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«Le sport demeure
la continuation de la guerre par d'autres moyens»
« Pratiqué avec sérieux, le sport n'a rien à voir avec le fair-play. Il déborde de jalousie haineuse, de bestialité, du mépris de toute règle, de plaisir sadique et de violence ; en d'autres mots, c'est la guerre, les fusils en moins. » George Orwell Pour garantir la loyauté des compétitions sportives, un serment olympique en quatorze points régit l'organisation des Jeux depuis 338 av. J.-C. Le 10e point concerne les cas de tricheries durement sanctionnés : « Toute corruption d'arbitre ou d'adversaire sera punie» Dimanche 24 juillet, à quelques jours du début des Jeux, le Comité international olympique (CIO) a décidé de ne pas exclure la Russie des JO de Rio (prévus du 05 au 21 août), reléguant cette responsabilité aux fédérations internationales. Cette décision a déclenché une tempête de protestations amplifiée par les médias. La liste des indignés est longue. Bernard Amsalem, président de la Fédération française d'athlétisme, déclare, ulcéré, : « C'est un jour de deuil pour le sport ». Pour lui, le CIO « fait preuve de faiblesse ». Bardé de morale et d'éthique sportive puriste, B. Amsalem (natif de Saïda, Algérie, en novembre 1951) a pris la tête d'une cabale acharnée contre la Russie depuis longtemps. Sa position est limpide et ne souffre aucune nuance : la Russie a mis en place un système sportif où le dopage occupe une place stratégique, centrale et industrielle, soutenu par les instances politiques et les services secrets du pays. Elle doit donc être exclue des enceintes sportives internationales, sans la moindre exception. Travis Tygart, le directeur exécutif de l'Usada, l'agence antidopage américaine, partage cet avis: « De façon décevante, au moment le plus important pour les athlètes propres et pour l'intégrité des Jeux olympiques, le CIO a refusé de jouer un rôle leader déterminant», a-t-il insisté dans un communiqué. Par-delà la tragique actualité, le mot «intégrisme» s'impose ici en son caractère bi-sémique : intégralité de la loi et intégrité du sujet. Récapitulation Tout est parti des enquêtes de Hajo Seppelt un journaliste allemand, né à Berlin en 1963, à qui la chaîne de TV ARD a fourni les moyens de ses investigations et diffusé nombre de ses documentaires sur le dopage dans différents pays en commençant par le sien. Mais ce sont surtout les ex-pays de l'Est, en particulier l'ex-RDA, mais aussi la Corée du Nord, la Chine?qui constituent ses principaux «têtes de Turc», comme l'aurait écrit son compatriote[1]. La natation, le cyclisme, l'athlétisme? tout y passe. C'est un peu à lui que l'on doit le scandale qui vient de toucher le sport olympique russe. Décembre 2014, ARD diffuse son documentaire «Dopage confidentiel: comment la Russie fabrique ses vainqueurs», évoquant, témoignages à l'appui, un système de dopage généralisé dans l'athlétisme qui conduira à la mise en place d'une première commission d'enquête par l'Agence mondiale antidopage (AMA). Ce document est suivi de plusieurs autres reportages, entre août 2015 et juin 2016, qui accusent la Russie de continuer à enfreindre les règles. Novembre 2015. Suspension de la Fédération russe après que le rapport Richard McLaren (enquêteur «indépendant» désigné par l'AMA), a mis en évidence le dopage d'Etat en usage en Russie. Réunie en conseil extraordinaire, vendredi 17 juin à Vienne, la Fédération internationale d'athlétisme (IAAF) a décidé de prolonger la suspension de la fédération russe d'athlétisme (RUSAF). L'exclusion des athlètes russes sera confirmée par le tribunal arbitral du sport (TAS) de Lausanne. Mais leur position ira plus loin et, jeudi 21 juillet, il est demandé au CIO de prendre ses responsabilités et d'exclure, bien au-delà des athlètes, toute la délégation russe. Quatorze agences nationales de lutte contre le dopage, dont l'Usada américaine et la Nada allemande, ont envoyé une lettre commune au président du CIO, Thomas Bach, l'exhortant à exclure la Russie des Jeux olympiques 2016. « A la lumière des conclusions fortes du rapport McLaren qui ont été acceptées par l'Agence mondiale antidopage, le CIO et le mouvement olympique, étant donné le peu de temps qu'il reste avant les JO de Rio, nous croyons qu'il est approprié et nécessaire pour le CIO de prendre une action forte pour préserver la Charte olympique et l'intégrité des JO de Rio », indique cette lettre. « Le CIO ne peut pas, ne doit pas, déléguer cette responsabilité à d'autres. En conséquence, nous demandons au CIO d'exercer son autorité au nom de la Charte olympique (...) en suspendant le Comité olympique russe et en l'excluant des Jeux de Rio », poursuit le texte. Les directeurs des 14 agences antidopage signataires (Allemagne, Autriche, Canada, Danemark, Egypte, Espagne, Etats-Unis, Finlande, Japon, Pays-Bas, Nouvelle-Zélande, Norvège, Suède et Suisse) ont également réclamé la mise en place d'une «task force» chargée de définir les critères selon lesquels des sportifs russes peuvent être repêchés individuellement pour participer aux Jeux de Rio sous drapeau neutre. Cette dernière hypothèse est grave car elle revient à priver la Russie d'une part de sa souveraineté en amputant ses sportifs de leurs droits et de leurs références nationales. Comment peut-on en effet interdire à un sportif de participer à une épreuve sous le drapeau de son pays dès lors que l'on s'est préalablement assuré de son total respect des prescriptions anti-dopage ? Ce serait l'exemple d'un sportif dont l'entraînement s'est déroulé dans un pays très strictement contrôlé ? Cette interrogation peut de même concerner tout sportif dont on n'aurait pas fait la démonstration de son dopage, où qu'il se serait préparé. La réaction russe était prévisible « Les résultats du vote des membres du conseil de l'IAAF ont créé une situation sans précédent : les athlètes russes ne pourront pas participer aux XXXIe JO à Rio, a déploré le ministre russe des Sports, Vitaly Moutko, avant même la conférence de presse de l'IAAF. La décision de l'IAAF était attendue. Nous allons réagir.» « C'est injuste, a aussi réagi le président russe, Vladimir Poutine. Je pars du principe que nous aurons une discussion avec nos collègues de l'Agence antidopage et j'espère une réaction du Comité international olympique [CIO]. » Rien n'y fait. Le Tribunal arbitral du sport (TAS, domicilié à Lausanne) rejette comme on le sait jeudi 21 juillet l'appel du comité olympique russe. Les 68 athlètes russes suspendus par la Fédération internationale d'athlétisme (IAAF) pour dopage ne participeront pas aux Jeux olympiques de Rio. « Le jury du TAS a confirmé la validité de la décision de l'IAAF selon laquelle des athlètes dont la fédération nationale est suspendue sont inéligibles pour les compétitions tenues sous l'égide de l'IAAF », a-t-il asséné, au grand désespoir des sportifs russes. Cependant, cette exclusion, sous la forme ainsi prise, n'est ni juste, ni universellement partagée, comme les médias occidentaux veulent le faire croire, ni d'ailleurs cohérente. 1.- La condamnation des tricheurs ne fait pas débat et n'est pas discutable. Mais condamner tous les sportifs collectivement, sous prétexte qu'un système généralisé a été mis en œuvre pour accroître leurs performances n'est pas soutenable et tout d'abord parce c'est injuste : * pour celles et ceux qui ne se dopent pas. * pour leurs adversaires qui se produiront à Rio et dont les médailles seront, quoi qu'on dise, en chocolat. Parce que les meilleurs ne sont pas là. Dopés ou pas. « Notre bataille pour Rio est terminée », a regretté dépitée la star du saut à la perche Yelena Isinbayeva, qui visait à Rio une troisième médaille d'or olympique avant de prendre sa retraite. Isinbayeva est double championne olympique, aux jeux d'Athènes 2004 et de Pékin 2008. Elle est également triple championne du monde et championne d'Europe. Elle détient le record du monde de la perche féminine, avec 5,06 mètres franchis en plein air à Zurich en 2009. Suivie régulièrement, elle n'avait jamais fait l'objet de contrôle anti-dopage positif. Certes, en août 2013 elle a exprimé une opinion tenue pour homophobe. Cela ferait-il d'elle une sportive déloyale, inapte à l'olympisme ? * La décision d'exclure tout sportif russe qui a fait l'objet par le passé d'un contrôle positif est totalement injustifiée. Le Britannique Greg Rutherford, champion olympique à la longueur, s'est à raison insurgé dans The Guardian : « C'est totalement incohérent, introduire une telle interdiction pour les Russes à la dernière minute, tout en autorisant des athlètes d'autres pays au même pedigree ! ». Une référence claire à Justin Gatlin par exemple, le sprinteur américain en lice pour le titre olympique sur 100 m à Rio après avoir été deux fois suspendu pour dopage, pendant cinq ans au