Les
conflits sociaux, qui ont grippé le fonctionnement de plusieurs secteurs et
départements ministériels depuis plusieurs mois, provoquant une réelle crise
politique et de gouvernance, ont certainement mis à nu les carences de l'actuel
gouvernement. Autant dans le secteur de l'Education nationale que dans la
Santé, le bras de fer entre les syndicats et leur tutelle a montré l'extrême
carence de dialogue social, et, surtout, que les institutions officielles sont
souvent dépassées par l'ampleur non pas des revendications syndicales, mais du
travail de communication qu'elles doivent déployer pour instaurer un vrai
dialogue devant ouvrir la voie à un règlement juste et durable des conflits
sociaux. Et, sur ce chapitre, la gestion du conflit social né de la grève du Cnapeste a montré que le ministère de l'Education nationale
a été complètement débordé et incapable, autrement que par la force et le
recours à la justice, de discuter des revendications de ce syndicat. Pis, le
ministère, en réponse à un durcissement des positions du Cnapeste,
a procédé au licenciement d'enseignants. Une décision qui a été en même temps
validée, sinon suggérée par le Premier ministre lui-même, lors de sa sortie à
Biskra. Le blocage de la situation au niveau du secteur de la Santé avec cette
grève illimitée des médecins résidents dont le ministère n'arrive pas à
résoudre autrement que par, là aussi, des décisions de justice, donne ainsi un
tableau global décevant des six mois du gouvernement d'Ahmed Ouyahia. Un tableau d'une gouvernance aléatoire encore assombri
par des déclarations de partis selon lesquelles il aurait même perdu la main
sur bien des dossiers économiques d'importance, et qu'il ne serait même pas
consulté sur d'autres. Au-delà de la consistance de ces accusations, lancées en
particulier par le RCD, il y a lieu de se poser la question si vraiment
certains membres du gouvernement Ouyahia ont une
réelle emprise sur leur secteur. Ce que confirmeraient à demi-mots des
affirmations d'un sénateur du FLN, notamment la crise entre le Cnapeste et le ministère de l'Education nationale qui
aurait été bel et bien réglée par le président Bouteflika lui-même, pour ne pas
dire une intervention directe de la présidence. ?'C'est grâce à l'intervention
du président de la République que la crise a trouvé un dénouement'', affirme ce
sénateur, qui a révélé que ?'ce n'est pas la première fois que le président
intervient pour désamorcer une crise dans le secteur de l'Education''. Ces
affirmations montrent à quel point le gouvernement Ouyahia
est englué dans les conflits sociaux, et que certains de ses ministres
compliquent, au lieu de les résoudre. Ce qui met dans des postures précaires la
gouvernance de l'actuel gouvernement, à qui on reproche notamment de ne pas
prendre des positions claires et franches sur nombre de questions sociales et
économiques touchant directement certains secteurs sensibles de l'économie
nationale. Et que le silence du Premier ministre face aux critiques le visant
personnellement, avec des attaques de plus en plus violentes de l'opposition sur
sa gestion des conflits sociaux, confirme autrement tout ce qui se dit dans le
microcosme politique algérois, à savoir une gestion remise en question. Faut-il
alors applaudir lorsqu'un sénateur ose demander la démission d'une ministre de
la République, et conseiller à un autre, celui de la Santé, de dialoguer avec
les médecins résidents ? Sinon se poser la question de savoir à quoi sert un
gouvernement lorsque le président intervient pour régler un simple conflit
syndical ?