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«Pourquoi la guerre en
Ukraine va jouer un rôle fondamental dans la future configuration de puissance
dans le monde ?» Partie d'une histoire de divorce de peuples issus d'un même
peuple slave, d'un même territoire mais frappés par les vicissitudes de
l'histoire, elle est devenue aujourd'hui un point de mire hautement stratégique
pour l'avenir de l'Occident. Doit-on s'étonner de ces événements qui se jouent
en Europe orientale ? Regardons la mappemonde. Partout des conflits là où les
enjeux géostratégiques divisent les puissances. D'abord, la donne pétrolière.
Toutes les grandes puissances convoitent les grands gisements de pétrole du monde. En plus de la crise économique en Occident qui est loin d'être finie, la donne islamo-pétrolière que caractérisent les conflits en Syrie, en Libye, en Egypte, au Nigeria, au Venezuela, en Mer de Chine, est relayée voire supplantée conjoncturellement par les événements en Ukraine, mais en pire à ce qui a prévalu en Ossétie en 2012, parce qu'une guerre se joue en Ukraine, où il y a des destructions massives, des pertes humaines considérables et plusieurs millions de personnes ont quitté leur patrie pour l'Europe, les États-Unis et pour d'autres pays occidentaux. Et si tous ces événements qui se jouent aujourd'hui dans le monde, en particulier en Ukraine, vont battre les cartes du monde comme au lendemain de la Second Guerre Mondiale ? Cette situation en Ukraine nous amène à se poser la question. « Pourquoi l'Europe et toujours l'Europe, s'immisce dans les affaires du monde ?» Surtout que cette immixtion dans les affaires du monde ne s'opère pas sans le consentement tacite des États-Unis. Des enjeux géostratégiques vitaux pour l'Occident, auxquels la Russie y est associée, à son insu Après avoir intégré les treize pays d'Europe centrale et orientale, l'Union européenne peut-elle se prévaloir d'avoir des visées sur l'Ukraine et probablement demain sur la Biélorussie ? Et probablement même sur la Russie, à condition qu'elle soit soumise à l'Occident. N'a-t-on pas donné à la Russie un ticket d'entrée au groupe des pays les plus riches de la planète, le G7 qui est devenu G8, en 1998 ? Il est clair que un territoire de 17 millions de km² ne laisse pas indifférent l'Occident, de plus c'est une puissance militaire nucléaire à parité avec la première puissance du monde, les États-Unis. Précisément la Russie intéresse beaucoup l'Occident, et l'idée lancée par le général de Gaulle, dans son discours à Strasbourg, en 1959, « l'Europe, de l'Atlantique à l'Oural », fait son chemin. L'idée à l'époque était de briser le duopole de la Guerre froide entre Washington et Moscou. Aujourd'hui, depuis la montée en puissance des grands pays émergents en Asie, en particulier la Chine, véritable empire industriel à l'échelle de la planète, le monde est en train de se reconfigurer, et la domination de l'Occident est de plus en plus remise en question. Cependant, si on regarde l'histoire, dès que l'Union soviétique a cessé d'exister, l'Europe a mis les bouchées doubles pour intégrer la plus grande partie de l'Europe centrale et orientale ; cette construction historique de l'Europe a pris des dimensions continentales depuis précisément la fin de l'URSS. Les États-Unis, sans adversaire de taille, restant l'unique puissance économique, financière et monétaire, ont cherché à organiser le monde selon un seul pôle, où ils seront la seule puissance prédominante dans le monde. On comprend dès lors pourquoi l'Europe avait intégré la plus grande partie des Pays de l'Europe Centrale et Orientale, alors qu'elle aurait pu s'arrêter là, l'intégration des PECO rendant encore plus complexe l'Union politique, économique et monétaire de l'Europe. Or, au lieu de s'arrêter aux frontières des PECO, elle n'en continue pas moins d'œuvrer pour détacher l'Ukraine de la Russie. Une démarche géostratégique de l'Europe atlantiste difficile qui cherche à rompre l'équilibre du monde hérité de la Deuxième Guerre Mondiale. Une Union européenne à 27 nations, en s'élargissant à l'est, cherchent, sous la férule des États-Unis, à faire pencher la balance géostratégique de son côté ? Quel intérêt pour l'Union européenne d'avoir un pied dans l'Eurasie ? Donc dépassant les frontières naturelles de l'Europe ; celui d'être un poste avancé du bloc atlantiste ? Pour cela, avoir une position de force en Eurasie passe par une Russie soumise à leurs plans. Ce qui n'est pas possible ou du moins