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Un
article très intéressant (1) a paru sur Le Quotidien d'Oran, signé par Nouriel Roubini, économiste
réputé parce qu'il est un des rares qui ont vu venir la crise de 2008. Il est
parfois surnommé «Docteur Catastrophe» du fait de ses prévisions très sombres.
Professeur d'économie à la Stern School of Business
de l'université de New York, Nouriel Roubini a publié un nouvel ouvrage (Mégamenaces,
Buchet-Chastel, 384 pages), où il recense les risques
auxquels les économies occidentales seront confrontées en 2023 et, bien sûr,
au-delà, s'étendant aux économies émergentes et les pays en voie de
développement, bref à l'ensemble des pays du reste du monde. Qu'en est-il de la
menace d'une crise et non seulement financière qui peut toucher le monde, et
par les conséquences de la guerre en Ukraine ? Et la question pourquoi une
crise multiforme qui pourrait apparaître ? Et surtout comment ?
Aussi, tout au long de son article, l'auteur apportera au fur et à mesure des éclaircissements, les lecteurs pourront en juger de la fiabilité des réponses, certaines relèveront de la métaphysique ; mais un sujet aussi important et surtout aussi grave non seulement pour le futur de l'économie mondiale, la crise financière deviendra mécaniquement économique pour l'ensemble du monde, qui partira de l'Occident, mais aussi ce qui ressortira pour la paix mondiale. Il faut le dire avec l'escalade dans cette guerre qui oppose l'Ukraine soutenue par tout l'Occident pour des intérêts bien compris, il s'agit du «leadership de l'Occident» sur le monde qui est menacé, et qui explique le bras de fer de l'Occident face à la Russie et les pays, comme l'écrit Nouriel Roubini, «les puissances révisionnistes alignées (sinon alliées) que sont la Chine, la Russie, l'Iran, la Corée du Nord et le Pakistan ses alliés». Dès les premières lignes de l'article, le ton est péremptoire de l'économiste américain qui écrit : «NEW YORK ? L'inflation se sera, en 2022, brusquement rappelée à nous, tant dans les économies avancées que sur les marchés émergents. Les tendances de fond suggèrent que le problème n'a rien de transitoire, et qu'il est là, bien au contraire, pour durer. Ainsi, de nombreux pays sont-ils aujourd'hui engagés dans des «guerres», réelles ou métaphoriques, qui conduiront au creusement des déficits budgétaires, à une monétisation croissante de la dette et à la hausse des taux d'inflation». (1) Ce que l'auteur énonce est absolument vrai, et comme il le dit : «le problème n'a rien de transitoire, qu'il est là, bien au contraire pour durer». Certes, il fait mention des «guerres» mais, on ne peut s'empêcher de dire que toute guerre a un sens dans la marche du monde. Nous y reviendrons. «Le monde souffre d'une forme de «dépression géopolitique», que vient couronner l'escalade de la rivalité entre l'Occident et les puissances révisionnistes alignées (sinon alliées) que sont la Chine, la Russie, l'Iran, la Corée du Nord et le Pakistan. Les temps sont à la guerre, déclarée ou froide. La brutale invasion de l'Ukraine par la Russie peut encore s'étendre et contraindre l'OTAN à réagir. Israël ? et avec lui les États-Unis ? est engagé sur une route de collision avec l'Iran, qui n'est plus loin du seuil d'accession à la puissance nucléaire. Le Moyen-Orient, plus largement, est un baril de poudre. Pendant ce temps, les États-Unis et la Chine, face à face, se disputent la domination de l'Asie et se demandent si ou quand Taïwan sera réunie par la force au continent». Si le monde souffre de «dépression géopolitique», que vient couronner l'escalade de la rivalité entre l'Occident et la Russie qui n'est pas seule dans le conflit, il y a aussi la Chine qui, sur le plan économique, talonne les États-Unis ; elle est déjà deuxième puissance économique du monde depuis 2010, en parité de pouvoir d'achat (PPA), selon les déclarations du FMI ; avec ses 1,4 milliard de Chinois, «travailleurs», ayant acquis un grand savoir, une grande maîtrise technologique dans tous les domaines de l'industrie, la Chine est devenue l'«atelier du monde», comme