total. La liste de sportifs réintégrés après avoir été exclus est beaucoup trop longue pour qu'on en fasse ici état. Alberto Contador a été contrôlé positif au clenbutérol lors du Tour de France en juillet 2010. En février 2012, Contador est rétroactivement suspendu pendant deux ans, de août 2010 à août 2012, par le TAS. Cela ne l'a pas empêché de participer au Tour de France cette année, annoncé au départ comme un vainqueur potentiel. La décision du CIO va faire une victime de plus : Yuliya Stepanova, la lanceuse d'alerte à l'origine des révélations sur le dopage russe. Cette spécialiste du 800 m sera privée de JO, car elle a été sanctionnée pour dopage dans le passé, ce qui a là aussi suscité un tollé parmi les responsables de l'AMA et de l'Usada. Stepanova a eu ce qu'elle mérite, a estimé Komsomolskaïa Pravda. 2.- Universalité du dopage : «On achève aussi les sportifs» La sévérité des jugements et des décisions laisse croire que la Russie est la patrie mondiale et historique du dopage. De nombreux pays s'y adonnent et leurs sportifs sont régulièrement pris en défaut et cela dans tous les sports. La boxe aux Etats-Unis. Le cyclisme en Europe? On ne compte plus les victimes emportées dans leur jeunesse. Le plus souvent des sportifs venus des couches pauvres de la population. «Il faut être un imbécile (...) pour s'imaginer qu'un cycliste (...) peut tenir le coup sans stimulant», disait Jacques Anquetil qui a sans doute payé ses succès de sa vie. Ce cycliste émérite était un militant du dopage auquel il avouait publiquement avoir recours. Et pas «à l'insu de son plein gré». Ses déclarations sont pudiquement mises sous l'éteignoir aujourd'hui par tous les tartuffes qui pilotent le sport les sportifs, des ministères aux plateaux de télévision, des banques aux annonceurs, sans oublier, cela coule de source, les industries du dopage. Le dopage est constitutif du sport de compétition parce que la performance exigée des sportifs est inhumaine, parce que le système économique glorifie la compétition, la compétitivité, le benchmarking?et les performances, avec des agences de «rating» qui comptent les coups, qui toisent et comparent les muscles et les prouesses. Pas de pitié pour les perdants ! Les sportifs ? Un produit, un marché comme les autres, avec ses agents, ses prix, ses vitrines, ses salons?ses soldes. Retour au pillage Peu importe la nationalité d'origine. Pourvu que cela alimente le tableau des médailles des pays d'accueil qui font leur marché un peu partout dans le monde pour détecter les talents avec professionnalisme. C'est cela «l'immigration choisie». La générosité de l'Europe humaniste, c'est pour les salons cossus entre soi. Pour la bonne conscience. Le cynisme en supplément. Depuis la fin des «trente glorieuses», le monde est en guerre et tous les coups sont permis. La France, la Grande-Bretagne, le Portugal, les Pays-Bas, les Etats-Unis?peuvent toujours faire référence à l'histoire (et encore !), mais on ne compte plus les Suédois, Suisses, Norvégiens? Qataris, Turcs?à peau sombre qui parlent des langues exotiques et prient d'autres dieux, mais dont les spectateurs en mal de nation, inquiets en ce qu'ils sont et en où ils vont, se glorifient collectivement de leurs victoires. « Nous avons bien choisi ! » « Nos noirs sont meilleurs que leurs Noirs !».[2] Le Kenya, (mais aussi sans doute les coureurs infatigables des Hauts Plateaux de l'Est africain qui font inlassablement la ronde sur des kilomètres sur les pistes des stades), est sur le haut d'une pile himalayenne de dossiers chauds de la triche à l'EPO. Ses athlètes sont sur la liste des champions du dopage. Mais prenons garde ! Ce sont aussi les victimes d'une machine impitoyable. La pauvreté fait courir à en perdre haleine. Fait courir à en mourir. Si certains arrivent, la multitude n'achève pas le voyage. 3.