant que «la tradition française est difficile à comprendre. Leur mot péjoratif pour désigner ce qu'ils craignent, le «communautarisme» n'est pas traduisible en anglais, mais c'est l'équivalent de la promotion de cultures séparées. Les Britanniques appellent cela le multiculturalisme et le célèbrent. C'est là toute la différence». Le Guardian dresse quant à lui la liste des cinq raisons de porter un burkini et pas seulement pour «embêter les Français», «Rendre fous les médias», «économiser de la crème solaire», «souligner le ridicule» de la polémique ou «défier ces idioties». Mais en France aussi, la sagesse n'a pas déserté totalement l'espace juridico-politico-médiatique même si certains «élus», adeptes du «Papy fait de la résistance», refusent d'appliquer la décision du Conseil d'Etat qui a jugé les arrêtés interdisant le burkini comme étant illégaux, se mettant ainsi dans la marge du droit. Et si Manuel Carlos Valls et Sarkozy s'obstinent dans leur postures c'est qu'ils sont coutumiers des volte-faces et des combats d'arrière-garde. Le premier essuie camouflet sur camouflet (Loi sur les Binationaux, Loi du Travail, Burkini, Benzema, etc.) et le second qui a été éjecté en 2012 de l'Elysée, s'est illustré en s'asseyant sur le «non» du peuple Français au projet de Maëstricht. Tous deux sont ainsi totalement disqualifiés par la loi et la voix du peuple pour intervenir dans les débats qui engagent sérieusement l'avenir de la France. Aussi, Alain Juppé, s'est-il déclaré, en enfonçant un peu plus Sarkozy, foncièrement opposé à la promulgation d'une loi sur le burkini parce que, argumente-t-il, il faut résister à la «tentation d'exiger des lois de circonstance au fil des polémiques médiatiques». Quant à François Fillon, dès son entrée en campagne, il lance vertement à Nicolas Sarkozy, dont il fut le Premier ministre de 2007 à 2012, « il ne sert à rien de parler d'autorité quand on n'est pas soi-même irréprochable... Qui imagine un seul instant le général de Gaulle mis en examen ? Je ne participe pas au concours Lépine des solutions les plus stupides et les plus imbéciles, censées lutter contre le terrorisme». Ensuite, la raison veut que condamner et verbaliser celles qui portent le burkini revient à établir un délit d'opinion au regard suspecté d'un simple vêtement sans prendre en considération l'avis de celles qui le portent, puisque ces «samaritain» venus de Hongrie et de Catalogne les considèrent comme un simple faire-valoir. Enfin, il est utile de retenir ce que dit Toufik, ce philosophe de la cité voisine du Neuf Trois qui a un avis sur tout, «ce que disent Sarkozy et Valls, même si cela relève d'un racisme de conciergerie gratuit, cela reste nauséabond et inopérant, puisque pour eux, même si on adopte le naturisme en affirmant à tort que c'est une recommandation islamique, ils dégaineront aussitôt et proposeront sans grand risque de se tromper une loi pour faire porter obligatoirement et immédiatement à toute la communauté musulmane la Burqa. C'est pourquoi je cours tirer la chasse sur leurs propos pour m'adonner ensuite à des méditations plus sérieuses ». (*) Enseignant universitaire à la retraite - Bordeaux. |
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