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«Avant que les Palestiniens ne soient des
diplomates, ils sont des combattants, nous appartenons tous à la résistance
palestinienne armée », note l'ambassadeur dans cette interview. Il s'engagera,
en outre, dans un argumentaire détaillé sur les luttes politiques et
diplomatiques de l'Autorité palestinienne pour libérer les territoires occupés.
«Après notre demande à la CPI pour juger Israël pour ses crimes de guerre, nous
irons devant les 522 organisations internationales pour défendre nos droits»,
affirme Louaï Mahmoud Taha Aïssa.
Le Quotidien d'Oran: Dernière tentative diplomatique en date de l'Autorité palestinienne, la demande introduite auprès de la Cour pénale internationale (CPI) pour faire juger Israël pour ses crimes de guerre contre le peuple palestinien. A quoi cela sert-il quand on sait que le monde est régenté par le veto américain et le lobby juif ? Louaï Mahmoud Taha Aïssa : Je tiens à souligner, en premier, que nous nous appelons l'Etat de Palestine et non l'Autorité palestinienne. L'Autorité est un instrument de contacts qui a été choisi dans une conjoncture précise pour mener une lutte précise, pour un temps précis. L'Autorité continue d'exister certes, mais toujours comme instrument. L'Etat palestinien joue lui, aujourd'hui, un rôle plus élevé qui est celui d'un Etat observateur au sein des Nations unies. La Palestine n'est donc plus une organisation ni une autorité. A propos de notre rapprochement de la CPI, cette organisation, autant que toutes les organisations onusiennes existantes, a toujours constitué un espace parmi d'autres dans notre champ de lutte contre la colonisation et ses alliés. Très souvent, nous avons douté des capacités des Etats-Unis à pouvoir détacher leur relation de l'Etat colonisateur et même à pouvoir être en concordance avec leurs principes de liberté, de démocratie et de droits de l'Homme qu'ils mettent en avant. Les Etats-Unis ont échoué dans tous les examens dans lesquels nous les avons présentés et testés. Toutes leurs médiations et tous leurs engagements se sont effondrés devant le comportement têtu d'Israël. Mais ils n'hésitent pas à se retourner vers nous pour évaluer nos concessions. Q. O. : Comment expliquez-vous votre disponibilité à continuer de croire à leurs appels pour les négociations de paix avec Israël ? L. M. T. A. : Nous avons décidé de ne plus aller aux négociations avant l'arrêt de la colonisation et la création de l'Etat de Palestine. Il faut, pour cela, que je rappelle certains faits marquants de notre combat. Il y a quelque temps, nous luttions pour tenter, un tant soit peu, de séparer entre l'Etat colonisateur, entre l'Europe et les Etats-Unis puisqu'ils sont les parrains d'Israël, ce sont eux qui l'ont créé, eux qui le préservent et eux qui parlent de sa démocratie et admettent ce qu'il fait. Plus tard, et en raison des changements des situations, des normes, des équilibres dans le monde, nous avons recouru à un autre mode de lutte qui prescrit le retour dans notre patrie. Il faut savoir que toutes nos causes reposent sur une problématique essentielle, à savoir la préservation de la Palestine et notre existence sur nos terres. Après que nous avons quitté le Liban et après la conférence de Madrid à laquelle ont participé tous les Arabes, et ont effacé l'OLP et désigné une représentation jordanienne, nous avons pu retourner dans notre patrie et constituer notre Etat par le triptyque Peuple-Terre-Autorité (ce sont les composantes de tout Etat dans le monde). Nous avons réussi aussi à ce que le peuple palestinien soit reconnu par l'Etat colonisateur. Nous avons décidé alors de passer à une étape supérieure en changeant notre moyen de lutte. Nous avons opté pour la lutte par la négociation. La négociation est un moyen de lutte comme tous les autres, notamment pour une révolution qui a 50 ans d'existence et qui n'a pas hésité à recourir à toutes les formes de lutte. Au fur et à mesure que nous avançons et comptabilisons nos acquis aussi minimes soient-ils, nous nous devons