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«Une grève qui
n'embête personne équivaut à une grève de la faim».Jean Amadou
Il ne s'agit plus de grèves. L'impasse. L'abus de droit face au droit d'en user à faire trépasser l'école. Dans ce campement unilatéral, l'obstination est devenue un dialogue. La surdité, d'une part, et l'«aveugleté», d'autre part, isolent davantage les orphelins scolarisés. Encore des grèves. La lutte permanente, celle des classes prolétaires n'est plus une inspiration à même d'inciter une quelconque idéologie à se radicaliser. Les vertus de ce syndicalisme humain, pensé et juste, ont pété leurs plombs. Par manque de préceptes pour un militantisme disparu et suppléé par une rente, l'école s'est transformée en un parti où l'esprit révolutionnaire n'est qu'un repos. Une ineptie. L'école n'est pas Benghebrit. Elle est une sculpture de ses artisans. C'est une nation qui se cultive dans le champ des cartables, à l'aurore des portails et à chaque intermittence de cloche. Dans chaque écolier, l'on soupçonne croître un futur gréviste, un coupeur de route ou un mauvais sous-ministre ou un quart de wali. Pendant que cette école, œuvre artisanale d'enseignants rouspéteurs, agonise dans le mépris de tous, ces enseignants ne semblent avoir de cure qu'une grille de salaires ou autres caprices. Ils ne sont pas le pays, mais font sa pluie et magnétisent le gris de son ciel. Se confondre à un monde, penser bloquer l'avenir ou retarder l'intelligence n'est qu'une gageure. Il y a des défis plus costauds pour des militants en quête de lutte. Le parti unique n'étant plus la matrice d'un recrutement massif dans ses années de gloires obscures, la voie vers d'autres faux combats, faux calculs a été ouverte dans les préaux et les classes de cette pauvre école nationale. L'on y fait beaucoup plus de grève que de civisme. Où est cet instituteur qui, à vélo ou en moto, rongeait des pistes pour rejoindre son estrade ? Ce modèle qui mouvait dans l'exemple l'envie de son écolier, souhaitant à mourir devenir comme son maître. En classe, chez un maître, son comportement était la première leçon. A cette époque, la voiture étant un luxe inaccessible, seule la passion pouvait conduire son passager à aller semer comme un apôtre la bonne parole. Les premières écoles rurales étaient des miracles dont l'hypothétique réalisation ne s'incarnait que dans le volontarisme et l'abnégation. Les affaires sociales de ce corps prophétique n'étaient pas des Maruti, des omras, des prêts, des logements. Juste des hommages à peine applaudis en fin d'année. Des reconnaissances citoyennes en ce moment où la citoyenneté se logeait seulement dans la fierté et la dignité. Les cours du soir ou de nuit ne sont qu'une éducation clandestine. Ce n'est forcément pas là où crèche la réussite. Mais le besoin d'y recourir est déjà créé par l'école du jour. Une cavalcade scolaire à longueur d'année chemine au trot les âges de tous les gamins. Pris pour un vaccin immunitaire, ces cours ne sont pas l'apanage d'un fournier ou du toubib du coin. Ce sont ceux qui crient à la supériorité statuaire, à la hausse des soldes qui, au lieu de se dépenser le jour, font dépenser de nuit les autres. Dans le temps, l'école suffisait à l'école. L'enseignant à lui-même. L'on ne se figeait point son orbite oculaire uniquement sur un bulletin de paye, pourtant rachitique. La constance et la patience, valeurs d'époque, faisaient le reste de ce qui se décantait comme loyauté et bravoure. La baraka, à l'instar de tous les étals, s'est envolée depuis, aux dépens d'une boulimie soldatesque et excessivement revendicative. Ainsi, l'on se retrouve à l'envers de toute droiture avec cette gourmandise qui fait accroître les appétits les plus béants. L'on exige ce que l'on n'a pu remettre en assurance de contrepartie. L'obligation de résultat devrait en conséquence être un corollaire jumelé pour toute autre gratification. En classe chez un gardien d'élèves, le cynisme n'est plus une embûche pour se soustraire à ses devoirs. Il présume retenir dans une blouse un petit peuple et dans une angoisse un ensemble de parents. Ce surveillant-instructeur qui croit faire grève n'a pas à quitter ses classes. Fige ta chaire, ferme tes leçons, reste à ta place et fais comme il se doit ta trêve ou ta grève. Quitter son poste ou s'abstenir de le rejoindre, dans un espace d'enseignement, ne peut être qu'un acte d'absentéisme. Une abdication de conscience. Plus qu'une disjonction brisante de pacte. Le bon sens s'il est relégué au second rang, par-devant une fantaisie ou une rivalité, voire une obstination, devient vite une injure. Apprenons à débattre avant de s'abattre ! Si l'école est un grand sinistre national d'où émanent toux les maux, l'urgence est donc dans la scission des raisons et la brisure des confiances. Ainsi le retour aux bancs est un retour à la table. Le retour aux classes passe par le retour à la salle de réunion. Réunissez-vous et sauvez les pauvres têtes déjà blanchies par la noirceur d'un avenir partiellement scellé. En fait, le syndicat restera toujours une belle création défensive de l'homme. La grève, un meilleur armement. L'essentiel de cette beauté restera à son tour dans l'usage que l'on en fait. Tout est dépendance de l'homme situé des deux côtés, de sa morale, de sa responsabilité. |
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