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Pâle normalisation

par Abdelkrim Zerzouri

Les attaques génocidaires commises par l'entité sioniste à Ghaza ont provoqué une vague de manifestations et de dénonciations à travers de nombreux pays dans les quatre coins de la planète, y compris dans des pays où les gouvernements accordent leur soutien militaire à Israël. Mais le cas du Maroc reste un exemple saisissant sur plusieurs plans. Il est tout à fait légitime que les Marocains, à l'instar d'autres peuples de différentes nationalités, manifestent leur soutien à la cause palestinienne et crient leur colère dans les rues des villes marocaines, à Tanger, Meknès, Nador, Agadir, Taroudannt, Kenitra, Ahfir et d'autres régions encore, contre les Israéliens suite aux massacres perpétrés à Ghaza depuis huit mois. Les slogans des manifestants ne se limitent, cependant, pas à la condamnation des opérations militaires de l'armée israélienne, bifurquant sur une opposition populaire à la normalisation des relations diplomatiques entre le Maroc et Israël.

 Dès l'entame des opérations militaires israéliennes à Ghaza, des citoyens marocains ont massivement investi les rues des grandes villes pour exprimer leur soutien aux Palestiniens et dire tout haut ce qui leur était interdit, leur opposition à la normalisation des relations diplomatiques entre le Maroc et l'Etat sioniste. Comme si ce triste événement constituait une opportunité à saisir pour afficher leur désaccord vis-à-vis de cette normalisation à travers une forte et constante mobilisation des populations. On se rappelle ce qui s'est passé quand un parti politique marocain a dénoncé publiquement cette normalisation, provoquant les foudres du Palais royal, suivies d'une sévère mise au point avertissant que la politique extérieure du Royaume est une prérogative exclusive du roi. Depuis, rares ont été les voix qui se sont exprimées ouvertement sur ce dossier qui retient l'attention d'une opinion étouffée. Jusqu'au mois de décembre 2023, trois ans après la normalisation, quand les Israéliens ont entamé leurs attaques contre les civils palestiniens, où les Marocains ont pu exprimer leur opposition à cette politique du roi. Des manifestations pour la cause palestinienne qui ont pris une forme politique, orientées vers un problème interne ? Cela semble avoir l'air d'un alibi que le roi, lui-même, peut difficilement s'y dérober en recourant à la répression.

 Car, en sus du soutien aux Palestiniens, les manifestants scandent des slogans hostiles à Israël, en appelant au boycott des produits israéliens, aux désinvestissements et aux sanctions contre Israël. Chose qui n'a pas été vue, ou de moindre intensité, dans d'autres pays qui ont normalisé leurs relations diplomatiques dans le cadre des accords d'Abraham. Pourtant, de loin ou de près, on sait que le Maroc a toujours entretenu des relations intimes avec Israël. En fait et pour de nombreux observateurs, tolérer ces marches et ces slogans anti-israéliens, revient au Makhzen à réguler et faire baisser la tension et la colère populaires contre le palais royal, architecte de cette normalisation.