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I) Caractéristiques du sous développement Quarante sept ans après l'indépendance de notre cher pays, la recette magique qui consiste à développer un secteur d'activités est toujours la même. Prenons l'exemple de l'agriculture : Acte I : On concocte un plan (PNDA) auquel on consacre des centaines de milliards de dinars ; Acte II : On réalise ce plan selon les procédures qui lui sont propres (c'est - à - dire sans réel contrôle) ; Acte III : On constate après dix ans : 1) Qu'il n'y a aucune traçabilité et aucune amélioration du rapport qualité - prix des produits de la terre ; 2) Qu'aucune forme de coopération digne de ce nom n'existe au sein de la corporation des fellahs algérien ; 3) Qu'aucune filière (comprendre chaîne de valeur) n'a été construite ; 4) Un gouffre évalué à 70 milliards de dinars au niveau de la CNMA (selon le responsable de l'UNPA) ; 5) Que la facture alimentaire du pays a explosé au point d'atteindre les 8 milliards de dollars US ; Acte IV : On change de ministre et on efface l'ardoise des agriculteurs estimée à 41 milliards de dinars ; Acte V : On concocte un nouveau plan (rebaptisé pour la circonstance) en partant de l'équation invraisemblable que « plus de dépenses publiques = plus de développement ». Mais de quel développement s'agit - il ? Si le développement signifie dépendance accrue à l'égard du sous sol et des importations, l'Algérie a certainement réussi ! Si le développement signifie croissance continue du PIB hors hydrocarbures (en valeur absolue et relative), alors les dirigeants algériens ont réussi l'exploit de maintenir l'Algérie dans état de sous développement chronique en dépit des plans mirifiques construits depuis 1962 à nos jours ! La raison est simple. Le niveau de flux de ressources financières n'a un impact réel sur le développement d'une économie que si elles sont concentrées sur des activités clés. Ces activités sont définies par, d'une part une itération entre stratégie d'ensemble et stratégie par activité, et d'autre part par des stratégies internationales. Autrement dit, le développement économique est tributaire d'un double modèle : - Un modèle de compétitivité intégrant les relations en cascades entre : le cycle de maturité de l'industrie (définie comme un espace d'acteurs, objets, offre et demande), le cycle de maturité technologique qui influence l'évolution de l'industrie, le cycle de vie du produit qui, en partie, trouve sa dynamique dans l'évolution technologique pour une application et une clientèle données, et le cycle de maturité d'un segment d'industrie qui résulte de l'évolution des cycles des produits qui lui sont rattachés. - Un modèle dialectique intégrant la dynamique d'une industrie à l'échelle internationale, qui dépend étroitement du jeu combiné de deux séries de facteurs : les forces d'adaptation locale et les forces de coordination et d'intégration globale. En combinant ces deux forces, on établit une typologie d'industries à l'échelle internationale. La formulation d'une stratégie internationale se fondera donc sur des approches différentes en fonction du contexte de l'industrie. Les options stratégiques possibles pour une entreprise donnée et dans une industrie donnée à l'échelle internationale seront les suivantes : stratégie globale pure, stratégie multidomestique, stratégie multinationale et stratégie transnationale. Aussi, pour que nos entreprises soient compétitives (et par conséquent notre économie), il est impératif qu'elles adoptent un positionnement, dans des chaînes de valeur mondiales (comme préconisé par les experts de l'ONUDI), approprié aux enjeux de la compétition internationale. Cette compétitivité passe par la traduction des orientations stratégiques (déclinaisons des valeurs stratégiques) en plans d'actions concrètes (exploitation des sources de création de valeur). Ces actions représentent naturellement un investissement à la fois matériel et immatériel et nécessitent des sources de financement largement justifiées, pour être menées à bien. Aucune relance économique n'est donc envisageable sans modèle de développement international et ce, quel que soit le niveau des dépenses publiques consacrées ! Autrement dit, si un dinar est investi dans un modèle viable de développement, il s'inscrira dans le cercle