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Les smartphones et l'errance des écrits

par Abdou BENABBOU

Le Centre de prévention et de lutte contre la criminalité informatique est semble-t-il submergé par des enquêtes à traiter. La plupart n'ont pas trait à de simples indélicatesses ni à des impolitesses diffamatoires. Les plus graves ont fini devant les tribunaux. Près de 5.000 dossiers ont été ouverts au courant de l'année 2023. Il est fort à parier que l'année en cours verra le chiffre doubler.

Au phénomène de la cybercriminalité aucun pays n'échappe et les Algériens ont tout l'air d'avoir été happés par la nouvelle culture internaute qui, tout en apportant des aises et des bienfaits, distille aussi de nombreuses monstruosités. La cime de l'insanité est certainement dans la gravissime tare qui veut qu'une majorité d'internautes s'adonne à un strip-tease mental pour livrer leurs faces et leurs intimes pensées. Tout est prétexte à des commentaires sans retenue sans doute pour juguler d'immenses solitudes humaines en se laissant piéger par l'inconsistance des débats virtuels.

Rien ne manque, des condoléances aériennes adressées à des inconnus aux insultes grossières, le tout faisant figure de tags sur un mur informatique pour se laisser kidnapper par de vagues chants de sirènes. L'errance des écrits sur les smartphones devient curieusement provocation contre soi-même pour marquer et se justifier une présence. A contrario, l'affirmation de soi pour briser la solitude ne fait que la renforcer pour confirmer qu'elle est le grand mal du siècle.

Il y a là matière à réflexion pour tenter de comprendre pourquoi des drogués des réseaux trouveraient un tordu plaisir à afficher leurs âmes et leurs visages à tous les vents. Le besoin de s'affirmer n'est autre que la recherche d'une contenance. Le mal est autrement plus important pour les enfants et les adolescents pris en otage définitivement extirpés de l'éducation parentale et livrés au levain empoisonné des mobiles et des tablettes.