l'étaient les États-Unis naguère dans les années 1940 ; elle deviendra inévitablement la première puissance du monde dans une ou deux décennies, et forcément la première puissance économique, financière et monétaire du monde. Quant «à la brutale invasion de l'Ukraine par la Russie, elle peut encore s'étendre et contraindre l'OTAN à réagir», la réponse peut paraître possible, et tout ce que fait et pense l'humain est possible, sauf un seul cas, celui de la finalité de l'arme nucléaire. Et cette «arme nucléaire a pour finalité d'empêcher toute extension de la guerre ; aucune puissance au monde ne voudrait son propre suicide pour une guerre qui, en Ukraine, tout compte fait est externe pour l'Occident. De même, elle ne se déroule pas sur le territoire russe. Que la Russie brandisse l'arme nucléaire et l'Occident répond qu'il n'a pas peur d'un conflit nucléaire, que ce conflit nucléaire arrive pour une raison ou une autre, que l'extension devient réelle, les puissances l'étoufferont immédiatement dans l'œuf. Elles ne voudront en aucun cas voir des millions d'êtres humains mourir en quelques heures, tout au plus quelques jours, avec des ultimatums, la panique, l'effroi s'étendre sur les villes occidentales, russes, chinoises... qui auront à disparaître en cas de guerre nucléaire soutenue, comme cela fut pour Hiroshima et Nagasaki. Cependant, il est probable que, suite à la guerre en cours, un événement grave se produise et provoque un bouleversement général dans la région de l'Ukraine et sa périphérie. Il pourrait être provoqué en Ukraine, et toucher les pays frontaliers, membres de l'OTAN, la Russie et la Biélorussie. Cet événement potentiel du fait que non seulement il changera le cours même de la guerre, mais par les conséquences qui résulteront et dans un certain sens ressemblant aux effets d'une pandémie du type Covid-19 ou d'une arme nucléaire mais beaucoup plus moindre, il accélérera la fin du conflit. Une telle situation obligera les puissances à mettre fin à la guerre, les poussera à faire tous les compromis possibles, de part et d'autre, pour sortir de cette guerre, qui est à la fois «insensée et sensée». Que Nouriel Roubini énonce : «Israël ? et avec lui les États-Unis ? est engagé sur une route de collision avec l'Iran, qui n'est plus loin du seuil d'accession à la puissance nucléaire», on peut lui répondre : «Peu importe que l'Iran accède à la puissance nucléaire, les armes nucléaires ne donnent pas à manger au peuple iranien ; l'Union soviétique était le deuxième Grand du monde face aux États-Unis ; ses milliers d'ogives et vecteurs nucléaires et ses arsenaux, à la fin des années 1980, n'ont pas empêché le peuple russe d'avoir faim, une crise économique et financière avec une hyperinflation, allant jusqu'à 2.000% par an, dès 1989, entraînant une perte de valeur du rouble considérable en quelques années. Résultat : l'Union soviétique est dissoute en décembre 1991. Débâcle qui a suivi déjà celle des pays de l'Europe de l'Est après la chute du Mur de Berlin, en novembre 1989. «Le Moyen-Orient, plus largement, est un baril de poudre. Pendant ce temps, les États-Unis et la Chine, face à face, se disputent la domination de l'Asie et se demandent si ou quand Taïwan sera réunie par la force au continent», poursuit Nouriel Roubini. Cette appellation de «Moyen-Orient, un baril de poudre» est plus galvaudée que réel ; elle l'était certes, aujourd'hui, le Moyen-Orient est en train de se stabiliser. Même le pétrole et le «pétrodollar» deviennent de moins en moins une carte vitale pour la puissance américaine. Si le «pétrodollar» domine toujours dans la facturation... dans cette région et ce sont les États-Unis qui en émettent, via la Banque centrale américaine (Fed), ont compris que ces pétrodollars les aident certes à financer «sans fatigue économique» leurs déficits commerciaux et courants qui sont structurels, mais, malgré tout, ces «pétrodollars» profitent aussi aux pays du reste du monde, en particulier la Chine. Cependant, si le pétrole des pays arabes, par exemple, n'est pas facturé en dollar US, une question se pose : la