vertueux de l'amélioration continue (du potentiel existant) exprimée en termes de création de valeur. Dans le cas contraire, il s'inscrira dans le cercle vicieux de la démolition continue (du potentiel existant) exprimée en termes de destruction de valeur. Attention, il ne faut surtout pas se méprendre sur cette notion de valeur. S'il y a création, elle est le résultat de tous. Se pose alors l'épineux problème de sa répartition qui se résout généralement sur la base de la contribution effective de chacun dans un système concurrentiel transparent. S'il y a destruction, elle est le fruit d'une minorité aux dépens d'une majorité. Se pose alors l'insoluble problème de la corruption et de ses maillons systématiquement étouffé dans un système opaque de monopole. Outre le fait qu'ils relèvent de deux systèmes de valeurs antinomiques, le développement et le sous développement sont de nature fondamentalement antagoniste ! Les différentes pathologies du sous développement chronique nous enseignent que toute thérapie (aussi complexe soit ? elle) doit être précédée d'un diagnostic approfondi des causes principales du faible niveau de compétitivité. Un traitement efficace doit suivre en mettant l'accent sur les options stratégiques à prendre, les chaînes de valeurs à construire (filières), l'accès à la maîtrise industrielle à favoriser, les normes (comptables et industrielles) à respecter, le cadre juridique et réglementaire à adapter, le recours au conseil (en management entre autres) à promouvoir, les mesures incitatives à accorder, les leviers de croissances à actionner, et enfin les ressources à allouer dans le cadre d'un modèle (systémique) et d'une méthodologie qui consiste à penser globalement et à agir localement. II) Problématique Sommes - nous réellement en voie de développement ? En se référant au taux de croissance moyen de la décennie précédente (5 % à confirmer !) on serait tenté de répondre par l'affirmative. Par contre, à en croire les rapports des institutions internationales faisant état de la régression économique des pays arabes, la réponse ne parait si évidente. Cette apparente contradiction s'explique du fait que la croissance du P.I.B. (total annuel des valeurs ajoutées produites par l'ensemble des entreprises d'un pays) n'est pas synonyme d'une meilleure efficacité des entreprises due essentiellement aux cycles de transferts technologiques. En effet, le recours à des technologies plus productives induit une diminution du coût unitaire de production, et le renouvellement rapide du portefeuille de technologies, rendu possible par un taux d'utilisation élevé des équipements, permet de bénéficier des matériels les plus performants. Ce changement est aussi, souvent, l'occasion d'un changement organisationnel à même de pouvoir démultiplier en interne par le biais de la responsabilisation les gains de productivité et par conséquent accroitre la création de valeur. L'expansion de l'entreprise développe également un apprentissage collectif qui alimente à son tour des gains de productivité susceptible de soutenir l'expansion à venir friande de technologies encore plus performantes. Or, nos opérateurs économiques (privés et publics), confrontés aux difficultés de la croissance à savoir : a) - que la progression du chiffre d'affaires n'engendre pas automatiquement une progression des bénéfices de l'entreprise ; b) - que la croissance suppose des investissements dont la rentabilité ne peut jamais être connue avec certitude ; c) - que tous les investissements ainsi que tous les accords passés avec des tiers exercent une influence limitative sur la flexibilité et rend plus difficile une réaction rapide face à des opportunités nouvelles et attrayantes ; Sont rarement enclins à transformer les profits réalisés en investissements d'expansion et de progrès (notamment technologiques) et de ce fait n'atteignent pas la « masse critique » (dimension minimale requise d'une activité pour se maintenir sur le marché sans supporter des handicaps concurrentiels) et démotivent leur personnel qui in fine rechigne à travailler à l'avènement de la croissance et à sa poursuite. Cette problématique algérienne caractérisée par la réalité déconcertante (croissance économique alimentée par les dépenses publiques / régression économique relative), le déséquilibre (croissance