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1ère partie
Alors que l'islamisme veut cacher ses intérêts rentiers et son idéologie fasciste derrière la religion, le despotisme veut masquer ses intérêts néolibéraux et son idéologie en laissant croire qu'il n'en a pas et qu'il se place en arbitre au-dessus des conflits idéologiques qui agitent la société. Son discours consiste à dire qu'il n'est ni islamo-conservateur, ni démocrate. Il faudrait admettre que seuls le bien commun et l'utilité publique guideraient Bouteflika alors qu'il est un des principaux protagonistes des luttes en cours, autour d'intérêts bien matériels. Si l'illusion, faute de mieux, a pu fonctionner, la société algérienne est, depuis, revenue du mythe du sauveur. Elle comprend que si les justifications que se donne le pouvoir politique ont bien changé depuis dix ans - autrefois, il appuyait son conservatisme sur la légitimité historique; aujourd'hui, il affirme la volonté de mettre en oeuvre le changement - il ne renonce pas, pour autant, au monopole sur la Nation et à diriger le pays. Bouteflika tente de se rattacher autrement à la légitimité historique et, après la réhabilitation de Messali Hadj, l'idée de nommer le futur parti de son frère «Génération Libre» suggère parfaitement le rapport de filiation et de rupture que le pouvoir essaie d'instaurer. Il le fait à travers un travail de réécriture de l'histoire qui passe autant par une polémique sur la demande de pardon à la France que par la commande de films historiques sur Ben Boulaïd ou sur l'Emir Abdelkader. Il s'agit pour Bouteflika de s'appuyer sur cette légitimité historique pour la dépasser et construire son propre projet. Ce projet despotique exige de s'emparer de tout : l'histoire, la religion et la paix. Le pouvoir va vite. Dans sa volonté de s'approprier de l'ensemble de la vie sociale, il passe, maintenant, du discours sur la paix et la réconciliation nationale au patriotisme économique asséné à coups de pacte social et de loi de finances élaborée sans concertation avec les acteurs représentatifs de l'économie réelle. Mais ce n'est pas tant contre l'islamisme, aujourd'hui défait, que contre la démocratie que le pouvoir se dresse. Il a un objectif : opposer à la revendication de la démocratie un discours qui permette de contrarier les décantations en cours dans la société, de forger une unité artificielle qui favorise l'exclusion de tous ceux qui n'acceptent pas de se soumettre à ses intérêts et empêcher la rupture. Hier, tous ceux qui refusaient l'amnistie octroyée par Bouteflika aux sanguinaires islamistes étaient coupables d'être contre la paix, d'être des «marchands de sang». Aujourd'hui, tous ceux qui sont contre des réformes économiques, qui reproduisent et parfois aggravent les conséquences du système rentier, sont accusés de défendre leurs rentes et leurs profits contre l'intérêt national. D'être des marchands tout court. On aurait tort de penser à une forme de confusion ou de vide idéologique de la part du pouvoir. En vérité, le despotisme se présente comme la forme de régime requise pour maintenir la domination des forces encore liées à la rente dans la période de développement de l'économie de marché. Poulantzas rappelle que «les périodes de transition présentent une typicité propre, une articulation spécifique des instances due à une coexistence complexe, dans une formation en transition, des divers modes de production, et à un déplacement continu, souvent occulté, de l'indice de dominance d'un mode de production à un autre». L'idéologie est précisément l'instrument de cette occultation. Et quoi de mieux qu'une idéologie qui prétend ne pas en être une. Pas de discours (explicite) donc pas de contre-discours. En esquivant la polarisation idéologique, en privilégiant au niveau socio-économique la cristallisation de son propre camp au détriment de la cristallisation des autres camps, les idéologies adverses se trouvent empêchées par les moyens les plus divers d'acquérir ou de maintenir une influence politique tangible. Les représentants de l'islamisme et de la démocratie sont