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On mesure le temps avec sa montre, avec des repères, en flashs d'images
«avant» et «après», en modes vestimentaires
qui se succèdent, en façon de se nourrir et se divertir, et, enfin,par évolution des cultes qui déterminent des mentalités, marquant ainsi l'évolution de l'histoire des hommes et de leurs pensées. On est passé de l'ère socialiste à l'ère de l'économie de marché. On est passé de la sémantique socialiste à la sémantique libérale. Tout a changé. Le marché a remplacé la satisfaction des besoins sociaux, la liberté d'entreprise, la planification, l'OMC s'est substituée à la protection de la production nationale et la mondialisation aux politiques régionales de développement. Les Algériens y sont arrivés naturellement comme tous les pays en voie de développement, en utilisant cette façon nouvelle de dire et forcément de penser. Et comme ils disaient hier que l'option socialiste était irréversible, ils disent aujourd'hui que l'option libérale est irréversible. La nouvelle philosophie des pays nantis, à laquelle nous avons été obligés de nous soumettre, a pris la place de la canonnière et des fusils. Nous étions jadis colonisés par la force et le feu, nous le sommes actuellement par l'esprit. Sans effusion de sang, sans canon ni couteau, nous sommes arrivés nous-mêmes par la colonisation de nos esprits à nous soumettre à la doctrine des pays qui ont toujours recherché des approvisionnements sûrs et des marchés afin de maintenir chez eux le plein emploi et la prospérité de leurs couches sociales au détriment de notre emploi et de notre prospérité. Leurs marchés ils les conquièrent non par le feu mais par le verbe, l'ouverture de nos frontières non pas par des blocus mais l'adhésion à l'O.M.C. Ouvrons donc nos marchés au nom de la liberté d'entreprendre. Ouvrons les capitaux de nos sociétés à leurs capitaux. Laissons faire et laissons la libre circulation des biens et des capitaux se faire sans autorisation sans visas, sauf bien sûr pour nous qui n'auront d'autre droit que de restez chez nous, ou de subir l'humiliation des files sans fin lorsque vous avez le bonheur de recevoir la «convocation». Le contexte international est à l'économie libérale, comme il l'était hier au socialisme. C'est la loi de l'évolution et rien n'est irréversible et définitif. Nous savons, par avance, ce que vont gagner les autres, mais nous, qu'allons-nous gagner? En ce qui concerne le commerce, nous allons de plus en plus être les appendices de multinationales structurées, écoulant leurs produits à coups d'opérations marketing plus ou moins fumeuses. Nous allons répéter leur logo, leur devise, leur flash, pour mieux leur faire des profits et ramasser quelques miettes au passage. En retour, nous aurons à leur vendre un pétrole et un gaz, non le fruit de génie transformateur des hommes, mais du génie transformateur de Dieu. Lui qui nous a gratifié d'un sous-sol que nous perçons pour en tirer ce que nous vendons. Nous savons forer, c'est déjà ça! Bien sûr, avec l'aide des équipements fabriqués ailleurs et hautes technologies qui demeurent sur des rayons haut perchés pour nous en défendre l'accès. Le paysage commercial s'installe à coups de néons et de couleurs multicolores et les marques et labels originaux ou contrefaits fleurissent sur les étals. Nous devenons peu à peu les boutiquiers du génie humain qui s'exprime ailleurs. Notre génie à nous demeurera longtemps enfermé dans sa lampe d'Aladin jusqu'à ce que? En matière d'industrie, nous avons observé, sans réagir, le démantèlement de nos unités, qu'elles relèvent du secteur public ou privé. A coup de dévaluation de la monnaie nationale et à cause de politique à haut dénigrement, nous avons fait de nos zones industrielles, des zones cimetières, des hangars, hermétiquement clos. D'anciens vous diront qu'il fallait en passer par là. Toujours est-il que l'Algérie produit si peu et importe tellement que l'on se prend à demander si l'espoir est permis, et si un jour, dans le cadre du libre échangisme nous aurions autre chose à échanger que les matières premières dont nous a gratifié Dieu. D'un autre côté, les instituts de technologie et de