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Les textes juridiques sont
une condition nécessaire mais non suffisante: l'important est d'agir sur le
fonctionnement de la société algérienne, fonction des rapports de force des
différentes composantes politiques, économiques et sociales, elle-même liée au
fonctionnement de l'économie mondiale afin que ces lois soient applicables.
L'Algérie possède des institutions qu'il s'agit de dynamiser si l'on veut un
Etat de droit, condition pour un développement durable et surtout être crédible
tant au niveau national qu'international. Cette présente
contribution s'appesantit sur une institution stratégique, le Haut Conseil
national de l'Energie, gelé depuis de longues années que le président de la
République a décidé de réactiver par le décret présidentiel du 15 mars 2022, et
qui abroge les dispositions du décret présidentiel n° 95-102 du 8 avril 1995
portant création du Conseil national de l'Energie et j'avais consacré une
longue contribution déjà en 2018 (Abderrahmane Mebtoul
www.google.com en date du 06 juin 2018, sous le titre : le conseil national de
l'énergie et la sécurité énergétique )
1.- Afin de voir la différence, analysons la teneur des deux décrets l'un publié en avril 1995, l'autre en mars 2022. Rappelons que le Conseil national de l'Energie, régi par le décret présidentiel n° 95-102 correspondant au 8 avril 1995 stipule que le Conseil se réunit périodiquement sur convocation de son président, le président de la République dont le secrétariat est assuré par le ministre de l'Energie étant composé des ministres dits de souveraineté (Défense nationale, Affaires étrangères, Énergie et Finances), du gouverneur de la Banque d'Algérie et du délégué à la Planification. L'article 6 stipulait que «le Conseil national de l'Energie est chargé d'assurer le suivi et l'évaluation de la politique énergétique nationale, à long terme, notamment de la mise en œuvre d'un plan à long terme destiné à garantir l'avenir énergétique du pays; d'un modèle de consommation énergétique en fonction des ressources énergétiques nationales, des engagements extérieurs et des objectifs stratégiques à long terme du pays, de la préservation des réserves stratégiques du pays en matière d'énergie ; des stratégies à long terme de renouvellement et de développement des réserves nationales en hydrocarbures et leur valorisation ; de l'introduction et du développement des énergies renouvelables ; des schémas d'alliances stratégiques avec les partenaires étrangers intervenant dans le secteur de l'Energie et des engagements commerciaux à long terme». Selon le nouveau décret présidentiel du 15 mars 2022, le Haut Conseil présidé par le président de la République, le Conseil est composé du Premier ministre, du ministre de la Défense nationale, ou son représentant, du ministre des Affaires étrangères et de la Communauté nationale à l'étranger, du ministre de l'Intérieur, des collectivités locales et de l'aménagement du territoire, du ministre des Finances, du ministre chargé de l'Énergie, du ministre chargé de la Transition énergétique et des Énergies renouvelables, ainsi que du ministre chargé de la Recherche scientifique. Le Conseil, dont le secrétariat est assuré par le ministre chargé de l'Energie, se réunit périodiquement sur convocation de son président et peut consulter tout organisme et/ou personne susceptible de l'éclairer dans ses travaux, étant doté d'un comité technique présidé par le représentant du ministre chargé de l'Energie, composé des représentants des secteurs concernés par la politique énergétique nationale qui lui adressent un rapport périodique sur le suivi et la mise en œuvre des décisions prises. Il est est chargé de cinq axes essentiels hautement stratégiques : premièrement, de statuer sur les stratégies à suivre dans les domaines de la sécurité énergétique du pays à travers, notamment la préservation ; deuxièmement le renouvellement et le développement des réserves nationales en hydrocarbures, et le suivi et l'évaluation de la mise en œuvre des plans à long terme pour le développement des infrastructures de production, de transport, d'approvisionnement, de stockage et de