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La Constitution est
l'incarnation d'un large consensus qui doit prendre ses fondements par et grâce
à la volonté populaire, ce qui lui confère respect, force et crédibilité, elle
représente le dernier rempart auquel la société y trouve refuge en dernier
recours, ses articles doivent traduire les choix stratégiques et sociétaux de
la majorité, chacun doit s'y retrouver dans la cohésion et l'unité de la
nation.
Mais quand la Constitution n'est en fait qu'un amalgame d'articles concoctés et vidés de leur sens par une caste afin de préserver d'abord ses intérêts là où le simple citoyen ne se reconnait pas ou lorsque qu'elle est imposée d'en haut, elle ne trouvera répit ni auprès du peuple ni même pas auprès des décideurs du moment qui n'hésitent pas à la transgresser autant de fois qu'il le faudrait pour asseoir leur domination dénuée de toute légitimité. En Algérie, le simple citoyen n'a jamais prêté grande intention à la Constitution pour la simple raison qu'il ne s'y est pas senti concerné, et qu'il n'y voyait pas non plus une traduction de ses aspirations ; il n'a jamais vraiment pris part à sa rédaction, il n'y a jamais eu de garanties à son application. L'histoire de la Constitution est une succession d'amendements qui obéit au fait du prince ; La première Constitution est celle de 1976 car celle de 1963 qui contenait déjà les prémices de la subordination à un parti unique a été abrogée suite au coup d'Etat de feu Houari Boumediene(1965) elle a été adoptée (1976) dans un environnement dominé par la langue de bois, l'unicité de la vision, le repli de la société et l'absence d'opposition où tout avis divergeant était assimilé à la trahison ou la contrerévolution, la Constitution était plutôt une supercherie pour redorer la façade et en faire un Etat respectable, le vote était une formalité avec les fameux résultats staliniens de 99.99% de oui. Et voilà qu'en 1979 du temps de feu Chadli Bendjedid on procéda déjà à son amendement avec la nomination d'un premier ministre ; elle aura le mérite de réduire la durée du mandat présidentiel à cinq ans au lieu de 6. Vient ensuite la Constitution de 1989 suite logique à la première contestation populaire d'octobre 1988 réprimée dans le sang ; cette nouvelle Constitution a consacré le multipartisme et le renforcement des libertés, la démission du président Chadli créa ainsi un vide juridique ; la tournure prise par les évènements violents suite à l'interruption du processus électoral imposait de nouveaux amendements dans la Constitution de 1996 avec l'introduction d'un système bicaméral et la substitution de qualificatifs ; le chef du gouvernement devait désormais s'appeler le premier ministre (article 74) et revirement sur le nombre de mandats (amendement de 2008 ; article 74) qui deviennent cette fois-ci illimités ; toutefois un article intéressant (article 62) qui devait garantir l'héritage des symboles et le patrimoine de l'histoire de l'Algérie à tous les Algériens est resté lettre morte ; et comme preuve, le sigle FLN fait partie de l'histoire et devait donc être à ce moment précis restitué à la mémoire populaire, déjà une entorse majeure à la Constitution qui n'a pas été réparée à ce jour et qui a contribué à la situation dans laquelle le pays s'est enfoncé. La Constitution de 2016 avait comme objectif principal et difficilement dissimulable le maintien des rênes du pouvoir le plus longtemps possible, elle devait carrément consacrer une présidence à vie, les dispositions annoncées concernant les élections, la liberté de la justice c'était juste pour noyer le poisson dans l'eau, la réalité du terrain démentira ces affirmations, la consécration de tamazight comme langue officielle et nationale était un subterfuge afin de faire passer la pilule, mais c'était sans compter sur le réveil de conscience de la majorité silencieuse et patiente. Mais aujourd'hui cette Constitution représente un véritable guet-apens pour le futur de la nation, elle pourrait être utilisée pour maintenir le système en place et ceux qui s'opposeront pourraient être taxés d'anti constitutionalistes, ce qui justifierait à leur yeux l'utilisation contre eux de la violence au prétexte de sauvegarder la République et de lutter contre le chaos ; un scénario fortement plausible, les tenants du pouvoir ont montré jusque-là qu'ils ne lâcheraient rien de leur propre gré et nous pouvons s'attendre à des réactions de désespoir. La Constitution que le peuple appelait de tous ses vœux à l'appliquer voilà plusieurs années ne se résume pas à l'article 102 qui devait être déclenché en toute logique dans une véritable démocratie dès le lendemain de l'accident vasculaire cérébral du président c'est-à-dire depuis le début du quatrième et même à la fin du troisième mandat ; un accident vasculaire chez une personne âgée laisse presque toujours des séquelles qui sont incompatibles avec la fonction de chef d'Etat ; mais un scénario digne des grandes mises en scène hollywoodiennes a été tissé pour maintenir le peuple dans un état végétatif et obnubilé, encore une entorse majeure à la Constitution, mais comme cela n'arrangeait pas les affaires des tenants du pouvoir faisant fi des appels de personnalités nationales et de partis de l'opposition on a fait la sourde oreille et la pièce pouvait encore durer. Mais aujourd'hui les données ont radicalement changé ; le président il y a quelques semaines encore se faisait déposer son dossier auprès du Conseil constitutionnel, il était présenté par ses supporters acharnés comme valide et apte a assumer un cinquième mandat contre tout bon sens avec en prime la confirmation exhibée par lettre interposée attribuée au président dont il s'est dédouané par la suite, cette pièce théâtrale se déroulait avec la bénédiction des partis de la coalition, de l'armée, des médecins qui ont délivré le certificat de bonne santé et qui ne manqueront pas de signer imminemment son incapacité et surtout du Conseil constitutionnel qui n'a rien vu venir jusqu'à l'injonction du chef d'état-major pour qu'il puisse se rendre compte de l'état d' ?empêchement' alors qu'il devait s'autosaisir depuis bien longtemps. Ce brusque regain d'intérêt pour le respect scrupuleux de la Constitution a un air d'intrigues ! S'agit-il d'une réponse aux doléances du peuple ? Et même si ! Ce sera bien en deçà du minimum requis qui est de voir disparaitre le système et ses hommes. Cela ne voudra pas dire la dislocation de l'Etat loin de là, mais ce pouvoir a montré ses limites, il a dilapidé tout le potentiel confiance ; il ne pourra jamais être au diapason avec le peuple. En fin de compte, respecter cette Constitution ne pourra que faire perdurer la crise avec le risque de réanimer la légitimité moribonde d'un pouvoir aux abois. Chaque fois que cette Constitution pourtant rédigée à décharge du peuple constituait un obstacle aux desseins des gouvernants, elle a été piétinée sans scrupules et pour une fois que la réalité impose qu'elle soit contournée dans l'intérêt de la nation, on insiste alors sur sa sacralité ! Cela ne fera que renforcer le climat de suspicion et l'appréhension du peuple. Il y a une chance historique inouïe à ne pas gâcher pour remettre le pays sur des rails solides, Le peuple est source de toute légitimité, le peuple s'est exprimé, aucune voix, aucune manœuvre ne doivent être au-dessus de ses revendications. |