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Quelques rappels, nécessaires
à notre présente conjoncture sanitaire, aux humanistes des hautes luttes contre
les famines paysannes et exodes ruraux organisés, savamment, par le capitalisme
libéral, aujourd'hui bien mondialisé : ceux qui souffrent le plus de la faim et
de privations élémentaires sont, à notre époque et contradictoirement, les
paysans et les ruraux !
Vous qui aviez, depuis un demi-siècle, alerté les uns et les autres, victimes malheureuses et gouvernants et acteurs économiques criminels, sur les déviances de nos systèmes de développement et de croissance. Vous qui aviez, depuis la symbolique découverte et sacralisation populaire de Che Guevara1, appelé à une mobilisation effective et union salutaire des ex-colonisés devenus des pays en développement, à rompre avec les tutelles et modèles capitalistes. Vous qui aviez, chers nombreux humanistes, tant écrit, tant affronté, tant parlé et tant crié aux injustices criminelles qui empêchent notre monde d'un réel épanouissement solidaire, d'un bien-être et bonheur partagé, pourtant possibles. Et tous ces efforts de conscientisation ; tous ces efforts d'évocation et de convocation de la part humaine et généreuse de nos peuples et sociétés, n'ont pas suffi à corriger nos mauvais choix socio-économiques, politiques et civilisationnels. Il a fallu qu'un petit fragment d'ADN, une minuscule et dérisoire petite entité biologique bloque la marche inexorable, les perspectives stratégiques, la visibilité même, et le fonctionnement de notre monde imparfait ! Analyse sur quelques dessous occultés de cette crise sanitaire inédite, et aujourd'hui bien mondialisée ! Nos modèles de développement et de croissance n'ont été, depuis bien deux siècles, qu'une somme et suite d'indignations infligées au monde rural et ses belles paysanneries aujourd'hui disloquées. Et s'il faut ?'appeler un chat, un chat'', disons-le sans retenue, ni fausse pudeur : La ?'merde'', les urines et leurs divers polluants induits, après leur transit par les STEP (Stations d'épuration et de traitement des eaux usées), sont voués, dirigés et acheminés, normalement et sans scrupules, ni de morale, ni de justice, vers le milieu rural pour des usages et ?'recyclages'' agricoles. Après les échecs sanitaires, certes malheureux mais aussi criminels, des centres d'incinération des ordures ménagères urbaines en croissance exponentielle depuis la mondialisation et son urbanisme outrancier (découverts bien après une trentaine d'années de pulvérisation criminelle, dans le milieu naturel et l'air, de très fines particules, insidieusement volatiles, dont la dioxine cancérogène avéré). On a vite trouvé la parade, afin d'occulter davantage le traitement des vraies causes et rechercher les solutions idoines ; et, pour, surtout, gagner du temps, avec les fameux CET (Centres d'enfouissement technique). Le terme est pompeux et semble particulièrement ?'savant'' à notre présente époque de sacralisation du mythe technologique. De la réutilisation agricole des eaux usées ou ?'cachez-moi ces seins que je ne saurais voir'' En réalité, ces fameux CET ne sont en réalité que des décharges et dépotoirs d'ordures urbaines qu'on enfouît dans le sol, qu'on enterre dans de grandes fosses... qu'on cache, enfin ! Pas dans les cités et villes de la modernité impeccable. Non, bien loin... dans la campagne, pardi ! Chez les ruraux, comme d'habitude, voyons (et pourquoi changer une équipe qui gagne). Mais dans cette occultation et déviation instituée, ce n'est plus de l'attrayant et distingué ?'cachez-moi ces seins que je ne saurais voir'' mais plutôt du ?'débrouillez-vous avec notre ?'merde urbaine'', ici, on ne sait que faire avec, d'autant plus qu'on a plus de place en milieu urbain pour ce type d'usage improductif. Car, ici, nous avons de plus en plus besoin d'espaces et d'assiettes foncières à lotir pour faire face à nos ambitieux politiques et programmes d'urbanisation à venir, semblent-ils suggérer sournoisement. Et puis, vous pourriez toujours innover dans la confection de nouveaux composts agricoles, semblent-ils persister encore ! Ces centres d'enfouissement technique (CET) pratiquaient systématiquement pour