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Des années avant
le Printemps arabe, Hichem Djaît
écrivait : «Je me sens humilié d'appartenir à un Etat sans horizon ni ambition,
autoritaire quand il n'est pas despotique où ne se trouvent ni science ni
raison ni beauté de la vie, ni culture véritable.
Cet Etat me réprime et dans cette société providentielle, ruralisée, j'étouffe, comme je souffre d'être dirigé par des chefs incultes et ignorants. En tant qu'intellectuel, je vis une névrose et il est humain et légitime que je projette mon malaise sur ma société, mais les révoltes populaires sont là pour témoigner que ce malaise n'est pas une construction d'intellectuel. » Les révoltes populaires ne sont plus là pour témoigner et les chefs ont cessé d'être incultes et ignorants. Quant à l'intellectuel, s'il a existé, il a fini par revenir au mektoub pour guérir de sa névrose. Mitterrand, fraichement élu, en visite officielle en Angleterre, a demandé de dialoguer avec des intellectuels. Les sujets de sa Gracieuse Majesté lui ont répliqué : « Nous avons des professeurs, des scientifiques, des peintres, des artistes?, mais pas d'intellectuels. » En Algérie, on n'est pas en manque de diplômes délivrés par l'Etat signés par des responsables nommés par des autoproclamés au rythme des contrats signés. Des diplômés qui n'ont jamais exprimé leur humiliation qu'à travers une fiche de paye sans se poser la question : qu'allons-nous acheter avec la nouvelle hausse ? Le marché s'offrait à eux avec sa danse du ventre et la musique qui va avec : culture du sabotage et B.A. BA des magouilles. Cette humiliation à un si haut niveau n'a pas de remède. Pour la reine du crime, Agatha Christie, le crime parfait ne peut être commis que par un as de la médecine. La décolonisation a apporté la liberté l'égalité la fraternité aux « Rois fainéants ». Les bougnouls n'ont pas changé de statut. Pourtant, la guerre de libération a été déclenchée parce que certains avaient des droits et d'autres pas. Même Bourguiba en été convaincu: «Les Tunisiens ne sont pas prêts pour la démocratie.» Quand les Ottomans ont envahi la Tunisie, les élites du pays ont fusionné avec ceux de la Sublime Porte contrairement à l'Algérie, l'orpheline, qui a laissé l'envahisseur régner seul. Le pays persiste dans son exception et menace de revenir au chaos si on l'interroge. Il y a quelques jours dans l'Egypte de l'après «Dégage», 1 électeur sur 4 s'était déplacé pour voter. Les descendants des pharaons arrivent à interdire à leurs «élus» le prestige des fausses statistiques. La Régence d'Alger a fait mieux, elle a interdit les statistiques. À l'humiliation de n'avoir pas su «dégager», s'ajoute la honte du roi des dupes de la «fratrie». Avant d'aboyer, on subit la noyade du chien que la rage a dédaigné. Nous trainons cette nationalité encensée par des fraudeurs tel un boulet au cou à l'intérieur et l'extérieur. Déshonorés par leurs propres maitres, les esclaves ne trouvent même pas de salut dans la foule anonyme super sécurisée d'un aéroport international. Quand le plus idiot d'entre eux essaye de comprendre, la réponse se limite à un méprisant sourire ou : «On a des directives? L'Algérie c'est un pays difficile?Ce n'est pas la même chose?On s'excuse pour le retard etc.». Quand il insiste, l'inévitable fuse : «Nous avons toujours des problèmes avec les Algériens.» On ne peut même pas se défouler dans le « touche pas à mon faciès » puisque le pire vient de ceux qui nous représentent à l'étranger et de la compagnie nationale d'Air Algérie. En parallèle et au sommet, heureusement l'honneur est vierge: «Nous n'avons aucun problème avec les dirigeants algériens. Notre entente est parfaite. Une véritable lune de miel?» Le syndrome des parents parfaits qui engendrent des monstres. Ils ont le choix entre les engraisser ou les assassiner. On compare l'Algérie à tort et à raison à la Corée du Sud. D'un pays riche naturellement à un autre dépourvu de toute richesse naturelle. En 50 ans, ce dernier a fait son miracle pendant que l'autre s'est acharné à forer sa malédiction. La Corée du Sud était parmi les trois pays les plus pauvres avoisinant le Soudan et en guerre avec sa moitié du Nord. L'Algérie indivisible de 1962 était bien partie pour perpétuer le miracle avec les acquis de la révolution