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A la tête d'Alliance Assurances depuis sa création, Hassan Khelifati, Président-Directeur
Général d'Alliance Assurances, revient dans cet entretien sur les raisons qui
l'ont conduit à postuler à la présidence du Forum des Chefs d'Entreprises (FCE).
Il évoque également ses orientations en matière de développement économique et affirme qu'il pourra apporter une «plus-value» s'il est élu à la tête du forum. Le Quotidien d'Oran : Vous avez décidé de postuler au poste de président du FCE. Pourquoi maintenant et pour quelles raisons ? Hassan Khelifati : Pourquoi pas maintenant ? Je pense que ma candidature obéit à une conjoncture très favorable au sein même du Forum qui commence à vivre une certaine léthargie et un statu quo depuis quelque temps. D'autre part, nous avons été sollicité par un certain nombre de nos pairs membres du forum qui nous ont fait l'honneur de penser que nous pouvons représenter une certaine innovation, un dynamisme et un renouveau. Notre Forum a besoin d'une vision novatrice qui le rapproche plus des préoccupations de ses membres, actuels et futurs, mais surtout qui le remet au centre du débat économique national avec des positions claires, affichées et assumées. L'autre raison qui m'a poussé à me présenter, je pense que le jeu est ouvert au sein du FCE et chacun a la possibilité de s'exprimer dans le respect mutuel et en totale démocratie, ce qui rend la compétition assez intéressante si les choses demeurent dans cet esprit jusqu'au jour du scrutin. Nous sommes porteur d'une vision claire du rôle que doit jouer chaque membre du Forum, ainsi que de la relation que doit bâtir le FCE avec le monde extérieur (pouvoirs publics et institutions, universités, syndicats, relations internationales ainsi que la société). Q.O.: Pensez-vous réellement avoir des chances de l'emporter face aux autres candidats ? H.K.: Si je me présente à cette élection et que j'ai engagé ma personne et ma crédibilité, c'est que je suis sûr d'avoir de réelles chances de l'emporter si j'arrive à convaincre mes pairs de la pertinence de mes propositions et surtout de ma profonde volonté de mettre toute mon énergie et mon savoir-faire au service de cette noble tâche. La conjoncture est très favorable pour une candidature comme la mienne, porteuse d'espoir de changement et de renouveau. Les membres auront à choisir entre deux types de candidatures : celle du statu quo ou celle du changement et du renouveau. Je pense que le Forum regroupe une élite des chefs d'entreprises en Algérie et c'est à eux de départager les candidats qui répondent au mieux à leurs aspirations. La question est que veulent faire les membres de leur Forum et quelle stature veulent-ils lui donner dans le futur ? Q.O.: Le FCE a été un espace de débat et de propositions. Il a plutôt, estiment des observateurs, réussi sa mission. Pensez-vous faire plus que vos prédécesseurs à la tête de l'organisation ? H.K.: Tout à fait, le FCE a été à travers le temps un espace de débat et de propositions dès les premières années de son existence, notamment au milieu des années 2000. Néanmoins, nous avons perdu beaucoup de cette faculté ces dernières années. Nous sommes devenus beaucoup plus réactionnaires aux éléments externes. Nous avons perdu notre capacité de prospective et d'anticipation, et nous nous rencontrons de moins au moins. Ces derniers temps, les espaces de dialogue et les rencontres régulières entre les membres se sont réduits comme une peau de chagrin, et les membres qui sont en dehors du premier cercle se sentent marginalisés, non écoutés et écartés. C'est un sentiment réel qu'on doit tout faire pour rectifier au plus vite. Les propositions du FCE ne doivent pas être celles d'une cellule d'experts aussi brillants soient-ils. Il faut qu'elles soient l'émanation de la base du FCE, notamment ceux de l'intérieur du pays. Il faut les écouter et aller régulièrement à leur rencontre et trouver les voies et les moyens pour les aider dans leur quotidien. C'est en ce sens que nous pensons que notre vision est différente et que nous pouvons impulser le FCE vers le haut, et en adéquation avec les aspirations de sa base. Q.O.: Qu'allez-vous faire si vous êtes élu à la présidence du FCE ? H.K.: Notre vision est claire, précise et s'articule autour de 3 axes principaux : 1. La proximité : il faut rendre le Forum à l'écoute de ses membres et notamment sa base des chefs d'entreprises qui ne sont pas proches des centres de décisions à travers l'organisation. Il s'agit aussi de mettre en place des FCE par wilaya et par filière avec des présidents élus et des structures autonomes, qui sont de droit membres des instances centrales. Cela nous permettra d'identifier les potentiels au niveau local et d'élargir la base de FCE pour devenir, avec le temps, le vrai moteur de patronat national. Nous devons ouvrir des perspectives nationales, régionales et internationales à nos PME qui restent empêtrées dans des problèmes quotidiens qui ne leur laissent pas le temps de s'ouvrir sur le monde. Nous pouvons les aider et les guider pour avoir cette vision. 