économique / croissance démographique) et le constat alarmant (croissance économique / croissance des pollutions) peut être résolue par l'adoption intelligente d'un modèle compétitif de développement et respectueux de l'environnement. Remarque : les efforts de codéveloppement avec les autres acteurs de l'environnement doivent se fonder sur le principe suivant : si on externalise sur la collectivité un certain nombre de coûts qui diminuent d'autant son potentiel de création de valeur futur, on dégrade ainsi la compétitivité de l'environnement où l'on ?"uvre et qu'à terme on nuit aussi à sa propre compétitivité. La nécessité de bâtir une théorie du développement de l'entreprise et de l'Etat - nation se fait donc plus que jamais ressentir d'autant plus qu'elle est censée proposer à la réflexion l'hypothèse de l'existence d'un processus continu de création de valeur. Ce processus est de nature historique et politique, il transcende la dialectique psychologie - sociologie car il est conduit par des individus agissant à travers des institutions qu'ils modifient et/ou qu'ils créent pour traduire dans la réalité vivante l'idée de progrès. Le passage du domaine micro (entreprise) au domaine macro (Etat ? nation) qui sont deux aspects complémentaires d'une même réalité, ne se fait pas par la simple addition des aspects du premier, mais par la constitution d'un méta - système de nature supérieure, qui non seulement englobe les micro - systèmes mais les transmute en un système d'ordre supérieur par la création de maillages (n?"uds et de liaisons) nouveaux. Nota : On recense trois types principaux de maillages qui se dessinent en fonction de leur but : - Le maillage de chaîne qui vise l'optimisation qualité - prix du produit final. Il consiste à établir de nouveaux modes de relation et d'assistance tout au long de la chaîne client- fournisseur, " intra et interentreprises " ; - Le maillage de promotion qui vise la réunion de membres et de moyens pour atteindre des objectifs définis dans le cadre d'un projet global commun ; - Le maillage de développement que l'on pourrait aussi qualifier de " maillage en spirale " car à terme on n'en connaît pas l'aboutissement précis. C'est le cas du maillage propre au développement régional. On note que, dans le maillage de chaîne, le produit issu des membres a la vedette. Dans le maillage de promotion c'est, au delà de leur produit, la croissance des membres du maillage eux-mêmes qui a la vedette. Dans le maillage de développement, c'est l'ensemble des membres, de leurs produits et de leur milieu qui est visé. ? C'est ainsi que la première articulation du développement devrait idéalement être autre et davantage que la compilation de projets en programmes et de programmes en plans sectoriels et/ ou nationaux. Des acteurs nouveaux devront développer entre eux et avec les n?"uds des micro - systèmes des interactions telles que : politique monétaire et fiscale, transmission d'informations sur les objectifs et stratégies, fourniture de services d'infrastructures (énergie, éducation, route etc.). Les pro géniteurs du macro - développement seront des hommes politiques, les grands commis de l'Etat, les banques de développement, les ministères, les organismes internationaux etc. Toutefois, opérant à des niveaux d'agrégation élevés, donc d'abstraction plus grande, et d'information plus diffuse, les pro géniteurs soumettront leurs plans et leurs analyses à des tests dérivés de perceptions de la réalité différentes de celles utilisées pour les micro - systèmes. Les protagonistes du jeu de pouvoir du processus décisionnel représenteront non seulement des agrégats des micro - classes sociales (patronats, syndicats, associations professionnelles), mais des liaisons et des interactions entre ces agrégats d'une nature politico - sociologique radicalement différente. - La seconde articulation du macro - développement sera elle aussi centrée sur la formalisation de processus et de comportements dont les supports praxéologiques (étude de l'action ordonnée en vue d'un résultat) seront des institutions. C'est au sein de ces institutions que se concrétiseront en objets physiques les concepts théoriques du développement (calcul du PNB), et que les concepts de distribution du revenu et de répartition de la valeur créée s'objectiveront. C'est