Pour
beaucoup, la disparition d'un être cher est un séisme destructeur emportant
avec lui une part entière d'eux-mêmes. Ils ne s'en relèvent pas. Ou plutôt
difficilement et très longtemps après le terrible choc. Le vide que laissent
les morts parmi nous n'est jamais rempli. Seuls les souvenirs et leurs tombes
prolongent les liens affectifs et maintiennent la mémoire et sa transmission
d'une génération à l'autre. Et, il serait très pénible de ne pas pouvoir se
recueillir sur leurs sépultures un jour sacré comme celui de l'Aïd. La cause
incombe à un sérieux manque d'entretien de nos cimetières pour ne pas dire
-carrément - leur abandon par les autorités locales qui semblent ne pas avoir
d'yeux pour les morts et encore moins le cœur sensible à ces lieux de silence
qui devraient imposer le respect et la dignité des défunts. Il est regrettable
de voir nos cimetières, chargés d'histoire et d'hommes remarquables, tomber
dans l'oubli et le laisser-aller. Un nombre considérable de tombes sont
disloquées, d'autres effondrées, plaques cassées en morceaux par des
profanateurs, allées enherbées ou disparues sous un foisonnement d'herbes
folles et sauvages de plus d'un mètre de haut rendant les tombes impossibles à
trouver. Des enfants en fête, joliment habillés pour la circonstance, heureux
d'accompagner leurs parents pour perpétuer les usages, se voient déçus de ne
pas trouver le lieu où repose l'être cher, la grand-mère, le grand-père... Les
visages marqués, laissant apparaître le ressentiment et la colère. La désapprobation
est criée à haute voix : où est ce maire censé être le protecteur de ces lieux
pleins de douleurs ? L'expression de ces émotions n'est pas un fait de
circonstance mais indique le délitement et le recul partout constaté dans la
gestion de nos villes. L'insalubrité, la violence, le désert culturel,
l'abandon des « espaces verts », le commerce sauvage, le squat de l'espace
public, le piteux état des trottoirs, le centre-ville en ruine et à présent ce
sont les cimetières qui subissent l'administration approximative de la chose
publique et l'impuissance de ceux qui ne sont pas à la hauteur de la
responsabilité pour laquelle ils étaient élus.
Secouez-vous
messieurs, ne demeurez pas impassibles face à la douleur des vivants en
injuriant la mémoire impérissable des défunts par vos attitudes léthargiques et
irrespectueuses? car la mort n'oublie personne - elle est juste et aura
certainement le dernier mot contre tout le monde.