ce n'est pas la bonne démarche face à une Russie rétive aux aspirations expansionnistes européennes. Et pour cause ! La Russie est l'héritière de la deuxième puissance du monde, l'Union soviétique et l'Occident s'est gardé de s'en souvenir ; pour l'Occident, l'Union soviétique est une relique du passé, elle est morte et enterrée et c'est là l'erreur de l'Occident. La Russie a des atouts considérables. Elle est la première puissance territoriale du monde, la première puissance nucléaire ex aequo avec les États-Unis, le premier producteur et premier exportateur mondial de gaz naturel. Elle est également le troisième producteur (derrière l'Arabie Saoudite et les États-Unis) et le deuxième exportateur mondial de pétrole. Des qualités hors-normes qui ne laissent indifférent ni l'Occident, ni la Chine ni l'Inde ni les pays du reste du monde. Une grande puissance en tous points même si elle a subi l'éclatement de l'ex-URSS. Aujourd'hui, les futures grandes puissances économiques du monde sont la Chine qui est déjà première puissance du monde en parité de pouvoir d'achat (PPA) et l'Inde qui est quatrième mais appelée à devancer les États-Unis et l'Europe ; compte tenu de leur poids économique et démographique qui va en progressant, elles vont certainement rompre l'équilibre géostratégique et géoéconomique du monde. Aussi, peut-on dire que la guerre en Ukraine se déroule avec en toile de fond une possible reconfiguration de l'équilibre géostratégique du monde à venir, et des risques potentiels, des risques réels qui ne seront pas du tout favorables à l'Occident. Aussi la seule solution, c'est la Russie si elle venait à intégrer l'Union européenne, elle serait un atout de poids extraordinaire pour l'Occident sauf qu'elle devrait être soumise au leadership occidental sur le monde. Ce qui n'est pas possible du moins tant que l'Occident n'ait pas fait sa mutation. Et pour que cela réussisse, il faut une double mutation, à la fois pour la Russie et pour l'Occident, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui. Ce qui explique la guerre en cours en Ukraine. Ce que nous ne devons pas oublier, c'est que l'Europe comme les États-Unis ont un destin commun, surtout aujourd'hui, avec cette nouvelle page de l'histoire qui a commencé en décembre 1991. La disparition de l'URSS a fait place à l'envol de la Chine, devenue deuxième puissance économique du monde en Pib nominal, et première puissance économique mondiale en PPA (parité de pouvoir d'achat), ce qui a fortement régressé l'Occident. Les enjeux et les crises sont devenus multiples dans le monde. Depuis la crise financière de 2008, le rapport de forces entre l'Occident et l'Asie s'est complètement transformé. Le monde unipolaire a vécu, le monde est réellement multipolaire, ce qui explique l'affaissement de la première puissance mondiale sur nombre de plans stratégiques aujourd'hui dans le monde ; les États-Unis sont réellement impuissants face aux crises et guerres dans le monde, à voir le retrait de ses forces en catastrophe de Kaboul, à l'été 2021. L'Occident, en déclin depuis les échecs enregistrés en Irak, en Afghanistan et même dans les événements en Syrie, a perdu et continue de perdre de crédibilité pour l'ensemble des pays du monde. Au bénéfice de qui ? De la Russie et la «Nouvelle Chine» ? La question reste posée. Cependant, combien même la crise de 2008 a montré les failles du système économique et financier occidental, l'Occident reste toujours au-devant de la scène internationale. Le problème est «Jusqu'à quand ? ». Il faut se rappeler que la défunte Union soviétique s'est effondrée par elle-même sans guerre avec une autre puissance par la seule situation de banqueroute économique et financière qu'elle a vécue et ce, malgré la Glasnost (Transparence) et la Perestroïka (Restructuration) que son initiateur Gorbatchev a opérées à partir du milieu des années 1980. Ceci éclaire que les nouveaux phénomènes qui sont apparus, la mondialisation et la globalisation, font qu'aucun pays n'est à l'abri, a fortiori l'Occident d'où ils sont partis. La guerre menée par la Géorgie, le 7 août 2008, appuyée politiquement par l'Occident, pour récupérer l'Ossétie du Sud, a provoqué une riposte armée de la Russie. Elle s'est terminée finalement par une débâcle pour la Géorgie, un revers à l'Occident, et la reconnaissance de l'indépendance de l'Abkhazie et l'Ossétie du Sud par la Russie, le 26 août 2008. Là aussi, malgré son affaiblissement (depuis la fin de l'URSS), la Russie