désengorger les villes qui ploient sous des milliers de tonnes quotidiennes d'ordures et leurs polluants de toute sorte, participent progressivement mais inexorablement aux pollutions des sols, des nappes phréatiques et par extension aux cours d'eau, rivières, etc. jusqu'aux sources et puits environnants (dans certaines contrées, nos paysans et ruraux ne boivent plus l'eau de leur puits, alors que cela se faisait normalement durant des siècles et millénaires peut-être !). Dans ce ?'copié-collé'' de pseudo-modernisme emprunté aux pays du Nord par les pays du Sud, l'implantation de ces centres d'enfouissement technique a été précédée par de bien formelles ?'études d'impact environnemental'', payées rubis sur l'ongle par des financements publics. Et, transférés sur des comptes off-shore à ceux qui ont offert la commande et à de faux bureaux d'étude qui n'ont d'existence parfois qu'une boîte aux lettres anonyme, aux savants sigles, louée dans un bel immeuble vitré d'une capitale étrangère. Quant aux fameuses STEP (Station de traitement et d'épuration des eaux des villes), leur évacuation et destination finale ne prévoit, en général, rien d'autres que vers ce qui est pompeusement appelée une réutilisation agricole, bien sûr en milieu rural, encore. Mais au juste, ces ?'merdes'', urines et leur eau gâtée et empoisonnée de divers polluants souvent persistants (métaux lourds, résidus pharmaceutiques, pesticides, détergents, etc.), sont les produits et déchets de la ville moderne, des nombreuses cités urbaines et de cet urbanisme spéculatif et effréné qui a mis là leurs nombreuses populations, et qui continue d'entasser les nouveaux arrivants encore et encore... Il serait plus juste et légitime que ces monstrueux centres urbains, ces incontrôlables et auto-ingérables nouvelles villes faites de millions de personnes puissent les garder et les assumer au sein de leurs propres tissus urbain et aire géographique. D'où, chacun doit assumer et garder sa ?'merde'', n'est-ce pas plus responsable et plus équitable ! Les rapports milieux urbains et monde rural sont devenus depuis quelques décennies de modèles de développements nationaux déséquilibrés, des rapports d'inféodation et d'indignation tacitement institués, admis et malheureusement tolérés presque ordinairement par les uns et les autres. Depuis les années cinquante, avec la financiarisation accrue des agricultures, on ne cherche plus à étendre les SAU (superficies agricoles utiles) par des politiques et programmes de mise en valeur, mais plutôt à réduire les surfaces agricoles ; bien sûr pour les besoins incessants des plans d'urbanisme, mais aussi pour les mettre en jachère, afin de rendre rares ces moyens de productions agricoles. C'est par et à travers ce système d'organisation stratégique de la rareté que le système capitaliste libéral progresse. Faut-il rappeler que les Etats et les hommes utilisent, à ce jour, moins de quatre milliards d'hectares de terres cultivables, alors que notre planète en compte plus de quatorze milliards d'hectares recensés. On constate même, depuis des décennies, au niveau de la Communauté européenne dans sa politique de la PAC, proposer des primes et subventions aux possédants des terres quand ils gèlent leur productions agricoles. Et dire que parfois des législateurs, faiseurs de lois et des gouvernants, parmi les plus symboliques, se nichent en rentiers et profiteurs des gels volontaires de productions agricoles. D'où les affameurs et les faiseurs de famines mondiales sont, aussi, présents pour participer et contribuer, à leur discret niveau, à l'organisation et maintien de la rareté, seul paradigme du capitalisme libéral leur assurant profits et dividendes sans limites morales. Les mirages trompeurs des agricultures écologiques urbaines Les attitudes éhontées et sournoises infligées aux paysanneries et ruraux des Etats dits développés (où l'on recense, en moyenne, un suicide d'exploitant agricole, mis en faillite, par jour) ont atteint leur summum d'aberration, avec cette déviation et amplification médiatique toute particulière consacrée à ?'l'innovation'' et ?'floraison'' au sein de plusieurs métropoles occidentales, et aussi ailleurs par mimétisme béat, de ce que l'on