refoulés vers des institutions et des forces sociales marginales. Le pouvoir les présente comme deux extrémismes et les renvoie dos-à-dos. D'où l'impression d'une absence d'idéologie officielle, d'idéologies de rechange ou même, à la limite, d'idéologies de relai. Mais cette impression est fausse parce qu'à la marge des aires d'influence du pouvoir, par exemple dans les partis d'opposition, ou à leur défaut, dans les syndicats, le mouvement citoyen, le monde associatif et les journaux, les adversaires s'activent fébrilement à la constitution des moyens de lutte, c'est-à-dire au regroupement de forces différentes et éparpillées autour d'une alternative s'exprimant dans un programme conservateur (voire réactionnaire pour l'islamisme) ou de rupture (pour les démocrates les plus conséquents). Mais, justement, parce qu'elle apparaît sous la forme d'un programme de rechange et qu'elle réunit les opposants, une telle constellation idéologique se trouve, momentanément du moins, sans influence sur l'orientation politique du pouvoir. De là, cette impression d'unilatéralité que ressentent ceux qui perçoivent la situation selon l'optique du pouvoir. En dépit (ou à cause ?) de l'immobilisme apparent au sommet de l'Etat, les années 2000 ont vu la transformation ou l'éclatement des camps islamiste et démocrate. Années noires du progrès, années de la résistance au despotisme et de la revendication négative, elles ont vu naître les nouvelles assises d'une définition collective, sans même que nous nous en apercevions réellement. Il est vrai aussi que la (très) relative démocratisation de la société, depuis la fin du parti unique, a produit un net affaissement de l'effet de refoulement de certaines idéologies. C'est pourquoi le pouvoir peut tenter de faire croire à un choix démocratique, par le biais des urnes qu'il manipule, pour renforcer ce sentiment de vide idéologique et d'absence d'alternative. D'où il résulte, même lors d'élections prétendument pluralistes, qu'au plan idéologique, l'islamisme ou le camp démocratique se trouvent totalement mis en veilleuse comme lors des présidentielles de 2009 complètement sous l'emprise politique de Bouteflika. Les rapports de forces politiques produisent une vision bornée et trompeuse de la réalité idéologique dans la société. Enfin, soit qu'ils justifient à tort un choix idéologique au nom de la science, économique en particulier, soit que, tout en revendiquant l'objectivité, comme le font certains journalistes, ils deviennent des propagandistes ou des dénonciateurs d'une orientation politique, dans l'un et l'autre cas, les analystes abordent les phénomènes idéologiques selon l'optique du pouvoir. Et ils contribuent ainsi, à amplifier le sentiment d'absence d'idéologie que produit l'action du pouvoir lui-même, ne serait-ce qu'en restant soumis à son agenda. On voit bien à ce propos comment le débat sur la Constitution est totalement dépendant du bon vouloir de Bouteflika et même les partis de l'Alliance n'en maîtrisent pas le timing. Afin d'arriver à cette situation d'hégémonie totale, un des axes centraux du discours du pouvoir a été la réhabilitation de l'Etat aussi bien auprès de la Nation que sur la scène internationale. Bouteflika s'est largement défini par son opposition au «laxisme» chadliste au nom du fait que l'Etat n'avait pas su empêcher la tragédie nationale, en vérité qu'il s'était livré lui et ses moyens à l'islamisme. L'Etat despotique cherche, avant tout, l'annexion institutionnelle de tous les éléments de la vie sociale, de manière à contrôler et surtout digérer l'ensemble du corps social dans toutes ses expressions. Mais pour y parvenir, tel un rouleau compresseur, il est nécessaire de liquider les forces présentes qui s'opposent à la philosophie de l'Etat despotique. C'est pourquoi le régime de Bouteflika a procédé à la culpabilisation de l'islamisme et des démocrates. Parallèlement, il a créé de nouvelles organisations sociales (les comités de soutien) ou adapté les anciennes aux nouveaux objectifs de l'Etat. Certaines ont même été incorporées de manière organique à ses institutions