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Plus placide que Larbi, tu meurs ! Voilà un athlète bâti à chaux et à sable qui peut s'enorgueillir de n'avoir jamais abusé de sa force et ce, quelles que soient les circonstances. Attaquant à ses débuts en junior, il a tapé dans l'oeil de Gorine et El-Andaloussi qui le transformèrent en défenseur, sur le flanc droit de l'équipe. Et voilà comment il a pris la place du titulaire du poste, Bendjahène II, qui passa sur le flanc gauche. Pour lui, faire partie de cette séduisante formation unioniste était une grande satisfaction. Il avait comme partenaire les deux Bendjahène (Kouider et Mustapha) et Lasni, qui s'est imposé par la suite sur le côté gauche. «Notre capitaine Si Kouider avait une grande confiance en moi et sur les attaques adverses, on se couvrait mutuellement. Avec moi, il était à l'aise. C'était un grand footballeur et un capitaine très respecté par tous les joueurs», témoignera Larbi Naïr. Toujours à l'écoute de ses dirigeants et entraîneurs, il aura été le modèle des joueurs de club, toujours solide au poste et répondant parfaitement aux consignes. Il se souvient qu'un jour, Ouzaïd étant défaillant face au redoutable SCBA, le rusé Louis Dossat le plaça en pointe de l'attaque. Il n'en fallait pas plus pour que Larbi, lancé en profondeur par un coéquipier, inscrive le but égalisateur. Il revint ensuite en défense à la demande de son entraîneur. Un joueur possédant de telles qualités ne pouvait qu'attirer sur lui le regard du patron de la sélection de l'Ouest, l'ancien international de l'équipe de France, Gustave Dubus. Ce fut l'occasion pour lui de concurrencer le Témouchentois Baghli, alors titulaire. Ce duel a duré plusieurs saisons entre les deux hommes sans altérer pour autant l'estime réciproque qu'ils avaient l'un pour l'autre. Après le retrait des clubs algériens, Naïr Larbi, à 28 ans, a opté pour le club de Puteaux (région parisienne) où il évoluera durant deux saisons avant de rentrer au pays natal. Les dirigeants de ce club, tout comme ceux de l'USMO n'ont eu qu'à se louer de ses services. De caractère sociable, il s'est adapté facilement, ne laissant que de bons souvenirs. En 1962, on pensait qu'il allait rempiler dans son club de toujours, à l'instar de Fenoun. Mais à 32 ans, il a préféré mettre un terme à sa carrière. L'idée de passer de l'autre côté de la barrière pour être entraîneur l'a bien effleuré, mais conscient des difficultés de la fonction, il s'est ravisé. C'est un choix qu'il n'a jamais regretté et que tout le monde a respecté. «Bien que j'avais une idée très précise des entraînements après avoir été dirigé par de grands techniciens», précisera-t-il. Au vu de la situation du football, on ne peut lui reprocher cette sagesse. Nostalgie Le regard fixé sur la photo d'équipe où il figurait, Naïr Larbi, soudain mélancolique, fit l'état des lieux : «Dans cette photo, neuf personnes ne sont plus de ce monde. Il s'agit des deux Bendjahène, Moussa, Arroumia, Soualmia, Lasni, Gorine, Bouakeul et Nekkache. J'ai vécu de grands moments avec eux et sont, à mes yeux, irremplaçables». Jeudi dernier, nous avons eu la chance de rencontrer dans un café du centre-ville trois survivants de cette fameuse phalange des années 50, à savoir Fenoun, 81 ans, Naïr Larbi, 79 ans, et Cheraka Benyebka, 76 ans, en compagnie de l'ancien champion de boxe et entraîneur Rezzoug Belarbi, grand amateur de football. Grosso modo, ils se connaissent depuis 60 ans. Leur amitié est restée intacte, eux qui n'ont jamais courbé le front devant l'adversaire, quels que soient sa force et son statut. Eux qui, en dépit de la différence de leurs caractères, le football a réunis sous le maillot noir et blanc de l'USMO. Le défenseur Larbi, le demi Cheraka et l'inter Fenoun ont égrené quelques souvenirs, tous aussi vivants les uns que les autres. Chaque parole contribuait à éveiller ces images du passé, mais toujours ancrées dans leur subconscient. A un moment donné, on a ressenti une certaine nostalgie mais sans regret ni envie par rapport au football d'aujourd'hui dont tout un chacun connaît la situation. Bien au contraire, ils sont convaincus d'avoir fait pour le mieux, avec le peu de moyens dont ils disposaient à une époque où l'argent passait au second plan. Fenoun, Larbi et Cheraka ont au moins un point commun. Dès leur entrée en équipe fanion, ils sont devenus des titulaires indiscutables, constituant la base «droite» de l'équipe. Larbi mettra l'accent sur la discipline du groupe et le respect des consignes. Un jour, Louis Dossat, fin tacticien, lui a intimé l'ordre de monter à l'attaque. Bien lui en prit, puisqu'il fut l'auteur du but égalisateur contre le SCBA au stade Paul André. Cheraka, qui personnifiait la rigueur, était craint par tous ses adversaires, surtout les dribbleurs. Il évoquera la fameuse finale de Coupe d'Afrique du Nord 1954 où il a dû se plier à la consigne, ce qui permit à Sabi de marquer le seul but du match. Devenu son coéquipier au MC Oujda après 1956, l'enfant de Fleurus lui avouera la peur qu'il lui inspirait. Abondant sur le même sujet, le placide Fenoun évoquera la grossière faute dans la surface de réparation de Sauveur Rodriguez qui aurait dû être sanctionnée par un penalty. «Bien que déséquilibré, et en dépit de la chute, je me suis relevé et j'ai frappé sur le ballon. Hélas, le tir était trop faible pour surprendre le gardien témouchentois Vissus». Aujourd'hui, Larbi, Fenoun et Cheraka voient grandir leurs petits-enfants, et coulent des jours heureux dans leur bonne ville d'Oran où ils sont encore reconnus et respectés. Gratifications Les jours où il était retenu par ses obligations professionnelles à la Brasserie, c'est son frère Hadj et Nourredine Berrahal qui lui apportaient son repas. Ils étaient gratifiés par Larbi et, avec le pécule récolté, ils allaient au cinéma. Famille Père de neuf enfants dont trois garçons, Naïr Larbi n'a pas eu «d'héritier» sur le plan du football. Et pourtant, comme son père Habib, il ne se serait jamais opposé à une quelconque carrière de ses garçons. Admirateur De tout temps, Naïr Larbi a été un admirateur de Larbi Benbarek, la fameuse «perle noire» dont on parle toujours en France, en Espagne et au Maroc où l'ex-stade Philippe porte son nom. Il garde précieusement une photo où il figure avec lui «en civil». Photos A l'instar de quelques anciens sportifs, Naïr Larbi n'a pas conservé d'archives qui nous auraient aidés à retracer sa carrière. Néanmoins, il a conservé quelques photos où il figure, tant avec l'USMO qu'avec la sélection d'Oranie, aux côtés de ses coéquipiers Boudjellal et Fenoun. |