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C'est
par un pur hasard en rentrant d'un voyage en Angleterre alors que j'étais
encore à l'aéroport de Heathrow que je suis tombé sur un article plaidant la
cause de la langue de Molière en Algérie rédigé par un fervent défenseur à la
limite du fanatisme car loin d'être un expert en la matière, il a surtout tenté
par tous les moyens insensés et détournés à imposer un point de vue qui ne
reflète pas le consensus de la communauté scientifique ; parler le français et
écrire dans cette langue ne veut nullement dire être le maître penseur à
définir une stratégie linguistique pour un pays.
Bien que je n'éprouve aucune difficulté particulière de par mon cursus à communiquer en langue française, j'avoue que je me suis senti analphabète avec mon anglais rudimentaire le long de mon séjour londonien. Et je ne pense pas être le seul à avoir vécu ce malaise désagréable et handicapant ne serait-ce que lors d'une visite touristique de quelques jours car ce sentiment d'être à côté de la plaque est exacerbé quand il s'agit de prendre part à un congrès scientifique de haute voltige où pour en tirer le maximum, non seulement il faut comprendre l'anglais parlé et écrit mais surtout participer aux débats interactifs qui nécessitent une parfaite maîtrise de ses rouages mais pour comprendre cette situation de gêne et d'amoindrissement, à la limite de la honte, il faudrait être de la partie et je ne souhaiterais pas que les générations de demain puissent avoir à endurer le même ressenti. La décision prise et initiée par le ministre en poste en dehors de la question de sa légitimité dans les circonstances actuelles et que j'espère ira jusqu'au bout est non seulement courageuse mais surtout stratégique ; donner la priorité dans l'apprentissage des langues vivantes à l'anglais plutôt qu'à une autre langue a fait sortir de leur tanière les gardiens du temple qui veulent maintenir la société algérienne sous le joug de la langue française en déperdition de vitesse et de plus en plus devancée sous le faux prétexte qu'il s'agit d'une langue des élites qu'on va décapiter !!! A en croire que pour faire partie de cette élite à l'algérienne, il faut maîtriser le français plutôt que l'anglais, quelle duperie ! Donner à l'anglais la place qu'il mérite est loin d'être une décision idéologique, c'est une question technique que d'ailleurs les idéologues de tous bords n'ont pas droit de citer et qu'il vaut mieux qu'ils gardent leur avis pour eux-mêmes ; c'est une affaire de spécialistes et de stratèges. Ce débat a eu le mérite de mettre à nu les autoproclamées élites qui se sont déchaînées, de peur de perdre leur hégémonie intellectuelle et leur gagne-pain au détriment de l'avenir de tout un pays. Le débat est vite court-circuité en un complot des islamistes qui veulent à tout prix éradiquer le français ! Un argument usé qui ne trompe personne et une analyse simpliste et tendancieuse qui tente de noyer le poisson dans l'eau. Réduire la question à une confrontation entre l'arabe et le français est la dernière parade trouvée pour brouiller les pistes ! Il ne s'agit nullement de combattre le français, une langue qui aura toujours ses adeptes de par l'héritage culturel et historique du pays mais la question est d'une simplicité déconcertante ; quelle langue adopter à côté de la langue maternelle ? Tous les pays sinon la grande majorité y compris la France ont opté pour l'anglais. D'ailleurs dans un article publié dans Le Quotidien d'Oran du 17 mai 2017 sous le titre ''Otages d'une langue en déclin'' et qui a suscité de nombreuses réactions d'universitaires et scientifiques tellement ils se sont reconnus dans la nécessité de maîtriser l'anglais pour être au diapason des développements techniques et scientifiques, de nombreux arguments ont été développés qui plaident pour le choix de l'anglais comme langue de savoir et de transfert technologique. Tous les travaux de recherches de qualité ainsi que toutes les références et ressources bibliographiques sont publiés en anglais, les manifestations scientifiques, congrès et séminaires ne dérogent pas à la règle et d'ailleurs ce qui a motivé la rédaction à l'époque de cet article était la décision d'une grande revue médicale de spécialité et porte-parole d'une société française savante qui a décidé d'abandonner le français comme langue de publication laissant tous les francophones monolingues exclusifs dans le désarroi et parmi eux de très nombreux Algériens abonnés à la revue. Seul le pragmatisme compte, il n'y a pas de place pour les sentiments et les discours démagogiques, l'objectif affiché dans l'éditorial était la visibilité des articles par le maximum de lecteurs. Au moment même où nos ?'