et l'héritage colonial. Récemment, dans un documentaire sur Arte(1), une Coréenne explique leur étonnant décollage par le fait que les aînés ont beaucoup travaillé en veillant à ce que chacun soit l'ange gardien de l'autre. Tous les films historiques nous montrent qu'il suffit d'un dégénéré à la tête de n'importe quel empire pour le transformer fissa en un repaire de brigands. Tout simplement parce qu'on nait différents inégaux et vulnérables. Les Coréens qui ont pris les commandes ont intégré ces tares. Ils ont modernisé en conservant la tradition, en tolérant toutes les religions. Le principe même du bouddhisme est d'éviter les extrêmes ce qui est contraire à tous les systèmes arabes. Il y a 3 siècles un roi du Vietnam, las des guerres entre les brahmaniques et les musulmans, a eu l'idée d'obliger les uns à intégrer dans leurs croyances la religion des autres. Résultat, il n'y a plus de conflit et l'Islam des Cham Baní a adopté la non-violence en allant jusqu'à mettre une déesse à côté d'Allah. En général, quand l'Islam vainqueur s'oppose aux traditions asiatiques, il n'arrive pas à les effacer complètement. On doit s'interroger sur leur stabilité. Se demander pourquoi notre « Vatican » est représenté par des Ibn Saoud qui n'ont ouvert leur frontière à aucun migrant musulman pendant que le Pape appelle à l'accueillir en frère dans le monde chrétien. Fossoyeurs des femmes alors que le miracle coréen ne pouvait se réaliser qu'en les intégrant. Le documentaire nous apprend que la réussite de la Corée du Sud est due au volontariat des femmes auprès de la catégorie la plus sensible : les jeunes. On imagine des Algériennes en faire de même. Le Code de la famille a tellement fait des ravages qu'on ne sait plus s'il est encore temps pour l'homme de compter sur une femme codée depuis des décennies. Si l'éducation a fait la Corée du Sud, par quel miracle l'Algérie, dépourvue de femmes et de lien social entre les hommes, peut s'extirper du gouffre. Il existe des enfants d'une même famille propres, polis, studieux alors que leurs parents non seulement sont absents toute la journée, mais utilisent le minimum d'autorité qui leur est dû. Leur secret ? La confiance. Si le Finlandais est le premier à l'école, il est aussi celui qui est le moins surveillé. Il y a longtemps que les Algériens ont perdu la confiance dans leurs décideurs pour finir par perdre celle qui existait entre eux. Que faut-il faire ? Loin de l'ange gardien coréen, on peut toujours éviter de voir le démon chez l'autre. Exemple type : signer une feuille pour améliorer la vie du quartier abandonné par les autorités. Que voit-on autour de nous au quotidien ? Des gens bon-chic bon-genre, des cadres parfois, préférant patauger dans un marécage nauséabond et dangereux pour le plaisir de voir râler un voisin haï. On vénère ces phrases lapidaires ressassées de l'aube au crépuscule : « C'est l'Algérie, c'est normal. Ibn Khaldoun l'a dit : Les Arabes se sont mis d'accord pour ne pas se mettre d'accord. Les ancêtres nous ont maudit. C'est un harki, un indic, un juif, il a son intérêt qui n'est pas le nôtre. Donner de l'argent de l'espoir et finir par être arnaqué, je préfère crever. À quoi ça sert, tout est foutu. La délivrance est dans la fuite. » La victime a tendance à se venger sur plus malheureuse qu'elle ou se faire hara-kiri. Cela dure depuis plus d'un demi-siècle sans résultat c'est-à-dire en empirant. Il est urgent de changer de méthode. La victimisation n'a pas porté chance aux Noirs des USA, des expériences ont prouvé sa responsabilité. Un policier Blanc tue un jeune Noir. Quel désastre, quand il n'y a aucun policier Noir qui tue un jeune Blanc. Le même phénomène existe dans les banlieues parisiennes, dans nos quartiers d'Alger un peu partout. Ce qui relève strictement de la justice se double étrangement de la pigmentation de la peau, du genre, des croyances, des affinités?au seul profit des politicards qui montent grâce aux plumes arrachées. Les Occidentaux de souche ont fini par avoir peur d'être fichés comme racistes ; que font-ils ? Ils évitent le chemin des bronzés au naturel ; bonjour la cohabitation ? Il faut s'arracher au cercle vicieux. Faire ce que font les autres : l'entraide. Les Coréens ne se considèrent ni comme une Oumma ni comme une fratrie, pourtant ils