Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

Malgré la décision de la CIJ: L'armée sioniste poursuit ses massacres

par Mohamed Mehdi

Vendredi, le jour même où la Cour internationale de justice (CIJ) a prononcé son ordonnance suite à la plainte pour crimes de génocide déposée par l'Afrique du Sud contre Israël, l'armée de l'entité sioniste a commis 18 massacres à Ghaza, faisant 147 martyrs et 310 blessés. Ce bilan quotidien, annoncé samedi par le ministère de la Santé dans la bande assiégée, porte le nombre de martyrs de l'agression israélienne depuis le 7 octobre dernier à 26.257 et celui des blessés à 64.797.

Hier, samedi, 113e jour de l'agression contre Ghaza, l'occupation a continué ses bombardements dans plusieurs régions, en particulier à Khan Younes au sud de la bande où le bilan meurtrier s'est élevé, à la mi-journée seulement, à 28 martyrs et plusieurs autres blessés transférés à l'hôpital Nasser. Un correspondant d'Al Jazeera a rapporté que Khan Younes était soumise à « d'intenses bombardements aériens et d'artillerie », au moment où la résistance palestinienne s'engageait dans des combats violents face aux forces d'occupation qui tentaient d'étendre leurs opérations dans cette ville.

Un correspondant d'Al Jazeera a également rapporté hier que des soldats sionistes ont ciblé une équipe de la Société palestinienne de télécommunications à Ghaza, qui effectuait des opérations de maintenance du réseau, blessant plusieurs malgré une coordination préalable. Depuis le début de l'agression, Ghaza a connu 10 pannes de communications et de services de l'Internet. La plus récente a duré plus d'une semaine. La chaîne qatarie a également fait état hier de violents affrontements entre la résistance palestinienne et les forces d'occupation israéliennes au nord-ouest de la ville de Ghaza. Le journaliste d'Al Jazeera a rapporté que ces combats étaient accompagnés de bombardements d'artillerie israélienne sur la zone. Samedi également, un bombardement israélien a visé des citoyens près du rond-point du Koweït du boulevard Salah Eddine, dans la ville de Ghaza, là où les forces d'occupation ont commis, il y a trois jours, un massacre ayant fait 20 martyrs parmi les Palestiniens qui attendaient les camions de l'aide humanitaire.

A Rafah, un bombardement israélien sur une maison du quartier d'El Jeneina, au sud de la bande, a fait 3 martyrs et des blessés. Par ailleurs, plus de 10 Palestiniens sont tombés en martyrs dans un bombardement qui a visé une maison de la famille Fayyad, au sud-ouest de la ville de Deir al-Balah, dans le centre de la bande de Ghaza. Au moment où l'aviation et l'artillerie israéliennes continuent de cibler différentes parties de Khan Younes, les troupes au sol de l'armée sioniste imposent un siège total de l'hôpital al-Amal dans cette localité, siège du Croissent-Rouge palestinien, qui dure depuis une semaine.

Hier, le Croissant-Rouge palestinien a réitéré sa condamnation du siège en cours et le ciblage de son siège à l'hôpital Al-Amal. « Pendant six jours consécutifs, les forces israéliennes ont bombardé les environs de l'hôpital, mettant en péril la sécurité du personnel médical, des blessés, des patients et d'environ 7.000 personnes déplacées qui ont cherché refuge dans cet hôpital pour échapper aux bombardements », a déclaré le Croissant-Rouge palestinien.

« Le couvre-feu et la poursuite du blocus dans les environs de l'hôpital entravent la circulation des ambulances et des équipes médicales d'urgence dans la ville, les empêchant d'atteindre les blessés, de leur prodiguer les premiers soins et de les transporter à l'hôpital pour recevoir les soins nécessaires », ajoute le communiqué.

Conseil de sécurité : l'Algérie appelle à une réunion urgente

Le Conseil de sécurité de l'ONU tiendra une réunion d'urgence mercredi prochain après la décision de la Cour internationale de justice (CIJ) sur Ghaza, a rapporté hier Al Jazeera qui cite l'Agence France-Presse. Al Jazeera a précisé, citant des sources diplomatiques, que l'Algérie a demandé la tenue d'une session du Conseil de sécurité de l'ONU mercredi prochain pour discuter de la situation à Ghaza, dans le contexte de la récente ordonnance de la CIJ.

Vendredi un communiqué du ministère des Affaires étrangères et de la Communauté nationale à l'étranger a déclaré que « l'Algérie a pris connaissance avec intérêt du prononcé de la Cour internationale de justice à propos de la requête déposée par l'Afrique du Sud en relation avec la commission d'un crime de génocide à Ghaza », estimant que cette décision « porte témoignage de la justesse de l'initiative du président de la République, Abdelmadjid Tebboune, qui a été le tout premier chef d'Etat à appeler à une saisine massive des instances juridictionnelles internationales de la multiplicité des crimes réprimés par le Droit international humanitaire perpétrés par les forces d'occupation israéliennes à Ghaza ». Par ailleurs, « l'Algérie considère que le prononcé de la Cour internationale de justice annonce le début de la fin de l'ère de l'impunité dont l'occupation israélienne a longtemps tiré bénéfice pour donner libre cours à son oppression du peuple palestinien et à la répression de l'ensemble de ses droits légitimes », ajoute le communiqué du MAE.

