
Souvent
l'unanimisme s'apparente à de l'hypocrisie, de l'opportunisme, du clientélisme
ou à la contrainte et à l'asservissement de ceux qui le font. Certaines
personnes ne partagent pas les idées ou les opinions des autres, et c'est tout
à fait naturel, l'exprimer courtoisement ne devrait déranger aucun. Si le monde
est monde, c'est parce qu'il est fait de tout et de son contraire, sinon la vie
n'y serait qu'une monotonie involutive et décadente, les êtres : des clones à
l'infini, leurs figurines se reflèteraient en continuité dans des miroirs, la
même image, la même ombre et la même silhouette. Les uns se verraient dans les
autres : mon moi, c'est ton moi, il n'y aura plus l'autre que dans moi. C'est
terrible comme vie, c'est la sélection de l'unique par l'unique : pensée
unique, mœurs uniques et vie communautariste en autarcie, isolante, plate et
mortelle. Le monde deviendrait sans couleurs et la vie sans odeurs. Occulter la
réalité, travestir l'histoire, la tronquer, la pervertir et la confisquer ne
mène nulle part ceux qui bercent, infantilisent et bernent leurs semblables.
D'autres, et sont légion, croient ou pensent et avèrent que l'histoire de
l'Algérie a commencé seulement avec l'avènement des conquêtes musulmanes et
pour d'autres encore, elle n'est que la fille naturelle de la Toussaint. Avant
le Big Bang, c'était le vide sidéral cosmique, pas de trace de faune, ni de
flore, la géographie n'existait pas encore pour eux et l'Homo-algérianus
n'était qu'une légende et un mythe des anciens. Il est intellectuellement
malhonnête de soustraire du temps au temps et de gommer la diversité et la
richesse culturelle de la personnalité algérienne. Les fondements
socioculturels intrinsèques qui font la particularité de tout un peuple sont un
héritage séculaire. A chaque nouvelle période de l'histoire, la créativité et
l'innovation, induites par des générations d'hommes à la recherche de la
satisfaction de leurs besoins vitaux, de leur sécurité et de l'amélioration du
confort de leur vie quotidienne, apparaissent des modes de vie nouveaux, des
pratiques nouvelles et des croyances nouvelles. Ce progrès enrichit le
patrimoine matériel et immatériel d'un peuple, diffusé d'une génération à
l'autre et est régénéré indéfiniment, pour procurer et créer le sentiment d'une
identité commune aux individus qui le composent. Depuis la nuit des temps, des
peuples se sont succédé sur cette terre d'Algérie : les Phéniciens, les
Carthaginois, les Romains, les Vandales, les Arabes, les Ottomans, les
Espagnols et les Français ont tous apporté des croyances et des cultures
différentes: païenne, juive, orthodoxe, catholique, chiite, ibadite et malékite
aujourd'hui, ont imprégné et modelé la mémoire collective du peuple algérien.
Cet évènement culturel à Constantine est l'occasion de rappeler la pluralité
omise de l'Algérie pour corriger le regard que porte la société sur son
histoire et non pas la trahir encore et encore, par des illuminés qui ont
ouvert ces festivités par un affront ridicule à l'Histoire en déformant les
noms de Cirta en « Qirta » et de Constantine en « Qasr Tina» ; malheur a un
peuple qui ne s'assume pas et qui n'assume pas son histoire, toute son
histoire.