y adhérent. C'est vrai qu'ils ont eu les bons dirigeants, mais l'orphelin n'est pas condamné à tout rater. Plus le système est pourri, plus il a peur de faire la moindre concession. Pourquoi le ferait-il s'il n'y a aucune force pour l'y contraindre ? En Algérie, la violence est omniprésente quand elle n'est pas contenue par la peur, l'âge ou la maladie. Pourquoi se battre avec le voisin et parfois devant un juge parce que son rejeton a brisé le pare-brise de ma voiture ou a vidé la poubelle devant ma porte ? Au lieu de se dire pourquoi cette agressivité chez un bambin, apparemment normal, qu'on a vu grandir avec des sourires ? Rien ne sert de déménager, partout c'est le même scenario. En Allemagne, un Coréen avait volé des sous-vêtements pour séduire sa belle. Manu-militari, ses compatriotes lui dressèrent un procès et le condamnèrent à mort sous prétexte de les avoir tous déshonorés. Il a beau leur expliquer que la police allemande lui avait pardonné après qu'il ait rendu la totalité de son larcin, en vain. Il n'a eu la vie sauve qu'à la défection de l'un de ses juges. Et dire que chez les émigrés musulmans, les dignitaires n'osent même pas faire des remontrances à leurs terroristes. Terreur et déshonneur pour la populace pendant que la Régence s'érige sans honte et par calcul sur le meurtre au propre ou au figuré des vrais révolutionnaires. « ?un homme d'honneur qu'on a voulu déshonorer?une des plus grandes figures du 20e siècle qu'on s'est épuisé à salir, à maudire et que j'ai vu trembler , à la fin de sa vie, sous le poids des ingratitudes et des amnésies.»(2) Pourquoi l'Algérie a-t-elle eu besoin de salir un Messali Hadj, le premier Algérien à évoquer son indépendance ? Sans parler d'un Ferhat Abbas, le premier qui a su la représenter au niveau international ? Avec lui « Une autre Algérie », affirme l'historien attitré Benjamin Stora. Face à ces points d'interrogation, les Algériens sont condamnés à former une union basique là où ils végètent. Les insultes, la haine, la jalousie, la violence, les critiques, le racisme, l'intégrisme, l'intolérance ont fait leur sale boulot, il faut se décontaminer de ces virus mortels. S'occuper des enfants. On les a vus, ils peuvent nous haïr et aller jusqu'au meurtre pour le mal qu'on leur a fait par lâcheté. C'est facile, ils ont besoin d'espace de jeux et de confiance, il suffit de se mettre d'accord sur ces trois constantes. Après la mort des sages, l'ère de l'internet où le pire côtoie le meilleur. Cliquer sur la bonne touche et découvrir l'expérience de ceux qu'on admire et qu'on envie. On est sidéré quand on voit comment en Occident certains se débrouillent pour un coup de main par-ci par-là à moindres frais notamment depuis 2008. Les sites pullulent où l'initiative citoyenne se fait dans la discrétion l'efficacité loin de la politique et du business. Lors du tsunami, les Japonais affamés ont fait la chaine dans la sérénité refusant de tendre la main à l'aide internationale. Il est temps que les Algériens retrouvent un peu de dignité. Qu'ils cessent d'avoir honte et affrontent les tabous que de vils potentats et des généraux sans médaille leur ont imposés pour mieux les déposséder, les asservir : la bombe démographique, le codage des femmes, l'énigme du sida qui évite notre pays tel un nuage de Tchernobyl, le boom du cancer, la pollution sans industrie, les intoxications de la malbouffe, le trio insécurité-terrorisme- repentance et l'impunité quasi divine des détourneurs des richesses naturelles. Sans oublier le venin du pedigree. « Au Maroc, il n'y a que des Marocains», avait répliqué le roi quand les nazis ont voulu savoir le nombre des Juifs marocains. En Algérie, il n'y a que des Algériens. L'homme n'a rien inventé dans ce domaine depuis des milliers d'années. «S'il existe dans la nature un principe de justice, un principe d'honnêteté des principes que nous décrivons par les mots « le mien» et le « tien », des principes des droits naturels de l'homme?dès lors nous avons une loi universelle ?la loi suprême est partout la même dans le monde entier, dans tous les temps et pour tous les peuples. »(3) 1- Arte (vendredi 27 /11/15) 2- Djanina Messali- Benkelfat (Une vie partagée avec Messali Hadj, mon Père) 3- Lysander Spooner, juriste américain 1808-1887 ( Outrage à Chefs d'Etat) |