comme, par exemple, l'UGTA et les organisations patronales au sein de la tripartite. Mais cette incorporation n'exprime pas une participation au processus de pouvoir comme on vient de le voir avec la polémique autour de la loi de finances complémentaire. On peut, en réalité, presque parler d'abolition de la politique au profit des rapports de forces nus. Bouteflika est dans la négation de la faculté d'initiative politique des citoyens à travers la négation de l'aptitude à l'initiative des partis politiques, par l'interdiction faite à l'individu, aux groupes sociaux d'orienter, ou ne serait-ce que de critiquer, par leur scrutin ou leur action, le pouvoir ou sa politique, et, en tout état de cause, de se défendre face à l'arbitraire. Il y a même une criminalisation de la résistance, les protestataires sont tous des émeutiers, les harraga sont assimilés aux terroristes alors que ce qui est criminel c'est bien ce pouvoir et ses méthodes. C'est, précisément, cette réduction du champ de la politique au cadre de l'Etat et le refus de toute capacité politique à la société qui définit le caractère despotique du régime. Dans la mesure où cette orientation ne s'accompagne pas de l'accord de la société, l'Etat est tenu d'accroître, en conséquence, ses appareils répressifs et idéologiques. D'où, à la fois, la folle course de la DGSN qui voudrait porter ses effectifs à un policier pour trois cents habitants, tandis que le pouvoir interdit l'ouverture du champ audiovisuel et multiplie les clones de l'unique. Au final, l'Etat despotique ne vise pas à effacer les divisions qui se sont accentuées avec l'ajustement structurel et l'affrontement avec le terrorisme islamiste mais à en orienter l'expression, afin de supprimer toute contestation sociale et politique. Dans l'Etat despotique la volonté de la société peut être exprimée par une minorité et, par conséquent, par une seule personne. L'accaparement de la politique par l'Etat veut dire en réalité accaparement par le chef qui est maître de l'Etat. La dérive présidentialiste, l'appropriation du ministère de la Défense, le contrôle direct des ministres par un système d'auditions sont des symptômes de cette évolution. L'Etat despotique n'accepte pas l'existence d'appareils de pouvoir représentatifs médiateurs entre l'Etat et la société. Ainsi s'analyse d'ailleurs l'inexistence d'un parti fort qui, d'une part, contrôlerait l'Etat, et, de l'autre, serait chargé de mobiliser la société en faveur du régime. En révélant le taux de participation lors des législatives on peut même parler d'un abandon des partis de l'Alliance présidentielle. Nous ne sommes plus à l'époque du parti unique où le FLN servait de relai aux orientations de Boumédiène afin de mobiliser la société sur les tâches d'édification nationale. L'Alliance présidentielle serait en tout cas soit la preuve d'un désintérêt pour la mobilisation des masses soit d'un échec. Le pouvoir se sait impuissant à mobiliser la société, la fraude massive sur le taux de participation a été sa seule réponse lors de la dernière présidentielle. Il sait qu'il ne possède pas encore, pour y arriver, l'organisation indispensable, les mécanismes idéologiques ni l'encadrement. Mais, surtout, par sa nature même, un parti ne peut exprimer la Nation ; il n'exprime qu'une partie du corps social. C'est pour cela que Bouteflika était un candidat indépendant lors de l'élection d'avril 2009 et pas le candidat des partis de l'Alliance. Il est clair qu'il ne dispose pas encore d'aucune force sociale et politique digne de ce nom. C'est seulement s'il réussit à cristalliser de telles forces qu'il fera aboutir la création du nouveau parti qui est en gestation et dont pour le moment on dit qu'il n'est qu'une ONG qui pourra, si nécessaire, se transformer en parti. Et un pouvoir qui n'a pas besoin de parti pour lui-même pourrait-il en accepter pour l'opposition ? Cependant, l'armée refuse, de manière diffuse mais obstinée, de consentir à ce que le système évolue en un Etat purement despotique. Il est de son intérêt à conserver la primauté dans le rapport de forces