Banque centrale américaine pourra-t-elle émettre massivement des liquidités en dollars à partir de rien ? Le pourra-t-elle ? Il faut se rappeler le krach d'octobre 1987 et le bras de fer entre la Fed américaine et la Banque centrale de la République fédérale allemande (RFA). La Deutsche Bundesbank, anticipant, a relevé son taux d'intérêt directeur ; l'objectif était pour elle de faire barrage à la Fed qui avait besoin d'importantes masses de liquidités en dollar pour financer les déficits américains. La Bundesbank craignait que le relèvement du taux d'intérêt directeur entraînerait une fuite de capitaux allemands vers les États-Unis. Comme ce qui s'est passé, lorsque le président de la Fed américaine, Paul Volcker, en relevant en 1979 et 1980 le taux d'intérêt à 20%, a siphonné une grande partie des liquidités mondiales en circulation dans le monde. Attiré par le haut taux d'intérêt, les liquidités en dollars dans le monde, y compris les liquidités internationales en franc, en livre sterling, en deutschemark, en yen, qui se sont empressées de se convertir en dollar, se sont placées aux États-Unis, provoquant une dépréciation majeure, il faut dire historique, des monnaies européennes. Le dollar s'est apprécié sans discontinuer entre 1980 et 1985, il est passé de 4 Fr à 10 Fr en 1985, le deutsche mark est passé de 1,5 DEM à 3 DEM pour un dollar, idem pour les autres monnaies internationales. Or, le problème qui s'est posé pour la Banque centrale américaine, elle aurait pu utiliser le pétrodollar et donc injecter massivement des liquidités monétaires et ce faisant financer les déficits commerciaux extérieurs et passé outre le barrage de la Banque centrale allemande. Et donc la Fed n'aurait pas à relever son taux d'intérêt directeur. En augmentant fortement le prix du baril de pétrole, elle aurait opéré comme en 1979, c'est-à-dire faisant augmenter le prix du pétrole. Les pays arabes surtout qui facturent leur pétrole en dollar US, les autres pays de l'OPEP suivraient immédiatement parce qu'ils ont à gagner avec la hausse des prix du pétrole, obligeraient mécaniquement les pays du reste du monde importateurs de pétrole à acheter plus cher le pétrole. Le processus financier et monétaire pour les États-Unis est que les liquidités massives en dollars émises par la Fed trouveraient preneurs, en particulier par les pays européens qui sont forcés d'acheter en dollar le pétrole arabe et des pays Opep, dont bien sûr la République fédérale allemande. Et là, il n'y aurait pas eu de bras de fer. La RFA sera obligée de convertir massivement des liquidités DEM en dollar, et financerait une part des déficits extérieurs américains. En clair, comme les monarchies arabes relèvent, sur le plan de leur défense, du parapluie nucléaire américain, les pétrodollars, c'est-à-dire la facturation de leur pétrole en dollar US est vitale pour les États-Unis. Sans les pétrodollars, la Banque centrale américaine serait impuissante pour monétiser les déficits commerciaux US, de même les programmes de quantitative easing ou politique monétaire non conventionnelle, comme elle a opéré après la crise financière, en 2008, serait interdite. Monétiser les déficits extérieurs US sans les pétrodollars par la FED serait de provoquer une très forte dépréciation du dollar américain qui, affectant les marchés, entraînerait un krach boursier. Comme ce qui s'est passé pour la Bourse de Wall Street, en octobre 1987. La question se pose pourquoi la Fed n'a pas activé le pétrodollar, véritable levier non-dit dans la politique monétaire de la Banque centrale américaine. La réponse se trouve dans la situation dans laquelle se trouvait l'économie de l'Union soviétique. Tout d'abord le contrechoc pétrolier de 1986 a été vécu comme un choc pour l'Union soviétique. En effet, ses avoirs en fortes devises principalement en dollar, ont subi une très forte correction à la baisse. Il faut rappeler la réunion des principaux Banquiers centraux occidentaux, à l'hôtel du Plaza, à New York, qui, s'entendant pour procéder à l'atterrissage en douceur du dollar, ont signé des accords dans ce