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La crise
économique et financière de 1846-1847, le chômage de masse, les antagonismes,
les épidémies, la famine, les idées révolutionnaires, nationalistes et
républicaines - le socialisme commençait à travailler les classes ouvrières -,
provoquent la révolution de 1848.
La révolution de 1848 sonna le «printemps des peuples d'Europe». Partout en Europe, dans la confédération germanique, dans les pays sous domination de l'Autriche, en Italie?les peuples se liguèrent pour mettre fin à la restauration. Partout l'aggravation de la misère et des problèmes sociaux, les conditions misérables de la classe ouvrière (vie dans les ghettos et bidonvilles) provoquent des soulèvements populaires et des revendications de la souveraineté populaire (suffrage universel). En 1848, un vaste mouvement de libération secoua l'Italie entière. Les traités de 1815 avaient morcelé l'Italie en petites monarchies absolutistes, l'Autriche en possédait une partie de ses territoires. La même situation existait en Allemagne, le traité de Vienne avait laissé l'Allemagne éparpillée en 39 Etats, vaguement unis en une confédération germanique, administrée par la Diète (Parlement) de Frankfort, sous la présidence de l'empereur d'Autriche et la vice-présidence du roi de Prusse. C'est ainsi qu'en Italie, un mouvement libéral d'opposition au despotisme des monarques se développa parallèlement à l'impatience nationale dans les duchés allemands et en Prusse (le pays le plus puissant de la confédération) qui réclamait la création d'une grande patrie allemande. Une métamorphose de la société s'opérait dans les Etats allemands depuis la révolution française de 1789 et les campagnes napoléoniennes. La campagne de Napoléon qui intégra plus de 120.000 Allemands dans l'invasion de la Russie en 1812 a été une bonne école pour la formation et la préparation de la future armée allemande. De plus, le libéralisme offrait une base intellectuelle pour l'unification en concurrençant les systèmes dynastiques absolutistes. Et cela allait de pair avec une résurrection littéraire et artistique, l'Aufklärung, qui marquait dès le début du XIXe siècle l'aurore d'une Allemagne nouvelle. En littérature, Goethe, Schiller, Hegel?et dans les œuvres artistiques Louis van Beethoven, Schubert, Schumann? Une union douanière s'est progressivement instituée entre les Etats allemands préfigurant la future Allemagne. A partir de 1840, l'opinion publique réclama le remplacement du Staatenbund (Confédération d'Etats), par un Bundestag (Etat confédéré). Mais le changement ne viendra pas des aspirations politiques, mais des intrigues et des ambitions même des monarques et des guerres qui ont suivi dont "les enjeux sont des territoires et des peuples à se partager". Les événements des deux décennies qui ont suivi la révolution de 1848, la guerre de Crimée (1854-1855) et la Deuxième guerre d'indépendance italienne (1859) vont, en instaurant la discorde entre les monarques européens, entraîner des événements déterminants dans ce cycle finissant de Kondratieff (1750-1870) reformulé (voir article sur les cycles de Kondratieff du même auteur). Et l'avènement d'un homme politique allemand, Otto von Bismarck, qui en exprimera l'essence, dans son célèbre discours du " fer et du sang " au comité du budget de la chambre des représentants de Prusse, le 30 septembre 1862, peu après sa nomination au poste de ministre-président : " Les grandes questions ne se décideront pas par des discours et des votes à la majorité, mais par le fer et le sang ". Bismarck a-t-il eu une vision anticipée et prémonitoire du monde ? La question reste posée. Toujours est-il que, dès cette date, l'Europe va commencer sa mutation poussant le cycle à venir à l'éclatement des empires coloniaux. Quant au reste du monde, face à la suprématie des puissances coloniales européennes, il donne l'impression d'être un "monde engourdi" par la colonisation et la domination. Il n'a plus pour lucarne que la vision dominatrice d'une "Europe qui parade" sur son destin. Un temps qui s'est arrêté pour l'Afrique et l'Asie. 3. Deuxième cycle de guerre des Temps modernes. 