de passer à un niveau plus important de lutte. A partir du moment où les Arabes refusent la confrontation avec l'Etat colonisateur, refusent même de nous couvrir dans notre combat y compris financièrement, après qu'ils sont tous partis à Madrid même après la chute de l'Irak, et puisque nous avons construit notre Etat pour y vivre, nous avons accepté d'aller à la négociation avec une vision à long terme. En retenant ce choix, on a voulu aller au bout de la logique de ce monde qui se dit civilisé, qui prétend œuvrer pour la paix et croire en les normes universelles qui permettent de l'atteindre. Nous nous disons ainsi que la lutte par la négociation répond aux exigences de la conjoncture actuelle et peut nous permettre de transformer notre faiblesse en une force. Nous savons surtout que nous ne pouvons plus continuer la lutte armée depuis que la Palestine a été isolée par le blocus israélien et que tous les pays arabes qui l'entourent nous ont chassés. Nous avons alors accepté la médiation des Etats-Unis et de l'Europe. Q. O. : Pourquoi ce choix ? L. M. T. A. : Parce qu'ils prétendent tous les deux vouloir la paix et insistent à cet effet, sur la négociation. Mais pendant 20 ans de négociations, nous avons réussi à montrer que les Etats-Unis et l'Europe tombent dans leurs propres contradictions et qu'ils n'ont même pas été capables, notamment les Américains, d'être des médiateurs impartiaux. Ils n'ont même pas approuvé les rapports des représentants qu'ils ont eux-mêmes désignés. Ce qui nous a mis à l'aise parce que nous avons prouvé que les négociations qu'ils ont tant louées n'ont pas donné de résultats. Nous avons constaté et démontré par ce moyen que les Européens ne sont ni pour ni contre la cause palestinienne et que les Américains sont foncièrement contre sans pour autant être capables de donner une seule raison pourquoi le sont-ils. C'est ainsi que nous avons décidé d'aller pour la première aux Nations unies pour défendre notre existence sur nos terres, dans notre Etat. Nous avons eu, bien sûr, une confrontation avec les Etats-Unis mais ils n'ont rien pu faire. Nous avons été soutenus par 138 voix. Après ça, nous sommes revenus à la table des négociations mais ça n'a rien donné. Nous avons décidé de poursuivre la lutte par les voies diplomatiques. Q. O. : La CPI en fait donc partie ? L. M. T. A. : Oui, c'est en concordance avec ce choix que nous avons introduit notre demande d'adhésion à la CPI. Depuis notre succès aux Nations unies, nous avons commencé à réunir les conditions pour l'introduction de notre demande auprès de la CPI. Nous avons décidé de le faire tout suite après que le Conseil de sécurité de l'ONU eut rejeté notre requête appelant à l'arrêt de la colonisation. En vérité, nous doutons de ces organisations à respecter leurs règlements et leurs décisions mais elles constituent pour nous des espaces de lutte puisque nous avons notre terre, notre peuple, notre autorité, nos lois, donc, tout ce qu'elles exigent pour consacrer la libération de notre peuple et la consécration de notre Etat. Nous avons constaté que lorsque nous avons été à l'Unesco, les Etats-Unis se sont retirés et ont refusé de s'acquitter de leurs cotisations. L'on peut s'interroger de quoi ce monde est-il fait et qui le commande si les Américains, avec cet esprit aveugle et cette couverture noire à l'Etat colonisateur, font la même chose à chaque fois que nous voulons adhérer à une organisation internationale. La réponse ne nous décourage pas même si on estime que si les Américains continuent sur cette voie, ils vont détruire l'ordre mondial. Nous n'allons pas nous arrêter à la CPI, nous irons vers les 522 organisations internationales qui existent. Je rappelle aussi que nous retournons aussi au Conseil de sécurité très prochainement. Q. O. : Les Palestiniens ont réussi, comme vous dites, à imposer le triptyque Peuple-Terre-Autorité mais on ne parle dans ce cas qu'essentiellement de Ghaza et tous les droits des Palestiniens sont quotidiennement bafoués. Pensez-vous que la voie diplomatique permette de