sens ; ce sont les Accords de Plaza, de septembre 1985. Et c'est à partir de cette date que le dollar a commencé à se déprécier pour revenir, du moins se rapprocher de son taux de change de 1979 ; il s'est progressivement déprécié pour atteindre une chute pratiquement de 100%. Et c'est cette dépréciation du dollar qui a affecté négativement l'économie soviétique ; couplé au faible cours du prix du pétrole, depuis 1986, à l'endettement du reste du monde (Afrique, Asie, Amérique du Sud), ce qui a porté un coup très dur à l'Union soviétique, il est évident que les États-Unis ne devaient en aucun cas actionner le levier du pétrodollar, pour éviter que l'économie soviétique rebondisse. Et c'est dans ce contexte que le bras de fer a surgi entre la Banque centrale américaine et la Banque centrale allemande. Face au relèvement du taux d'intérêt directeur de la Bundesbank, la Fed a réagi très mal et a injecté massivement des liquidités monétaires, malgré les Accords du Louvre, du 22 février 1987. Le résultat est immédiat : fuite massive de liquidités hors des États-Unis et krach de la Bourse de Wall Street. Le jour même, à l'époque Alan Greenspan qui venait d'être nommé président de la Fed et James Baker, secrétaire d'État au Trésor, rencontrèrent leurs homologues allemands et ont vite réglé cette crise. Il ne demeure pas moins que l'Union soviétique était dans le viseur des grands argentiers européens et américains. Finalement, l'Union soviétique cessa d'exister, en décembre 1991, et même le Japon en fit les frais, puisque lui aussi entra dans une crise financière et entra longtemps dans une dépression économique. On comprend dès lors que le pétrodollar joue un rôle plus que considérable, il est central non seulement dans l'économie américaine mais dans l'économie mondiale. Il faut le souligner, il profite certes aux pays exportateurs, et ce faisant, par les formidables injections monétaires, il finance l'économie mondiale, mais il demeure qu'il profite plus à la puissance américaine. Si demain, le pétrole est aussi facturé en yuan, il est déjà facturé en rouble depuis l'invasion de l'Ukraine par la Russie, le danger est pendant pour l'Occident tout entier puisque l'Union européenne, de même le Japon et le Royaume-Uni partage aussi indirectement le droit seigneurial qu'ont les États-Unis sur le pétrole arabe. Puisque les Banques centrales de ces pays disposent aussi du pouvoir d'injecter des liquidités monétaires à partir de rien lorsque le dollar se déprécie fortement, pour éviter que leurs monnaies se renchérissent, ce qui nuit à leurs exportations (plus chères). Cependant, ce processus dure depuis les années 1970, et même avant, et le système a pris naissance à Bretton Wood, en 1944, le dollar était, à l'époque, la seule monnaie dans le monde convertible en or. Et le monde aujourd'hui a beaucoup évolué et la situation change de plus en plus avec les nouvelles puissances économiques qui sont concurrentes à l'Occident. La question se pose : «Jusqu'à quand les États-Unis et l'Occident tout entier s'endettent en dollar, en euro, en livre sterling, en yen... et consomment, le reste du monde, en particulier, les pays émergents, produisent, vendent leurs exportations» ? Jusqu'à quand les pays du reste du monde exportent vers l'Occident, en retour, ces pays reçoivent des dollars, des euros..., il est clair qu'il viendra un jour où ce processus s'arrêtera inévitablement, et alors ce serait la fin de la mondialisation ? Ou une organisation économique du monde plus équilibrée, une nouvelle mondialisation, on ne saurait croire que l'humanité va revenir aux zones dollar, euro, yuan... comme dans les années 1930. Une chose est certaine, il est impossible qu'une partie du monde consomme, s'endette indéfiniment grâce à son pouvoir d'émission monétaire qu'elle a sur le monde, et à sa discrétion totale, l'autre partie du monde ne cessant d'exporter ses richesses physiques pour recueillir le produit de ce qu'elle exporte en numéraire, en papiers, en liquidités monétaires électroniques internationales émises par les Banques centrales occidentales. Il