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Le problème n'est
pas seulement que la Russie et la Chine aient jusque là tout au plus bloqué des
résolutions du Conseil de sécurité sur une intervention militaire sur la Syrie,
le maillon faible de l'axe Iran-(Irak)-Syrie-Hezbollah, et contre l'Iran, ont
laissé passer les sanctions économiques qui somme toute n'ont affecté l'Iran
que sur le plan économique. Il est évident que si la Chine et la Russie avaient
la conviction que leurs intérêts stratégiques en Iran étaient menacés, elles
auraient opposés leur droit de veto aux sanctions économiques internationales.
Ce qui veut dire que les dirigeants iraniens étaient très conscients du rapport
des forces, comme d'ailleurs la Russie, la Chine et l'Occident.
Dès lors que les responsables iraniens n'étaient pas " fous " vu la disproportion manifeste des potentiels de guerre qui existe entre leurs forces et l'arsenal américain, force de dire qu'ils ont des " cartes maîtresses ", ou en d'autres termes, une " puissance de dissuasion " qui n'a pas été mise sur la " table " mais sous-entendue, ce qui explique pourquoi les puissances occidentales dont les États-Unis ont attendu si longtemps pour déclencher une guerre contre l'Iran. Il est évident que ces " cartes maîtresses " reposent sur le problème même qui oppose l'Occident à l'Iran, c'est-à-dire le " problème nucléaire ". Et encore aujourd'hui, en ce début de février 2013, le Guide suprême iranien, l'ayatollah Ali Khamenei, réitère la position de l'Iran sur le nucléaire. Il a opposé une fin de non-recevoir à l'offre américaine de négociations directes dans le dossier nucléaire, dénonçant la stratégie de Washington qui mêle sanctions et offre de dialogue. Il l'a clairement exprimé. " Cette déclaration du numéro un iranien intervient au lendemain de la confirmation par les États-Unis de nouvelles sanctions économiques contre l'Iran, quelques jours seulement après une " offre sérieuse " du vice-président américain Joe Biden à Téhéran sur des négociations directes dans le cadre du groupe 5+1 (États-Unis, France, Grande-Bretagne, Russie, Chine et Allemagne). " Vous pointez une arme sur l'Iran en disant +négociez ou nous tirons+. Mais faire pression et négocier n'est pas cohérent et la nation ne se laissera pas intimider ", a lancé à l'adresse des États-Unis le Guide, lors d'un discours à Téhéran dont le texte a été publié sur son site internet (www.leader.ir). " L'Iran n'acceptera pas de négocier avec celui qui nous menace par des pressions ", a-t-il affirmé, estimant qu'une " offre de dialogue n'a de sens que quand l'autre partie montre de la bonne volonté. " Ceci en dit long non seulement sur le bras de fer Iran-Occident mais aussi sur le rapport des forces. En d'autres termes Ali Khamenei " pense très bien la partie de guerre qui s'annonce avec les États-Unis au cas où elle aura lieu ". Ceci étant, qu'en est-il réellement des " cartes maîtresses iraniennes " ? Il est évident que le problème qui se pose n'est pas que la guerre se déclenche en 2013, ou à une date ultérieure (2014 ou 2015?), mais qu'il réside essentiellement dans l'" évolution de la guerre " ? C'est-à-dire qui aura le dernier mot, les États-Unis ou l'Iran ? Probablement la guerre va se jouer dans les premières semaines, en cas de déclenchement d'un conflit armé, et ce quel que soit le prétexte invoqué. Il faut encore rappeler que l'Iran n'a agressé aucun pays, les seuls griefs que l'Occident lui reproche est d'avoir soutenu un pays allié (Syrie) comme le font d'ailleurs les Américains avec la Corée du Sud, le Japon, Taiwan?, ou de poursuivre un programme nucléaire que l'Iran déclare pacifique alors que l'Occident dément. L'Iran poursuit un programme militaire. Donc il n'y a pas de grief militaire proprement dit comme fut l'invasion du Koweït par l'Irak. La guerre déclenchée, il est clair que l'Iran, malgré sa riposte sur des cibles ennemies, ne peut attendre que le rouleau-compresseur de la puissance de feu américaine déferlée sur ses installations militaires et civiles les réduise à