n'en continue pas moins de mettre en échec l'Occident. En mars 2014, la Russie dame de nouveau le pion à l'Occident. Par un référendum pour la réunification de la République de Crimée et de la ville de Sébastopol avec la Russie, et en ratifiant le traité d'admission de la Crimée, elle s'agrandit d'un des territoires les plus stratégiques du monde, sans tirer un seul coup de fusil. Il est évident que l'Occident ne peut que s'incliner devant la Russie, qui est la deuxième puissance nucléaire du monde. Cependant, ses succès ne libèrent pas la Russie de la pression occidentale, car il s'agit d'«enjeux géostratégiques vitaux auxquels la Russie, elle-même, y est, à son insu, associée». L'Occident répète les mêmes erreurs, mais peut-il les éviter si ce sont elles avant d'être des erreurs qui font miroiter la puissance font avancer le monde ? Est-ce seulement parce que l'Ukraine est la plaque tournante du transport de gaz russe avec ses milliers de kilomètres de pipe-lines qui explique cet intérêt de l'Occident pour conclure un accord de libre-échange avec ce pays ? Ou obéit-il à d'autres données géostratégiques majeures qui sont en toile de fond, où c'est la Russie qui est visée pour les objectifs cités supra ? Il faut rappeler que l'Ukraine est un des pays les plus peuplés d'Europe (45 millions d'habitants), deuxième en Europe par sa superficie, et surtout elle a une grande frontière avec la Russie. Elle est frontalière avec la Pologne, la Hongrie, la Roumanie, la Slovaquie, toutes quatre membres de l'Union européenne et de l'OTAN. La Moldavie aspire à entrer dans l'Union européenne et l'OTAN. Seule Biélorussie reste alliée à la Russie. La longueur totale de la frontière ukrainienne est de 6.992,98 km ; c'est dire l'importance de l'Ukraine dans les plans occidentaux. Depuis sa sortie de l'ex-URSS, ce pays qui a connu des gouvernements successifs reste miné par la corruption ; ce qui explique la facilité de l'entrisme occidental dans les affaires intérieures et extérieures de l'Ukraine. Donc, dominé par les puissances extérieures au double plan politique et économique, partagé entre le désir d'intégrer le bloc de l'Ouest et de rester dans le giron de l'Est, du fait de la présence de communautés d'origine ethnique russe, ce pays n'a pu trouver une issue politique viable. La forte division de sa population ukrainienne, partagée entre russophiles et russophobes et autres ethnies compliquant le choix politique du pays, s'est soldée, à la fin, en un conflit sanglant. En 2013, face à la crise économique et les offres de l'Union européenne pour un accord de libre-échange accompagnée d'une aide financière qui a suscité une contre-proposition plus avantageuse de la Russie (réduction d'un tiers ses tarifs de gaz et une aide financière sous forme de prêt sans conditions de 15 milliards de dollars), a entraîné un bras de fer politique qui s'est porté sur la voie publique dès novembre de cette année. Le mouvement de contestation à la place Maïdan suivi de la formidable manipulation médiatique occidentale, ont provoqué les événements que l'on connaît aujourd'hui. Et c'est dans ce rapport de forces et les ingérences en Ukraine ont fait qu'aussi bien l'Occident qui s'est appuyé sur des « partis néo-nazis ukrainiens», n'avait de choix, que la Russie qui s'est appuyée sur les russophones, elle aussi n'avait de choix, que la situation a dégénéré en Ukraine. Les divisions dans ce pays le doivent, avant tout, à la faible cohésion nationale dont les puissances ont tiré profit. Comme d'ailleurs, les États-Unis, l'Europe et la Russie se trouvent aussi divisés, par l'enjeu géostratégique que l'Ukraine représente en Europe orientale, et par l'approche qu'ils sont tous concernés par les mêmes contraintes issues de la nouvelle configuration géostratégique et géoéconomique en cours dans le monde. Aussi faut-il souligner que si la Russie a réagi et a pris de court l'Occident, c'est que les événements qui ont eu lieu en Ukraine se sont déroulés à ses frontières et risquaient de mettre en danger sa position stratégique en Mer noire, une lucarne pour sa puissance politique, économique et militaire sur la Mer Méditerranée. Mais l'Occident peut-il énoncer ce pourquoi il vise l'Ukraine ? Et c'est là le problème, l'Occident n'exprime pas assez sa stratégie planétaire à laquelle la Russie n'y voit qu'une expansion du «système occidental» sans réelle contrepartie si ce n'est la suspicion qu'elle génère. On comprend pourquoi, à l'époque, John Mac Cain, décédé