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Le duel des chiffres

par Abdelkrim Zerzouri

Ce n'est pas pour bientôt la fin des désaccords entre l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) et l'Agence Internationale de l'Énergie (AIE). L'avenir du pétrole et les prévisions concernant la demande sur l'or noir à court, moyen et long termes, ainsi que les besoins en investissement dans le secteur pour garantir les approvisionnements et les perspectives de la croissance économique mondiale, constituent les sujets des désaccords ou des visions différentes entre les deux parties.

Est-ce parce que chacun appartient à un pôle particulier, qui ne voit pas l'évolution de l'économie mondiale, d'une manière générale, sous le même angle que l'autre ?

En tout cas, c'est le duel des chiffres, à chaque fois qu'on parle statistiques et prévisions, avec des visions qui s'entrechoquent pour donner lieu à des passes d'armes dont le monde est témoin, ces dernières années.

Plus près de nous, c'est l'évolution de la demande au second semestre de l'année 2023 et en 2024 qui a fait remonter à la surface des visions et des estimations différentes, pour ne pas dire totalement opposées l'une à l'autre ; l'Opep prévoyant une légère hausse de la croissance de la demande sur le pétrole, avec une demande de 2,25 millions de barils par jour, et l'AIE misant sur un recul de cette même demande, placée à une hauteur de 1,1 million de barils par jour, soit la moitié de ce que prévoit l'Opep.

Mardi, c'est le Secrétaire général de l'Opep, Haitham al Ghais, qui a déclaré, en marge du Sommet mondial des gouvernements, un évènement annuel organisé à Dubaï, aux Émirats arabes unis, que le monde aura toujours besoin de pétrole, prévoyant que la demande mondiale de pétrole atteindra 116 millions de barils/jour, d'ici 2045. Alors que l'AIE prévoit un déclin de la demande sur le long terme, en raison du recours aux énergies renouvelables, notamment.

Dans ce contexte, certains observateurs voient en la décision de l'Arabie saoudite de suspendre ses projets d'expansion de ses capacités, en matière de production de pétrole, un indice d'une baisse de la demande de brut, comme le voit également l'AIE, mais le SG de l'Opep a tenu à mettre les points sur les «i» à ce propos, déclarant qu'il tient à préciser qu'il ne peut pas commenter une décision saoudienne souveraine, «mais cela ne doit, en aucun cas, être interprété comme une projection de la baisse de la demande », a-t-il déclaré.

Notant dans ce sillage que les baisses de quotas de production, sur la base du volontariat, mises en œuvre par certains pays de l'Opep+, jugées comme l'un des moyens pour assurer la stabilité du marché, montre la flexibilité de l'Organisation. Non sans lancer un message clair à l'AIE, soutenant qu'il faudrait attendre septembre ou octobre, date à laquelle l'Opep devrait publier ses nouvelles perspectives, pour déterminer un éventuel changement dans les données. « Mais nous pensons que nos chiffres restent valables et sont très solides », a-t-il déclaré sur un ton plein d'assurance. L'avenir restera témoin.