sciences qui formaient techniciens et ingénieurs pour doter en moyens humains une industrie voulue par une Algérie Socialiste, continuent, de façon paradoxale, à former des ingénieurs et autres techniciens pour l'économie de bazar installée. Comme si rien n'avait changé, comme si l'Algérie était restée sur sa lancée industrielle, alors qu'elle a changé fondamentalement de cap. Le critère de cohérence dans la démarche, ou la vision globale, n'est décidément pas de mise dans le domaine. Des médecins et des ingénieurs s'installent derrière des tiroirs-caisses pour vanter la qualité des produits faits ailleurs et écoulés par leurs soins. Belle conversion et retournement spectaculaire, conforme à la philosophie du libéralisme accommodé à la sauce OMC. Eh bien, nous qui donnons tant d'importance à la décolonisation, nous la revivons de façon plus douce car plus pernicieuse. Nous faisons du sur-place. Physiquement, les colonisateurs ne sont plus là, nos vignobles et nos terres à céréales? pour les livrer à l'OMC, à la concurrence des autres, aux diktats des autres, nous avons jeté les occupants par la porte ils sont revenus par nos fenêtres à coup de «libéralisme», de «démocratie», de «droits de l'homme», et de «droit d'ingérence». Alors comment faire nous qui pensions avoir recouvert le «droit de disposer de nous-mêmes». De quoi disposons-nous? Même propriétaires de nos biens, nous nous efforçons d'adapter les prix de nos pétroles à leurs besoins car, bien sûr, faire du tort à l'économie mondiale c'est grave pour nous, non pour les autres! Nous mesurons à quel point notre esprit est occupé, colonisé! Nous nous faisons du mouron non pour nos analphabètes, non pas pour nos laissés pour compte, mais pour le bien-être des économies dominantes. Et comme si ces dernières s'en faisaient pour les prix des équipements et technologies que nous sommes contraints d'acheter chez eux, à des niveaux qui ne souffrent d'aucune discussion, et sans recours à une quelconque «OPEP». Qu'avons-nous eu en échange? Nous avons droit à respecter le jeu de la démocratie, le jeu du libéralisme et les droits de l'homme avec en prime le droit d'ingérence si nous nous en écartons ou si nous osons vouloir disposer de nos richesses en fixant les prix. Alors quelle solution? - La solution chinoise qui a su maintenir la discipline de l'éthique communiste en optant pour le libéralisme et qui réussit de façon spectaculaire. - La coréenne qui nous inonde elle aussi de façon spectaculaire par ses produits qui battent en brèche ceux fabriqués par les pays jadis détenteurs du «monopole» de fabrication. De quels atouts disposent-ils dont nous ne disposons pas? Ces questions nous interpellent de façon brûlante et nos universitaires devraient travailler et réfléchir aux problèmes sans toutefois faire encore un «séminaire». En ce qui nous concerne, nous pensons qu'il ne s'agit pas d'en rechercher les causes dans des atouts qu'auraient ces pays et dont nous ne disposons point. Lorsque, de façon brève, l'on recense les données, nous nous trouvons des points communs avec en prime, en ce qui nous concerne un atout majeur, la richesse de nos sous-sols. Nous disposons d'une jeunesse désoeuvrée, non qualifiée mais que nous pouvons former. Nous disposons d'une géographie qui, comme eux, autorise normalement l'organisation spatiale et son accessibilité par des réseaux de transport et de communication. Nous disposons des moyens financiers pour acquérir technologie et équipement. Nous nous trouvons à une heure d'avion de l'Europe et de sa technologie, alors? Une première approche nous amène à penser, qu'en ouvrant l'économie à l'économie de marché, nous n'avons pas accepté ce qu'elle pouvait induire comme conséquences. Nous n'avons pas compris aussi, parce que nous n'avons pas interrogé l'histoire, que l'économie de marché, comme elle se pratique en Chine et en Corée, suppose, le temps de l'accumulation du capital, la descente des Algériens à la mine pour suer et créer la richesse pour que, plus tard, bien plus tard, les enfants de nos enfants puissent trouver, dans notre beau pays, les commodités et l'opulence qu'ils recherchent à coup de visas dans les pays d'Europe. Les 14 heures