- «La continuation de la guerre par d'autres moyens» Ainsi pourrait-on reprendre la paraphrase cet officier prussien (C. v. Clausewitz, 1832). Il n'y a pas que la politique pour créer les enceintes aptes à civiliser la violence. Certains pourraient objecter que seuls ceux qui n'ont pas connu les affres abominables de la guerre peuvent oser une analogie si légère avec les jeux du stade. C'est que la guerre habite bien des territoires et prend toutes les formes propres à faire triompher de ses adversaires et de ses ennemis. Il y a les «réponses graduées», il y a aussi les annexes de la belligérance. La guerre peut aussi commencer dans les stades, même si l'on a beaucoup forcé le trait à propos «la Guerre des Cent Heures» déclarée entre le Salvador et le Honduras en juillet 1969[3]. Le match de football qui a opposé les équipes des deux pays n'a pas déclenché la guerre. Il n'a fait que servir de prétexte. Ses causes n'ont rien à voir ni avec l'arbitrage, ni avec la dextérité des joueurs. Accuser les Russes d'instrumentaliser politiquement le sport au bénéfice d'une glorification de la Nouvelle Russie Poutinienne n'est pas sérieux. De l'exhumation des Jeux olympiques modernes (lancés par le Baron P. de Coubertin qui fonda le CIO en 1894) à ce jour, en passant par la parade militariste de 1936 à Berlin, les Jeux ont toujours défilé à l'ombre des baïonnettes et des canonnières. Avant d'être des sportifs, les athlètes étaient des soldats. Le parcours du combattant est le berceau du sportif. Dans beaucoup de pays les sportifs sortent des casernes. Tout cela n'a rien de surprenant. Des JO, n'est-ce pas la bataille de Marathon qui en marqua la naissance ? Reprocher aujourd'hui à la Russie d'en faire un instrument de propagande politique, c'est hypocrite et de mauvaise foi. Tout le monde en fait autant. Tous les gouvernants en tout pays utilisent leurs sportifs pour en tirer un bénéfice électoral, la démonstration d'une réussite politique. Ce n'était pas (seulement) par amour du foot que F. Hollande (comme certains de ses homologues) a assisté à tous les matchs de l'équipe de France de football lors du dernier Euro. Comme tous ses autres concurrents (de gauche, de droite et des extrêmes), il était déjà en 2017 ! Aux politiciens il faudra aussi ajouter les firmes transnationales qui les financent, les chaînes de télévision en compétition sauvage qui en diffusent les images, sans oublier les industries pharmaceutiques qui utilisent les sportifs comme cobayes in vivo pour leurs laboratoires. C'est dans certains de ces laboratoires que sont mis au point les nouveaux produits dopants ou les produits chimiques destinés à les masquer. La frontière entre médicament et produit dopant est plus floue que les censeurs moraux qui se drapent dans une dignité factice veuillent bien le reconnaître. Face à l'industrie du dopage, il y a l'industrie tout court. Et les tricheurs russes n'en ont pas l'exclusivité. Pourquoi la Russie ? À la fin des années 1980, Francis Fukuyama proclamait la «fin de l'histoire» (depuis il a eu le temps de nuancer). Le communisme, c'est fini ! Tout le monde est capitaliste. Maintenant, la guerre «froide» extérieure est devenue «chaude» à l'intérieur. La guerre est partout, sur tous les marchés, puisque tout est désormais marchandise. Le fait est qu'après la séquence Eltsine, alcoolique corrompu notoire, qui a ouvert toutes les portes à un capitalisme qui avait atteint dans son pays un haut niveau de sauvagerie, a succédé un jeune technocrate qui avait commencé sa carrière au FSB avant de la continuer comme gouverneur de la Russie puis de prendre la place de l'ancien maire de Moscou après son décès, à la tête de la Fédération de Russie à partir de l'an 2000. Entre-temps, il a alterné avec son Premier ministre, Dmitri Medvedev, entre 2008 et 2012. Il a été sous-estimé mais très vite on sut que son seul et unique objectif était de redonner à la Grande Russie -non plus soviétique, mais russe- le lustre qu'elle avait perdu depuis la chute du Mur de Berlin. Avec un projet eurasiatique, un axe géostratégique Berlin-Moscou-Pékin que ni Washington ni Paris (et ses atlantistes militants) ne pouvaient tolérer. Le nationalisme russe s'est substitué à la «patrie du communisme» et Vladimir Poutine s'est doucement coulé dans la peau du «Petit Père des Peuples» v.02. Le recouvrement de la souveraineté du pays, exercée sur son territoire, sur ses richesses naturelles, sur ses principales entreprises. La relance des investissements militaires, la sécurité du pays face à un OTAN envahissant, intégrant les ex-PECO, qui aurait dû disparaître à la chute des Démocraties Populaires. Washington ne pouvait admettre l'idée d'une sorte de « USSR back », d'un retour à une nouvelle «guerre froide» en rivalité avec un pays, certes spatialement gigantesque, mais une économie atteinte du «syndrome hollandais» et qui produit à peine l'équivalent de ce que dépensent les Etats-Unis pour leur défense en une année, soit 9 fois plus que la Russie qui