L'Algérie
est face à un dilemme : soit continuer sur le rythme de ce plan de planche à
billets et encaisser les coups à moyen terme, faute de stratégie industrielle
ou agricole pour sortir du bourbier de la dépendance économique, soit recourir
à l'endettement extérieur et c'est la catastrophe ! Voulant « préserver la
souveraineté nationale », sans se donner les moyens qu'il en faut, le Premier
ministre Ahmed Ouyahia qui a opté pour la planche à
billets n'a pas de quoi se targuer aujourd'hui, lorsqu'on sait que le taux
d'inflation est, à la fin de l'année 2018, de l'ordre de 6.5% (à peu près le
même niveau que la Tunisie). Si la stratégie de ce dernier a porté ses fruits,
d'autant que la croissance est passée de 1.4% en 2017 à 2.5% en 2018,
l'embellie n'en reste pas moins de courte durée. La Banque mondiale aurait
signalé dans son dernier rapport annuel sur l'Algérie que celle-ci devrait
accuser un recul économique dans les années à venir. Ainsi le chômage
augmentera-t-il à 17.8% en ce 2019 après qu'il était de 17.2% en 2017. Si notre
économie rentière résiste encore, c'est surtout grâce à l'augmentation relative
des revenus pétroliers, lesquels génèrent plus de 70% des recettes fiscales de
l'Etat et contribuent pour la moitié du PIB (en effet, les prix du pétrole sont
passés de 53 dollars à 68 dollars pour le baril en un an). Cela aura permis,
entre-temps, au pouvoir en place de jouer sur une petite marge de manœuvre, en
freinant son accélérateur sur la loi de l'austérité pour contenter un front
populaire en ébullition. Le Fonds monétaire international (F.MI) qui préconise
des réformes structurelles profondes, autrement dit la maîtrise des dépenses
publiques, la réduction des factures astronomiques des importations, la
suppression progressive des subventions généralisées, lesquelles coûtent
environ 14 milliards de dollars aux caisses de l'Etat, peine à être écouté du
côté d'Alger. Contre toute attente, sans doute en perspective des échéances
électorales d'avril prochain où Bouteflika est fortement pressenti candidat de
l'establishment pour un cinquième mandat consécutif, l'exécutif a même lâché du
lest concernant les mesures d'austérité pourtant prévues dans la loi de
finances 2018. A cet effet, il a acté une augmentation de 7.9% des dépenses
sociales. Le texte de loi prévoit un coup de pouce pour les transferts sociaux.
Les recettes complémentaires doivent provenir d'une hausse modérée de la
fiscalité des entreprises, et surtout de la taxation de l'industrie pétrolière,
ce qui n'encourage pas du tout l'investissement et la relance de l'emploi pour
la jeunesse. En plus, dans le même projet de loi 2018, l'Etat a reporté
l'agenda de la politique de la diversification économique, promise en haut lieu
à plusieurs reprises. Tout semble en statu quo, alors que le pays s'apprête, de
l'avis de tous les observateurs, à une transition politique difficile au
printemps prochain.