néant. L'Iran est contre les armes nucléaires, qu'il a maintes fois dénoncées comme contraire aux valeurs de l'Islam. Ce qui est vrai, la traduction même du mot de l'Islam est " Paix ", mais " Paix " ne signifie pas pour autant " se laisser détruire ". La seule solution qui se pose à l'Iran est alors d'équilibrer ses " moyens de puissance " avec ceux des États-Unis. Ce qui est licite dans l'Islam, et ce quel que soit le moyen utilisé. Bien qu'il ne vise dans le programme de l'enrichissement nucléaire que des applications civiles, on peut penser que l'Iran, face aux menaces persistantes de l'Occident, a été poussé à se prémunir en se lançant dans un programme nucléaire secret qui vise des applications militaires. D'autant plus que " Installer des centrales nucléaires en produisant le combustible nécessaire, ce que l'Iran qualifie comme un droit naturel et inaliénable du peuple iranien ", est, dans un sens, légitime. " Pourquoi de nombreux pays en dehors des cinq grandes puissances du Conseil de sécurité ont le droit d'enrichir l'uranium pour leurs centrales ou de procéder à des applications à caractère pacifique et non l'Iran ou à tout autre pays musulman. Ou parce qu'ils sont musulmans ? " Le Pakistan est bien une puissance nucléaire. D'autant plus que l'Iran a signé très tôt le TNP (Traité de non-prolifération nucléaire). Ainsi, par ce programme secret, l'Iran, en tant que " puissance non-nucléaire ", en cas d'agression par une " grande puissance nucléaire ", peut se transformer rapidement en " puissance nucléaire déclarée " pour équilibrer le rapport des forces. Ce cas est intéressant à formuler puisque Israël lui-même est aujourd'hui qualifié de " puissance nucléaire non déclarée ". C'est-à-dire qu'il a un arsenal de missiles à tête nucléaire, et, en cas de guerre globale avec le monde arabo-musulman, Israël sera prêt à lancé le feu nucléaire sur des villes et regroupements importants militaires des pays arabo-musulmans. Ainsi Israël s'immunise, en cas de perte du parapluie militaire américain, d'une guerre globale avec le monde musulman. L'arsenal nucléaire israélien joue un rôle de " dissuasion à la guerre ". Précisément, l'Iran, de la même façon, raisonne. C'est ainsi que, " acculé par la guerre déclenchée par l'Occident ", il procèdera dans les premières semaines qui suivent le conflit à des " essais nucléaires (probablement) souterrains en cascades " comme un " avertissement " à la superpuissance. Il est évident que l'Iran va alors se dévoiler comme une " puissance nucléaire attestée ". On peut même dire que ses Shahabs 3B et Shahabs 2, de portée respectivement 2000 et 500 km, armés d'ogives nucléaires, sont déjà pointés sur Tel-Aviv, Ryad, Doha, Koweït-city, et sur le Bahreïn où se trouvent le commandement américain, position avancée du CENTCOM en Floride, et bien d'autres ville-cibles. On comprend d'ailleurs pourquoi le président Bush mettait l'accent dans l'implantation d'un dispositif NMD (projet de défense missiles-anti-missiles) en Pologne, en Tchéquie... contre une attaque nucléaire par l'Iran. Quelle sera alors la réaction des États-Unis face à la nouvelle situation ? Ne penseront-ils pas que les Iraniens " bluffent ". Et qu'ils ne sont encore qu'au stade des premiers essais nucléaires. C'est possible, et les bombardements américains vont probablement continuer. Mais si Moscou et Pékin en tant qu'alliés à l'Iran informent Washington du changement de l'équilibre des forces au Moyen-Orient et surtout que la région du Proche et du Moyen-Orient court un réel danger de guerre nucléaire ? Ce n'est plus comme les analyses le font penser, un embrasement qui pourrait durer des mois voire des années, mais une apocalypse qui surgira en quelques jours. Ce qui est complètement différent. Les responsables iraniens qui voient leur pays attaqué, agressé par les Américains et leurs alliés qui procèdent à des destructions massives de leurs infrastructures et entraînant des milliers de morts vu la disproportion des forces en faveur des forces adverses, n'auront alors plus d'alternative. Mentionnons