aussi par le biais de ces mêmes institutions que les aspects politiques et sociaux du développement s'induiront dans le réel. - Nous appellerons « développement virtuel » le processus de progrès socio - économique et politique qui se déroule au cours de la première articulation du processus de création de valeur. Virtuel parce que, pendant cette phase, les outputs du projet (support de développement) sont latents, potentiels, préparatoires à la seconde articulation. Et cependant, développement car si en général les outputs économiques de la phase virtuelle sont nuls ou quasi - nuls, les outputs sociaux ne sont pas nuls (création d'emplois, développement de capacités individuelles et organisationnelles, effets indirects sur la santé et l'éducation, etc). L'effet global résultant du développement virtuel est la résultante, au niveau du projet ou du pays (grappes de projets intégrés en programmes), du processus d'apprentissage de création de valeur et de lancement de mécanismes d'investissements capitalistiques (notamment IDE). La prise de conscience du caractère de développement virtuel de la première articulation devrait induire dans le management stratégique du développement des définitions d'objectifs et de stratégies, des décisions et des actions destinées à optimiser les ressources mises en ?"uvre lors de cette phase. - Nous nommerons « développement » le processus de progrès socio - économique et politique qui débute avec le passage à la seconde articulation du procès de création de valeur et se poursuit par l'exploitation socio - économique de l'institution opérationnelle résultante. En définissant l'efficacité comme le rapport de la couverture des objectifs choisis (plan du projet ou plan national) aux inputs utilisés, nous dirons, que si ce rapport est élevé, on a affaire à un processus de « développement réel », si par contre le rapport efficacité est bas, on a affaire à un processus de « développement larvé » (du latin larvatus, masqué). Divers développements virtuels pourront être autonomes ou organisés en systèmes suivant que le degré de systématisation de la structure institutionnelle de l'entreprise (unitaire ou constituée en groupe) ou de l'Etat - nation est faible ou élevé. Les greffes successives ou simultanées du faisceau des développements virtuels font en quelque sorte rebondir la trajectoire de base du développement qui, sans cela, se dégraderait progressivement au cours de l'équivalent d'un cycle de vie des industries, des technologies, des produits et des services. Nota : La régulation industrielle des entreprises permet une optimisation du cycle de vie des produits et une meilleure exploitation des activités créatrices de valeur au cours des cycles de transformation des produits par les différents types de technologies en usage. Les technologies n'ont pas la même importance stratégique. Les plus importantes sont celles qui constituent des facteurs-clés de succès durables. Le portefeuille technologique apprécie à la fois le degré de maîtrise des ressources technologiques et leur impact concurrentiel et de ce fait, permet d'évaluer le degré de solidité des facteurs de succès de l'entreprise. Comme le patrimoine technologique évolue, les entreprises performantes s'efforcent d'en tirer le meilleur parti, d'exploiter au mieux ce que d'autres ont déjà trouvés et d'innover pour apporter les meilleures réponses aux impératifs du marché. Une des différences essentielles entre le développement des pays industrialisés et des pays en voie de développement est que, pour les premiers, le développement réel (ou larvé) est basé pour la plus grande part sur des stratégies d'expansion d'opérations existantes : pénétration de marchés, augmentation de la productivité, etc. les développements virtuels toujours présents (quoique ralentis en période de récession) constituent en valeur relative une part faible du taux de développement. Par contre, pour les pays en voie de développement, les stratégies entrepreneuriales domineront les stratégies opérationnelles : ce seront entre autres les stratégies de substitutions d'importations et les stratégies d'exportations de matières premières et de produits manufacturés. Le nombre de projets nouveaux par rapport aux opérations existantes sera élevé. L'importance relative du développement virtuel sera donc