distribution des produits énergétiques ; troisièmement, de suivre l'introduction et le développement des énergies nouvelles et renouvelables, la transition énergétique vers un nouveau modèle national de production et de consommation d'énergie en fonction des ressources énergétiques et minières nationales et à suivre les engagements extérieurs et des objectifs stratégiques, à long terme du pays ; quatrièmement, d assurer le suivi de la régulation du marché énergétique national, l'impact de la situation énergétique nationale et internationale sur le pays, ainsi que la valorisation des ressources énergétiques et la dimension énergétique liée à l'environnement et au changement climatique et cinquièmement d'assurer le suivi des alliances stratégiques et les partenariats internationaux en matière énergétique, notamment les engagements et accords commerciaux, à long terme et à portée stratégique font partie également de ses missions (voir nos deux interviews en arabe/français à Radio Algérie Internationale et à la radio Chaîne1 du 03/04/2022 ? nos contributions dans le numéro d'avril 2022 du quotidien gouvernemental El Moudjahid /Politis- avec les tensions géostratégiques et énergétiques en Ukraine, quelles perspectives pour la coopération Algérie-Europe et sur la stratégie énergétique en Méditerranée et en Afrique, face aux tensions en Ukraine, à paraître en mai 2022 dans la revue internationale le Pont?Paris France). 2.-Au niveau des prérogatives, ce n'est plus à Sonatrach d'octroyer les périmètres d'exploitation selon la nouvelle loi sur les hydrocarbures mais à une Agence dépendante du ministère de l'Energie ?ALNAFT, entretenant donc des relations fonctionnelles avec cette structure autant qu'avec une autre agence, l'autorité de régulation chargée de suivre les mécanismes des prix. La nouvelle loi a fixé à au moins 51% la part de Sonatrach sur les périmètres octroyés par ALNAFT et moins de 49% aux compagnies pétrolières. Mais le partenariat a toujours existé même du temps du socialisme des années 1970. Car il y a lieu d'éviter la vision essentiellement négative car cette association a permis de redynamiser la production pétrolière et gazière en chute libre. Concernant l'organisation de Sonatrach , nous avons l'Assemblée générale composée du ministre de l'Energie et des Mines, du ministre des Finances, du gouverneur de la Banque d'Algérie, d'un représentant de la présidence de la République. L'Assemblée générale est tenue de se réunir «au moins deux fois par an en session ordinaire» et en «session extraordinaire, à l'initiative de son président ou à la demande d'au moins trois de ses membres, du ou des commissaires aux comptes ou du président-directeur général de Sonatrach». Au terme de chaque session, l'Assemblée générale est tenue d'adresser son rapport au président du Conseil national de l'Energie qui est le président de la République. Ensuite, nous avons le Conseil d'administration composé du président- directeur général de Sonatrach, du président-directeur général de Sonelgaz, des vice-présidents, du directeur général des Hydrocarbures du ministère, un autre représentant du ministère, de deux représentants du syndicat de Sonatrach. Enfin vient le Comité exécutif, composé et qui est la véritable cheville ouvrière de Sonatrach : du président - directeur général de Sonatrach - du secrétaire général de Sonatrach - des vice-présidents et des directeurs centraux. Nous avons également les holdings qui sont annexés aux vice-présidents, comme Naftec et Naftal et au niveau international, le groupe Sonatrach a mis en place un système de réorganisation de ses activités par le regroupement des compagnies filiales à l'étranger autour d'un holding international qui opère dans différents pays. 3.