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Dr Lardjane
Dahmane est médecin conseiller
et concepteur en pédagogie des sciences de la santé.
Il est diplômé de l'Université de Montréal en pédagogie des sciences de la santé et de l'Université de Québec à Montréal en technologie éducative. Il a également exercé dans le cadre de la conception des environnements d'apprentissage en ligne en contexte de la formation continue. Dans cette entrevue, Dr Lardjane va nous parler de son projet de formation en ligne à la pédagogie médicale pour l'Algérie. Le Quotidien d'Oran : Vous avez lancé un service de formation en ligne à la pédagogie des sciences de la santé pour l'Algérie et en quoi consiste ce projet ? Lardjane Dahmane :Ce projet de formation est une offre de service d'apprentissage, de conseils et de soutiens en pédagogie des sciences de la santé conçue selon les normes modernes des sciences de l'éducation. Les formations offertes sont reconnues au Canada par la Société de formation et d'éducation continues (SOFEDUC). Nous sommes membres institutionnels de la SOFEDUC et nous sommes autorisés à émettre des unités de formation continue (UEC). Ces formations assurent le développement des compétences et des habiletés pédagogiques d'enseignement en mettant à la disposition des enseignants les moyens et les outils de communication et de collaboration nécessaires pour se former et se perfectionner en pédagogie médicale. Un certificat en pédagogie médicale et une lettre de suivi des apprentissages sont délivrés à la fin de chaque session de formation. Q. O.: Décrivez-nous votre démarche et quelles sont les missions de ce projet de formation pour l'Algérie ? L. D.: Notre démarche est une action citoyenne au service de la formation et des enseignements des sciences de la santé en Algérie, mais aussi au service des professionnels de la santé où ces derniers doivent pouvoir accéder facilement à des prestations d'apprentissage à la pédagogie médicale en ligne et de qualité. La mission de ce projet est également de permettre aux médecins enseignants d'optimiser leurs compétences et pratiques pédagogiques, et pour se tenir à la fine pointe de l'évolution des connaissances et des nouveautés dans le domaine de la pédagogie des sciences de la santé. En d'autres termes, ces formations sont centrées sur le développement des processus pédagogiques d'enseignement afin de répondre principalement à des objectifs de perfectionnement professionnel et de développement des habiletés pédagogiques d'enseignement en contexte de la formation continue. Q. O.: Décrivez-nous le contexte dans lequel vous avez élaboré ce projet de formation pour l'Algérie ? L. D.: Pour que nos institutions soient des lieux de formation crédibles et innovants, un élément fondamental ne doit pas être oublié: la pédagogie. Car, c'est par la pédagogie que fonctionne toute institution de formation en tant qu'instance de construction des savoirs. Dans ce contexte, il est important, voire essentiel, de former les enseignants à la pratique d'enseignement et de promouvoir l'acte d'enseigner comme la mission première de toute institution de formation. À cet effet, il faut mettre à la disposition des enseignants un environnement de formation en ligne centré sur les apprenants et les apprentissages conformes à l'approche par compétences. Pour ce faire, il est important de développer un éventail de stratégies pédagogiques qui favorisent l'apprentissage et la motivation. Q. O.: Quels sont les enjeux de l'enseignement et de la formation à la pédagogie médicale pour l'Algérie ? L'enseignement constitue la mission première de toute institution de formation, et la question de la qualité de l'acte d'enseigner doit être plus que jamais au centre des préoccupations des autorités facultaires, universitaires et des doyens des facultés de médecine. De plus, l'un des facteurs pour promouvoir la qualité de l'enseignement est la compétence pédagogique des enseignants, mais faut-il encore que les responsables soient sensibles véritablement aux enjeux de la mutation de l'université algérienne et des facultés de médecine en faveur de la pédagogie, mais aussi à l'amélioration de l'acte d'enseigner et des pratiques pédagogiques en milieu médical et universitaire. Q. O.: Quelles sont les valeurs ajoutées de ces formations pour la communauté médicale en Algérie ? L. D.: Comme valeurs ajoutées, la formation à la pédagogie médicale permet de promouvoir la qualité et la valorisation de l'acte d'enseigner en sciences de la santé. De plus, le certificat en pédagogie médicale pourrait servir comme critère de promotion, de nomination et de titularisation des enseignants hospitalo-universitaires dans la progression de leur carrière. Elle peut également servir comme levier pour promouvoir l'acte d'enseigner en milieu de santé, comme facteur de prise de conscience des médecins enseignants à propos de leurs pratiques d'enseignement et de leurs contrats pédagogiques avec leurs apprenants. Pour ce faire, les stratégies pédagogiques de formation doivent être conçues de sorte à assurer des apprentissages en ligne où les enseignants en milieu de santé pourraient bénéficier de connaissances de pointe dans le domaine de la pédagogie médicale et de l'utilisation des technologies de l'information et de la communication (TIC) à des fins d'apprentissage. Ainsi et comme valeur ajoutée, les médecins enseignants vivront une double et enrichissante expérience d'apprentissage à la pédagogie médicale et de formation en ligne. Q. O.: Vous avez opté pour la formation en ligne pour Algérie et pourquoi ce choix ? L. D.: Le choix de la