2. Travailler pour le rassemblement du monde de l'entreprise : il n'est pas question ici de réunification du patronat, nous avons une approche très différente de ce qui a été fait jusqu'à maintenant. Nous avons une méthodologie qui a réussi dans d'autres pays et que nous pouvons dérouler dans des délais raisonnables afin de ramener les chefs d'entreprises à s'entendre sur un minimum vital pour eux et pour l'économie nationale. 3. Le partenariat Public/Privé que nous devons encourager et développer sur deux volets. Le premier est économique pour trouver les voies et les moyens pour que les entreprises algériennes, quel que soit leur statut, travaillent ensemble et font des investissements à caractère national. Nous devons impérativement combattre la dichotomie publique/privé qui existe encore dans certains esprits et aller vers l'entreprise algérienne tout court. Le deuxième volet a trait à la concertation avec les pouvoirs publics et les institutions. Il s'agit de trouver le moyen de déplacer le débat de la place publique vers un cadre de dialogue et de concertation pour régler les problèmes et trouver les solutions. N'oublions pas que le défi du développement et de la croissance est l'affaire de toutes les parties (patronat, gouvernement, syndicat et la société) et qu'en aucune manière une partie seule pourra relever le défi. Q.O.: Comment vous appréciez la manière avec laquelle le FCE a été géré jusqu'ici ? H.K.: En réalité, le FCE a connu plusieurs étapes depuis sa création, il a connu une période faste au milieu des années 2000 et, depuis quelques années, on constate un repli inexplicable en interne. Il n'a qu'une présence médiatique soutenue et régulière. La preuve que le bilan n'est pas très positif, le nombre de membres qui n'ont pas renouvelé leurs cotisations. Pour rappel, le président sortant à l'issue de son élection en 2009 s'est engagé à ramener le nombre à une certaine hauteur et aujourd'hui, même le nombre de 2009, nous n'arrivons pas à le maintenir. Il y a donc un vrai problème. Lors des élections de 2009, le tiers des membres s'est exprimé pour un autre candidat. Tous ceux qui étaient proches de ce candidat ont été éliminés des instances dirigeantes et leurs voix étaient complètement absentes ces deux dernières années. Certaines propositions ne sont pas assez concertées avec les membres et même ceux qui sont au sein des instances dirigeantes disent qu'ils ne sont pas consultés sur certaines décisions. Nous pensons que c'est le moment pour le FCE d'opérer un changement profond pour lui donner une autre dimension. Lors de l'assemblée élective de 2009, l'équipe gagnante s'était engagée publiquement à adopter et appliquer le programme du candidat malheureux. Après un mandat, on constate qu'aucune mesure n'a été appliquée et voilà qu'on nous promet que ça va se faire lors du prochain mandat. Je ne sais pas si nos pairs vont croire à ces nouvelles promesses. J'invite les membres à relire le programme de M. Othmani en 2009, et les promesses et programme de certains en 2011 et de trouver l'erreur. Q.O.: Pensez-vous pouvoir faire revenir les entreprises publiques qui avaient démissionné du FCE ? H.K.: Je pense que la place des entreprises publiques est au sein du FCE. Nous avons le même défi de la croissance, de création de richesse et de développement de l'économie nationale, afin de sortir de la dépendance totale vis-à-vis des exportations des hydrocarbures. Nous allons tout faire pour ramener les entreprises publiques au FCE et dépasser les malentendus du passé, regarder vers l'avenir afin de relever le défi de la construction nationale qui nous est primordial. Q.O.: Le partenariat public-privé est-il une chimère à vos yeux ? H.K.: Le partenariat public-privé n'est pas une chimère, c'est un objectif noble pour l'économie nationale. Nous devons faire évoluer notre mentalité et notre vision des choses pour être au rendez-vous de la croissance et du développement. Le public avec des capacités énormes sous-utilisées et le privé avec sa flexibilité, son dynamisme et son goût pour la prise du risque peuvent donner des résultats très importants à l'avenir. Q.O.: En tant que patron d'une compagnie d'assurance privée, pensez-vous que le secteur privé peut relever le défi du développement après les mesures plutôt encourageantes obtenues lors de la dernière tripartite ? H.K.: Tout d'abord, c'est la première fois que le secteur privé bénéficie de mesures aussi importantes pour son sauvetage et sa relance. Effectivement, la dernière tripartite a pris des mesures salutaires pour certaines entreprises, mais attendons de voir leur concrétisation sur le terrain. A mon avis, les intentions du gouvernement sont très bonnes et la preuve c'est la prise de décision rapide et efficace. Mais c'est la mise en application qui fait peur aux chefs d'entreprises. Il faut qu'il y ait un mouvement d'ensemble afin d'atteindre les objectifs attendus de ces mesures qui restent exceptionnelles mais non suffisantes, car l'environnement de l'entreprise n'est pas complètement assaini, mais c'est un très bon début. Le secteur privé national a déjà donné la preuve de son engagement pour