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A l'orée du
cinquantenaire de la fin de la guerre d'Algérie et de l'Indépendance arrachée
au colonialisme français, une vision citoyenne s'impose des deux côtés de la
Méditerranée sur l'état de la relation entre les deux peuples algérien et
français.
Il n'y a qu'à survoler les blogs et manifestations associatives des deux rives avec leur cristallisation au-dessus de Mare Nostrum pour percevoir de la part du profane en sciences sociales ces milliers d'interactions/connections se manifestant de façon pathétique sous la forme verbalisée de symptômes et plaintes «téléchargées» d'une trame affective et relationnelle qu'on ne peut que qualifier de syndrome algérien en France et syndrome français en Algérie comme a existé ce fameux syndrome vietnamien exorcisé aux USA par une filmographie déculpabilisante pour la génération des GI's qui avait pataugé dans les rizières? et rédemptrice pour ses enfants programmés dans une mondialisation presque virtuelle formatant le souvenir même d'un impérialisme séculaire? Quarante-huit années après -j'allais écrire 48 heures-, le traumatisme de juillet 1962 n'en finit pas de perturber la Toile, les hémicycles, les places publiques, mémorials, cimetières, charniers anonymes, amphithéâtres, débats télévisés, animés par une symptomatologie de bouffées délirantes qui alimentent les canards locaux des deux pays? alors que l'étiologie de la maladie est occultée par les gouvernements pour des intérêts économiques, financiers, claniques et «géopolitiques» circonstanciels peu regardant sur le long terme que l'on évite d'assumer au nom des nouvelles générations vouées aux gémonies d'une Mondialisation robotique rampante et inexorable? Quoique de plus hypocrite et satyrique que de qualifier, de part et d'autre, les relations politiques entre l'Algérie et la France «?de très mauvaises proches de la rupture diplomatique?», et comptabiliser laconiquement les relations économiques et financières sous une rubrique de haute rentabilité dont certaines clauses datant des Accords d'Evian ne sont pas accessibles aux opinions publiques? ! Curieusement, c'est à travers les blogs et différents sites tchatchant 24 heures sur 24 que les modérateurs et autres observateurs s'aperçoivent que les simples citoyens, fussent-ils acteurs des conflits mémoriels générés par la guerre d'Algérie ou ayants droit «collatéraux» des événements qui ont traumatisé des millions de contemporains, s'avèrent mieux discuter, se comprendre, négocier avec l'ex-ennemi de l'autre rive ; les discussions entre citoyens de France et d'Algérie, enfants de pieds-noirs ou de fellaghas, s'avèrent être plus longues et fructueuses puisque dénuées de tout calcul matériel et exprimant leur(s) vécu(s) morcelé de part et d'autre sous forme de plaintes pleine de ressentiment non pour les auteurs de leur déboire mais surtout pour ceux qui ne reconnaissent pas leur douleur même au sein de leurs compatriotes? Bizarrement, ces citoyens se reconnaissent dans la douleur, se respectent même s'ils le manifestent maladroitement dans leurs forums. Les sémiologues et psycholinguistes ne peuvent pas ne pas remarquer que seuls les milliers de kilomètres empêchent les acteurs du drame franco-algérien de tomber dans les bras de l'autre et pleurer leurs fiel et souffrance? Les discussions citoyennes réussissent une médiation potentielle que les diplomates des deux bords ont tout simplement différé à l'image d'un Bernard Kouchner qui tente un rapprochement en solo en s'appropriant une lecture de l'inconscient collectif de la jeunesse algérienne sur la génération de l'Indépendance? La glace est brisée par ces citoyens blasés et «blousés» par leurs gourous catatoniques condamnés à l'immobilisme soit en Algérie sous l'expression de «receleurs de cadavres», soit en France et Navarre sous l'animation de «pleureuses de disparus habeas corpus»? Des centaines de pieds-noirs, plusieurs générations confondues, se relayent ces dernières années, pour revoir leur pays natal, leurs morts et camarades d'enfance. Les enfants, adultes aujourd'hui, viennent chercher au Bled ce qui a tant attristé leurs parents décédés en France. Et ces dizaines de milliers d'Algériens qui sont attirés par l'Hexagone pour voir ce qui a ensorcelé les centaines de milliers de leurs aïeux qui ne sont plus revenus et se sont dilués dans la société française coloniale et postcoloniale? Il est vrai que Jacques Toubon, ex-ministre et président de la Cité nationale de l'histoire de l'immigration, qualifié par Mourad Medelci d'ami de l'Algérie, détient le scoop de la «négociation d'un nouvel accord sur l'immigration qui prendrait la place de l'Accord franco-algérien de 1968»*1. Il nous est gré de constater une fois encore que la Relation algéro-française est mieux prise en charge par les initiatives informelles mais efficaces que les diplomates du sérail. S'agit-il encore une fois de manque de compétences diplomatiques tant algériennes que françaises ou tout simplement du verrouillage par ces structures de toute initiative citoyenne ou informelle représentant les courants de l'opinion publique de Sétif à Perpignan si nous partons du prérequis que tant la presse hexagonale qu'algérienne refuse de reconnaître les crimes, massacres, traumatismes et douleur? de l'Autre? ? «Ladouleur n'a pas de camp. Comprendre celle des autres aide à atténuer la sienne !»?de l'auteur. Note : Mourad Salim*2, psychologue, enseignant en médiation sociale et gestion de cycle de projet à l'INFSCJC *3 d'Aïn-El-Turck/Oran. -*1-El Watan du 23/06/2010,P.03, «L'Actualité» de Fayçal Métaoui. -*2-mouradhoussine@yahoo.fr -*3-Institut national de formation supérieure des cadres de la jeunesse et des sports (ex-Creps). |