formation en ligne a été d'abord dicté par le contexte de la Covid-19, mais aussi par l'étendue du territoire national, la dispersion géographique des facultés de médecine, le nombre important des médecins enseignants en milieu de santé, la rareté des intervenants spécialisés en pédagogie des sciences de la santé, et finalement les contextes socioprofessionnels et culturels des médecins enseignants et des hospitalo-universitaires en Algérie. De plus, l'apprentissage en ligne permet de réduire considérablement les coûts de formation, les distances, les déplacements, et la mobilisation des ressources humaines, des moyens et les structures pédagogiques sans oublier la possibilité de transfert de l'expertise pédagogique en Algérie grâce à l'utilisation des TIC. Enfin, ces formations seront disponibles en tout temps et les médecins enseignants pourront choisir le moment et le lieu pour apprendre tout en respectant leurs styles et leurs démarches d'apprentissage. Q. O.: Que pensez-vous de la qualité de formation médicale en Algérie ? L. D.: La qualité de la formation médicale en Algérie est en net recul malgré les efforts consentis par le corps des enseignants hospitalo-universitaires, mais cela ne signifie pas que les anciennes générations de médecins ont été mieux formées que celle d'aujourd'hui pédagogiquement parlant. Par ailleurs, les apprenants fuient les amphithéâtres et cela représente un véritable fléau social et pédagogique. À cet effet, la pédagogie médicale représente un levier fondamental à l'amélioration de la qualité des pratiques pédagogiques en termes de la qualité des apprentissages et des enseignements en milieu de santé. En d'autres termes, la formation médicale doit être centrée sur les apprenants et les apprentissages, d'autant qu'il existe une relation significative entre la qualité de l'enseignement dispensé et l'apprentissage en profondeur réalisé visant à fournir à la société des professionnels de la santé compétents et autonomes. Il y a donc tout lieu de soutenir qu'enseigner en milieu de santé n'est pas aussi simple qu'on le prétend, mais une pratique pédagogique beaucoup plus complexe, car «personne ne commence par bien enseigner, enseigner à l'université ça s'apprend» selon Herbert Kohl. Q. O.: Les facultés de médecine en Algérie ont-elles une responsabilité dans la qualité de la formation médicale en Algérie ? L. D.: Les problématiques de la formation médicale en Algérie sont surtout de l'ordre des pratiques pédagogiques. À cet effet, chaque faculté de médecine doit être soumise socialement à une obligation de satisfaire les besoins pédagogiques de ses apprenants et de faire connaitre ses compétences et son professionnalisme par la manifestation de son savoir-faire en pédagogie des sciences de la santé. En d'autres termes, il est de la responsabilité de chaque faculté de médecine de se procurer une visibilité académique par l'affirmation de la qualité de ses enseignements, et par son engagement social à promouvoir les compétences pédagogiques et professionnelles dans un contexte défavorable où cohabite un curriculum de formation obsolète et néfaste. À vrai dire, si le modèle du curriculum de formation importe aussi, ce sont les pratiques pédagogiques innovantes qui permettent véritablement l'amélioration de la qualité de la formation médicale et de l'expertise disciplinaire ainsi que la mobilisation des compétences de soins de santé au service de la société. Q. O.: Quelles sont les responsabilités des enseignants hospitalo-universitaires dans le recul de la qualité de la formation médicale en Algérie ? L. D.: Les enseignants hospitalo-universitaires ne sont pas responsables du recul de la formation médicale en Algérie, car malgré un contexte très défavorable, il est important de rendre un grand hommage aux hospitalo-universitaires qui continuent à s'investir en enseignement et méritent respect et considération. Pour ce faire, il est plus que fondamental de valoriser autant le statut des enseignants hospitalo-universitaires que l'acte d'enseigner en contexte des sciences de la santé. De plus, les enseignants hospitalo-universitaires sont très motivés à procurer des apprentissages et des enseignements de qualité à leurs apprenants, mais ils n'utilisent simplement pas les bons outils pédagogiques pour y parvenir en l'absence de formation en pédagogie médicale. Par ailleurs, il est aussi important de signaler d'emblée que ce n'est pas l'expertise ou les connaissances disciplinaires des enseignants hospitalo-universitaires qui sont mises en cause, mais les processus d'enseignement en termes des stratégies et d'encadrement pédagogique des apprentissages, car l'enseignement se décline souvent selon un modèle traditionnel basé sur la transmission quantitative des connaissances au sein d'exposés magistraux unidirectionnels et à sens unique. De plus, l'acte d'enseigner est plus ou moins planifié, voire improvisé, et parfois fait appel au bon sens et à l'intuition pour enseigner. Q. O.: Quels sont les impacts projetés de ces formations sur les soins de santé en Algérie ? L. D.: Ce projet de formation à la pédagogie des sciences de la santé est pertinent tant sur le plan pédagogique qu'institutionnel par son impact sur la qualité de la formation médicale et les soins de santé en Algérie. En d'autres termes, nous sommes persuadés que le développement de nouvelles compétences et pratiques pédagogiques sert directement la qualité de la formation médicale en Algérie dont l'impact ultime est l'amélioration de la qualité des soins de santé en Algérie. *Conseiller et concepteur en pédagogie des sciences de la santé |