le développement, à travers des résultats probants qu'il n'a cessé d'enregistrer malgré une conjoncture pas toujours favorable. Ce secteur, qui est le premier employeur depuis 3 ans, a créé plus de 70 % de la valeur ajoutée hors hydrocarbures alors qu'il ne bénéficie que de moins de 15 % des crédits à l'économie. Les mesures financières d'effacement des agios représentent environ 80 milliards de DA, soit environ 1 milliard de dollars, qui n'est pas une somme énorme par rapport au nombre d'entreprises sauvées de l'asphyxie financière et le nombre d'emplois sauvés et à créer. Q.O.: Ne pensez-vous pas que le gouvernement agit plutôt en pompier et que tant qu'il n'existe pas une relation de confiance entre les autorités et le secteur privé, toutes les mesures ne répondent qu'à un souci conjoncturel ? H.K.: Je pense que cette année le gouvernement a changé de cap et d'orientation, et il en donne la preuve à travers sa capacité d'écoute et de prise en charge des propositions des chefs d'entreprises. A la dernière tripartite du 29 septembre, le Premier ministre a accepté l'ensemble des propositions émanant des commissions regroupant les ministères et les représentants des patronats. Si elles venaient à être mises en œuvre dans des délais relativement courts, les 211 mesures adoptées et acceptées par le gouvernement changeront complètement l'environnement de l'entreprise algérienne et la libèreront totalement pour sa vraie mission de création de richesse et d'emplois. Q.O.: Vous êtes la première compagnie privée à être cotée en Bourse. Vous n'avez pas regretté ? H.K.: Pas du tout. L'entrée à la Bourse d'Alger obéissait à un axe stratégique de notre développement et de notre désir profond de participer à la relance du marché financier en Algérie. Nous avons réussi à relever le défi de rétablissement de la confiance et modestement à montrer le chemin aux autres que nous attendons avec impatience, en particulier ceux qui se sont déjà annoncés. Néanmoins, les difficultés sont réelles, notamment à travers l'impréparation du marché à répondre aux besoins d'achats et de ventes des investisseurs et nous faisons tout pour sensibiliser nos amis banquiers afin de veiller à ce que leur réseau soit à l'écoute du marché et permette aux titres boursiers de vivre et de ne pas perdre les occasions d'animation inutilement. Il y a une volonté réelle des autorités publiques de relancer la machine par une réforme profonde du compartiment PME avec l'appui du PNUD et de la COSOB. Nous avons attiré l'attention de toutes les parties sur la nécessité de mettre tout en œuvre afin de maintenir l'espoir et la flamme suscitée par notre introduction en Bourse et ne pas la dilapider inutilement. En tout état de cause, nous pensons faire un bilan au bout d'une année ou deux et tirer les conclusions qui s'imposent à ce moment-là. Q.O.: Disposez-vous du bilan financier d'Alliance Assurances pour cette année ? H.K.: Pour le bilan financier, il n'est pas disponible pour le moment et nous allons le communiquer dès que les diligences seront terminées. Nos objectifs conjoncturels en termes de réalisation du chiffre d'affaires sont atteints avec plus de 22 % au premier semestre, et ce, malgré un ralentissement du marché dans sa globalité (+ 2%). Ce qui est intéressant pour l'année 2011, c'est une année de transition et de réorganisation. Nous avons continué le renforcement de l'équipe dirigeante par des recrutements de qualité au niveau international ainsi que la définition d'un plan stratégique 2012-2014 qui a pour nom 1,2,3 avec trois objectifs principaux : 1. Devenir l'assureur préféré des Algériens, 2. Doubler le chiffres d'affaires en 3 ans et 3. Tripler le réseau actuel. Nous avons aussi procédé à l'alignement de nos fondamentaux, notamment de provisions et les règles prudentielles sur les meilleurs standards internationaux afin de répondre aux exigences les plus rigoureuses en matière de gestion financière. Nous avons aussi créé une structure au niveau central chargée de mener à bien tous les investissements futurs que nous devons mettre en place. Cette structure est formée par des compétences de niveau international afin de répondre au besoin de maîtrise et aussi à la création de valeurs attendues par nos investisseurs à moyen et long terme. Nous pensons mener des actions d'ensemble afin de consolider les acquis et répondre aux besoins de nos investisseurs. Q.O.: Qu'en est-il de la nouvelle filiale «assurance vie», notamment les perspectives ? H.K.: Pour la filiale assurance des personnes, nous avons mis ce dossier parmi nos priorités malgré la lourdeur de l'investissement (1 milliard de DA) pour un marché qui n'est pas très développé en Algérie. Nous avons négocié avec un partenaire international et nous avons soumis le dossier pour autorisation au niveau du CNI dont nous attendons la réponse que nous espérons favorable afin de lancer le plus rapidement possible notre activité. Le projet est en bonne voie, les négociations sont terminées et nous n'attendons que le feu vert des autorités. Les perspectives sont bonnes mais c'est un projet qui ne peut être rentable qu'à long terme. |