de travail que passent ici les Chinois à travailler sur nos chantiers, nous renseignent sur cette descente aux «charbons». Ceux qui n'ont pas accepté cette vérité, soit recherchent d'autres moyens pour arriver à leurs fins tels le népotisme, le clientélisme, ou en s'appuyant sur une «açabya» qui ne demande qu'à s'exprimer et à régner en renvoyant toujours à plus tard l'Etat de droit, soit à fuir le pays sous différents prétextes pour aller profiter de la richesse et du confort de pays dont ils n'ont pas participé à l'édification. Nos universitaires, chercheurs et autres ingénieurs de tout bord, expatriés, ont refusé la «descente aux charbons» et préfèrent le confort douillet de l'Europe en prétextant, il y a peu de temps, de la menace qui pesait sur leur vie, et, paradoxe en se faisant les défenseurs acharnés de cette même économie libérale dont ils n'ont pas accepté les impératifs de travail. Comme si leur vie valait plus que celle d'un paysan vivant là-bas en haut de la colline dans un douar de cinq maisons de tourbe séchée? Comme si leur vie valait plus que celles des 30 millions d'Algériens restés chez eux à se battre et à se construire dans l'effort! Comme si leur vie valait plus que celle de tous leurs collègues qui continuent à se battre, à revendiquer mais à travailler. Qui nous a dit que les formations sociales que nous admirons tant, se sont faites en 40 années? Qui nous a dit que les TGV, les BOEING et autres équipements et infrastructures dont ils sont dotés, ne sont pas le fruit de leur descente à la mine? La part de rêve que nous portons chacun en nous, a pris le pas sur la réalité que nous devions affronter au nom de l'économie de marché et de l'âpre concurrence à laquelle nous n'étions pas préparés mais qu'il faut assumer. Les Algériens n'ont fait ni l'Amérique, ni la Chine, ni la Corée. Qui fera l'Algérie? Les Américains, les Français, les Allemands, ou les Chinois? Le véritable débat et la prise de conscience dans ce domaine ne sont pas encore faits et n'ont pas eu lieu. Nos débats et nos efforts sont actuellement axés sur des questions d'ordre théocratique. Nos discussions, nos débats sont d'ordre métaphysique, et: - Pour paraphraser Auguste Comte au plan de la loi des 3 états, nous n'avons pas encore atteint «l'âge positif, l'âge métaphysique, voire théocratique, se prolongeant outre mesure»; - Pour paraphraser Marx qui demeure un redoutable analyste et méthodologue, nous n'avons pas «pris conscience du conflit pour mener le combat jusqu'au bout». Evidemment, au plan le plus abstrait du terme, c'est-à-dire, la compétitivité et la productivité qu'il faut assurer à tout prix; - Pour paraphraser Althusser, nous n'avons pas procédé dans l'analyse à «la rupture épistémologique». Parti d'un problème de développement et d'économie, nous débouchons sur un problème de société. L'Algérie n'est pas malade au plan de son économie et des atouts dont elle dispose, mais elle est malade de sa société. La richesse n'est plus le fruit du travail mais le fruit du clientélisme et de la Açabya. Les rapports de forces bâtis sur le clientélisme révoquent l'Etat de droit, à plus tard, toujours plus tard. Le savoir n'est pas le trait fondamental de la réussite, mieux encore, plus on est en bas de l'échelle du savoir, et plus la réussite est éclatante et, inversement plus vous détenez le savoir, plus vous êtes en bas de l'échelle sociale. Le débat sur la femme prend le pas sur le débat du développement celui de la polygamie exacerbe la société dans son aspect féodal et occulte les problèmes de l'économie et du développement. La société n'a plus de repères et son système de valeur est complètement inversé. Les charlatans «sorciers» dans leurs propos fumeux sont plus écoutés que le plus éminent de nos savants. Les constantes répétées pour les uns et les autres figent le débat. Rien n'est constant, car les lois, expressions des formations sociales, changent avec la transformation de ces mêmes formations sociales. Hier le socialisme, aujourd'hui le libéralisme. L'homme préhistorique, les pharaons, les Grecs avaient leurs vérités et leurs lois pour expliquer les phénomènes et déterminer les conduites. Le Dieu Eole faisait le