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Réaliser
la symbiose entre les générations, instituer une nouvelle culture du bien
public et abolir la culture de beylik
Il y a quelque chose de très nocif semé par ce système et qui peut avoir quelques origines dans les travers négatifs de notre culture. Il n'y a pas de cultures parfaites, toutes les cultures possèdent des éléments positifs et des éléments négatifs. Les «gens moyens» attendent souvent que d'autres se sacrifient seuls pour qu'ils puissent en bénéficier après, sans prendre part aux risques. Le système politique et social ne fait jamais participer les jeunes dans les actions importantes en vue de former une relève dans les institutions. Ce système est un système à la fois opportuniste et infantilisant. Même quand on est grand-père, on est toujours considéré comme jeune dans une institution de vétérans. Par jeune, on entend qu'on est inapte à prendre les responsabilités et non éligible aux hautes fonctions. En ce sens c'est un système qui infantilise. Ce faisant nous avons assisté à un conflit de générations où chaque génération étouffe une autre inconsciemment. Ce genre de travers finit par engendrer une génération rebelle à toute forme d'autorité aussi noble soi-elle. Le rejet quand il se produit, risque d'être radical. Pour ne pas être déphasé, il est important d'être en symbiose avec toutes générations confondues. La plus ancienne est source de sagesse et de bon sens et la plus jeune est source de nouveautés. Ce sont toujours les plus jeunes qui sont enclines à l'action quant aux plus anciennes, elles constituent la mémoire, plus enclines au raisonnement et à la réflexion. Pour que les actions des uns soient réfléchies et que les réflexions des autres ne soient pas atrophiées ou servent de simples élucubrations, il convient de faire participer toutes les générations à l'action et à la réflexion. L'éducation que donnent les bonnes familles pour leurs enfants est à revoir sur certains plans. Bien qu'ils leur inculquent des valeurs de civisme, de respect et de savoir être, mais elles oublient ou feignent d'oublier de les préparer à la vie active et à la chose publique. L'autorité parentale excessive brime l'individu, étouffe l'initiative et annihile le courage. Les enfants issus de ces familles bien qu'ils sont gentils et «cools», il n'empêche qu'ils ne sont jamais responsables, ils ne sont pas préparés à être des meneurs de la société. Ce faisant, la chose publique est cédée aux personnes qui ont très tôt brisé les chaînes familiales et échappé aux pesanteurs sociales. Or ces derniers sont enclins à s'y prendre qu'à leurs têtes, ils se soucient très peu des sensibilités des autres et de la responsabilité à préserver l'ordre social. La morale sociale est souvent interprétée comme une contrainte à abolir et elles ont tendance à vouloir transformer la société en fonction de leurs fantasmes, sans réserves et sans retenues. Chez ces bonnes familles, il y a une sorte d'égoïsme à vouloir préserver sa progéniture de tout risque et de tout sacrifice pour le bien des autres. Cela transparaît même dans leurs pratiques religieuses qui sont davantage îbadates (actes de culte) plutôt que mouâmalates (comportements et relations avec autrui) notamment quand il s'agit de l'utilité publique. Il y a un phénomène de religiosité, la forme prime sur le fond et les apparences l'emportent sur les convictions. Ils ne participent pas dans les actions sociales et n'interviennent même pas dans les débats publics, ils se contentent d'une douillette tranquillité qu'ils font tout pour préserver. Soucieux de leurs intérêts, ils ne s'aventurent jamais à les perdre. Ils ne sont pas acteurs politiques, ils se contentent du rôle d'éternels spectateurs. Ils se déresponsabilisent, mais ils pleurnichent quand ça va mal. Pour un contrat social Je suis différent de toi, voire opposé à tes visions, mais j'ai besoin de toi et tu as besoin de moi et par conséquent nous sommes condamnés à se solidariser et à se renforcer mutuellement. Laquelle solidarité n'est pas basée sur la règle dominant - dominé, mais plutôt sur le principe d'interdépendance et du respect mutuel. Il s'agit de se solidariser sur les principes directeurs de fonctionnement et des règles fondamentales de travail qui garantissent à tous la liberté et l'égalité des droits et des devoirs. La liberté n'est pas celle du plus fort à disposer du plus faible, ni même du plus faible à s'insurger contre le plus fort par tous les moyens que lui dicte son «esprit libre» y compris par la violence, pour la simple raison qu'on ne peut abattre l'injustice par une injustice plus grande, ni changer le mal par le pire. La belle loi de la nature est qu'il n'y a que la justice qui est capable d'abattre l'injustice, il se trouve que le combat pour la justice ne peut en aucun cas s'accommoder avec des moyens immoraux. Le contrat social permet au plus faible qui se sent lésé dans ses droits d'avoir les moyens légaux de prendre sa revanche sans atteinte à l'ordre public ou à la morale sociale. L'esprit qui gouvernerait un tel contrat c'est la