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1ère partie
Une croissance insuffisante pour absorber une population active encore en augmentation En première approche, on peut estimer que ce déséquilibre majeur et persistant de l'économie Algérienne trouve sa source dans une croissance économique insuffisante pour absorber une population active encore en augmentation. La solution au problème serait donc à rechercher du côté d'une politique favorable à la croissance, et plus précisément à l'émergence d'une offre compétitive dans la mondialisation. S'il est évident qu'une croissance plus rapide du PIB créerait plus d'emplois, force est cependant de constater que la croissance tendancielle de l'économie reste faible, un rythme insuffisant pour réduire le chômage. Quoi qu'il en soit, si l'insuffisance de la croissance constitue une part importante de la réponse, ce diagnostic n'épuise cependant pas toutes les interrogations. Car avec une croissance économique largement comparable à celle de beaucoup de pays, l'Algérie a connu des taux de chômage bien supérieurs. Si on veut bien considérer que le relatif dynamisme démographique, il convient alors d'admettre qu'il existe d'autres causes qu'une insuffisance de la croissance pour expliquer le niveau du chômage. Les nombreux rapports spécifiques sur le sujet convergent ainsi pour considérer que le sous-emploi constaté dans notre pays puise aussi ses racines du côté de dysfonctionnements sur le marché du travail et d'une politique de l'emploi à tout le moins perfectible. 2. Les raisons d'un sous-emploi chronique. Au cours des dernières années, la compréhension du sous-emploi a beaucoup évolué, avec des progrès significatifs dans sa connaissance. Le retour au plein emploi d'un certain nombre de pays, pas forcément industrialisés, a ainsi montré que le chômage n'était pas une fatalité et que sa persistance en Algérie avait des causes assez largement locales. Il faut distinguer quatre grandes catégories de facteurs explicatifs. Une prédilection pour des méthodes favorisant la baisse de l'offre de travail (départ en retraite anticipée, découragement du travail féminin, allongement de la scolarité, etc.) comme moyen de réduction du chômage. Pendant plusieurs décennies, les gouvernements successifs ont semblé considérer que la quantité d'emplois était limitée et que la réduction du chômage passait par une sortie (ou une non-entrée) du marché du travail de diverses catégories de population : jeunes, femmes etc. Loin de réduire le chômage, ces politiques ont, en fait, réduit le potentiel de croissance de l'économie, augmentant les difficultés de financement de la protection sociale. Les comparaisons internationales montrent, au contraire, que les pays ayant accru leurs taux d'activité sont aussi ceux qui enregistrent le taux de chômage le plus faible. Des dysfonctionnements du marché du travail empêchant le transfert de main d'oeuvre des secteurs en déclin vers les secteurs en expansion. Les rigidités du marché du travail ont conduit à la cohabitation d'un nombre élevé de demandeurs d'emplois et d'offres d'emplois non satisfaites et l'émergence de secteurs en tension. Cette notion de rigidité renvoie à un vaste ensemble de dispositions juridiques (contrat de travail, statut public, droit du licenciement) qui entraveraient la mobilité du travail et limiteraient les capacités d'adaptation de l'emploi aux fluctuations de l'activité économique. Un coût élevé (charges sociales). L'Algérie se caractérise par l'existence d'un salaire minimum d'un niveau non élevé, et par un financement de la protection sociale largement assis sur la masse salariale. Il en découle un taux de chômage très important pour les salariés non qualifiés, une pyramide des salaires écrasée qui rend quasi impossible toute individualisation des rémunérations et un coût du travail chargé, prohibitif pour les entreprises de main d'oeuvre dans la compétition même locale ou nationale. Des politiques de l'emploi coûteuses aux résultats discutés L'Algérie a l'une des politiques de l'emploi les plus coûteuses parmi les pays en voie de développement .Dans une large mesure, cette politique vise à corriger les défauts cités ci-dessus : une inflation de contrats de travail spécifiques pour tenter d'assouplir les rigidités du contrats à durée indéterminée, un coût élevé de la politique de l'emploi largement imputable aux allègements de charges sur les bas salaires pour corriger les effets du SMIG, en l'absence de politique de formation des demandeurs d'emploi pour atténuer les défaillances du système de formation initiale, etc. 3. Les indicateurs des insuffisances des politiques de l'emploi Au-delà du simple constat de l'importance du sous-emploi, bien d'autres indicateurs peuvent être mobilisés pour décrire les dysfonctionnements du marché du travail national. On en rappellera quelques-uns d'entre eux : - Importance du taux de chômage des jeunes de moins de 30 ans qui signe la difficulté pour les jeunes générations d'entrer sur le marché du travail. De multiples raisons expliquent