a 2 fois moins de soldats. Un nain face à la première puissance militaire, économique, financière, commerciale?un empire dont jamais l'histoire n'en a connu de semblable. Les pressions sur Moscou se sont exercées peu à peu, en tous domaines et de tous côtés : la finance (assécher les flux de capitaux vers la Russie), les procès (celui intenté par Khodorkovsi est exemplaire après sa libération), la monnaie (dépréciation du rouble), la chute du prix des matières premières et surtout celui des hydrocarbures, le confinement des politiques et des oligarques proches du Kremlin?et bien sûr un nouveau containment militaire : bouclier anti-missiles, relance de la course aux armements, réinvestissement dans le spatial (privé) afin de ne plus dépendre des Russes pour l'accès à l'orbite basse et à un éventuel retour sur la Lune que convoitent Chinois, Indiens et Japonais? On ne peut comprendre les crises ukrainienne et syrienne sans la volonté des Etats-Unis, mobilisant tous leurs alliés, pour réduire et étouffer la tentative poutinienne de retour à une Russie qui refuse de se cantonner à la figuration. Les escarmouches nombreuses et variées émaillent les relations russo-américaines depuis près de vingt ans. Après l'avoir chassée du G8, comment ne pas lire la querelle du dopage -dans les termes exposés ci-dessus- comme une volonté de chasser la Russie de la famille olympique pour peser sur ses décisions et contraindre sa politique ? Et malgré cela, malgré toutes ces pressions qui entament les forces économiques du pays, la popularité de Poutine demeure intacte et même se renforce. Se pourrait-il que la tension anti-russe organisée en sous-main par les Etats-Unis se soit adoucie et qu'un accord secret ait été conclu entre Washington et Moscou ? Peut-on le présumer à la lecture du Wall Street Journal de la semaine dernière ? En effet, lors de leur rencontre du 15 juillet, les chefs de la diplomatie russe et américaine, Sergueï Lavrov et John Kerry, se sont mis d'accord pour coopérer militairement en Syrie contre les groupes jihadistes Etat islamique (EI) et Al-Nosra (branche locale d'Al-Qaïda). D'après cet accord, Moscou cesserait de bombarder les positions des rebelles syriens soutenus par Washington et empêcherait son allié syrien de faire de même, en échange d'un moindre isolement russe sur la scène internationale. Serait-ce ainsi qu'il conviendrait d'interpréter la décision du CIO, présidé par un allemand (que les mauvaises langues disent proche de Moscou) de ne pas généraliser à tous les sportifs russes, l'interdiction prononcée contres ses athlètes par la IAAF ? On peut le présumer, même s'il serait illusoire de croire à la fin de la tension entre les deux pays. Naturellement, si l'hypothèse est retenue, cet accord fera des victimes : tous les vassaux qui se sont activement mobilisés pour que la Russie soit totalement interdite de Jeux. Sans oublier tous les «alliés» qui portent à bout de bras les terroristes qui combattent militairement le régime d'Assad. Après la volte-face d'Obama, refusant de détruire le régime de Damas au cours de l'été 2013, ce ne serait qu'une couleuvre de plus au menu que l'Empire accommode à l'intention de ses plus fidèles sujets. « Du sport ? Juste un peu de marche à pied pour suivre les enterrements de mes amis sportifs. » (W. Churchill) Pour une première exploration de cette question, quelques références : 1.- Cahiers de Sciences & Vie (2004) : Huit siècles avant J.-C. débutait l'épopée des Jeux olympiques. Numéro spécial. Juillet 2004. 112 p. 2.- Diplomatie. Affaires stratégiques et relations internationales n°57. Géopolitique du sport. Compétition, argent et diplomatie. Juillet août 2012. 98 p. 3.- Ramonet I., Ch. de Brie (1996) : Le Sport, c'est la guerre. Manière de voir n°30. Le Monde Diplomatique mai-juin-juillet 1996. 98 p. 4.- Ramonet I., Ch. de Brie (1998) : Football et passions politiques. Manière de voir n°39. Mai-juin 1998, 98 p. Notes [1] Günter Wallraff (1985). 1986 pour la traduction française chez La Découverte et la préface de Gilles Perrault. [2] Je recommande chaudement la vision attentive du film « Django déchaîné » de Quentin Tarantino, 2012. [3] Au moment où Neil Armstrong faisait ses premiers pas sur la Lune. La «conquête» spatiale est un autre territoire de la guerre. Et la compétition spatiale est incompréhensible sans la rivalité Est-Ouest. |
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