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Sous la houlette de Kermiche-Partner, cabinet conseil en management, l'Institut supérieur de gestion et de planification (ISGP) du Lido a abrité les 6 et 7 juillet 2013, sous le thème «La ressource humaine et la croissance», un séminaire consacré au développement humain dans la construction économique de l'entreprise étatique ou d'initiative privée. Modéré par Yacine Ould Moussa, économiste et enseignant universitaire, le regroupement, qui se voulait didactique, offrait à l'auditoire un panel de conférenciers nationaux pour la plupart de dimension internationale. Il s'agissait de Omar Aktouf, Phd, professeur à HEC de Montréal (Canada), Yacine Ould Moussa sus qualifié, Hacène Boukaraou économiste, expert international, Younès Grar, ingénieur, expert en technologies de l'information et de la communication (TIC) et Salah Slimani, chef d'entreprise opérant au niveau du cyber-parc de Sidi Abdallah rapportant sa propre expérience dans le domaine des TIC en tant que contribution à la croissance. Le présent chroniqueur s'astreindra pour sa part, à rapporter quelques moments forts de cette rencontre dans sa première journée consacrée, exclusivement, aux deux interventions du professeur O. Aktouf, intitulées respectivement: «Rôle de la ressource humaine et de la formation dans l'impulsion de la croissance», «Expérience de pays émergents ayant réussi dans le management de la ressource humaine: Chine, Brésil, Inde? au service d'une croissance économique forte». Rappelant vaguement la silhouette de Mahatma Ghandi surmontée d'un crâne rasé, un visage bruni, sans nul doute, par les voyages intercontinentaux et des yeux pétillants d'intelligence cerclés de lunettes que seuls les intellectuels savent porter, il occupa la scène pendant plus de 6 heures en tenant en haleine l'assistance suspendue à ses lèvres. La courte et fugace intervention en lever de rideau de Bachir Messaitfa, secrétaire d'Etat auprès du Premier ministre chargé de la Prospective et des Statistiques, ouvrait le bal sur une scène qu'il quittera quelques instants plus tard pour la clôture de la session printanière du Parlement. Debout, en bras de chemise, le professeur Aktouf entame d'emblée son plaidoyer contre la mondialisation, lutte dont il est devenu le gourou depuis plus de deux décennies. Il prédisait déjà ce que le monde subit actuellement. Si le capital est bon, il doit changer cependant, dira-t-il, car il détruit beaucoup, et la nature et l'environnement. Ne dit-on pas que le profit tue le profit ? S'il a toujours eu un rôle financier et économique, ce mode de gouvernance doit être plus social. L'association des économistes états-uniens, réunie à San Diégo a, lors de son dernier congrès, abouti à la conclusion suivante: ne plus considérer l'économie comme une science, à l'instar des sciences physiques qui sont exactes et sous toutes les latitudes, mais comme une idéologie. Il faudra arrêter l'analyse qui plaît au politique. La messe est ainsi dite ! Que veut-on dire par bonne gestion économique ? Aktouf, renvoie dans le contexte à Aristote qui disait: «La communauté ira mieux, quand les calamités dues au climat, les souffrances qui frappent l'humanité et la nature diminuent». N'est-ce pas d'actualité ? Dos au mur, le monde capitalistique se remet, peu à peu, en cause. La célébrissime université de Columbia (USA) reconnaît à l'Etat son rôle majeur d'intervenant économique. N'est-ce pas là une séquence subliminale du collectivisme décadent ? Et là, le professeur de HEC se démarque pour dire: «Je ne souscris à aucun ?isme', sauf celui d'humanisme !». Il faut retenir à ce titre, ce bon mot d'un Nobel d'économie: «Le marché (Loi), n'a ni cœur, ni cerveau, pourquoi voulez-vous que je lui confie mon destin ?». Ce «marché sans cœur» a produit 40 à 50.000 «sans-abri» à Montréal. Des cadres, faute de domicile à Paris, gîtent dans leurs voitures. Le néolibéralisme occidental à l'américaine n'a enfanté jusqu'à présent que des paradoxes; l'économie canadienne exsude, en dépit du niveau culturel communautaire, 16 p. cent d'analphabètes totaux, l'états-unienne, quant à elle, repose sur une main-d'œuvre évaluée à 45 p. cent d'analphabètes totaux, auxquels il faut ajouter 13 p. cent de diplômés du secondaire qui ne savent ni lire ni écrire. Il est à noter en outre, que 49 p. cent de la population est analphabète fonctionnelle; sait lire mais ne discerne que vaguement le contenu. Pour clore le propos, l'orateur l'étayera par cette assertion de Bill Clinton qui disait: «Le peuple du monde occidental le plus formaté, et dont le lavage de cerveau est affirmé, est sans doute le peuple américain». La pensée-slogan a fait de la société nord-américaine un sujet de suivisme béat tel ce concept élevé au rang de dogme: «Israël: grande démocratie, Arabe ou musulman: extrémiste, terroriste». Après cette mise à niveau conceptuelle qui permettra plus tard, au profane l'appréhension de l'objet du débat, Omar Aktouf délivre une note d'espoir aux