la déclaration de l'ex-président d'Iran, Hachemi Rafsandjani, le 14 décembre 2001, lors d'un sermon à l'université de Téhéran : " L'emploi d'une seule arme nucléaire contre Israël détruirait tout, mais, contre le monde islamique, ne causerait que des dommages limités ". Ce qui suggère que l'emploi de l'arme nucléaire pourrait être concevable contre Israël en tant que puissance ennemie. Les États-Unis continueront-ils leurs bombardements massifs sur l'Iran encore longtemps, en se laissant espérer que les missiles patriots protègeraient Tel-Aviv, Ryad, Doha? de l'apocalypse venant des Shahabs 3B et E, vecteurs porteurs d'ogives nucléaires ? Vont-ils jouer à " la roulette russe sur l'existence des autres peuples " ? Les responsables iraniens ont déjà assimilé le " prix qu'ils auront à payer " s'ils déclenchent une guerre nucléaire dans la région, ce sera la " destruction de Téhéran, d'Ispahan, et d'autres villes iraniennes ". Adeptes du martyr et profonds croyants, les Iraniens estimeront que ce sera un sacrifice venant de Dieu. Qu'en sera-t-il des villes israéliennes, Tel-Aviv, Haïfa, dont 40% de la population d'Israël sont concentrés dans ces villes ? La panique, l'exode. Qu'en sera-t-il des populations arabes à Ryad, la capitale saoudienne, à Doha, la capitale du Qatar, et ailleurs ? Une panique générale sera étendue à l'ensemble de ces pays et du monde ! Le monde entier sera tenu en haleine. Les médias occidentaux qui appelaient dans un certain sens à la guerre se verraient à changer leur " une " en appelant à la fin immédiate des hostilités. Le peuple américain acceptera-il l'" aventurisme " de l'establishment américain ? Des millions de morts en Israël, en Arabie Saoudite, au Qatar, en Iran ? Une disparition totale des villes-capitales et des villes de provinces comme si elles n'avaient jamais existé. Cette " guerre apocalyptique extrêmement tendue " des premières semaines de guerre car il y va de plusieurs millions de vies humaines vient à point nommé confirmer les rumeurs de grands généraux de l'armée américaine, comme l'amiral William Fallon, alors chef du CENTCOM (2007-2008), qui a démissionné parce qu'il a refusé de cautionner la politique de Bush d'étendre la guerre à l'Iran, de l'amiral Michael Mullen, ex-chef d'état-major interarmées des États-Unis (le plus haut gradé de l'armée US à l'époque) qui est parti en retraite et qui, à maintes reprises, a affirmé qu'une guerre contre l'Iran, c'est l' " inconnu ", pour ainsi dire le " noir ". En 2010, il s'est opposé à un raid israélien sur les installations nucléaires iraniennes. Et d'autres prestigieux généraux parmi lesquels le général Stanley A. McChrystal (il a quitté l'armée et travaille comme civil dans la firme Siemens) qui a compris en Afghanistan que ce n'est pas la guerre qui apportera une solution mais en respectant les peuples, en tentant de convaincre les peuples que l'Amérique est là pour les aider. Ce qui n'et pas le cas malheureusement. L'Amérique poursuit une stratégie de domination et non pour aider les peuples. Mais cette domination risque de déboucher sur plusieurs Hiroshima, plusieurs Nakasaki. Il est évident que ces chefs militaires américains n'auraient pas été réticents pour porter le feu contre l'Iran s'ils n'avaient pas entrevu les risques qu'aurait entraînés un tel conflit. Dans toutes les armées du monde, ce sont toujours les chefs militaires qui apprécient les théâtres de guerre et non les politiques. C'est ainsi que la pression des politiques l'ayant emporté malgré l'éclairage des chefs militaires, une guerre est déclenchée contre l'Iran et le " monde entier aura tremblé ". C'est ce qu'il faut attendre lorsque les " politiques se mêlent de la guerre ". Quelle serait la réaction de la Russie et de la Chine si les " politiques américains " seraient poussés à provoquer l'" apocalypse " ? Une alerte mondiale ou pire, des " menaces " viendraient s'ajoutaient à d'autres menaces ? Il est évident que le monde entier, surtout Israël, l'Arabie Saoudite et le Qatar qui attendront dans la peur l'issue de la