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La langue vivante, organe
d'expression méthodique et de compréhension cognitive, est fondamentalement
déterminée par deux vecteurs essentiels et complémentaires : la forme et le
fond. Ces deux substrats sont en effet à la base de toute langue élaborée et
structurée sémantiquement et grammaticalement, en situation de focaliser le
raisonnement logique. La complexité à rendre compte des données et des
expériences de la vie implique et nécessite en permanence des efforts
d'ingéniosité intellectuelle et d'imagination féconde. Les impératifs de la vie
quotidienne éclairent et permettent de comprendre l'existence effective d'une
pluralité de raisonnements logiques parfois complexes et enchevêtrés, où les
propositions tantôt majeures tantôt mineures sont implicitement ou
explicitement éludées. Ce pluralisme imposé par la vie courante se résume
fondamentalement à trois modèles essentiels de raisonnement logique :
? Le raisonnement en extension ou syllogisme ; ? Le raisonnement en compréhension ou non syllogistique ; ? Le raisonnement non syllogistique de synthèse, ou en conséquence. Il est nécessaire de souligner que le raisonnement logique relève d'un processus évolutif historique, c'est un progrès de l'esprit humain à l'intérieur d'une série successive dans le temps : animiste, magique, syncrétique, et une diversité de discours primitifs prélogiques. Cette évolution correspond à une progressive adaptation aux exigences de la pensée rationnelle. I - La forme: un support de raisonnement logique en extension La logique en extension à l'œuvre dans le syllogisme classique aristotélicien est un raisonnement globalisant qui rassemble sans pénétrer, c'est-à-dire que les éléments hétérogènes ne sont pas distingués en tant que tels, du fait d'une perception totalisante des objets ou des sujets. C'est un mode de pensée qui s'adresse à tous les sujets ou objets pouvant se grouper sous le même terme, sans en pénétrer leur essence, leur propriété ou qualité. Exemple : le terme animal peut concerner un animal sauvage ou domestique, un chat, un chien, un loup, etc. Le raisonnement en extension ou syllogisme est une déduction analytique démonstrative qui donne la primauté à la forme au détriment du fond. Cette déduction intellectuelle se présente et est configurée par un enchaînement séquentiel d'idées et de propositions, à caractère restrictif, éludant toute discussion contradictoire ou mise en doute. L'absence de contrariété du syllogisme classique régi par la logique en extension est un facteur simpliste et simplificateur déterminant son caractère formel, qui confère en même temps simplicité de sens, c'est-à-dire clarté de signification permettant une assimilation sans difficulté. Ces éléments sémantiques favorisent la mémorisation intellectuelle, la formation intuitive des sensations, des perceptions/aperceptions et des idées, et contribuent à l'intégration cohérente des parties, des propositions, et des éléments constitutifs de l'ensemble. Le raisonnement logique en extension est un enchaînement formel induisant une intime interpénétration des idées et des propositions, l'assimilant à un véritable art du point de vue du lien logique. C'est à ce titre que le syllogisme classique est qualifié justement comme «l'art de raisonner de manière rigoureusement logique et cohérente». Cependant comme toute chose, le mode logique de raisonnement formel reste imparfait et ses points faibles ne doivent pas être ignorés. Ainsi il est péjorativement considéré comme un raisonnement de piétinement, stérile, sans rapport au réel. Il s'avère par conséquent nécessaire d'examiner de près la formule demeurée célèbre d'Aristote, qui a le grand mérite d'avoir été dès l'antiquité le premier philosophe à établir les règles complètes (et innées pour ainsi dire) du raisonnement logique. Ces règles constituent à ce jour un travail inégalé sur le plan de la réflexion axiomatique et de la détermination des rapports logiques, séquentiellement et grammaticalement. Cette formule fameuse en question est « tous les hommes sont mortels or Socrate est un homme donc Socrate est mortel ». Cette expression est très significative, elle montre que le raisonnement méthodique basé sur le primat de la forme sur le fond, tel que le syllogisme classique aristotélicien, est une déduction analytique formelle, de sorte que deux propositions étant posées (l'une majeure, l'autre mineure) on en tire une troisième (conclusion) qui est logiquement