considérable en termes de temps, d'actions et de nombre d'acteurs concernés ; en d'autres termes, une proportion importante des ressources globales lui sera consacrée. En Algérie, la prise de conscience collective d'être engagés dans un processus de développement larvé devrait induire (au niveau macro) des comportements politico - socio - économique traduits par le « théorème de Schmidt» : «les profits d'aujourd'hui sont les investissements de demain et les emplois d'après demain », et (au niveau micro) des comportements managériaux pour transformer ce processus en développement réel et s'inscrire enfin dans le cercle vertueux de la croissance « orthodoxe ». La base de cette transformation sera constituée par l'analyse de critères d'efficacité et de performance et la recherche des causes et des contraintes qui lui donnent une valeur basse. Deux voies s'offriront alors aux décideurs pour le passage de l'état larvé à l'état réel : - la première sera de mettre l'accent sur la réflexion stratégique pour permettre de renforcer la conscience des buts et la cohérence des actes pou créer de la valeur ; - la seconde sera de se pencher sur la préoccupation de plus - value sociale à travers la redéfinition du rapport au système social, l'obligation légale du bilan social et la signature d'un pacte social. III) Esquisse de solution La création de valeur est la nouvelle version d'un vieux concept : le profit. Plus sûre que les indicateurs comptables, plus pertinente que la valeur boursière, la création de valeur résulte de la différence entre le résultat d'exploitation après impôt et le coût de l'actif, le coût du capital étant calculé d'après le niveau des taux d'intérêts et la prime de risque du secteur de référence. Pour créer de la valeur, le rendement du capital investi doit être supérieur au coût des fonds propres de l'entreprise. La création de valeur reflète la performance économique et se fonde sur le Profit économique: le seul indicateur complet de la performance d'une entreprise (PE = REMIC - cmc*CI ; le résultat opérationnel diminué de la charge des capitaux investis calculée au coût du capital). C'est le seul qui soit une mesure de la productivité globale de l'entreprise par rapport à l'ensemble de ses deux facteurs de production : le Capital et le Travail. Les managers en charge de création de valeur seront donc tenus d'avoir deux préoccupations majeures à savoir : - 1) l'amélioration du Profit Economique obtenue tout autant, voire même plus, par une politique nouvelle axée sur le bilan (meilleure utilisation des immobilisations, diminution du BFR) que par une politique traditionnelle axée sur le compte de résultat (augmentation des ventes et diminution des coûts). Cette démarche met l'accent non seulement sur la marge sur chiffre d'affaires appelée productivité opérationnelle mais aussi sur la rotation du capital appelée productivité bilancielle. La seule règle stratégique qu'il convient de respecter est donc d'améliorer le Profit Economique quel que soit son niveau actuel, que l'entreprise fasse des pertes ou des profits économiques. L'important n'est pas tant la valeur absolue du PE que le sens de sa variation pour autant qu'elle ne soit pas déjà anticipée. Dans cette optique, la seule règle stratégique que se doit de s'imposer une entreprise est d'augmenter le PE, encore et toujours. S'il est négatif, il doit devenir de moins en moins négatif. S'il est positif, il doit devenir de plus en plus positif. - 2) la croissance : la création de valeur incite bien à la croissance mais pas à une croissance à tout prix. Seule la croissance rentable est créatrice de valeur. Le retraitement des investissements stratégiques est là pour faciliter et susciter cette dynamique. Un des principaux rôles d'une entreprise sera de développer les savoir-faire managériaux de ses membres (qui sont à la racine de la création de valeur) en mettant l'accent sur la réflexion stratégique qui exprime une volonté de mouvement et de changement. Or, pour que cette volonté se traduise en acte, le changement technico - économique envisagé doit être souvent accompagné d'un changement du système de pouvoir (politique) et d'un changement des normes de comportement (culturel). Cette réflexion stratégique gagne à être approfondie quand elle permet de renforcer la conscience des buts