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La justice a
tranché : « Le mouvement de grève des magistrats est illégal ». La sentence est
tombée dimanche sous forme d'une ordonnance en référé d'heure en heure rendue
par le tribunal administratif de Tipaza. L'ordonnance en question juge le
mouvement annoncé et observé par le Syndicat national des magistrats (SNM)
illégal car « sans notification préalable ni respect du service minimum, outre
l'occupation illégale des postes de travail et l'atteinte à la liberté de
travail », a indiqué avant-hier le ministère de la Justice dans un communiqué.
«Ce mouvement de grève est illégal, car intervenant en contradiction des dispositions de l'article 12 de la loi organique portant statut de la magistrature et entravant le bon fonctionnement d'un service public sensible, en l'occurrence la magistrature, ainsi que les intérêts des citoyens, d'autant que des juges ont été empêchés d'exercer leurs fonctions et de poursuivre le travail judiciaire », a argumenté le ministère dans son communiqué. Cette ordonnance contraint la partie défenderesse, à savoir le SNM, représentée par son président, à «ne pas entraver l'action judiciaire et de ne pas empêcher les magistrats d'exercer leurs fonctions et de quitter les lieux de travail », lit-on dans le communiqué. Le ministère de la Justice a réitéré encore une fois sa disposition à faire prévaloir le dialogue et la sagesse au mieux des intérêts du citoyen et de l'intérêt général, a conclu le communiqué du ministère. L'ordonnance du tribunal de Tipaza intervient, note-t-on, dans un climat de haute tension entre les magistrats grévistes et leur ministère de tutelle. Une tension qui a atteint dimanche son apogée avec les troubles sans précédent qu'a connus l'enceinte de la Cour d'Oran où les forces de l'ordre sont intervenues sur demande du parquet général pour faire face à une tentative d'empêchement de l'ouverture de la session criminelle. Pour rappel, les magistrats grévistes de la Cour d'Oran se sont rassemblés dans l'enceinte même de la Cour et ont tenté par la suite d'empêcher l'ouverture de la session criminelle qui devait avoir lieu dans la matinée. La Gendarmerie nationale et la police dépêchées sur les lieux sont alors intervenues. Une scène surréaliste qui s'est déroulée sous les yeux abasourdis de dizaines de citoyens. Des vidéos prises par des témoins présents sur les lieux, largement diffusées sur les réseaux sociaux, montrent en effet des éléments de la Gendarmerie nationale en uniformes et équipements antiémeutes en train d'avancer en rangs serrés à l'intérieur même du tribunal, et en face d'eux des personnes, vraisemblablement des magistrats qu'ils tentent de disperser. L'incident a fait réagir le Syndicat national des magistrats (SNM) le jour même en début de soirée à travers un communiqué où il a dénoncé « une dérive dangereuse » qui viole aussi bien « les lois nationales que les pactes internationaux ». Pour l'organisation syndicale, ce qui s'est passé à la Cour d'Oran « ne peut être justifié même pendant les périodes de guerre ». L'organisation syndicale annonce même « la rupture de toutes formes de médiation et de dialogue visant à trouver une issue à la crise » jusqu'au départ du ministre de la Justice Belkacem Zeghmati. De son côté, le Club des magistrats, en cours de constitution, a réagi en des termes encore plus acerbes. Pour lui, le recours à la force publique contre les magistrats au sein même de la Cour de justice d'Oran est un « comportement lâche » qui est l'œuvre des « sbires du ministère de la Justice ». « Cela dénote du degré de narcissisme et de la dictature que subissent les magistrats et qui est arrivé jusqu'à la réquisition de la force publique pour réprimer par l'agression des juges et des procureurs de la République dont le seul tort est d'avoir voulu s'affranchir effectivement d'un ministère brutal », affirme par ailleurs la même source dans un communiqué. Rassemblement devant la Cour suprême Dans une tentative d'apaisement, le Conseil national des droits de l'Homme a saisi l'occasion de sa rencontre, dimanche, avec le président du SNM pour exprimer dans un communiqué diffusé hier, d'abord ses vives préoccupations après les incidents qui se sont déroulés à la Cour d'Oran avant de lancer un appel à l'adresse des pouvoirs publics les invitant à continuer à agir conformément aux règles du professionnalisme comme ils l'ont déjà fait tout au long du Hirak populaire, sans omettre d'appeler également les magistrats à faire preuve d'un comportement digne de leur statut et de leur rang à même de préserver le prestige de leur fonction et son indépendance. Il est à noter enfin, qu'à l'appel de leur syndicat, des dizaines magistrats ont observé hier un rassemblement de soutien à leurs collègues de la Cour d'Oran devant la Cour suprême à El Biar, sur les hauteurs d'Alger, au même moment où se déroulait au tribunal de Sidi M'hamed l'installation du nouveau procureur de la République et de la nouvelle présidente du tribunal. Lors de ce rassemblement, les magistrats ont réitéré leurs revendications relatives à l'annulation des mutations décidées par le ministère et à la concrétisation effective de l'indépendance de la justice vis-à-vis du pouvoir politique. |