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Le cinéma méditerranéen vit sous le double
signe du paradoxe et de l'ambiguïté. Paradoxe parce que ce secteur d'activité a
besoin de liberté pour se développer. Ambigüité, en
raison de sa fragilité et des menaces qui pèsent en permanence sur lui.
Mais, bon gré, mal gré, en l'espace de quelques éditions, ce cinéma trace son sillon. Rendez-vous incontournable des cinéphiles, des amateurs et des professionnels du 7e art, les journées cinématographiques de Carthage qui viennent de s'achever ont, malgré les aléas, tenu leurs promesses. De grandes stars, de grands cinéastes et des vedettes du grand écran n'ont pas hésité à faire le déplacement malgré la tourmente que vit le pays. La plus grande distinction, est revenue cette année à L'Orchestre des aveugles, du Marocain, Mohamed Mouftakir, longuement applaudi. Cette comédie sociale, qui relate l'histoire d'un orchestre populaire conduit par Hocine (Younes Megri), qui anime des mariages et des fêtes de circoncision est, selon les dires de son auteur, à cinquante pour cent autobiographique. Mis en scène tout en nuance et subtilité, le film qui a obtenu le Wihr d'Or au dernier Fiofa d'Oran et le grand prix du film à Tanger et qui a aussi été distingué à Bruxelles, Khouribga et ailleurs, est d'une parfaite maitrise technique et esthétique. Les applaudissements nourris du public ont certainement conforté le jury qui a décerné le Tanit. A quoi peut-on attribuer ce succès ? Pour l'auteur, Mouftakir, cela est dû au fait que «le film s'est éloigné de la morale, des jugements de valeur sur les personnes en se contentant de transposer à l'écran la réalité d'une société telle qu'elle est et la vie de personnages qui ont le droit d'exister comme ils sont». Dans quelques jours (du 3 au 9 décembre), c'est au tour de l'Algérie de célébrer à nouveau le cinéma dans la singularité de ses talents. De grands pays méditerranéens ont d'ores et déjà, confirmé leur présence à Annaba pour prendre part au Festival du film méditerranéen (Fafm) qui va sortir la ville de sa trop longue torpeur cinématographique. Dix-neuf films issus de 13 pays ont, d'ores et déjà, été présélectionnés au Fafm qui se propose d'inventer de nouveaux symboles et d'accompagner les consciences collectives afin de poursuivre la lutte pour la défense les libertés artistiques, morales, professionnelles et économiques de la création cinématographique. Le jury présidé par le critique et rédacteur en chef du magazine libanais El Akhbar, Pierre Abi Saâb, et ses membres Kamel Dehane (Algérie), Kaltoum Bornaz (Tunisie), Johan Pancrazi (France), Goran Tozija (Macédoine) et Vironio Soro (Italie), n'aura pas la tâche facile pour délivrer l'Annab d'Or. Le Fafm, qui poursuit les Journées du cinéma méditerranéen de Annaba (Jcma), initiative du ministère de la culture présidé par Saïd Ould Khelifa a inscrit des films récents et d'une brulante actualité : «Printemps tunisien», de la tunisienne Raja Amari, «Soleil de plomb» de Dalibor Matanic, (Croatie), «Le dégradé» des palestiniens Arab et Tarzan Nacer,«Al Tarik» de la libanaise Tana Salem, «Salki/Secret» du turc Selin Evci, «Le scarabée des cendres» de la marocaine Sanaa Akroud entre autres,? L'Algérie présente «Opération Maillot» de Okacha Touita, «Madame courage» de Merzak Allouache, et «Mémoire de scène» de Rahim Laloui. Seront projetés sur les écrans du Théâtre régional A.Medjoubi et du Palais de la culture M.Boudiaf de nombreux autres films tout aussi intéressants. Saïd Ould Khelifa, le nouveau commissaire, qui a invité le grand cinéaste chilien d'origine palestinienne Miguel Littin, a inscrit au programme des hommages aux grands artistes algériens et étrangers du 7e art méditerranéen, sans oublier ceux qui viennent de nous quitter : Amar Laskri, Benamar Bakhti, Omar Sharif, Nour Echerif?. Lieu privilégié de rencontres, d'échanges et de découvertes, un festival de cinéma est aussi une opportunité exceptionnelle pour prendre part à des activités connexes. C'est ainsi qu'une table ronde sur les migrations vues à travers le cinéma, est inscrite au programme. Elle réunira nombre d'universitaires et de chercheurs pour débattre de ce thème éminemment important. Un festival, même ordinaire, est une œuvre de longue haleine. Lorsqu'il se donne pour mission de sortir de l'ornière les films arabes, maghrébins et méditerranéen et de les promouvoir, sa tâche devient encore plus ardue. Le ministre de la Culture, Azzedine Méchoui, qui sera présent à l'ouverture de la rencontre, s'est déclaré prêt à ne pas faire mentir la légende de la ville. |