ce constat mais deux ressortent particulièrement : l'inadaptation des formations initiales aux besoins de la vie économique et un niveau de charges sociales trop élevé. Ces dysfonctionnements se paient d'une précarité dans l'emploi qui dure jusqu'à un âge avancé ; - Importance du chômage de longue durée notamment chez les non qualifiés. la durée importante des périodes de chômage signale une faible incitation à la reprise rapide d'emploi. On peut aussi y voir un manque d'efficacité du service public de l'emploi. Cette durée excessive a deux inconvénients majeurs : elle provoque une déqualification des demandeurs d'emploi et rend plus difficile leur retour à l'emploi ; elle favorise le développement d'un profond sentiment d'angoisse face au chômage qui encourage la défense à tout prix des emplois, même de ceux qui sont non productifs ; - Des inégalités importantes dans les statuts. Le marché du travail est caractérisé par une très grande hétérogénéité des situations professionnelles avec faible taux de la population active bénéficiant d'un statut public très protecteur, un taux important de la population supportant un statut très flexible (CDD, suppléance, etc.) et peu ayant un statut considéré comme « normal » (CDI), mais qui concerne de moins en moins les jeunes générations entrant sur le marché. Au total, ce rapide tour d'horizon fait apparaître qu'avec un taux tendanciel de croissance économique normal, un meilleur fonctionnement du marché du travail et des politiques de l'emploi plus efficaces pourraient conduire à un taux de chômage significativement plus faible que celui constaté avant la crise. Du point de vue des entreprises, cela permettrait, aussi, de mieux satisfaire des besoins de recrutement - aujourd'hui pas ou mal satisfaits - et de réduire les tensions constatées dans certaines branches. On pourrait également attendre d'un taux d'activité plus élevé, un coût par emploi de la protection sociale plus faible, ce qui améliorerait la compétitivité des entreprises et réduirait les incitations à privilégier les combinaisons productives plus capitalistiques ou moins intensives en main d'oeuvre. A ce titre, la politique de l'emploi doit se référer à des objectifs préalablement définis. En ce sens, toute évolution à venir devrait avoir pour but de : - favoriser une logique dynamique de mobilité sur le marché de l'emploi de préférence à des politiques stables et cloisonnantes ; - concentrer les politiques de l'emploi sur la protection de la personne et non sur la protection de son emploi. Par ailleurs, l'ensemble des résultats des actions menées en matière d'emploi doivent faire l'objet d'une évaluation, sur la base de critères objectifs, concrets et pertinents, permettant de mesurer l'efficacité des politiques entreprises. La mise en oeuvre systématique de cette évaluation tarirait le flot législatif, le plus souvent contre-productif et éviterait, notamment, l'adoption de dispositifs concomitants et parfois contradictoires. Sur la base de ces principes directeurs, deux axes de propositions peuvent être dégagés : - Faciliter l'accès au marché du travail ; - Fluidifier le marché du travail. Faciliter l'accès au marché du travail Les maux dont souffre le système d'éducation sont connus. On citera notamment le poids déterminant de la formation initiale et du diplôme dans l'accès à l'emploi et l'évolution des carrières, l'importance des sorties sans qualification, les parcours chaotiques d'insertion des jeunes dans la vie active, marqués le plus souvent par des périodes de chômage et la succession d'emplois précaires. Il existe ainsi une réelle difficulté à organiser et à articuler les différentes transitions que peuvent connaître les personnes au cours de leurs études et de leur vie professionnelle : transitions entre les cycles de l'enseignement, entre la fin des études et le premier emploi, transitions dans l'emploi .Il importe de mieux préparer les transitions et de les rendre plus fluides, en agissant sur les deux leviers que représentent l'orientation et la formation. 1. Faire de l'orientation un vrai choix d'avenir L'orientation est en effet le préalable indispensable à la construction de tout projet de formation, de tout projet professionnel. Elle doit permettre à l'élève, à l'étudiant, mais aussi au salarié en situation ou non de transition, de s'interroger et de réfléchir à ses goûts, ses motivations, ses aspirations, ses capacités et ses compétences pour construire son projet de formation, et, partant, son projet professionnel. Or, malgré son importance capitale, le système d'orientation apparaît défaillant à plusieurs égards. L'orientation des jeunes Malgré les réformes et les initiatives engagées ces dernières années pour améliorer le système d'orientation, il est toujours aussi difficile, et même très souvent anxiogène, pour les jeunes de s'orienter, de «savoir quoi faire» comme études ou comme métier. Plusieurs problèmes subsistent en effet : - difficulté, pour les jeunes et leurs parents, à se repérer dans l'information sur les filières de formation