solidarité. C'est une solidarité, non pas sur les propositions mais une solidarité de principes, la solidarité à défendre ensemble la liberté de chacun. C'est donc une solidarité organique qui caractérise toute société complexe et non une solidarité mécanique des sociétés simples caractérisées par l'homogénéité culturelle. Désormais l'hétérogénéité culturelle n'est plus interprétée comme un danger à la cohésion nationale au contraire elle est source d'enseignements et d'enrichissements. Les cultures ne s'entrechoquent pas au contraire, elles s'enrichissent les unes les autres. Les cultures produisent plutôt l'effet de synergie et non de fractionnement. Quand la liberté est garantie et la justice est assurée pour tout citoyen, les cultures des individus et des groupes d'individus produisent plutôt l'effet de quintessence. Adopter des structures nouvelles et autonomes Indépendamment des individus, on doit s'atteler à établir des structures et des institutions conçues sur des bases objectives dont le fonctionnement sera indépendant de la volonté des hommes qui les composent. La structure permet la synergie des forces. Quelles que soient nos forces, nous sommes toujours faibles individuellement, et quelles que soient nos faiblesses individuelles, nous deviendrons forts en groupes. La structure façonne les mentalités. Einstein disait qu'il est plus facile de transformer un atome que de changer une mentalité ou un préjugé. Eh bien ! la structure permet justement de forger les mentalités et d'adoucir les sentiments par l'effet de groupe et l'exercice collectif du bien public. La structure est une sorte d'appareil qui donne la force aux actions de l'homme au sein de la société. Dans son analyse de l'échec de Jugurtha dans sa guerre avec les Romains, Mohand Chrif Sahli a bien fait de montrer que malgré que Jugurtha dont les soldats ne manquaient ni de courage ni d'engagement et qu'il avait remporté plusieurs batailles face aux Romains, il n'empêche qu'il avait perdu la guerre au final parce que son armée était moins structurée que celle des Romains. Dans ces sociétés simples qui s'identifient au héros et à structures horizontales, il suffit que la tête tombe que tout l'édifice construit au prix d'énormes sacrifices s'effondre comme un château de cartes. Toute société qui se veut moderne doit être dotée d'une structure complexe capable de se régénérer, de se reproduire de manière élargie. Laquelle structure doit prévoir des boules de rétroactions ayant des prérogatives de faire face instantanément à des situations nouvelles imprévues dans les plans de telle sorte à assurer l'équilibre général. Nous avons vu des partis politiques faire passer leurs cadres les plus réputés et des plus compétents dans des conseils de discipline et les exclure de leurs rangs pour avoir pris des initiatives individuelles ou publier des opinions personnelles qui n'engageaient pourtant que leurs responsabilités propres, pour la simple raison qu'ils n'ont pas cherché à avoir le consentement et l'approbation des instances supérieures du parti. Lequel parti n'était pas obligé d'apporter son soutien ou sa couverture politique à des opinions pour lesquelles il n'a pas été consulté. Ces structures rigides finissent tôt ou tard par se vider de leurs sèves. Il y a d'autres formes de structures qui ont pour effet la concentration des pouvoirs et la neutralisation de toute velléité d'alternance ou d'accès aux sources d'informations. Ce genre de structures aide le chef à avoir la mainmise sur le parti. Le règlement intérieur adopté et les hommes qui le portent sont choisis de telle sorte qu'il serait pratiquement impossible de détrôner un chef une fois élu, quels que soient ses déviations et ses errements. Cela avait pour justificatif et subterfuge de neutraliser les infiltrations du régime et la récupération des partis politiques pour son propre compte. Il est important de concevoir les structures au service de la démocratie et de la justice. Révision de la loi électorale La loi électorale doit être révisée de telle sorte que l'électeur puisse choisir au même temps la liste et la personne à qui donner sa voix, ainsi la personne la plus populaire, celle qui recueillera le plus de voix aura plus de chances d'être élue quelle que soit sa position sur la liste. Dans le cadre de la loi électorale actuelle, c'est aux instances du parti, voire à son président, qu'échoit le droit de désigner les «représentants du peuple» relevant de sa tendance politique. C'est la personne désignée par le parti en tête de liste qui est élue en premier, puis le second,... ainsi de suite, même si l'électeur a offert sa voix à la dite liste par égard à celui qui se situe en bas de la liste. C'est une sorte de vente concomitante où on achète tout un lot d'objets pour avoir été intéressé par un seul. Le choix du peuple se trouve déjà biaisé. Ce mode de scrutin avait produit un double effet négatif : d'une part, il a faussé la représentation du peuple; d'autre part, il avait affaibli les partis politiques de l'intérieur, puisque à l'approche de chaque élection des luttes intestines sont enclenchées et des guéguerres éclatent à l'intérieur des partis pour être désigné en tête de liste. D'où les déceptions et les démissions collectives à chaque approche d'élections. Au moment même où les militants sont censés renforcer leurs rangs face à l'adversaire ils se chamaillaient et se dispersaient et finissent par ne plus se réconcilier. Il est objectivement impossible de contenir les contradictions d'intérêts par de telles lois. Pour éviter que l'administration soit impliquée dans le trucage des élections, les partis politiques et les personnalités participant au vote auront droit de désigner un élément dans chaque bureau de vote qui eux signeront tous un P.