faut se rappeler la livre britannique qui a régné longtemps sur le monde, le dollar est venu ensuite la remplacer, l'euro est venu à son tour pour «partager», de même le yuan chinois est venu en 2016, d'autres monnaies viendront et, fatalement, obligatoirement, changeront les donnes, elles assureront un meilleur équilibre au commerce mondial, une meilleure distribution des richesses dans le monde. Et l'Occident en est conscient ; un des enjeux les plus importants sur cette donne et qui divise le monde se joue précisément dans la guerre en Ukraine. Quant au Moyen-Orient, il deviendra tôt ou tard une région comme une autre, une région stable, le pétrole perdra son caractère stratégique. Il l'a été hier avec toutes les guerres qui sont survenues depuis au moins 70 ans, et toujours au nom du «pétrodollar» que seuls les États-Unis émettent, et il l'est encore aujourd'hui. Cette situation moyen-orientale ne peut durer indéfiniment. Comme l'énonce l'économiste américain, le face à face États-Unis et la Chine, certes, a pour enjeu la domination de l'Asie, de même la question «se demandent si ou quand Taïwan sera réunie par la force au continent.», il est clair que la Chine a pour elle le temps, elle sait que «Taïwan ne va pas s'envoler», que les Chinois qui habitent la Chine ou les Chinois qui habitent Taïwan sont tous Chinois, et à quoi bon la force ? Si un jour, encore mieux, le temps travaillait pour la Chine, à quoi bon user de la force si la situation peut se résoudre «historiquement et pacifiquement» ; dans le sens que, les années à venir, un nouveau rapport de forces, de puissance économique, financière et monétaire surviendrait et changerait au profit de la Chine ; une situation potentielle à venir et tous les économistes du monde s'accordent à le dire. Dire qu'«en conséquence de quoi les États-Unis, l'Europe et l'OTAN réarment, comme à peu près tout le monde au Moyen-Orient et en Asie, le Japon compris, qui s'est lancé dans un effort militaire comme il n'en avait pas connu depuis des dizaines d'années. Partout, l'augmentation des dépenses d'armement, conventionnel ou non (non seulement nucléaire, mais cyber, biologique et chimique), n'est rien moins que certain, et les finances publiques en pâtiront. La guerre mondiale contre les changements climatiques coûtera cher elle aussi, tant au secteur public que privé. Il faudra des milliers de millions de dollars par an pendant les décennies à venir pour atténuer la modification du climat et s'y adapter, et il serait stupide de croire que ces investissements accéléreront la croissance. Après une guerre réelle qui a détruit en grande partie le capital physique d'un pays, une forte augmentation des investissements peut bien sûr se traduire par une expansion économique ; le pays en question s'est pourtant appauvri, car il a perdu une part importante de son patrimoine. Il en va de même des investissements climatiques : une portion significative des équipements existants devront être remplacés, qu'ils soient devenus obsolètes ou qu'ils aient été détruits par des événements météorologiques dus aux changements climatiques». Ce qu'énonce Nouriel Roubini est une réalité issue de la guerre, issue aussi de l'histoire ; personne ne s'attendait à une invasion de l'Ukraine par la Russie, y compris la Russie elle-même puisque trois décennies durant depuis l'éclatement de l'Union soviétique, il n'y eut que des promesses stratégiques par l'Occident pour tranquilliser la Russie alors que les pays d'Europe centrale et orientale (PECO) passaient corps et bagages à l'Ouest, renforçant le bras américain de puissance en Europe, l'Otan. Cette attente pour la Russie envers l'Occident était imposée par la marche même de l'histoire ; l'intégration des pays de l'Europe de l'Est était naturelle ; elle venait du libre choix des peuples des PECO qui ont vu dans les démocraties européennes une bouée de sauvetage, et à ce qui a prévalu dans la débâcle de leurs économies dans les années 1980 et aussi l'autoritarisme pur et dur du système soviétique socialiste qui leur a enlevé toute possibilité d'agir sur le destin