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Foin la croûterie des fatras, recours au voyage pour coincer la
monotonie. Aller écouter la rumeur du monde et souquer la mélancolie au loin.
Changer la vie comme le proclame Rimbaud.
Mois de mars, une période choisie en adéquation avec la clémence du temps à 32°, je n'avais plus besoin d'une veste d'été qui devient un encombrement à l'instar d'une tortue traînant sa carapace. Au Caire, Fostat, ancienne ville fatimide, vous accueille sous des feux scintillants, enrobés de la plus grande histoire de l'humanité : Oum el Dounia dont s'enorgueillit l'Egyptien moyen. A l'aéroport, je passe le cordon de la police avec un visa acheté sur place. Pratique, pour 25 dollars au guichet d'une banque on vous remet un timbre autocollant que le policier tamponne sans états d'âme ; on peut même en acheter deux pour un multiple voyage. A la sortie, gare à l'arnaque des taxieurs ! Direction vers la grande place du Midan Tahrir près du grand musée d'Egypte. A n'importe quelle heure, le trafic est à son comble. Imagine un grouillement d'un pays de plus de cent millions d'habitants en quête de pitance. Après la visite du Musée la grande attraction après les Pyramides, l'objectif demeure Sinaï. Sinaï, l'exaltation au service de l'émerveillement La prédisposition du voyage pousse à l'optimisme et la tolérance du voyage. Elle vous laisse téter le goût de l'aventure. Le Sinaï s'y prête pour une écriture avec un état d'âme plus vaporeux. La force intérieure dicte son effet de sublimation. Son histoire traverse le temps comme le bus traverse les nombreux villages et les camps militaires vers un non lieu dépourvu d'éloquence de dunes de sable. Au départ du Caire, une amie égyptienne me conseille d'éviter cette zone de guerre. - Vas plutôt du côté d'Assouan en croisière sur le Nil - Je l'ai déjà fait - Le Sinaï est devenu un refuge de frondeurs - En Algérie, on a connu pire au point où on est devenu consultant international - J'ai choisi le Sinaï pour assouvir une curiosité de l'après guerre israélo-égyptienne et de fouler une portion sacrée d'un des prophètes (Moïse) - A ton choix, bon voyage - A ce propos, je vais vous raconter ce qui va avec selon l'histoire après avoir traversé la mer Rouge, Moïse aurait campé en ce lieu avec sec 600.000 compagnons, et y aurait fait jaillir une source. La plus grande, celle que Moïse aurait purifiée, se trouve à 1 kilomètre plus au sud. «Le peuple murmura contre Moïse en disant : que boiront nous ? Alors il cria vers Yahvé (Dieu) et Yahvé lui indiqua du bois. Il le jeta dans l'eau et l'eau devient douce» (Ancien Testament, l'Exode XV) En allant au Sinaï je me sentais en noce avec le cosmos, assoiffé d'absolu, même si la mélancolie me fait escorter. Certes les Egyptiens tentent dans un accueil très poli ?nouar Misr' et je ne voyais pas de fleurs autour. Cette affabilité m'aidait à vivre en apesanteur de sensation dans l'autobus. L'autobus. J'allais vers l'inconnu, je carburais à l'utilitaire, plutôt je clopinais vers un destin de voyageur à la recherche de soi-même. Au Sinaï vous avez trois routes principales. L'une au nord qui part d'Ismaïlia vers El Arich et Rafa sur 400 km, près de l'enclave de Gaza, subissant ouvertures ou fermetures selon la conjoncture politique. La deuxième, à partir de Suez, coupe le désert en son milieu vers Newbia : zone à prédominance militaire. Et enfin la troisième, longe la mer Rouge au sud en frôlant le monastère de Sainte Catherine pour remonter vers le nord sur Taba et la frontière d'Israël. A partir de Nuweiba, sur 70 km, la corniche jusqu'à Taba est une zone touristique par excellence très animée principalement par des Israéliens, Russes et Jordaniens. La ville de Taba qui s'étend sur un kilomètre carré a été l'œuvre des Israéliens avec un grand hôtel Hilton, rendu aux Egyptiens lors des derniers accords d'Oslo. Belle affaire, disait le chauffeur lors d'un arrêt thé. - Depuis, nous vivons en paix, juste quand il y a tension, la frontière est fermée et notre activité tombe zéro, car d'Israël, le tourisme nous faire vivre. - Il n'y a pas d'autres activités économiques ? - Non, ni l'agriculture ni aucun minerai ne pointent à l'horizon. Seulement un peu de pêche. - Ce qui compte le plus c'est la paix et une certaine convivialité qui commence à prendre corps. Voyez ces touristes c'est tous des Israéliens qui viennent prendre le thé. Même après les accords d'Oslo, les deux pays vivent en chien de faïence. Encore un barrage égyptien, où grouillent des jeunes militaires vêtus de tenus de camouflage grises et teintées de brun comme celles des Américains, remontées de guêtres leur donnant fière allure. C'est le vingtième pour une sécurité probante. Un arrêt qui nous permet de se dégourdir les jambes après dix heures de secousses. Ma démarche est bancale, elle emprunte les anciennes coulisses de l'histoire. Un contact avec l'extraordinaire qui produit des vibrations merveilleuses. Le paysage oriental tranche avec ses tonalités, ses mouvements, son paysage humain et désertique. Une couleur locale qui vire son exotisme à la nostalgie des anciens écrivains anglo-saxons. Adieu les dunes de Timimoune qui, accroupies en volupté, interpellent une esthétique digne des tableaux de maîtres. Le désert fascine toujours, celui du Sinaï demeure mystérieux et sacré. La médiocrité l'accompagne d'un microcosme d'un film de série B, le curseur est à son octave la plus basse. Près de la côte d'Aqaba, la bise transmet le feulement d'une fraîcheur revigorante. Pétrie de référence historique, ma vision est détournée par les grosses pancartes de publicité du prochain vote présidentiel de Sissi. Sûre que, pour le moment, le Sinaï jouit d'une sécurité relative mais aussi promet un développement économique en partenariat avec l'Arabie saoudite. Un désert à l'instar du Néguev très productif, le Sinaï serait une terre d'avenir comme le prédit Moïse dans ses Tables. |
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