guerre. Ils espéreront que l'Amérique arrête la guerre contre l'Iran. Et surtout que gagneraient-ils les États-Unis dans une apocalypse au Proche et au Moyen-Orient ? Une partie de leurs alliés qui disparaîtraient de la terre ! Et le monde ne serait plus comme avant. Précisément, non seulement le Congrès américain s'interposera, mais le lobby juif qui a un très fort ascendant sur le pouvoir américain, dont l'American Israël Public Affairs Comittee (AIPAC), la puissante Republican Jewish Coalition et son équivalent démocrate, le NJDC), les puissants banquiers de Wall Street et enfin Benyamin Netanyahu qui aura perdu de sa superbe, vont de tout leur poids intercéder pour Israël, amenant les États-Unis à mettre fin à la guerre. Ce sera désormais un nouveau monde qui apparaîtra après la guerre Iran-Occident. Ce qu'il faut dire sur cette donne que, depuis l'avènement de l'arme nucléaire en 1945, toutes les puissances qui sont devenues des " puissances nucléaires " l'ont été par la force des choses, à commencer par l'URSS et la Chine. Ces pays cherchaient à se faire contrepoids mutuellement. Donc l'URSS et la Chine ont été poussées à l'être, il y allait de leur survie, de leur poids dans le monde. De même pour l'Angleterre et la France. Après la défaite cinglante à Suez en 1956 (ultimatum de l'URSS), et leur retrait d'Egypte, ces deux pays, ayant perdu la face devant l'Union soviétique, sont devenus ensuite des puissances nucléaires. L'Inde face à la Chine aussi est devenue une puissance nucléaire, en 1998. Quelques jours après, c'est le Pakistan face à l'Inde. Là encore, la menace a prévalu. Israël et son complexe de Dimona, même principe, face au monde arabo-musulman. La Corée du Nord, en 2006, face à la Corée du Sud et son grand allié, les États-Unis. Aujourd'hui encore, l'Iran, une puissance nucléaire non déclarée face à Israël et les États-Unis. Il deviendra probablement demain une " puissance nucléaire déclarée " par la force des choses. L'Iran a déjà annoncé la maîtrise complète du cycle nucléaire. Tous ces pays ont été poussés pour une raison ou une autre, à s'armer de moyens nucléaires. L'Iran ne fera pas exception tant que l'embargo et les menaces de bombardements et d'invasion pèsent sur lui. Les mêmes causes produiront les mêmes effets. Si la Corée du nord est aujourd'hui une puissance nucléaire, cela ne veut pas dire que la Corée du Sud ne peut pas l'être. Et le Japon non plus. Simplement, ces pays n'y sont pas poussés, estimant l' " arme nucléaire non-utile " pour vivre pacifiquement avec leurs voisins. Malgré les litiges qui se posent pour le Japon et la Corée du Sud dans leurs aires respectives, ces deux pays ne sont pas tentés de passer ce seuil. Donc, chaque pays a une histoire et l'armement nucléaire est lié à cette histoire. C'est dans cette vision de l'Histoire que cette étude se conclut en espérant qu'elle apporte un éclairage, une base de réflexion sur les conséquences géostratégiques et politiques que peuvent impliquer une guerre contre l'Iran. Une guerre asymétrique, conventionnelle ou nucléaire n'est pas une fatalité, elle n'est que ce qu'en font les hommes, et surtout les puissances. Un renouveau pointera peut-être pour les peuples des trois religions monothéistes qui comprendront que l'arme nucléaire, par la crainte qu'elle suscite, doit au contraire " rassembler " au lieu de " diviser ". Que les richesses pétrolières du monde arabo-musulman et technologiques du monde chrétien et juif sont au contraire " complémentaires ". Telle sera peut-être la finalité dans les frictions qui opposent aujourd'hui l'Occident au monde musulman. * Officier de l'ANP en retraite (Forces Navales) Auteur et chercheur spécialisé en Economie mondiale, Relations internationales et Prospective. Notes : * " Les fondamentaux économiques de l'année 2013 ", par Nouriel Roubini. Project Syndicate " PROSPECTIVE : Pourquoi l'Occident et les pays pétroliers n'échapperont pas à une crise économique majeure ? ", par Medjdoub Hamed. www.sens-du-monde.com |
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