faire lever ce long blocus sur la Palestine ? L. M. T. A. : Nous vivons depuis plus de 100 ans sous la colonisation, depuis qu'un plan international a été initié pour partager cette région et la déstabiliser. L'entité sioniste a été créée pour cet objectif. Elle doit donc être protégée et il ne lui est pas permis de disparaître. Nous savons tout ça. Nous connaissons nos ennemis. Mais nous avons des droits. Nous faisons ce que nous pouvons pour les recouvrir. Nous sommes en lutte et subissons des génocides et des destructions depuis 1922. Je ne voudrais pas parler des révolutions que nous avons menées et comment ont-elles été arrêtées. Laissons ça aux historiens. D'une façon ou d'une autre, nous savons ce que nous voulons et les luttes que nous devons mener pour l'atteindre. L'essentiel de notre cause est de remettre la Palestine sur la carte. Il faut se rappeler que la Palestine n'existait plus à partir du moment que l'entité sioniste avait occupé en 1948, 78% de ses territoires, que la Jordanie s'était appropriée juste après ce qui restait de ses terres et Ghaza avait été rattachée à l'Egypte sous l'effet d'un protectorat. Il était possible que le peu qui restait de la Palestine constitue un Etat. Nous avions une banque, une monnaie, des radios, des universités, des écoles? Mais il est demandé que la Palestine ne doit pas exister parce qu'elle est la négation de l'entité sioniste. L'existence de cette entité doit aussi être la négation de la Palestine. L'ordre mondial s'est entièrement constitué sur l'existence de l'Etat d'Israël. Notre tort est justement de vouloir rester Palestiniens et que la Palestine existe. Nos ennemis ne sont pas les seuls à nous en faire payer le prix. Même au plan arabe, l'on ne s'est jamais entendu sur la façon de combattre cette colonisation, par les armes, d'une manière pacifique, économiquement? Tout le monde sait que la libération de la Palestine aura des répercussions sur toute la Nation. Vous en Algérie, vous l'avez reconnu en soutenant que la Palestine est le ciment qui unifie toute la nation arabe. Vous avez ainsi dressé le véritable diagnostic de la révolution palestinienne. Parce que sans la Palestine, la nation est émiettée et les conflits s'amplifient. C'est pour cela qu'Obama refuse de lui donner toute son importance. Dans son discours de septembre dernier, il a affirmé que la question palestinienne n'est pas centrale, elle est comme l'Irak ou la Syrie. Il a voulu la noyer dans tous les autres conflits. Netanyahu a, lui, demandé la constitution d'une coalition avec des pays arabes pour lutter contre le terrorisme. On sait qui il vise quand il parle de terrorisme. Ils veulent qu'on s'entretue entre nous pour que l'entité sioniste vive. C'est pour cela que l'Irak ne devait pas être une force stratégique dans la région, il fallait donc la détruire. Et c'est ainsi à chaque fois qu'il est question de protéger Israël. On a vu qu'il y avait une autre force stratégique dans le Golfe, les autres pays de cette région ont eu peur et ont alors recouru à d'autres forces et moyens pour se défendre. On a monté des problématiques diverses comme celle du pétrole et autres ressources pour que la région n'ait pas de répit. Q. O. : Qu'ont fait les responsables palestiniens et que pourraient-ils faire qu'ils n'ont pas encore fait pour faire triompher la cause palestinienne au milieu de tous ces bouleversements et tous ces complots ? L. M. T. A. : Vous me demandez ce que nous avons fait, nous Palestiniens ? Nous avons fait beaucoup. Nous avons au moins des enfants, ceux de la 4e génération, qui sont partout dans le monde mais qui affirment leur identité en soutenant qu'ils sont Palestiniens. Diplomatiquement, notre adhérence à la déclaration de Genève 4 nous aide beaucoup parce qu'elle reconnaît que la Palestine est colonisée et que toutes les mesures prises par Israël sont contraires aux lois et règlements internationaux. C'est ce qui nous a encouragés à aller à l'ONU, là où est née l'entité sioniste. Nous nous retrouvons aujourd'hui au point de départ d'Israël. Notre