et la cohérence des actes pour créer de la valeur. La création de la valeur est destinée à trois types d'acteurs, les acheteurs (clients), le personnel (qui apporte son travail), les actionnaires (qui apportent leur capital). Par-delà ces acteurs (directement engagés) la collectivité tout entière est concernée, au moins par le biais de la pression fiscale, des activités induites et de l'équilibre écologique. La finalité de la création de valeur est commune à toutes les entreprises. En système concurrentiel on parlera de création d'un avantage concurrentiel (valeur supérieure à celle des concurrents), en situation de monopole (certains services publics par exemple), on parlera simplement de création de valeur. En système concurrentiel on parlera de " cibles de clientèles " pour lesquelles créer cette valeur. Cependant, en situation de contraintes (service public), on parlera de " priorités ", car, par définition, le service public sert sans discrimination l'ensemble de la collectivité. Pour améliorer les performances d'une entreprise il conviendra de distinguer les trois composantes partiellement liées qui expliquent l'efficacité d'une firme (définie comme l'atteinte du but fixé, la création de valeur) : la position stratégique, les ressources et la mise en ?"uvres des ressources, afin de tracer le profil général de l'entreprise. Il s'agira par la suite de mettre en évidence tour à tour, les causes principales du problème central de l'entreprise en termes de Profit Economique, les causes des causes, les conséquences des causes et les conséquences des conséquences (réelles ou potentielles) pour évaluer l'importance et l'urgence des priorités de redressements et surtout favoriser l'émergence d'idées de solutions grâce : - A l'analyse des systèmes concurrentiels (pour faire évoluer la dynamique des industries dans le sens de la transformation de leur structure) Un système concurrentiel est un sous-ensemble d'un ensemble économique sociologique et politique plus large. Les forces concurrentielles dans une industrie donnée sont liées à des forces de cet ensemble plus large que nous appellerons « macro - environnement ». L'identification de ces liens est nécessaire pour saisir la dynamique d'un système concurrentiel (le concept d'industrie est utilisé comme synonyme de système concurrentiel). L'étude du jeu concurrentiel, en termes de positionnement des opérateurs les uns vis-à-vis des autres et d'évaluation de leurs aptitudes respectives à exploiter le potentiel du secteur, constitue l'autre aspect majeur de l'analyse de l'environnement. La réflexion stratégique est une démarche tournée vers le futur, la compréhension de cette dynamique est donc l'aboutissement normal de toute analyse de l'environnement. Dans une certaine mesure, l'art de la stratégie consiste à être présent dans les industries et les segments les plus attractifs. De ce principe découle un des buts majeurs à savoir : porter un jugement sur l'attrait des industries dans lesquelles l'entreprise s'est engagée ou envisage de s'engager et sur la valeur des segments composant chaque industrie. On notera que : - une industrie est définie comme une catégorie relativement stable à moyen terme, formée de quatre composants : acteurs, objets, offre et demande. L'offre sera appréhendée comme un ensemble de technologies relativement homogènes et la demande comme un ensemble d'applications relativement homogènes. Les technologies et les applications seront des « objets » ; les entreprises qui mettent en ?"uvre les technologies et les acheteurs qui utilisent les biens et les services seront considérés comme des « acteurs ». - un segment d'industrie ( sous - ensemble homogène au sein d'une industrie) a, par définition, des facteurs clés de succès spécifiques s'ajoutant aux facteurs communs à l'ensemble de l'industrie. Les deux niveaux (ensemble et segments) seront considérés tout au long de l'analyse du système concurrentiel. - Pour apprécier l'hétérogénéité des caractéristiques de l'industrie et pour évaluer l'attrait de chaque segment ; - Pour analyser les positionnements stratégiques des entreprises engagées dans l'industrie et pour imaginer les man?"uvres stratégiques possibles dans le futur. Ceci dit, deux facteurs seront identifiés pour décrire une activité. Le premier est le nombre de sources