élites'' crient au complot ?'islamiste'', une fixation et un délire de persécution digne d'une prise en charge en psychiatrie. Il s'agit-là d'une réalité tangible qu'on ne peut occulter par de faux prétextes et par des explications tirées par les cheveux qui ne peuvent convaincre un esprit lucide. Enfin on ne peut être plus royaliste que le roi ! Dénaturer sciemment le débat en le résumant à une bataille idéologique est une manœuvre maladroite dont l'objectif est de maintenir le statuquo et de s'afficher comme un défenseur attitré d'une langue qui nous a été imposée et qu'on veut nous la faire vendre comme une conquête de guerre ! Ce n'est pas une animosité injustifiée et gratuite à l'égard du français, une belle langue mais qui, de l'avis même de ses propres adeptes et enfants, ne peut rivaliser dans le monde actuel avec l'anglais comme outil de développement technologique, scientifique et même communicatif et si des générations ont été sacrifiées par des responsables ignares et zélés ne maîtrisant pas leurs décisions, le fait de remettre en question ce choix de première langue vivante à adopter par un responsable qu'il soit même membre d'un gouvernement en manque de légitimité, ce qui relève là d'un autre débat, ne justifie pas ce qu'il a eu à subir à l'occasion comme foudres de ses détracteurs affolés qu'ils ont décrit par les pires adjectifs comme un venu de nulle part, un factotum, un intérimaire et j'en passe mais qui en réalité mérite tous les honneurs bien que je sois convaincu qu'il ne s'agit pas d'une décision personnelle ou de circonstances. Il est suicidaire de refuser d'opter pour l'anglais et de ne pas s'inspirer de la quasi-totalité des nations qui ont tranché depuis longtemps ; c'est une aberration de continuer à faire l'impasse sur la question ; les seuls opposants à cette option judicieuse sont les défenseurs excités d'une langue dont ils se nourrissent et qui s'acharnent à en devenir et à demeurer les ambassadeurs chauvins dans leur propre pays. Sans arguments convaincants, ils font opposer le français à l'arabe, notre langue maternelle et officielle, qu'ils n'hésitent pas à mettre en dérision sans crainte de devoir rendre des comptes. Pour ces prétendues élites, l'abandon du français est assimilé à un suicide, un meurtre. En fait, c'est un sevrage douloureux d'une caste voulant asseoir sa domination culturelle au détriment des intérêts suprêmes des générations futures. Tous les pays ayant fait de l'anglais une langue de l'apprentissage et de la formation sont dans une bien meilleure situation économique et technologique que la nôtre, l'anglais, et ce n'est un secret pour personne, est devenu la norme et cela ouvrirait de nombreuses perspectives encore inexplorées pour les jeunes Algériens dont beaucoup ont déjà fait le pari de l'anglais sans attendre de directives mais le fait que ce soit inscrit dans une stratégie d'Etat, cela permettrait de disposer des moyens nécessaires et de gagner un temps précieux. Ce débat doit être dépassionné et laissé aux spécialistes qui pourront convaincre les plus réticents et faire barrage aux commerçants idéologiques qui veulent en faire une bataille rangée entre Algériens pour assouvir leurs intérêts et ceux de leurs sponsors. Opter pour l'anglais est la décision sensée qu'il fallait prendre depuis bien longtemps. Cela pourrait bien changer peut-être un jour pour devenir le mandarin ou le coréen mais pour le moment, il n'y a pas photo. Ceci dit, apprendre les autres langues ne s'oppose pas à avoir une stratégie visionnaire et révolutionnaire. Chacun est libre d'apprendre la langue qu'il souhaite mais cela doit rester du domaine du privé sans chercher à en imposer ses choix personnels à l'ensemble de la nation pour faire triompher ses idéaux et sauvegarder ses dividendes. |