combat n'est pas facile. Nous souffrons partout, et ce quels que soient nos moyens de lutte. Mais nous continuons de lutter. Evidemment, l'ennemi réagit. Les nombreux génocides à Ghaza le prouvent. Nous savons qu'il y a des plans pour faire de Ghaza la Palestine et faire oublier l'essentiel de ses territoires comme la Cisjordanie avec El Qods. Q. O. : Est-ce pour cela qu'à chaque fois qu'il y a un massacre à Ghaza, la cause palestinienne se transforme en une cause humanitaire ? L. M. T. A. : Absolument. Ils veulent nous faire oublier l'essentiel de la cause palestinienne pour nous pousser à accepter la bande de Ghaza comme territoire pour l'ensemble du peuple palestinien. Q. O. : Etes-vous convaincu que votre recours aux Nations unies peut vous garantir vos droits ? L. M. T. A. : Nous avons engagé la lutte armée en 1965 sans prétendre que nous allons libérer la Palestine. Nous l'avons engagée pour réanimer cette nation arabe. Nous avons combattu pas seulement Israël mais le monde entier. Tous ont été contre nous, les nationalistes arabes, les nassériens, les baathistes, les communistes, les Frères musulmans? Tous se sont entendus avec les régimes arabes pour que notre révolution s'arrête. Nous voulions pourtant commencer par l'action armée pour unifier les rangs de la nation et pour que nous concentrions nos efforts sur le règlement de la cause palestinienne. Ce sont nos proches qui ont été contre nous, que ce soit quand nous avons pris les armes ou présenté notre projet politique. Ils ont ri d'Abou Amar lorsqu'il a pris le bateau et leur a dit qu'il allait en Palestine. Il n'était pas fou. L'objectif est clair, récupérer la Palestine. Mais le chemin est long et sinueux. La Syrie, avec sa grandeur, son histoire, ses institutions, sa culture, ses citoyens, ses partis, tout le monde s'entretue. En plus, les blessés se font soigner en Israël qui les renvoie au combat. Il y a des secrets dont on ne veut pas parler. Mais il faut comprendre que c'est un conflit qui alimente notre crise dans la région. On craint l'Etat palestinien parce qu'avec sa création et son existence, c'est la carte du monde qui va changer. Q. O. : Si le Conseil de sécurité accepte votre requête de la création de l'Etat palestinien, ne craignez-vous pas qu'il ne le soit sur le fait accompli des colonies et du rétrécissement des frontières de 67, ainsi que le refus du retour des réfugiés ? L. M. T. A. : Vous voulez me convaincre ou je veux vous convaincre que nous ne comprenons pas notre ennemi ? Vous imaginez qu'après cette longue résistance, cette longue lutte, les nombreuses intifadas par les pierres, ou les actions des fidayîn, en passant par les négociations politiques, nous n'avons rien compris à ce qui se passe ? On se rappelle lors du sommet de la Ligue arabe qui s'est tenu à Syrte en Libye, lorsque Abou Amar a été interpellé par un responsable arabe qui lui a reproché d'avoir accepté de négocier, de s'être rendu. Abou Amar a répondu que vous êtes tous là, présents, présidents et rois, venez combattre avec nous, nous serons aux premiers rangs mais aidez-nous, on doit en finir avec l'Etat colonisateur. Celui qui l'a interpellé lui a alors lancé : « Nous attendons l'équilibre stratégique » !?! Pensez-vous que ce monde accepte d'avoir un équilibre stratégique avec Israël ? Il y a eu parmi les responsables arabes présents qui ont dit à Abou Amar que « nous sommes liés avec Israël par des conventions de paix ». D'autres lui ont fait savoir qu'ils l'aideraient avec de l'argent. Comme si on recevait leur argent? Ce genre de situation n'est pas fortuit, non pas parce que les Arabes sont des traîtres mais parce que la Palestine est une zone interdite, celui qui veut s'en approcher doit avoir une autorisation. Ghaza est permise mais les autres régions qui sont au cœur du conflit sont interdites. Les génocides sur Ghaza se multiplient pour nous occuper et nous détourner de l'essentiel. Ils grossissent ce qui se passe à Ghaza pour faire disparaître la Palestine. Nous nous devons d'inverser les choses. C'est pour cela que lorsqu'il