-De grandes mutations géostratégiques et énergétiques s'annoncent inéluctables entre 2022/2030 surtout avec la crise ukrainienne et le réchauffement climatique avec des incidences sur le nouveau modèle de consommation énergétique et sur la crise alimentaire. Le XXIe siècle sera dominé par l'émergence de réseaux décentralisés, qui remplaceront les relations personnalisées d'Etat à Etat dans le domaine des relations économiques et de l'intelligence artificielle (le primat de la connaissance) qui révolutionnent tout le système économique mondial. Le management d'entreprise est inséparable de la gouvernance globale interne et mondiale. C'est que les facteurs géostratégiques, comme en témoigne actuellement la flambée des prix, la gestion interne pour réduire les coûts, la discipline ou pas OPEP+, le nouveau modèle de consommation énergétique (efficacité et transition énergétique) qui se met en place entre 2022/2030 avec la percée de l'hydrogène entre 2030/2040, et la croissance ou pas de l'économie mondiale, joue comme un vecteur essentiel dans l'accroissement ou la diminution des recettes de Sonatrach. Aussi, l'analyse du fonctionnement de Sonatrach ne peut se comprendre sans la replacer à la fois dans la nouvelle configuration de la stratégie énergétique mondiale, tenant compte des coûts, pouvant découvrir des milliers de gisements mais non rentables financièrement, ces recherches ayant occasionné des coûts entre -temps non amortis, du nouveau défi écologique avec un changement notable du modèle de consommation énergétique qui se dessine entre 2022/2030. La gouvernance d'un pays est, elle-même, inséparable des mutations mondiales devant donc éviter d'isoler la micro-gouvernance de la macro-gouvernance, qui sont inextricablement liées. La situation actuelle rend de plus en plus urgent le management stratégique et une transparence de la gestion de Sonatrach devant reposer pour toute démarche scientifique et opératoire du général au particulier afin de saisir les interactions et pouvoir procéder à des actions par touches successives. Rendre plus efficiente Sonatrach suppose plusieurs actions stratégiques : la replacer dans le contexte international et national ; un système d'organisation au temps réel se fondant sur des réseaux et non plus sur l'actuelle organisation marquée essentiellement sur une vision hiérarchique, des centres de coûts transparents incluant la gestion du partenariat ; une gestion rationnelle des ressources humaines et élément essentiel du management stratégique, impliquer les cadres et être à l'écoute du collectif des travailleurs par un dialogue constructif permanent. L'ensemble de ces actions renvoie, en fait, à l'instauration de l'Etat de droit et de l'urgence d'une gouvernance renouvelée. Le fondement de tout processus de développement comme l'ont démontré tous les prix Nobel de sciences économiques repose sur des institutions crédibles, et c'est une loi universelle. La dynamisation des cinq institutions, le Conseil national de l'énergie, la Cour des Comptes, le Conseil économique et social, la bourse d'Alger et le Conseil de la concurrence, est importante pour le développement de l'Algérie comme adaptations tant aux facteurs internes qu'au mouvement du nouveau monde et sera fonction de rapports de forces internes, renvoyant donc à d'autres sphères que l'économique, en un mot au politique. En conclusion, l'Energie est au cœur de la sécurité des Nations et l'annonce de la réactivation du Haut Conseil national de l'Energie est à saluer car en ce mois d'avril 2022, Sonatrach c'est l'Algérie et l'Algérie c'est Sonatrach, environ 98% directement et indirectement avec les dérivées des recettes en devises. L'Algérie a une économie de nature publique avec une gestion administrée centralisée. Aucun pays à travers l'histoire ne s'est développé grâce uniquement aux matières premières. Il n'y a de richesses que d'hommes. Grâce à la bonne gouvernance et la valorisation du savoir, l'Algérie, forte de ses importantes potentialités, peut devenir un pays pivot et facteur de stabilité de la région méditerranéenne et africaine car toute déstabilisation comme je le soulignais dans plusieurs interviews (2016/2021), aux USA, à l'American et à Africa Presse Paris aurait des répercussions géostratégiques sur toute la région. Aussi, l'Algérie sera avant tout ce que les Algériennes et les Algériens voudront qu'elle soit. *Professeur des universités, expert international. Directeur d'études au ministère de l'énergie Sonatrach 1974/1979-1990/1995- 2000/2008-2013/2015- membre de plusieurs institutions internationales liées à l'énergie. |