a appelé pompeusement l'agriculture urbaine. On a laissé les modèles de développement et de croissance capitalistes urbains démanteler, disloquer puis démolir progressivement et sciemment les authentiques et fructueuses paysanneries jusqu'à désertifier le monde rural. Pour se gargariser et pérorer avec morgue, aujourd'hui, sur les avantages de ces pseudo-innovations en mirages trompeurs des agricultures écologiques urbaines (on a tous eu à voir des émissions et documentaires surannés et idiots, vantant ce délire ''d'innovation''en montrant quelques toits artificiellement reverdis de Paris, Londres ou New York, où on cultive, bien ostensiblement, des tomates, du céleri et même des herbes de Provence !). Le concept de l'agriculture urbaine et sa forte médiatisation d'auréolée n'est rien d'autre, au niveau symbolique, que le dernier ?'pied de nez'' d'indignation infligé aux agricultures authentiques et à leurs bienfaits humanistes de hautes valeurs morales et civilisationnelles, aujourd'hui, irrémédiablement détruites par le capitalisme libéral mondialisé. Cette agriculture urbaine n'est que le dernier jouet niais d'un scoutisme écologique d'avilissement et de régression de l'Homme et de sa longue et fructueuse marche vers le vrai progrès et l'abondance agricole assurée et largement partagée. Certains de ces documentaires ?'tape-à-l'œil'', et tellement sournois, nous montrent, aussi, qu'on est arrivé avec quelques ruches à produire du miel sur quelques toits, ostensiblement, choisis de New York. Et cela, comme si on avait réussi à inventer l'eau chaude ! Il a été, en effet, constaté puis confirmé par certains entomologistes indépendants (je salue au passage l'excellent travail de mon ami le naturaliste Hugues Mouret et son association Arthropoligia dans l'élaboration de ce constat scientifique) qu'après quatre-vingt ans d'agriculture intensive soutenue et de surutilisation de pesticides, les populations d'insectes, dont des abeilles mellifères, ont fini par fuir les campagnes pour se réfugier dans les villes et leurs parcs, où elles semblent avoir retrouvé un inespéré havre de résilience. La marche et croissance inexorables d'un monde imparfait Après avoir manifestement et durablement contaminé les milieux ruraux et leurs ressources naturelles par une agriculture intensive d'artificialisation des sols, de destruction des biotopes naturels par les phytosanitaires, et par l'agressivité sans limites d'une industrie agrochimique et de ses lobbys financiers et politiques de plus en plus voraces. Ils ont dit et fait admettre, à tout un chacun, le bien-fondé et judicieux usage agricole des eaux usées traitées, sorties de leurs nombreuses STEP (Stations d'épuration et de traitement des eaux usées). Mais les paysans et ruraux libérés de demain (ou ce qui en reste, du moins !) ne veulent plus qu'on leur fourgue encore, pour le prétexte de réutilisation agricole, cette eau trouble, sale et encore contaminée par les divers usages des urbains, auxquels on a même admis des normes de consommation, dites de bonne modernité, allant jusqu'à leur concéder 150 litres/jour, et par habitant ; soit, une véritable gabegie et gaspille de la précieuse ressource naturelle. Les nouveaux paysans et ruraux libérés de demain veulent désormais, avoir accès à leurs eaux pures, et non souillées, pour eux, pour leur usage, pour leurs élevages, et pour leurs cultures. Ils veulent se réapproprier de cette belle eau, traversant leurs immenses bassins versants, et qui leur passait, jusque-là, sous le nez, pour être gaspillée sans retenue par les nombreux urbains présents et à venir. Ils veulent de cette eau des Dieux, comme savent en faire depuis la nuit des temps leurs belles et fières montagnes. Quant aux déjections et souillures des villes et grandes cités urbaines du capitalisme libéral mondialisé, la ville responsable et assumée de demain saura et devra garder pour elle ses eaux usées et traitées. Pour, peut-être, et c'est son affaire, la recycler par ses nombreuses pseudo-technologies, en eau à réutilisation urbaine ou pour la boire ! Car les futurs paysans et ruraux libérés de l'incommensurable farce infligée par le capitalisme libéral outrancier ne veulent plus être dociles. Ils