de différenciation exploitable pour créer de la valeur et se distinguer par conséquent de la concurrence, et le second est l'importance de l'avantage concurrentiel. En croisant ces deux dimensions nous obtenons quatre types de systèmes concurrentiels : fragmenté, de spécialisation, de volume et en impasse concurrentielle. Quel que soit le type de contexte, une entreprise a théoriquement le choix entre 3 comportements stratégiques : - jouer les règles du jeu sans transformer le système ; - changer les règles du jeu sans transformer la nature du système ; - transformer la nature du système. Dans les systèmes en impasse concurrentielle qui caractérisent la majeure partie de nos entreprises, la stratégie de transformation est vivement recommandée avec toutefois : - un préalable lié à l'identification des caractéristiques du système concurrentiel en termes d'évolution de la demande, de cycle de maturité des technologies et de dynamique des avantages concurrentiels (différenciation et coût) ; - une contrainte inhérente à la maîtrise des innovations de produits et/ou procédés ; - un impératif de changement des règles du jeu pour faire évoluer l'activité vers un système concurrentiel plus favorable. Nota : La confusion totale qui règne entre «types d'industries et relations entre part de marché et rentabilité », embrouille nos industriels quand il s'agit de savoir quelles activités (Etoiles, Dilemmes, Vache à lait ou Poids morts) évoluent dans quel type d'industrie (Fragmentée, de Spécialisation, en Impasse concurrentielle ou de volume). Cette confusion a pour conséquence une imprécision coûteuse du segment d'industrie à cibler comme champ possible de diversification. - A l'analyse de la chaîne de valeur (pour exploiter les sources de création de valeur) Pour toute entreprise, quel que soit son métier, la chaîne de valeur est l'ensemble des activités créatrices de valeur reliées entre elles et intervenant depuis les ressources en matières premières destinées aux fournisseurs de composants jusqu'au produit fini livré au consommateur. Cette optique est extérieure à l'entreprise et conçoit chaque firme dans le contexte de la chaîne globale des activités créatrices de valeur dont elle n'est qu'un maillon situé entre matières premières et utilisateurs finals. A l'inverse, la comptabilité analytique des entreprises algériennes adopte un point de vue essentiellement interne : ses achats, ses processus, ses fonctions, ses produits et ses clients. En d'autres termes, la comptabilité analytique choisit une optique de valeur ajoutée, partant des paiements aux fournisseurs (les achats) et s'arrêtant aux sommes facturées aux clients (le chiffre d'affaires). Le but principal est de maximiser la différence (la valeur ajoutée) entre les achats et le chiffre d'affaires. Le concept de chaîne de valeur est fondamentalement différent de celui de valeur ajoutée. D'un point de vue stratégique, ce dernier à deux défauts majeurs : Il commence trop tard et s'achève trop tôt ! En amorçant l'analyse des coûts au niveau des achats, l'on se prive de toutes les occasions d'exploiter les relations avec les fournisseurs de l'entreprise. Or, il s'avère extrêmement important pour une société de nouer une relation de partenariat (sur la base d'un plan de production stable présenté à ses fournisseurs) pour la réussite de l'application des principes du " juste à temps " afin de réduire le gaspillage des ressources et les besoins en stocks de sécurité. Outre le fait qu'elle démarre trop tard, l'analyse de la valeur ajoutée a un autre défaut important, elle s'arrête trop tôt. En n'allant pas au-delà du chiffre d'affaires dans l'analyse des coûts, l'entreprise perd toutes les occasions de mettre à profit ses relations avec les clients. Or, celles-ci peuvent être tout aussi importantes que les liens avec les fournisseurs. L'exploitation des relations avec les clients est l'idée maîtresse du concept d'adaptation des produits aux besoins et aux souhaits des clients (surtout ceux qui appartiennent aux segments les plus rentables). Cette nouvelle vision du marketing fait appel à des indicateurs spécifiques pour en évaluer les effets. C'est ainsi que sont définis, entre autres, la valeur sur la durée de vie « life time value » et le potentiel du consommateur. La première notion mesure le capital