et les métiers, et à avoir une connaissance concrète des métiers et de l'entreprise, - survalorisation des filières générales et persistance de préjugés tenaces sur la voie professionnelle (et notamment sur l'apprentissage), - insuffisance de la préparation à l'orientation des élèves au sein du système scolaire, - poids excessif des notes dans les décisions d'orientation, - suivi insuffisant de l'application sur le terrain des textes règlementaires. Les difficultés existent également dans l'orientation. En particulier, les deux conditions premières à une orientation efficace - accès à l'information sur les métiers et les évolutions du marché de l'emploi ; accompagnement par un professionnel de l'orientation et par l'encadrement de proximité - ne sont pas toujours réunies En particulier, la multitude d'organismes faisant de l'orientation, et donc de prestations offertes, représente pour le demandeur à la recherche d'aide à l'orientation, qui, par définition ne sait pas où il en est de son projet professionnel, un défi de taille. Celui-ci est d'autant plus grand que la démarche d'orientation tout au long de la vie professionnelle est loin d'apparaître comme une démarche naturelle, trop souvent limitée aux situations de rupture et donc réalisée dans l'urgence. La rénovation de l'orientation scolaire et professionnelle, pour mieux éclairer les choix et aider à la construction du projet de formation ou professionnel, paraît d'autant plus importante à engager qu'elle constitue aujourd'hui une priorité des pouvoirs publics. A ce titre il est proposé : Mettre en place au CEM et au lycée une véritable politique d'éducation à l'orientation.Il est indispensable, à l'instar de ce qui se pratique dans d'autres pays, de rendre obligatoire au l'éducation à l'orientation, en inscrivant dans l'emploi du temps des élèves, ntamment pour les classes d'examen, des heures dédiées. Il s'agit donc d'intégrer véritablement l'éducation à l'orientation dans le quotidien et les projets scolaires en l'inscrivant dans un programme global et cohérent ainsi qu'en lui offrant un temps institué5. Le moment semble d'autant plus propice à une telle démarche au moment ou plusieurs dispositifs de formation et de promotion de l'emploi sont mis en œuvre. Visites de découverte en entreprise, journées de visites d'établissements de formation, entretiens personnalisés d'orientation, interventions de professionnels, d'anciens élèves et de parents dans les classes, organisation dans les lycées de forums des métiers ,sont de bon moyens d'orientation. Enfin, l'éducation à l'orientation sera d'autant plus réussie qu'elle associera les entreprises et leurs représentants (chambres de commerce et de metiers?), en particulier pour faire connaître et expliquer les métiers aux élèves. Pour faciliter les relations entre l'école, les entreprises et les milieux professionnels et organiser au mieux les interventions, des référents entreprises ou correspondants du monde économique pourraient être mis en place dans les établissements scolaires, sous forme de missions confiées à des enseignants, conseillers d'orientation ou conseillers d'éducation. 3. Réorienter les contrats de travail financés par l'Etat vers le secteur marchand La politique de l'emploi en France est marquée par le développement de contrats de travail aidés à destination de travailleurs identifiés comme ayant bénéficié de durée d'insertion mais doit toucher également tous les demandeurs d'emploi. Ces contrats doivent viser : - d'une part, les contrats de formation, souvent destinés à un public jeune, mais pas exclusivement, et qui allient formation théorique et expérience pratique en entreprise (contrat d'apprentissage; - d'autre part, les contrats présentant des avantages financiers et/ou sociaux pour l'entreprise, sans contrepartie en termes de formation, destinés à des publics particulièrement éloignés du marché du travail tels que les demandeurs d'emploi de longue durée ou de faible qualification. La politique mise en œuvre en la matière a connu de très nombreuses évolutions au gré des orientations gouvernementales successives. Toutefois, deux constantes peuvent être relevées : - la multiplication des types de contrats, rendant les actions publiques peu lisibles et le recours à ces contrats compliqué pour les entreprises (programmes solidarité et DAIP) ; - la préférence et le soutien des pouvoirs publics pour les contrats du secteur non marchand. Ces deux points méritent aujourd'hui d'être discutés. 3.1. Simplifier le maillage des contrats. Les entreprises se heurtent à de multiples dispositifs de contrats, ne sachant pas toujours lesquels utiliser ni dans quelles conditions le faire. Une simplification en ce domaine s'impose. Il semble, fort heureusement, que cette démarche, déjà finalisée en matière d'alternance, ait essaimé l'ensemble de la matière et doit connaître un aboutissement prochain avec la création des commissions locales de promotion d'emploi. A suivre *Secteur de l'emploi - Mostaganem |
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