-V. final après dépouillement. Lequel dépouillement doit se faire sur place. Mode de financement des instances dirigeantes Pour éviter que des personnes se fassent une course effrénée aux privilèges de député, il faut que la loi révise le mode de rémunération des assemblées élues. Le député doit être rémunéré en fonction du salaire qu'il percevait dans son ancien poste plus les frais de missions relatives aux charges engagées dans le cadre de ses activités de député. Abroger la loi offrant au député un salaire à vie et une retraite aussi faramineuse comparativement au SMIG. (voir l'article publié par nos soins le 04 et18 septembre 2017 sur la corruption). Les associations à caractère social et culturelle doivent cesser de bénéficier de budgets alloués par l'Etat. Il est impossible de prétendre s'opposer à un pouvoir qui nous finance. Il n'appartient pas à la société civile une association dont les caisses sont renflouées par l'Etat. Il n'est pas logique de financer quelqu'un pour qu'il nous prenne le pouvoir ou même pour s'opposer à nos options. Le financement doit provenir des seules contributions de ses adhérents et sympathisants. Conclusion : le combat pacifique comme arme de construction massive Après avoir répandu toutes formes de violences économiques, politiques, culturelles, sociales, institutionnelles et identitaires infligées au peuple, le régime a atteint son apogée après avoir adopté la corruption, la gabegie et la paralysie comme mode de gouvernance. Aujourd'hui il arrive à ses limites, nous assistons à l'inflexion de la tendance vers l'effondrement d'un système victime de ses propres contradictions ; « le mal s'autodétruit et s'auto-dévore comme le feu » disait un savant arabe. Ou bien comme l'écrivait Montesquieu, «la nature a ses propres lois qui lui permettent de se venger d'elles-mêmes». Ne crions pas trop vite la victoire, il reste beaucoup à faire, le système est agonisant certes, mais il n'a pas atteint encore sa périgée, c'est pourquoi il faut rester encore vigilants et tenaces jusqu'à l'élimination de tous les résidus matériels et immatériels de ce système moribond. Pour réaliser cet objectif ultime, celui de la renaissance de la République algérienne et achever le processus révolutionnaire que nos parents n'ont pas pu réaliser, il est important de garder cette ligne de mire et de mener un combat pacifique quels que soient les défis, les provocations et les tentatives d'avortement que les ennemis de l'Algérie ne se lasseront jamais à engager. La non-violence est une arme intelligente de construction massive, comme le disait un artiste anonyme, que nous opposons comme arme fatale contre l'arme de destruction massive et multiforme utilisée par un système conçu depuis l'installation de l'état-major sur nos frontières et mis en branle après le cessez-le-feu. La non-violence est la seule façon de contenir les plans diaboliques des dignitaires d'un régime indigne qui ont bafoué la dignité d'un peuple 57 ans durant et l'ont torturé par des violences multiformes morales, physiques, économiques, politiques et institutionnelles. La maturité politique malgré les différences est l'un des fondement de l'unité. C'est la maturité de l'esprit qui unit les personnes et les peuples, ce ne sont pas les origines et les idéologies. La maturité façonne l'unité dans la diversité, alors que l'ignorance fabrique et fomente les différences et les disputes dans une même lignée généalogique. Il restera toujours des résidus du système, des nostalgiques de la dictature, des chauves-souris que la lumière du jour risque d'éblouir et d'aveugler, des révisionnistes de l'histoire dont il faut prémunir notre jeunesse par l'information et le formation. La renaissance de l'Algérie finira par réveiller ce géant endormi de l'Afrique du Nord. Dieu ! Nos forces sont limitées, nos réflexions également, il n'y a que Ta Miséricorde qui n'a pas de limites, nous vous implorons Dieu de préserver notre patrie au nom des milliers d'hommes, de femmes et d'enfants qui ont versé tant de larmes et de sang dans l'anonymat avec un amour intime de la patrie. Au nom de toutes ces stars anonymes qui travaillent avec abnégation dans l'ombre sans attendre de récompenses qu'elles leur viennent de qui que ce soit. Au nom de tous ceux qui n'ont pas de voix pour crier leurs douleurs et qui souffrent et meurent en silence, Dieu préserve notre Algérie ! *Enseignant à l'université Akli Mohand Oulhadj de Bouira |