impliquée par les deux premières. On voit clairement que la prémisse majeure conditionne la mineure, laquelle détermine (nécessairement) la conclusion. Les trois propositions sont en étroite liaison, l'une dépendante de l'autre, dans un enchaînement rigoureux et systématique qui élude et fait abstraction des règles de la dialectique et de la rhétorique. La conclusion est une simple répétition sans valeur ajoutée démonstrative. La proposition mineure (en l'absence des règles de la dialectique) n'est pas en mesure d'être le lieu de rencontre et de dépassement de l'opposition entre la thèse et l'antithèse dans un effort d'intégration des contraires, sur un plan logique supérieur ou ils se rejoignent sans se confondre dans l'unité riche et féconde de la synthèse. L'opposition de la thèse et de l'antithèse est une démarche dialectique nécessitant l'investigation et la connaissance du fond, du contenu. Cette démarche implique d'aller au particulier, au détail, pour comprendre et expliquer le fond des choses et des sujets, de manière approfondie et précise et ne pas se limiter au global, au général. Ainsi on se rend compte de l'évidente indissociabilité et de la complémentarité de la forme et du fond, pour permettre une connaissance réelle, approfondie et fondamentale des sujets, objets et phénomènes, dans le but de construire et faire vivre une langue vivante en adéquation avec son temps. La thèse et l'antithèse n'étant pas des notions hostiles et antagoniques, dans une lutte destructrice, mais des contraires complémentaires, une ossature constituée en osmose, en influence mutuelle, dans une interpénétration profonde et intime, fécondante et enrichissante. II - Le fond: un processus et une méthode de raisonnement en compréhension synthétisée Nous avons expressément indiqué en introduction à cet exposé que le raisonnement logique pluriel est fondamentalement composé de trois modes, en précisant qu'un seul est syllogistique (logique en extension) et les deux autres non syllogistiques (à caractère dialectique). Cette similitude d'identité entre ces deux derniers modes non syllogistiques explique pourquoi pour les besoins d'analyse de notre seconde partie, nous les avons réunis ensemble sous le terme de «raisonnement en compréhension synthétisée». Les modes en compréhension et de synthèse, étant deux logiques identiques et homogènes, l'hétérogénéité se situe entre le raisonnement syllogistique (formel) et non-syllogistique (dialectique) deux concepts à signification différente. Il s'avère dès lors que le raisonnement logique pluriel se résume à une différence pertinente entre logique syllogistique formelle (en extension) et logique non syllogistique en compréhension (dialectique). Sur le plan didactique et grammatical apparaît une autre séparation dans le raisonnement logique pluriel. La logique en extension est en effet un raisonnement «media», c'est-à-dire que la prémisse mineure est un intermédiaire indispensable à la constitution du raisonnement. L'analyse de la prémisse majeure s'opère en effet à partir du point de vue de la proposition mineure, qui transmet ainsi la lumière de la certitude à la conclusion. Le raisonnement syllogistique est une médiation dynamique toujours en action, comprenant donc trois termes : la prémisse majeure (postulat), la prémisse mineure (moyen-terme) et la conclusion (proposition finale). À l'opposé de la logique en extension, qui est un raisonnement médiat syllogistique, celle en compréhension synthétisée est un raisonnement « immédiat » qui tire une proposition directement d'une proposition posée sans utiliser de moyen-terme, c'est-à-dire sans la prémisse mineure. Le raisonnement immédiat peut aussi se déduire et se construire grâce à une analyse successive des termes essentiels. Ainsi le raisonnement immédiat non syllogistique est un processus déductif d'analyse des propositions et des termes essentiels, de définition et d'explication individuelles des concepts, permettant une compréhension en profondeur des données matérielles ou immatérielles, aboutissant à une conclusion démonstrative synoptique et instructive. Il crée et développe un automatisme de réflexion caractérisé par la primauté du fond sur la forme, l'absence du terme médiat (prémisse mineure) étant suppléée par une analyse détaillée et préalable des concepts constitutifs du raisonnement, qui permet de saisir et comprendre l'essence, la nature et la propriété de la chose ou de l'espèce. La description et la définition préalable des éléments