de leurs pays. Pour ce qui est des dépenses coûteuses, elles ont aussi un sens économique. Et là, il faut débattre sur le pourquoi de l'inflation puisque ces dépenses non adossées à des contreparties de richesses produites et provoquant des déficits commerciaux qui vont encore se creuser vont mécaniquement augmenter l'inflation. Or, l'inflation qui a fortement augmenté, à partir de 2021, n'a mais dans l'économie mondiale, en rien à voir avec la guerre en Ukraine ; certes les Banques centrales occidentales ont pratiquement toutes augmenté leur taux d'intérêt directeur, en particulier la Fed et la Banque centrale européenne. Cependant l'inflation bien qu'elle ait diminué, elle persiste, et le paradoxe est la volonté occidentale d'abaisser les prix de pétrole de leur haut à plus de 100 dollars, entre 2021 et 20222 et, malgré le plafonnement du pétrole russe, les États-Unis qui règnent en maître dans la formation du prix du baril de pétrole et ses dérivés auraient voulu abaisser plus les cours pétroliers pour influer sur la Russie et la guerre en Ukraine, le paradoxe est qu'ils ne le peuvent pas, du moins ils sont limités dans la chute des cours pétroliers sur les marchés. Précisément, la guerre en Ukraine pour la forte hausse du pétrole comme pour l'inflation a un lien causal précis. En réalité, la situation pétrolière aujourd'hui remonte loin, et au moins à 2014 lorsque les États-Unis ont provoqué un contrechoc pétrolier. A l'été 2014, le prix du pétrole filait presque entre 120 et 130 dollars le baril, et brusquement avec la fin des «quantitative easing», c'est-à-dire la politique monétaire non conventionnelle et les programmes Q1, Q2, Q3 et l'opération twist menés durant 8 années après la crise financière de 2008, la fin de la dernière tranche de 10 milliards de dollars du Q3 a eu lieu en septembre 2014, le prix du baril de pétrole a caracolé non pas vers le haut, mais vers le bas, entre 50 et 60 dollars, en décembre 2014. Un prodige économique des marchés pétroliers relevant de la stratégie occidentale ? Toujours est-il, cette volte-face du prix du pétrole était tout compte fait «nécessaire». Il est évident que ce qui est dit par «nécessaire» relève de la situation économique mondiale qui englobait la situation macroéconomique des pays occidentaux, à l'époque. La situation occidentale était réellement mal en point et qui a «nécessité» les politiques monétaires non conventionnelles que l'Occident a menées longtemps et ce, malgré qu'il a provoqué un fort endettement public, pour certains pays notamment les États-Unis, la dette publique jusqu'à 100% du PIB, alors que les pays du reste du monde, cela a été le contraire, ils ont amassé des formidables réserves de change. La Chine de quelque 100 milliards de dollars à 4.000 milliards de dollars en 2014. L'exposé étant vaste, l'auteur, dans une prochaine analyse, tentera de compléter l'analyse de Nouriel Roubini avec les éléments de réponse sur les phénomènes qui ont survenu après 2014 et leur cours en fait logique dans ce qui a prévalu depuis 2019, de la pandémie Covid-19 à la guerre en Ukraine. Aussi, pour conclure, l'inflation restera élevée et ce au regard des coûts que provoquent à la fois la guerre en Ukraine et la «dépression géopolitique» en fait devenue mondiale. Le prix du pétrole restera normalement autour de 80 dollars en 2023-2024, cours qui sera dicté aussi par les dépenses occidentales et le financement en partie ex nihilo par leurs Banques centrales. L'or qui joue aussi la même fonction dans le pouvoir d'émission de la Fed pourrait dépasser les 2.000 dollars l'once. Évidemment, la fin de la guerre en Ukraine pourrait changer le processus, et progressivement inverser les donnes. *Auteur et chercheur spécialisé en Economie mondiale, Relations internationales et Prospective Note: 1. «Plus de guerre, c'est aussi plus d'inflation», par Nouriel Roubini. Le 26 février 2023 http://www.lequotidien-oran.com/index.php?news=5319154 https://www.project-syndicate.org/commentary/high-inflation-long-term-problem-owing-to-real-and-metaphorical-wars-by-nouriel-roubini-2022-12/french |