La même source a rappelé également que « la Mission permanente d'Algérie auprès des Nations Unies a été instruite par le président de la République de demander une réunion du Conseil de sécurité dans les plus brefs délais en vue de donner un effet exécutoire au prononcé de la Cour internationale de justice sur les mesures provisoires qui s'imposent à l'occupation israélienne ». Le secrétaire général de l'ONU, António Guterres, a de son côté décidé, vendredi, de transmettre immédiatement au Conseil de sécurité de l'ONU la notification des mesures provisoires imposées par la Cour internationale de justice à Israël. Le porte-parole de Guterres, Stéphane Dujarric a expliqué lors d'une conférence de presse que « les décisions de la CIJ sont contraignantes et qu'il est convaincu que toutes les parties les respecteront ». Par ailleurs, un porte-parole de l'équipe juridique sud-africaine a déclaré, dans une interview avec Al Jazeera, que la décision de la CIJ « stipule qu'Israël est obligé de mettre fin aux massacres, et non de cesser le feu », soulignant que « les mécanismes d'application sont faibles, voire inexistants, et la décision n'est pas contraignante». Et d'ajouter: «Le Conseil de sécurité doit adopter la résolution pour obliger Israël à la mettre en œuvre. Et si Israël ne se conforme pas à la décision de la Cour, le Conseil de sécurité devra intervenir ».

«Davantage d'efforts concertés en vue d'un cessez-le-feu»

Le président sud-africain, Cyril Ramaphosa, a déclaré après la décision provisoire de la CIJ, que son pays attend d'Israël qu'il respecte le verdict de la Cour, ajoutant qu'il «devrait y avoir davantage d'efforts concertés en vue d'un cessez-le-feu».     Et d'avertir que « les Sud-Africains ne seront pas des spectateurs passifs alors que des crimes sont perpétrés». L'Arabie saoudite, le Qatar, la Jordanie, l'Egypte, les Emirats Arabes Unis, le Sultanat d'Oman, la Tunisie, la Turquie, et l'Iran, ont exprimé leur soutien à la décision de la CIJ. Le Qatar a salué les mesures provisoires de la CIJ, les qualifiant de « victoire pour l'humanité et la suprématie de l'Etat de droit ». La Jordanie a qualifié la décision d'« historique », tout en soulignant la nécessité de mettre en œuvre immédiatement ces mesures pour mettre fin aux massacres des innocents à Ghaza. L'Arabie saoudite a appelé Israël à «rendre des comptes», alors que l'Egypte affirme avoir souhaité que la Cour exige un cessez-le-feu immédiat à Ghaza « comme elle a statué dans des cas similaires (par le passé, ndlr)», soulignant la nécessité de respecter et mettre en œuvre ces décisions. Le Sultanat d'Oman a appelé la communauté internationale à «obliger Israël à mettre fin aux opérations militaires et aux actes de génocide contre le peuple palestinien».

Sans surprise, la position des Etats-Unis et du Royaume-Uni, en réaction à la décision de la CIJ, défend totalement l'entité sioniste. La réaction de ces deux «puissances» peut être résumée en quelques mots: «Israël ne commet pas d'actes de génocide à Ghaza ».

Amnesty: Israël doit se conformer à la décision

Amnesty International a qualifié l'arrêt de la Cour de « mesure importante » qui pourrait contribuer à protéger les Palestiniens de « nouvelles souffrances et de dommages irréparables ». Pour Mme Agnes Callamard, secrétaire générale d'Amnesty International (AI), la décision provisoire « envoie un message clair selon lequel le monde ne restera pas silencieux alors qu'Israël poursuit une campagne militaire impitoyable visant à décimer la population de la bande de Ghaza et à déchaîner la mort, l'horreur et la souffrance contre les Palestiniens à une échelle sans précédent ».

L'ONG appelle néanmoins à une « pression efficace et unifiée » pour obliger Israël à se conformer aux décisions de la CIJ. « Cependant, la décision de la CIJ ne suffira pas à elle seule à mettre un terme aux atrocités et aux destructions que subissent les Ghazaouis. Au regard des signes alarmants de génocide à Ghaza et du mépris flagrant d'Israël pour le droit international, il est urgent d'exercer une pression efficace et unie sur Israël pour que cesse cette offensive contre Ghaza. Un cessez-le-feu immédiat par toutes les parties demeure essentiel et, bien que la Cour ne l'ait pas ordonné, reste la condition première pour appliquer les mesures conservatoires et mettre fin à la grande souffrance des civils », affirme encore AI.

Amnesty appelle également « les dirigeants des Etats-Unis, du Royaume-Uni, de l'Allemagne et d'autres Etats membres de l'UE » à « manifester leur respect de la décision juridiquement contraignante de la Cour et faire tout ce qui est en leur pouvoir pour s'acquitter de leur obligation de prévenir le génocide ».