constitutifs du raisonnement permet de comprendre le fond des choses, d'en saisir l'idée fondamentale, et ainsi éviter à l'esprit d'être la proie à l'incertitude, à l'équivoque, à l'incohérence et la perte de rationalité. Le raisonnement de Synthèse prolonge la déduction en compréhension en recherchant les conséquences et les effets des faits et phénomènes. Le propre de la pensée synthétique est de construire les conséquences, résultantes des faits apparents ou abstraits, en définir les causes, leurs origines, les responsabilités, de découvrir et d'établir les procédés, modalités et formules de solution des problèmes et questions se posant au monde. Par ailleurs, la diversité des modes de raisonnement logique et leur pluralité n'empêche pas cependant qu'ils ont tous un point fondamental commun : discursivement ils se traduisent par un enchaînement rigoureux, où seul règne la nécessité rationnelle, la raison nécessaire et suffisante qui exclut toute méthode auxiliaire. Ainsi l'ordre déductif est une suite logique, réglée et cohérente de jugements et d'idées dans laquelle l'esprit ne cherche à faire un pas que s'il est autorisé par une nécessité impliquée par la raison. C'est une nécessité logique, rationnelle qui s'impose à la conscience individuelle en tant que vérité générale ne donnant pas prise au doute et obligeant à la réflexion critique. Ce lien logique rationnel est universel, il s'impose aussi bien à l'univers physique qu'à l'univers humain. Il y a en fait parenté et concordance entre nécessité logique, nécessité physique et nécessité mathématique. C'est pourquoi le raisonnement fait indifféremment appel à ces trois nécessités incontournables, en fonction des besoins de la démonstration. Il s'ensuit que selon le niveau et le degré d'évolution sur un plan général, de la pensée scientifique, ainsi que par rapport au degré de maîtrise de la connaissance individuelle et d'érudition de chacun, le raisonnement logique se ramène en fin de compte et suivant les cas de situation, à des rapports d'extension, de compréhension ou de synthèse. Le caractère universel du lien logique s'imposant au monde physique et au monde humain comme une complémentarité Vitale, explique l'indissociabilité et la complémentarité nécessaire entre la forme et le fond. Cette complémentarité indispensable entre les deux vecteurs dynamiques du raisonnement logique focalisé par la langue vivante se manifeste en effet très naturellement à deux niveaux : ? Dès l'achèvement et la transcription du raisonnement, qui de manière claire et évidente semble (apparait) une suite réglée de jugements en compréhension synthétique, inhérente à la connaissance et l'explication du fond ; ? Au moment de son élaboration, le raisonnement logique forme une cascade de syllogismes bien réglés. En cours de construction en effet le raisonnement logique progresse par une succession de propositions qui sont les conclusions d'une séquence de syllogismes, sous la forme d'un enchaînement cohérent rigoureusement ordonné. En conclusion, la forme et le fond sont deux mécanismes dynamiques différents de nature, mais culturellement complémentaires indispensables à l'épanouissement de la langue vivante, d'où leur indissociabilité. Ce sont deux contraires en opposition fructueuse génératrice de valeur ajoutée, dont la rencontre définit un antagonisme non absolu à caractère fécond, créateur de richesse. Il s'agit d'une confrontation indispensable pour comprendre et rendre compte de la complexité des données et des expériences de la vie. Ce sont deux instruments didactiques et pédagogiques dont l'intéraction réciproque permet d'organiser et expliquer en profondeur l'ordre des choses, de préciser la nature, la propriété, la qualité ou les facultés des êtres et des éléments de l'univers. L'interpénétration mutuelle de ces deux vecteurs structure la conscience individuelle et est à la base du développement de la connaissance humaine. Cette complémentarité et cette convergence logique vertueuse permet à l'esprit de s'élever pour améliorer et satisfaire dialectiquement son intelligence du monde. La rencontre de la forme et du fond est une conjugaison fertile, une synthèse supérieure générative de la thèse didactique de défense d'une opinion scientifique, philosophique, politique, etc. ou pour l'obtention d'un titre doctoral, loin d'être par conséquent susceptible d'une difficulté logique sans issue, et donc elle est antinomique d'une aporie. |
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