représenté par un client à partir de la fréquence et du montant de ses achats ; la seconde évalue la marge de progression de la life time value ainsi établie. Le postulat de base de cette stratégie marketing est qu'on peut toujours améliorer son offre et donc le volume des ventes. Ce cadre de référence indispensable qui consiste à décomposer les différentes étapes du processus de « conception - production - distribution » de l'entreprise en maillons d'une chaîne de valeur incitera les stratèges à s'interroger sur les sources possibles (actuelles et potentielles) de création de valeur (ou avantage concurrentiel) avec une distinction pour les sources majeures d'avantages de différenciation et d'avantages de coût. Nota : A supposer que la représentation conceptuelle de la chaîne de valeur des différentes filières industrielles algériennes soit fiable, la quantification de la valeur créée à chaque phase grâce aux coûts, au chiffre d'affaires et aux actifs propres est très approximative (faute de chiffres précis), de sorte que la compréhension du positionnement de chaque entreprise d'une industrie donnée relève de la gymnastique cérébrale. - Aux modèles de l'économie industrielle (pour améliorer le Profit Economique) En s'appuyant sur les modèles simples de la micro-économie, le calcul du coût de revient sur la base du volume déforme gravement le regard que les entreprises portent sur leurs options stratégiques et la façon dont elles estiment l'incidence sur les bénéfices et leurs décisions en matière de prix de vente et de positionnement de leurs produits. En optant pour des modèles plus riches de l'économie industrielle, les entreprises ont une meilleure maîtrise de leur management des activités et ce, en améliorant de façon continue aussi bien la valeur reçue par les clients que les profits réalisés en offrant cette valeur. Il est donc temps que nos entreprises adhèrent à une nouvelle vision du contrôle de gestion qui s'inscrive dans une démarche globale et qui doit leur permettre d'acquérir des avantages concurrentiels en adaptant leur organisation et leurs investissements à leur stratégie. Cette nouvelle approche contribue à introduire dans l'entreprise une dynamique de progrès axée sur sa compétitivité. Le calcul de la rentabilité stratégique des investissements de progrès (ensemble des dépenses nécessaires pour obtenir dans chaque domaine de l'entreprise, les objectifs des valeurs stratégiques) suppose une batterie d'instruments de mesure non financière qui ont pour but de matérialiser les progrès dans l'application des mesures concrètes qui assurent le succès. De plus, si une firme peut avoir une foule de forces et de faiblesses par rapport à ses rivales, elle ne peut posséder que deux avantages concurrentiels : des coûts peu élevés ou une différenciation. - A l'origine d'un avantage de différenciation on peut trouver deux types de savoir-faire distinctifs ou d'actifs : les savoir-faire (et actifs) technologiques et les savoir-faire (et actifs) marketing. - A l'origine d'un avantage de coût on peut trouver deux types de causes : le coût unitaire des facteurs de production et la productivité. Par coût unitaire des facteurs de production on entend le coût unitaire du travail (salaires, charges sociale, etc.) et le coût unitaire du capital, la pression fiscale agissant sur les deux. Plusieurs facteurs peuvent être à l'origine d'avantages de productivité : l'innovation de produit, l'innovation de procédé, le plein emploi des actifs, les efforts d'analyse et de contrôle des coûts, la motivation du personnel, les effets d'échelle et d'apprentissage, pour ne citer que les principaux. - A la gestion de la Valeur - Client (pour alimenter la croissance de l'entreprise) La valeur - client représente la valeur actualisée des profits attendus d'une clientèle pendant toute sa durée de vie. La gestion de la valeur client couvre tous les processus de l'entreprise qui influencent cette valeur. C'est un des plus forts leviers dont dispose l'entreprise pour agir de façon durable sur sa profitabilité et sa croissance. Créer de la valeur - client, c'est installer durablement une dynamique vertueuse entre la valeur économique produite par l'entreprise et la valeur d'attachement perçue en retour par ses clients et ses marchés. A Suivre (*) Consultant en management |