y a eu le génocide de 2012, nous avons constitué avec l'Algérie une délégation commune pour rappeler en premier, que les Palestiniens ne feront aucune concession. L'Algérie a contacté le Qatar, la Turquie, l'Egypte et a demandé l'arrêt immédiat des bombardements. Le président Bouteflika a exigé le cessez-le-feu avant toute chose. Au même moment, nous avons été aux Nations unies pour évoquer la question palestinienne pour que le problème de Ghaza n'étouffe pas la cause palestinienne. Si nous n'avons pas les moyens qu'a notre ennemi pour nous défendre, cela ne veut pas dire qu'on doit baisser les bras ou qu'on pleure sur notre sort. Nous ne l'avons pas fait et nous en payons la facture. La devise de tous nos dirigeants, d'Abou Amar, à Abou Djihad, à Georges Habache, à Cheikh Yassine et bien d'autres, est qu' «une goutte de sang qui ne tombe pas à sa place est un crime, mais une cascade de sang là où il faut est un droit ». Nos frères arabes et d'autres nous ont toujours conduits à des guerres inutiles. On nous asséné de nombreux coups de couteaux dans le dos, malgré ça, nous avons toujours fait en sorte d'avoir de bonnes relations avec nos frères parce que nous estimons que notre combat est seulement contre notre ennemi. Q. O. : Avec tout ça, l'annexion des territoires palestiniens à Israël par le fait de la prolifération des colonies juives ne s'arrête pas ? L. M. T. A. : Certes, nous avons réalisé beaucoup de choses mais sous l'occupation. Le projet de la colonisation n'est pas terminé. Notre combat continue. Le conflit est entre deux concepts, celui palestinien qui dit que c'est un combat d'existence et non de frontières et le projet sioniste qui se réfère à la Thora comme couverture et doit être concrétisé par la colonisation. Le projet devait dessiner et créer un Etat d'Israël de l'Euphrate au Nil. Mais quand les équilibres ont changé, l'URSS est tombée, les équations se sont mélangées et le GMO est apparu, il y a eu l'idée d'un Israël de l'Atlantique au Golfe, fort économiquement et non militairement. Israël est aujourd'hui présent économiquement dans toutes les régions. Nous savons tout ça. Mais nous sommes des êtres humains, nos moyens sont limités. Nous croyons en Dieu et en notre cause. Nous activons comme nous pouvons. Notre objectif est clair. Un souffle en Palestine est une résistance, un arbre planté est une résistance... Aujourd'hui, 50% des habitants de la Palestine historique sont des Palestiniens et moins de 50% sont des juifs. Cette équation signifie que nos calculs sont très précis. Notre combat essentiel est de réinstaller les Palestiniens sur leurs terres historiques. C'est ça la victoire pour laquelle on lutte. Q. O. : Mais à chaque fois que vous acceptez la négociation, l'Intifada disparaît. Est-ce qu'il n'est pas possible d'allier les deux pour plus d'efficacité ? L. M. T. A. : C'est possible. Mais comme je l'ai précisé, la négociation est une forme de lutte. Elle n'est pas antinomique à la lutte armée. L'Intifada existe toujours. Le président Abou Mazem parle aujourd'hui de l'Intifada pacifique et non armée. Il faut savoir qu'avant que nous soyons des diplomates, nous avons été des combattants, nous appartenons tous à la résistance palestinienne armée. Seulement, on doit évoluer avec les conjonctures. Cela ne signifie pas que nous avons abandonné nos armes. On les utilise quand il faut qu'on tire pour l'intérêt de notre peuple et non pas parce que d'autres le veulent, pour des calculs ou pour l'Etat du Khalifa. Il n'est pas non plus permis à un sage de lutter contre son ennemi au niveau de son point fort quand il n'en a pas les moyens. Ils ont créé le terrorisme pour nous déstabiliser, pour diaboliser notre combat armé, pour nous empêcher d'exercer notre droit à la libération. Tout est donc permis sur ce terrain. On entretient la confusion entre les concepts. L'autodétermination et la lutte armée sont des droits consacrés par les Nations unies mais depuis l'histoire du terrorisme, ils ont tout annulé et se sont octroyés le droit de dire ce qu'ils veulent sur