1870-1945 : l'Allemagne dans un processus évolutionnel naturel et nécessaire Mais le rôle de la France, nations des révolutions, va s'effacer avec la défaite contre l'Allemagne (1870-1871). La guerre se terminera par l'insurrection parisienne, la "Commune de Paris" qui fit 25.000 morts dans les rangs des Parisiens. La victoire contre la France va propulser l'Allemagne au centre des enjeux qui divisent les puissances européennes. L'Empire allemand né de la guerre (Versailles, 1871) devait périr par la guerre. D'autre part, face aux divisions entre les puissances coloniales européennes, le reste du monde donne l'impression d'être "engourdi" par la colonisation ou la mise sous tutelle indirecte. Il n'a plus pour lucarne que la vision dominatrice d'une "Europe qui parade" sur son destin. Un temps qui s'est arrêté pour l'Afrique et l'Asie. Quant à l'Allemagne, depuis sa naissance, son essor industriel, scientifique, culturel, démographique qui rayonna non seulement en Europe mais dans le monde entier, le "pangermanisme", qui a été largement répandu par la littérature, par la presse et par l'enseignement scolaire, est allé jusqu'à vulgariser la doctrine de supériorité de race et de culture du peuple allemand sur les autres peuples. Investi par sa vocation providentielle à rajeunir la civilisation mondiale par la "germanisation", cet essor est devenu une véritable aliénation. Un mouvement incroyable de la pensée allemande, à l'époque. Précisément, dans la Pensée qui n'est pas propre à l'esprit allemand, mais à l'esprit de toute humanité pour peu qu'elle se soit trouvée au bon moment et au bon endroit de l'histoire pour changer le devenir du monde. Comme l'avait fait avant elle la France, l'Allemagne va plonger l'Europe dans le Premier Conflit mondial. Tous les protagonistes qui sont allés allègrement faire la guerre ont pensé que les hostilités ne vont durer que quelques mois. Cette guerre va en fait durer quatre années et trois mois et demi (août 1914-novembre 1918). C'est ainsi que ce Premier Conflit mondial va étrangement ressembler aux guerres napoléoniennes dans le sens que les victoires françaises sur les armées royales d'Angleterre, d'Autriche, de Prusse, de Russie, de Suède, de Belgique, de Hollande, des Ottomans, qui ont marqué les peuples d'Europe et permis leur éveil (révolution de 1848 en Europe) va cette fois dépasser toutes les espérances et permettre l'indépendance de plusieurs peuples d'Europe. Une première moitié des empires coloniaux démembrés, après la guerre 1914-1918, permit la constitution de nouveaux Etats. La Pologne, la Yougoslavie ou royaume des Serbes, Tchécoslovaquie, Estonie, Lituanie et Lettonie, le royaume de Hongrie. A la place des empires, des républiques sont nées. Les républiques d'Autriche (1918), d'Allemagne (Weimar, 1919), et de Turquie (1923, fin du califat). Les trois empires, l'empire allemand, austro-hongrois et ottoman appartiennent désormais à l'histoire passée. Cet affaiblissement de l'Europe par la guerre ouvre la voie aux aspirations d'indépendance des peuples colonisés (Afrique, Asie, monde arabe). Précisément, à peine le Premier Conflit mondial terminé que les événements se précipitent en Europe. A peine sorti des destructions du Premier Conflit mondial qu'une crise économique majeure tonna en 1929 sur le ciel américain. Elle s'étendit rapidement à l'Europe et au reste du monde. Dès le début des années 1930, l'Allemagne, avec l'avènement d'Hitler au pouvoir en 1933, se réarma. Les pays européens regardaient avec inquiétude un avenir incertain et menaçant qui se profilait. Comment expliquer ce retournement de la situation qui s'est opéré par le seul événement, la crise économique de 1929 qui, mettant, en 1933, 6 millions d'Allemands au chômage - c'était la Grande dépression -, a jeté l'Allemagne dans les bras d'Hitler ? Et le Deuxième Conflit mondial déclenché par l'Allemagne éclata en 1939 et va durer 6 ans et un jour (1er septembre 1939- 2 septembre 1945). Plus de cinquante millions de morts surtout dans le camp occidental, et probablement autant en blessés et handicapés à vie. Un monde en ruine, tant de sacrifices humains, l'avènement de l' "arme absolue" et son utilisation en 1945 par deux fois contre le Japon. Mais avec ces deux guerres mondiales et l'avènement de l'arme nucléaire va aussi s'opérer une nouvelle transformation du monde. La deuxième moitié des empires coloniaux subira le même sort que celle qui a précédé après le Premier Conflit mondial et ouvrir des continents entiers colonisés à l'indépendance. C'est dire qu'une autre mutation du monde s'est opérée graduellement entre le Premier et le Deuxième Conflit mondial. La guerre qu'on l'accepte ou non est malheureusement un mal nécessaire. L'humanité est telle une femme accouchant, dans la douleur, un "bébé", un "nouvel état du monde" ? La guerre peut s'assimiler à un poison qui attaque un autre poison, dont le corps qui en est empreint non pas cherche à rejeter mais doit à tout prix le rejeter parce qu'une situation de non-retour, de non-opérabilité, de non-guérison, est arrivée. Et cela n'est possible que lorsque tout se bloque, que l'irruption d'événements dans l'histoire traduit la maturité, l'avènement