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D'emblée doit-on dire, que la
crise pétrolière est une affaire économique et financière. Il y a cette pensée stratégique
quelque part dans le monde : «on veut un pétrole bon marché» comme «on a voulu
un pétrole cher les années passées», avant la mi-juillet 2014. Et aujourd'hui,
avec la guerre en Ukraine, depuis l'invasion par la Russie, le 24 février 2022,
on veut plafonner le prix du pétrole russe entre 40 et 60 dollars le baril.
Le problème c'est qu'il y a forcément des raisons impérieuses, et celles-ci ne s'embarrassent pas des conséquences qui vont suivre, et peuvent être très graves tant pour l'Occident que pour le reste du monde. Mais bon, passons. Tout d'abord, regardons les récessions passées. Prenons la période qui a suivi janvier 2001 où les États-Unis sont entrés en récession et que les attentats du 11 septembre sont venus corser la situation économique de la superpuissance déjà affaiblie par la double crise boursière du Nasdaq (valeurs high-tech), en mars et septembre 2000. L'Indice Nasdaq est passé de 3940,25 le 1er novembre 1999 à 1328,26 le 1er mai 2002. Une chute de l'indice de 0,662%. Pratiquement, toutes les capitalisations boursières dans le monde (à quelques exceptions près) ont décroché par le krach boursier de Wall Street; elles ont chuté entre 30% et 60% de leur valeur entre 1999 et début 2003. (Indices boursiers sur le site Yahoo. Finance). Les Bourses mondiales n'ont commencé à remonter qu'après l'entrée en guerre des États-Unis, en 2003, contre l'Irak. 1. Une formidable monétisation des déficits courants et publics par les États-Unis et l'Europe pour s'inscrire dans la croissance On a bien vu qu'entre 2001 et 2008 ou entre 2008 et 2014, le processus a été le même. Déverser des milliards de dollars pour la première période pour soutenir l'économie américaine et l'effort de guerre, la crise arrivée, de nouveau déverser des milliards de dollars pour la sauver cette fois de la crise des «subprimes». Deux phases historiques qui ont évolué de manière absolument corollaire, pour ainsi dire «mathématique», et en maintenant le même état d'esprit que le fut la première. «On guérissait le mal par le mal», l'excès d'argent qui a causé la crise spéculative par encore de l'excès d'argent. C'était finalement ce processus ou le chaos. En fait, on doit le mal, mais il faut relativiser ce mal qu'est l'argent; il a permis durant la première période de doper l'économie mondiale, puisque l'Occident comme les pays du reste du monde ont gagné, la deuxième période, après 2008, c'est bien l'argent massivement injecté, les «quantitatives easing» des Banques centrales qui ont sauvé, qui ont remis sur pied leurs économies, et ce faisant, ils ont dopé les pays du reste monde, du moins les pays émergents et exportateurs de pétrole, jusqu'en 2014. De plus, il faut le souligner, c'est la conjoncture mondiale qui l'a commandé; il n'y avait pas d'alternative; ni la Banque centrale américaine ni européennes n'y pouvaient rien; elles devaient corriger le tir durant la deuxième période. Bien sûr, les économies américaines et européennes sont certes reparties, et c'est une vérité, mais «sur fond d'endettement». «Le problème pour les Américains est qu'ils doivent rembourser». Ils n'ont pas le choix. Ils ont consommé plus qu'ils n'en avaient le droit. Beaucoup croient que la dette américaine n'est pas remboursable. Ils se trompent, les Américains doivent rembourser leurs dettes au reste du monde, sauf que le remboursement se fait selon les règles habituelles entre créancier et débiteur. Et surtout, et il ne faut pas perdre cette règle à première vue, «les États-Unis n'obligent pas les pays européens et les pays du reste du monde à investir dans leur économie, comme à acheter les titres de dettes publiques (bons de Trésor de différentes maturités en dollars) émis par le Trésor américain. De même, les pays d'Europe n'obligent pas les pays du reste du monde à acheter des bons de Trésor européens en euros. Il y a une confiance entre les pays émetteurs de monnaies internationales et les pays du reste du monde dont la grande majorité ont besoin des monnaies internationales, principalement le dollar US, l'euro et le yuan chinois, et accessoirement la livre sterling et le yen japonais. Cependant, aujourd'hui, le monde n'est plus aux années 1980 lorsque Paul Volcker a relevé le taux d'intérêt directeur de la Réserve fédérale américaine (Fed) de 10% à 20%. Et brusquement le monde s'est trouvé comme par magie endetté. Nous connaissons la suite et les conséquences qui ont suivi, un endettement mondial qui a mis à genoux les économies des pays en développement. Même l'Union soviétique endettée a été effacée de l'histoire, elle a cessé d'exister en 1991. Et sa périphérie européenne (pays de l'Europe centrale et orientale) est allée renforcer l'Europe de l'Ouest au point qu'aujourd'hui il n'y a plus d'Europe de l'Ouest mais d'Europe tout court et qui cherche même à s'agrandir de l'autre Europe, voire même de la Russie (sait-on jamais ?). Et d'ailleurs, cette expansion est à l'origine de la guerre en Ukraine, en 2022. Aussi, donnons quelques chiffres pour connaître la situation financière de la première puissance économique du