Algériens, jeunes et moins jeunes, pour leur dire: «Vous n'avez rien à envier à quiconque, soyez vous-mêmes. Le miroir aux alouettes fera long feu !». La croissance économique ne peut être efficiente que lorsqu'elle tiendra compte de l'élément humain. L'homme dans son acception cosmique n'est-il pas parole, communication, sentiments-affects, amour-propre et finalité ? A partir de ce postulat, l'orateur déroulera, peu à peu, ce à quoi il voulait en venir. Il émaillera sa conférence avec le brio que seuls les conteurs africains en détiennent le secret, par des exemples vécus aussi bien au Canada qu'ailleurs. Il reviendra beaucoup sur cette petite entreprise, d'abord familiale qui, peu à peu, deviendra une multinationale. Cascade, tel est son nom, partie d'un petit effectif de 700 employés, est à 17 ou 18.000 éléments disséminés de par le monde. Elle a bâti son empire sur le développement de sa ressource humaine. Le recrutement est «cascadisé». Un prestigieux master en administration des affaires (MBA) est mis au moment de son recrutement sous la tutelle d'un employé de l'entreprise, qui peut être ingénieur, comptable ou simple ouvrier pour subir le baptême de feu de la «Boîte». Il devra développer des capacités professionnelles et d'adaptation au poste sous l'œil de son tuteur pendant une année pour mériter sa «cascadisation» qui lui ouvrira les portes du recrutement? et ce sera probablement à vie. Partant du principe «Le travail est un loisir librement occupé par une activité librement choisie», l'homme devient dans certains pays qui ont appréhendé l'enjeu de la ressource humaine dans la succès-story entrepreneuriale, le principal moteur de son bien-être socioéconomique. Au pays du Soleil levant, le recrutement qui se fait à vie au mois d'avril, c'est-à-dire à la sortie du cycle universitaire, voit ses majors de promotion opter pour la fonction publique. Les départements de l'Industrie et du Commerce écrèment les promotions universitaires dans le but évident de la prévision et de la prospective des marchés mondiaux. Le Japon pratique depuis longtemps, à l'instar de l'Allemagne, la «cascadisation». Après une année de mise à l'épreuve, deux questions seront posées au postulant: Où vous sentez-vous utile pour l'entreprise ? Où vous sentez-vous le mieux ? S'il est vrai que la machine nippone est parfois sans cœur, elle n'est pas, par contre, sans esprit mystique. Il est souvent noté l'observance de rites ataviques tels que le recueillement à la divinité du feu dans les ateliers de soudure, ce qui n'enlève rien à la performance, bien au contraire. L'entreprise «Cascade» fête avec ses employés le «Christmas « au sein même de leur lieu de travail. On entend, souvent, dire que les Africains sont fainéants, paresseux, etc., il n'y a pas plus faux que çà. Henri Bourgoin: «Un travail humain a du sens? il se fera dans une saison, pour une cueillette? il a toujours un début et une fin». L'Africain trouve que le travail hyperactif du Blanc n'a aucun sens, il ne se termine jamais. Le travail traditionnel se fait en groupe? on y parle, on y chante, on y festoie. Par cette juste perception du travail, la méthodologie managériale s'appuie, présentement, sur le travail de groupe. Le grand voiturier Volvo, qui en a saisi l'enjeu, fait tourner ses équipes autour du véhicule à construire. Il n'est plus question que l'ouvrier fasse une seule et unique opération et en silence. Il peut même s'imprégner du geste de son collègue d'une toute autre spécialité. La compétence devient dans ce cas d'espèce rotative. Le capital a montré ses limites, il s'essouffle, entraînant avec lui un monde en déperdition. La monnaie est cette illusion humaine. Accumuler de l'argent n'a aucun sens, selon le conférencier qui renvoie à Aristote. La monnaie devait aider l'homme à ne pas s'encombrer du produit de son labeur pour ses échanges commerciaux. Il ne vient jamais à l'esprit d'un être sensé de stocker du blé, pourtant source de richesse, à l'infini. Prémonitoire, Charlie Chaplin a vertement fustigé cette déshumanisation capitaliste dans son anthologie filmique «Les temps modernes». Par cette inhibition, l'homme a perdu des territoires immenses de son intelligence qui sont la créativité et l'innovation. La manufacture a détruit socialement et culturellement l'échoppe. Le maître d'œuvre est devenu un simple ouvrier auquel on dénie toute intelligence. L'oracle prononcé par cet éminent économiste doublé d'un éthno-anthropologue, neuropsychologue et parlant cinq langues que se disputent de prestigieuses universités de par le monde, n'est-il pas assez puissant pour être audible et ouvrir les voies de l'enfermement sur soi. Auteur de 14 ouvrages et collaborateur dans 21, il signe son dernier-né: «Halte au gâchis - En finir avec l'économie-management à l'américaine». Pour ce dernier opus, une vente-dédicace eut lieu dans le hall de l'ISGP. A ce titre, l'auteur déclare qu'il ne perçoit de ces ventes aucunes royalties, il dédie les revenus aux œuvres sociales estudiantines. |