ne peuvent plus, non plus, être davantage indignés et se taire encore. En effet, après cette crise sanitaire planétaire et l'effondrement économique sans précédent du capitalisme libéral mondialisé, induits par ce dérisoire fragment d'ADN, le Covid-19, bloquant ainsi la marche et croissance inexorables d'un monde imparfait où ils ont été les ?'dindons de la farce''. Ces paysans et ruraux, anciennement soumis, transmutés, par la conjoncture d'aujourd'hui, en nouveaux citoyens libérés ne veulent plus ?'aller au Paradis le ventre creux'', la peau sale et sans avoir, surtout, dit leur mot final de raison : Basta ; ?'j'en ai marre, c'est fini'', comme a su le dire Cheîkha Rimitti il y a de cela un demi-siècle ! Cette ancienne adepte de la poésie et du chant rural oranais d'Algérie2 est l'une des aînés inspirateurs du Raï moderne. Cette chanteuse, appelée Rimitti (du français Remettez !) El Relizania (de Relizane), plus pour occulter son vrai nom et identité filiale, était plutôt native d'une famille rurale des piémonts du Tessala (monts du sud-est oranais), ayant quitté sa famille, pris un nom d'artiste ou plutôt de ?'guerre'', pour embrasser une longue carrière de chanteuse contestataire clamant des textes dénonçant les règles et pratiques liberticides d'entrave à l'épanouissement des êtres. Par sa condition de double oppressée : d'une part par sa qualité de femme vivant sous le joug d'une société sexiste, et par sa condition sociale de rurale, subissant, comme les siens, les ségrégations et relégations au plus bas de l'échelle sociale, elle marqua son époque par ses chants de revendications socioculturelles. Et par une longue présence sur diverses scènes et cabarets d'Algérie puis d'Europe, à la fin de sa vie, souvent à la demande des gens de l'émigration dont beaucoup sont d'extraction similaire rurale. Ci-dessous, une transcription de quelques extraits de sa chanson ?'J'en ai marre'' : Prologue de la chanson traduit : - L'impatient, ne peut faire fructifier et réussir ses affaires ; - Une balance légère, ne peut être stable ; - Quand l'esprit est probant, son titulaire sera davantage enrichi ; - Mais les paroles, non élevées, n'enchantent point Texte de la chanson traduit : J'en ai marre, j'en ai marre J'en ai marre, ça suffi (?'Basta'' !) (Refrain) J'en ai marre des lamentations et des pleurs de tous les jours Refrain Tous les jours, tu ne cesses de crier et de te lamenter Refrain Je supporte tout, sauf d'être opprimée Refrain Pour un mot, il m'a frappé et je souffre Refrain Ô l'amour, l'amour, l'amour Refrain L'amour, au travers des yeux, pour les gens qui savent Refrain Pourquoi je dors seule, alors que j'ai une personne à moi Refrain Parce qu'il est passé me voir, ils n'ont pas accepté Refrain Si tu restes dans mon esprit, on n'oubliera rien Refrain L'œil plaît et le sourcil a mis un voile Refrain J'adore le brun qui a de beaux yeux Refrain Je l'ai aimé, et il m'a aimé, et ceux qui ne sont pas contents n'ont qu'à demeurer dans le malheur Refrain J'en ai marre, et pour lui, j'ai divorcé de mon mari Refrain Cet homme m'a désiré, honte à moi si je le refuse Refrain Pour toi, mon amant, j'ai divorcé de mon mari Refrain Tour à tour, je prendrai Adda, leur fils Refrain Adda et Zoubida, comme ils s'entendent bien Refrain Toutes les choses, chez les authentiques, sont belles Refrain Sa volupté m'a emporté .../... (*) Professeur, université d'Oran 1 Notes explicatives et sources : (1) : «Vous me demandez ce qui me pousse à l'action? C'est la volonté de me trouver au cœur de toutes les révoltes contre l'humiliation, c'est d'être présent, toujours et partout, chez les humiliés en armes.», Docteur Ernesto Guevara dit le Che, militant de la cause cubaine et de bien d'autres en Afrique, en Amérique du Sud et bien ailleurs. Né en Argentine (à Rosario, le 14 juin 1937) et mort (à Higuera, le 9 octobre 1967), assassiné en Bolivie, où il soutenait, parmi les paysans, un maquis de la résistance de ce pays. (2) : ?'Le Raï, un acte consensuel, politique et citoyen de la ruralité algérienne spoliée'' par Hassan Taki El Benaissi, Edition du Quotidien d'Oran du 11 mai 2019, lien électronique http://www.lequotidien-oran.com/?archive_ date= 2019-05-11&news=5276563 |