vent et Neptune régnait au fond des océans, et leur météo était relative et attachée à la volonté des Dieux. Même les lois issues des sciences exactes ont évolué, et la physique de Kepler a cédé le pas aux lois de la relativité restreinte et générale. Alors qu'y a-t-il de constant si ce n'est la transformation de l'homme qui «en transformant la nature se transforme lui-même». Même la taille des hommes se transforme; les Suédois ont pris 5 cm de plus que ceux d'il y a cinquante ans à cause de menus alimentaires plus variés et plus adaptés. La transformation est irrésistible et ne peut être réduite par des vœux pieux énonçant des «constantes». Ceux qui veulent cantonner la société dans ces débats stériles, portent une lourde responsabilité devant l'histoire, car ils privent les enfants de ce pays des moyens propres à leur épanouissement. Ils portent une lourde responsabilité car ils mettent en échec la réflexion et l'évolution sociale. Mais ces entraves et ces privations ne durent que le temps d'une vie, le temps durant lequel les conditions de vie créeront et accumuleront les contraintes nécessaires à leur mise en échec, et à la mise à nu de la stérilité de leurs débats métaphysiques actuels. Le temps des «sorciers» ne doit pas primer sur la raison et sur la raison du «chef» qui conduit la société. Il devra, lui-même, un jour les réduire, pour s'en affranchir et guider son peuple vers la prospérité à travers une efficacité recherchée et pointue qui puisse nous amener à rivaliser avec la Chine, la Corée ou l'Europe, et dans le cadre de l'option libérale choisie. Il doit avec son peuple assumer les conséquences du choix. Les sorciers ont toujours été sorciers depuis la préhistoire, revêtus d'attributs vestimentaires changeant au fil des modes et civilisations, mais toujours s'accompagnant d'incantations et de dogmes érigées en vérité figées. Nous avons dit économie de marché! La cohérence dans la recherche des solutions pour participer à l'économie mondiale doit emprunter les mêmes voies que celles empruntées par d'autres avant nous et faire du débat économique le véritable débat en laissant le soin aux consciences de chacun de débattre des problèmes liés à la métaphysique. Nous y arriverons que nous le voulions ou non, malgré toutes les résistances vaines, qui s'opposent aux mouvements de l'histoire car la règle de la cohérence du choix opéré, à savoir l'option libérale, prime la règle des mauvais génies, et va en les bousculant les enfermer et les confiner dans les réduits sombres de l'histoire. Recherchons la cohérence partout dans notre démarche, par rapport à l'option libérale à laquelle nous avons été soumis ou que nous avons choisi peu importe, et qui implique l'efficacité par le travail, la discipline, la rigueur et la sueur. Acceptons, sans réserve, d'assumer nos tâches pour créer la richesse, partons à la conquête du savoir pour être plus efficace plus compétitifs, car ils demeurent les seuls facteurs du progrès. Récompensons ceux qui les détiennent et qui en usent pour créer les biens et les services pour eux-mêmes et pour la société. Admettons qu'il faille de la justice pour que ceux qui créent puissent profiter du fruit de leur génie. Qu'il faille faire preuve d'humilité, de beaucoup d'humilité en admettant qu'il a fallu un, voire deux siècles aux pays que nous admirons pour créer la prospérité et les vitrines de leurs grands boulevards qui nous fascinent, et qu'une génération ou deux, par le fait de l'accélération des mutations, nous seront nécessaires pour être parmi eux. A condition de se mettre en travail! D'assumer les choix! D'abandonner les débats stériles pour aborder l'âge positif. De ne donner aux «sorciers» que l'importance que l'on peut donner aux sorciers sans attendre d'eux d'autre salut que le statut de sorciers livrés à leurs nébuleuses réflexions. Et enfin dire, que si nos pères, mères, sœurs et frères sont morts pour l'Algérie, qu'ils ont voulu un pays de progrès, d'hommes libres aspirant à une meilleure vie et, en tous les cas, pas à une vie de «sorciers manipulant les constantes» pour prolonger leur pouvoir et leur règne outre mesure. |
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