de nouvelles donnes qui changeront définitivement le cours de l'histoire. C'est ainsi qu'après le premier contingent d'indépendances après 1918 arrive le deuxième et dernier gros contingent d'indépendances après 1945, qui concerne les deux tiers de l'humanité. Ceux-ci, colonisés ou dominés, n'avaient pas de véritable existence d'êtres humains, tout au plus considérés comme des indigènes incultes et inférieurs aux colons qui les administraient. Dès lors, on peut concevoir que les deux guerres mondiales et la crise de 1929 relèvent d'un processus évolutionel spontané, naturel, dialectiquement nécessaire, irréversible où les guerres font partie du panorama humain, dans le sens qu'intrinsèquement, ce sont elles qui font avancer l'histoire de l'humanité, et donc impriment un progrès au monde. Force est de constater que les guerres, qu'on le veuille ou non, participent à l'évolution positive du monde. Ce sont les guerres que l'humanité ne détient ni de leur avènement ni de leur sens, qui viennent dénouer ses crises et décider de son avenir. Ces guerres ne viennent pas ex nihilo, et sont, faut-il dire, en adéquation avec la marche et les enjeux du monde. Ainsi apparaissait un nouvel état du monde à la fin de cette première moitié du XXe siècle. 4. Troisième cycle de guerre des Temps modernes. 1945-1973: l'«équilibre de la terreur» La guerre terminée, l'Amérique dotée de l'arme absolue apparaissait comme la nation la plus puissante et toute désignée pour "ordonner" le monde. Mais très vite, son leadership sur le monde est mis en question par l'Union soviétique. Deux camps se font face : le bloc socialiste et le bloc capitaliste. Bénéficiant du monopole atomique, l'Amérique, par une succession de mesures (plan Marshall, création de l'OTAN en 1949, encourager la construction européenne dès 1950) tente d'endiguer l'expansion communiste par la révolution mondiale. Celle-ci vient en droite ligne de la fameuse devise idéologique de Karl Marx dans le Manifeste du parti communiste, publié en 1948 : "Prolétaires de tous pays, unissez-vous !", et son corollaire moins connu, "Vous n'avez rien à perdre, à part vos chaînes" (La phrase figure dans l'épitaphe de la tombe de Karl Marx). Cette phrase à elle seule, dans l'inconscient collectif des peuples, est pire que toutes les bombes atomiques réunies de l'Amérique. Pour preuve, en 1949, l'URSS est rejointe par la première puissance démographique du monde, la Chine communiste. Partout dans le monde naissent des pays à option socialiste. On comprend pourquoi, juste après l'avènement de la Chine populaire, en 1949, les États-Unis se sont lancés avec rage dans une guerre contre la Corée, en 1950. Une guerre des plus meurtrières que connut l'Asie pour étouffer (encercler) la troisième puissance mondiale naissante, la Chine. Le total de pertes humaines entre tués, disparus et blessés dans ce conflit s'éleva à 2.415.600, selon les sources des Nations unies. 63 ans après l'armistice, i.e. aujourd'hui, la paix n'est toujours pas établie entre les États-Unis et la Corée du Nord. Et la réunification de la Corée du Nord et de la Corée du Sud bute précisément par la différence des régimes politiques de chaque pays. Après 1949 et son premier essai nucléaire à fission (bombe A), l'Union soviétique rétablit la parité nucléaire entre les États-Unis, en 1952, juste une année après qu'ils aient maîtrisé l'arme à fusion thermonucléaire (bombe H), plus puissante de 1000 fois la bombe A. Aussitôt rétablie, les deux superpuissances se lancent dans une course effrénée aux armements atomiques et leurs vecteurs balistiques. Des progrès considérables sont portés sur ces systèmes d'armes qui va du mirvage ou MIRV (à têtes multiples) au MARV (trajectoire du vecteur détournée temporairement de la cible pour tromper l'adversaire), mais font aussi bénéficier d'autres domaines, comme la conquête spatiale, les télécommunications, l'aviation civile, la météorologie, la médecine. Ces avancées témoignent d'une révolution technologique planétaire en marche, qui se poursuit aujourd'hui encore. La création de l'Etat d'Israël au Moyen-Orient, instituant l'Etat hébreu en "gendarme du Proche- et Moyen-Orient" bouleversa le monde arabe, une série de guerre de 1948,1956, 1967 jusqu'à ce qu'elle culmina en 1973, avec le premier krach pétrolier. La crise des "fusées soviétiques" à Cuba a évité in extremis une troisième guerre mondiale, en 1962. Mais la guerre au Vietnam depuis l'engagement des États-Unis en 1964, va marquer l'histoire des États-Unis, avec le désengagement des forces américaines, en 1973. A suivre... *Auteur et chercheur indépendant en économie mondiale, relations internationales et prospective. |