en 2018, ancien candidat républicain à la Maison Blanche, est venu haranguer les foules à la place Maïdan, en Ukraine, ou Bernard Henry Levy (BHL) a visé à diviser le peuple ukrainien au nom de la démocratie occidentale, sans pour autant exprimer les vrais buts visés par l'Occident. Alors que si on se réfère aux véritables intentions russes, la Russie de Vladimir Poutine ne souhaitait rien d'autre que de se rapprocher de l'Europe de l'Ouest avec qui elle a bien plus d'affinités qu'avec les autres peuples du monde. Or, l'Occident a répété les mêmes erreurs, a surtout manqué de doigté avec l'idée gaullienne «l'Europe, de l'Atlantique à l'Oural». Mais l'Occident peut-il les éviter surtout si ce sont elles qui, avant d'être des erreurs, font miroiter la puissance mais font avancer le monde ? Le jeu en vaut-il la chandelle ? Pour l'Occident, il en va parce qu'il concerne son avenir tout entier, c'est son destin de leadership d monde qui est en jeu. Guerre en Ukraine. «Amorce d'une configuration géopolitique et géoéconomique de demain» ou nouveau tournant de l'Histoire ? « Le monde est en perpétuel devenir ». En effet, l'éclatement de l'URSS n'est pas venu ex nihilo, il a eu des causes précises. Pour simplifier, si c'est en Russie que le peuple avait envoyé une image d'un pays réellement démocratique, « où il faisait bon de vivre », où les hommes avaient des droits bien plus grands que ceux que les Européens ont en Europe, il est à parier que le peuple ukrainien dans toutes ses composantes n'aurait jamais eu à se désolidariser du peuple russe. Plus important encore, les pays d'Europe centrale et orientale n'auraient jamais quitté la Russie, et l'ex-Union soviétique d'Etat n'aurait pas disparu. Ce serait les Européens qui auraient eu à aspirer à la gouvernance soviétique, ce qui a existé d'ailleurs un temps en Occident, durant la Guerre froide. Mais cette aspiration n'a été qu'en surface puisque le soviétisme prometteur s'est écarté à ce qu'avait été «pensé» par Marx, par Lénine... puisqu'il est devenu une dictature d'Etat. Mais, ce qu'on peut dire du soviétisme est qu'il était sur un chemin inévitable. Pourquoi ? Le problème du socialisme soviétique, qu'il fut remplacé par un « socialisme dictatorial» et au-delà d'une classe nomenklatura, n'était pas qu'il devait quitter la scène de l'histoire, il avait avant tout pour lui l'histoire. Tout d'abord, le régime socialiste a joué un rôle salvateur pour les peuples du temps de l'Union soviétique, toutes les classes sociales ont bénéficié du régime socialiste ; l'Union soviétique s'est élevée au rang de deuxième puissance nucléaire au monde. Le monde s'est bipolarisé dès les premières années post-1945. C'est grâce à son rang de super-puissance qu'est devenue l'URSS que la décolonisation du monde a pu s'opérer, après l'Inde et le Pakistan, en 1947, suivis des communistes chinois qui, entrant triomphalement à Pékin, proclamaient la république populaire de Chine, le 1er octobre 1949. Aussi, peut-on dire que l'ex-URSS a rempli son rôle dans l'histoire. Sans ce contre-pouvoir à l'Occident, sans ce «socialisme dictatorial soviétique», la libération du monde colonisé aurait certainement été retardée. Et si les pays d'Europe centrale et orientale, à la fin de la Guerre froide, ont rejoint l'Union européenne, il faut dire que c'est en somme un processus tout à fait naturel. Car tout peuple aspire à la démocratie, tout peuple aspire à la liberté d'expression, à une sécurité sociale, et cela ne peut passer que par une gouvernance démocratique et une alternance politique. Il y a donc une logique interne naturelle dans tout mouvement historique. Aujourd'hui encore, la situation géopolitique et géoéconomique mondiale est en pleine évolution. L'avènement de grandes puissances économiques telles l'Inde et la Chine ont changé fondamentalement la distribution des cartes du monde. La Russie intégrée dans le BRICS avec l'Inde, la Chine, le Brésil et l'Afrique du Sud ont une portée majeure, par leur puissance économique et démographique, sur les événements à venir. Le problème n'est plus dans la démocratie même si celle-ci joue un rôle majeur dans la gouvernance mondiale. Il porte surtout sur l'emploi et la distribution des richesses dans le monde. Ce qui a un impact sur le commerce mondial et la stabilité de l'économie mondiale. Ce qui va toucher les économies nationales, c'est le risque de concurrence acharnée à la fois sur la compétitivité et la captation des marchés mondiaux. L'Asie, dans