monde. Scindons la période 2001-2014 en trois phases pour comprendre le déroulement des événements. Comme on l'a dit, l'entrée en guerre des États-Unis, après le 11 septembre 2001, a été particulièrement nourrie par les liquidités monétaires déversées par la Fed. C'est ainsi que les déficits courants américains ont explosé, passant de -395 milliards de dollars en 2001 à -687 milliards de dollars en 2008. Le pic a été atteint en 2006, avec un total de -807 milliards de dollars, au plus fort de la guerre en Irak; les tensions étaient extrêmes et les États-Unis menaçaient d'étendre la guerre à l'Iran. Ce n'est qu'à partir de 2007, lorsque la crise immobilière a fait son apparition aux États-Unis, que le déficit de la balance des paiements courants a commencé à diminuer. À -719 milliards de dollars en 2007, -687 M$ en 2008, avec 1 M$ = un milliard de dollars. (1) Le déficit public américain, annulé en 1999, puis positif en 2000, à +0,8% du PIB américain (sous la présidence Clinton), a de nouveau augmenté. Il passe en 2001 à -1,4% du PIB, en 2002 à -4,8% du PIB, en 2003 à -5,9% du PIB... pour atteindre en 2008, -7,2% du PIB (-1042,416 M$). Quant à la dette publique américaine, sous la présidence de Bill Clinton, elle passe de 70,6% du PIB en 1993 à 48,1% du PIB (4646,941 M$) en 2000; elle a fortement baissé, de plus de 20%. Sous la présidence Bush, la dette publique a au contraire augmenté, passant de 50,7% du PIB (5214,495 M$) en 2001 à 78,1% du PIB (11307,318 M$) en 2008. (1) Ces chiffres donnent une idée de l'évolution de la dette publique américaine. Après l'éclatement de la crise immobilière et financière en 2007-2008, commencent les programmes de quantitative easing. Mis en œuvre durant la crise (QE1), d'autres programmes de quantitative easing vont suivre après 2008. Le dernier programme (QE3) se termine en octobre 2014. Le déficit courant américain baisse fortement avec la récession en 2009 et passe à -381 milliards de dollars; il atteint en 2010, 2011, 2012, 2013, 2014, respectivement -444 M$, -459 M$, -461 M$, -400 M$, -411 M$. En 2015, le déficit courant est de -410 M$. Si les déficits courants diminuent, en revanche, les déficits publics explosent. En 2009, le déficit public américain est à -12,8% du PIB, soit 1884,032 milliards de dollars. Bien qu'il baisse en 2010, 2011, et 2012, il reste néanmoins élevé, et se compte respectivement à -12,2% du PIB, -10,7% du PIB, -9,0% du PIB. Ce n'est qu'en 2013 qu'il descend à -5,7% du PIB, soit -921,291 M$. En 2014, le déficit public est à -5% du PIB. Quant à la dette publique, elle augmente mécaniquement. De 78,1% du PIB (11307,318 milliards de dollars) en 2008 à 92,5% du PIB (13615,075 M$) en 2009. En 2010, 2011, 2012, la dette publique américaine augmente encore et s'établit respectivement à 101,8%, 107,7% et 110,5% du PIB. En 2014, la dette publique s'établit à 110,1% du PIB, soit 18461,568 M$. (1) Que constatons-nous pour les deux périodes, c'est-à-dire celle des «subprimes» et celle des «quantitative easing» (QE1, 2, 3) qui ont suivi ? Que sous la présidence Bush et Obama, la dette américaine a plus que doublé en une décennie et demie. On est loin de la situation financière laissée par le président Clinton. Au vu de cette dégradation économique, force de dire que l'économie américaine a vécu une situation d'extrême faiblesse qui a nécessité une formidable monétisation des déficits courants et publics pour s'inscrire dans la croissance. Et le reste de l'Occident, dont l'Europe, a suivi le processus avec aussi un endettement en hausse. Une question cependant : «qui a profité aussi de ses déficits jumeaux ?» 2. «Qui mène le jeu mondial, l'Occident ou le reste du monde ?», il va de soi que c'est l'Occident nonobstant l'endettement de l'Occident Les déficits de la balance courante et publics américains ont été colossaux, et se sont traduits par des pertes financières tout aussi colossales. Et donc un endettement extérieur américain colossal. La Chine en premier a profité de la guerre menée par les États-Unis au Moyen-Orient et son corollaire, son endettement qui a accompagné les dépenses militaires et la forte consommation intérieure. En 2000, les réserves de changes de la Chine s'établissaient à 165,574 M$. En 2005, ses réserves de change quintuplent pour atteindre 818, 872 M$. En 2008, ses réserves de change ont été multipliées par 12 pour atteindre 1.966,200 M$. (1) *Auteur et chercheur spécialisé en Economie mondiale,Relations internationales et Prospective Notes : 1. États-Unis, Chine, Russie, Japon. Balance des paiements courants-Déficit/surplus public-Dette publique-taux de chômage-Réserves de change-Taux de chômage-PIB en milliards de dollars http://data.lesechos.fr/pays-indicateur/etats-unis/balance-des-paiements-courants.html http://data.lesechos.fr/pays-indicateur/etats-unis/deficitsurplus-public.html http://data.lesechos.fr/pays-indicateur/etats-unis/dette-publique.html http://data.lesechos.fr/pays-indicateur/chine/reserves-de-change.html http://data.lesechos.fr/pays-indicateur/russie/reserves-de-change.html http://data.lesechos.fr/pays-indicateur/etats-unis/taux-de-chomage.html http://data.lesechos.fr/pays-indicateur/etats-unis/pib.html http://data.lesechos.fr/pays-indicateur/japon/dette-publique.html |