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L'outrance d'une piraterie

par Abdou BENABBOU

A l'occasion de la fête des travailleurs, le président Tebboune a mis le doigt sur des aspects d'une gouvernance passée mafieuse où de hauts responsables de l'Etat se sont comportés en véritables pégreleux organisés. Mais lorsqu'un ex-Premier ministre, aujourd'hui incarcéré, avoue avec une platitude caractérisée qu'il avait fait appel au marché parallèle pour écouler des lingots d'or, alors qu'il avait entre les mains la destinée du pays, il n'est pas besoin d'insister sur les détails d'une ère où le destin de l'Algérie s'hypothéquait.

En fait, tout se savait avec force détails et le drame était que l'outrance de la piraterie n'échappait pas à la connaissance du peuple qui ne manquait pas de souligner son traumatisme imposé. Les stratagèmes mafieux de hauts cadres de l'Etat avaient atteint un stade tel que les recettes outrageusement planifiées s'étalaient au grand jour au vu et au su de tous.

Alors que le passé les avait déifiés, jusqu'à leur promettre le stade suprême du pouvoir, la destinée et le sort des hommes débusqués aujourd'hui n'importe pas autant que la culture de la rapine qu'ils ont instaurée. Leur avidité avait semé une corruption généralisée de laquelle le pays arrive difficilement à se détacher. Ils sont surtout coupables d'avoir gommé le patriotisme dont chaque Algérien devait s'armer pour faire face à un monde sans pitié. Le droit était soumis au monnayage des salons et des rues, et l'administration, la petite comme la grande s'était vêtue des habits d'un mercenariat autorisé. Dans le passé, naïvement, à l'écoute des dires et des chuchotements, on croyait avoir affaire à un langage d'éberlués, mais la justice a prouvé que la colère populaire était fondée et justifiée.

La règle voulait qu'un appel téléphonique suffit pour quelques-uns pour qu'ils soient «milliardisés». Les dinars n'étaient pas comptés mais pesés et signe de décrépitude très symbolique, les liasses d'argent trouvaient l'accommodement et le plaisir d'être loties dans des sacs poubelles.