sa globalité, a des atouts qui sont prépondérants par rapport aux autres aires géopolitiques. Nous nous dirigeons donc subrepticement vers un nouvel ordre mondial. Et l'Occident entend prendre les devants. Il sait que sa puissance économique, surtout financière et monétaire, atteindra des limites dans un proche avenir, à l'échéance d'une à deux décennies, à l'horizon 2040. Mais les effets négatifs vont apparaître bien avant. Ce qui, avec l'insertion de l'Asie, surtout la Chine, son pôle central, dans la puissance financière et monétaire dans le monde, changera toute la configuration de l'ordre de puissance mondial. L'Occident probablement perdra sa suprématie à la fois économique, financière et monétaire. Or, ce devant auquel il se prépare se pose déjà, dans un premier temps, dans l' «élargissement de l'Union européenne» aux pays qui n'ont pas fait encore leur entrée comme l'Ukraine, la Moldavie, la Géorgie, le Monténégro, l'Albanie... Évidemment, l'intégration qui va demander du temps dépendra aussi de la guerre en Ukraine, et pour d'autres enjeux qui ne sont pas encore visibles aujourd'hui. Mais tout est ouvert et même très possible, dans quelques décennies, pour l'Occident un «marché commun économique, financier et monétaire global». Mais un «marché économique global» dont les projections géostratégiques et géoéconomiques ne sont pas définies aujourd'hui présuppose l'intégration de l'ensemble du monde européen, américain et autres pays alliés à l'Occident. Par cet ensemble, un «non dit » qui concerne la Russie, par ses plus de 17 millions de km² constituant la plus grande superficie territoriale du monde, ne peut être que comprise dans les plans occidentaux à long terme. C'est à toutes ces questions que tant la Russie qui se prépare à la configuration économique de demain qui pourrait être extrêmement préoccupante tant pour l'Occident qui s'efforce aujourd'hui de mener ses plans en soutenant l'Ukraine en guerre contre la Russie. Dans l'issue de la guerre, les conséquences géostratégiques seront extrêmement graves pour celui qui perdrait cette guerre. On comprend tout l'intérêt de l'Occident pour l'Ukraine et les enjeux qui se jouent dans cette guerre Russie-Ukraine. Ce sont ces questions qui se posent à la Russie, qui vont bien au-delà des sanctions économiques et financières que l'Occident lui a imposées. Quant à l'Ukraine, tout compte fait cette crise, cette guerre aura le bénéfice d'avoir délié ce qui l'empêchait d'avancer. Pour ce qui est de guerre nucléaire, ni l'Occident ni la Russie n'auront à s'affronter parce qu'ils perdront ensemble et les pertes seraient apocalyptiques, impossible pour les Occidentaux comme pour les Russes d'aller à l'« apocalypse nucléaire ». Ils peuvent se menacer mutuellement, mais cela reste de la rhétorique qui se joue dans un contexte de guerre psychologique et médiatique. Ce qui est de bonne guerre, en particulier pour les Russes qui ressentent le lourd poids du soutien occidental pour l'Ukraine. Sans oublier qu'au fond, l'Occident le déclare, il ne fait qu'aider l'Ukraine pour sa défense, et l'Occident ne se fait pas beaucoup d'illusion sur son soutien financier et matériel ; tout laisse penser que la Russie ira jusqu'au bout. Cependant, tôt ou tard, ils auront à dialoguer, à trouver une solution commune, et même unilatérale, de part et d'autre, n'enlèvera en rien à la volonté de trouver une solution commune. Ce qui relèvera, on ne peut en douter, des exigences de la «realpolitik». Telle est la problématique de la situation à venir pour l'Ukraine et pour le monde. Aussi, pour conclure, contrairement à ce que l'on peut penser, l'Occident ne va pas isoler la Russie et la pousser vers la Chine, bien au contraire, après que la paix soit revenue en Ukraine, et même si l'Ukraine perdrait la région du Donbass, la Crimée faisant déjà partie de la Russie, l'Occident aura tout autant d'intérêt à se rapprocher de la Russie, à rapprocher ses vues aux vues russes sur l'avenir du monde. Et cette «configuration économique, financière et monétaire de demain» ne s'adresse pas seulement à l'Occident et à la Russie, elle englobe aussi l'Asie, l'Afrique, l'Amérique du Sud, le monde musulman, bref, toutes les aires du monde. La guerre en Ukraine entre en fait dans un processus naturel de l'histoire, paradoxalement raffermit plus qu'il ne divise ; une loi de l'évolution naturelle du monde. *Auteur et chercheur spécialisé en Economie mondiale, Relations internationales et Prospective |