n'importe quel conflit. Comment pensez-vous que nous, Palestiniens, puissions-nous lutter ? Devons-nous le faire en leur tournant le dos ou en faisant en sorte de comprendre leurs équations ? Pouvez-vous vous attaquer à votre ennemi sans comprendre son langage ? Nous devons combattre notre ennemi mais identifier son allié pour l'écarter parce qu'il se pourrait qu'il devienne notre ami. Sinon, comment sommes-nous arrivés à la Suède ? Q. O. : La confusion est aussi entretenue entre groupes terroristes et mouvements de libération. Des Etats arabes ont lancé l'idée de constituer une coalition, -un vœu américain- pour lutter contre le terrorisme. Quel terrorisme veulent-ils combattre? L. M. T. A. : Je ne sais pas. Posez-leur la question. (Rires). Plaisanterie à part, nous sommes considérés par les Etats-Unis et Israël comme terroristes. Jusqu'à aujourd'hui, nos bureaux ne peuvent être ouverts que sur décision du président. Q. O. : Pourquoi l'Algérie se retrouve-t-elle seule à plaider pour une définition du terrorisme et ce, pour éviter les amalgames avec les mouvements de libération ? L. M. T. A. : Le dernier discours d'Abou Mazem aux Nations unies a abordé cette question. Les questions s'évaluent selon les conjonctures de ce monde injuste, ses compromis, ses complots et alliances, selon le dos rond des Etats arabes, leurs divisions? Qui joue le jeu du pétrole et celui du dollar aujourd'hui ? Nos ressources sont devenues pour nous une malédiction. Q. O. : En 1973, le pétrole a été utilisé par les Arabes pour prendre leur revanche sur Israël. Ils ont réussi. Est-il possible d'y penser aujourd'hui ? L. M. T. A. : Qui a tué le roi Fayçal ? ? Mais il faut qu'on regarde de l'avant. La révolution palestinienne a été déclenchée en 1965 et continue à ce jour avec toutes les formes de lutte. Elle continue de porter les revendications de la nation malgré toutes les tentatives de sa diabolisation. Nous avons 7 millions de Palestiniens à travers le monde. Nous savons ce que nous voulons. Mais il faut rappeler que juste après 73, un plan contraire a été lancé pour transformer la victoire en défaite. Ils ont pris l'Egypte comme allié. Nous sommes allés à Camp David. Il faut se rappeler ce qui s'est passé à l'époque comme conflits entre nous? Q. O. : Pourquoi les Arabes d'Israël affirment-ils que sans eux, il n'y aurait jamais eu d'Intifada ? L. M. T. A. : Ce sont des Palestiniens. Ce sont les oubliés de la nation qui ont été considérés comme des espions. Pourtant, ils ont vécu au cœur de l'entité sioniste mais ils sont restés Palestiniens. Ils ont continué le combat, ils ont préservé leur identité et leur culture. Nous coordonnons avec eux sur tout et nous nous partageons les rôles. Q. O. : La réconciliation entre les factions palestiniennes est-elle aujourd'hui assez solide pour qu'elle ne se défasse pas facilement ? L. M. T. A. : Sans l'unité nationale, il n'y a pas de victoire. Nous donnerons notre vie pour que cette unité soit solide. Mais il faut que tout le monde comprenne que son projet doit être nationaliste et non politique. Q. O. : La présence de Mahmoud Abbas dans la marche de Paris était-elle nécessaire ? L. M. T. A. : Nous comprenons pourquoi des insultes sont proférées contre notre prophète (QLSSL) et ce qui est visé par ces insultes. Au-delà de ceux qui le font, nous savons parfaitement ce qui s'est passé. Nous en connaissons le détail du détail. Ce n'est pas nouveau et ce ne sera pas la dernière fois. Ça a un rapport avec notre implication dans le terrorisme pour qu'on ne réclame pas nos droits. Il faut qu'on nous garde toujours sur le banc des accusés. Ceci étant, la présence du président palestinien à Paris signifie que nous agissons conformément à nos intérêts. Le soutien de la France à nos démarches auprès des organisations onusiennes nous a poussés à y être présents. Il faut savoir qu'Abou Mazen est parti à Paris sur insistance du président français. C'est Netanyahu qui était mal à l'aise. Ses gesticulations enfantines ne trompent pas? |
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