politiques, position qui deviendrait vite intenable si Bouteflika avait tous les pouvoirs et s'autonomisait en se dotant d'une organisation politique propre. Mais cette même armée a choisi la solution du despotisme pour se raffermir après avoir assumé ce qui apparaît, aux yeux de certains, comme un rôle partisan dans l'affrontement avec le terrorisme islamiste. Son rôle dans l'élection d'avril 2004, qui avait un caractère encore plus partisan de ce point de vue, éclaire de façon crue son choix en la matière. Il faut donc voir dans l'édification d'un Etat despotique, la formulation d'un nouveau compromis entre éradicateurs et réconciliateurs, au sein du pouvoir, ce qui explique le silence de Nezzar et le départ du général Lamari depuis cette élection. Les prises de position sur la concorde civile et la réconciliation nationale ont mis à jour les représentations que la société s'est donnée d'elle-même à l'occasion d'un enjeu jugé fondamental. Et partant, au cours de ce débat, la société a dévoilé de façon signifiante les idéologies qu'elle secrète. En départageant leurs opinions sur un objet précis, partis, associations et individus ont fait bien davantage que contribuer à un processus de décision : ils ont en même temps fait connaître les attitudes qui inspirent leurs conceptions de la société par rapport à son passé, dans son état présent et en regard de son avenir. Le débat sur la réconciliation nationale a montré que le clivage idéologique parmi les partis, les associations et les individus s'était développé entre le référendum sur la Concorde civile et celui sur la Charte pour la paix et la réconciliation. Il a mis en lumière de profondes divergences entre les générations. Il a manifesté l'opposition entre les différentes philosophies politiques et provoqué l'affrontement inéluctable des privilégiés et des dépourvus. Il a fait émerger les craintes des familles des victimes et celles des disparus que le pouvoir s'est évertué à isoler. Il a provoqué des recompositions puisqu'on a vu le FFS, le RCD et le MDS défendre la même position de boycott à cette occasion. Plus fondamentalement, sous l'influence de l'action du pouvoir, les prises de position par rapport à la réconciliation se sont orientées nettement vers deux pôles qui se définissaient, l'un, par les aspirations et les intérêts liés au despotisme néolibéral (en alliance avec le conservatisme et une partie de l'islamisme), l'autre, par les aspirations et les intérêts liés au changement radical et la rupture en faveur d'une Algérie démocratique et sociale. Malgré certaines apparences, l'idéologie du pouvoir n'est plus islamo-conservatrice. Cependant, le pouvoir préfère laisser croire à une telle option. D'une certaine manière il peut ainsi orienter, focaliser et limiter, en partie, l'action des forces démocratiques contre le segment islamiste lié au pouvoir tout en continuant, lui-même, à travailler à la neutralisation de l'islamisme. Mais ceux qui estiment que, depuis la Charte pour la paix et la réconciliation, l'islamo-conservatisme n'est plus qu'un résidu voué à disparaître mécaniquement, se trompent grandement. Il suffirait qu'il redevienne dominant politiquement pour que se produise un renversement de la situation au plan idéologique. Le réformisme du pouvoir est réversible autant au plan politico-idéologique qu'économico-social. Le débat sur la réconciliation a montré que l'union de l'islamisme et des tenants du système, bien que moins complète qu'autrefois était encore étroite. Mais en même temps, le climat des négociations entre ces forces a rendu manifeste que l'islamo-conservatisme avait beaucoup perdu de son emprise. L'affrontement avec le terrorisme a déjà transformé les modalités de leurs rapports. Lors du débat, l'un et l'autre se sont manifestés face à l'opinion et ont dû prêter l'oreille, d'une manière ou d'une autre, aux aspirations de la société. Ne serait-ce qu'en prétendant, faussement, que les terroristes qui auraient du sang sur les mains ne bénéficieraient pas des dispositions prévues par la loi. Néanmoins, la loi sur la Concorde civile et la Charte pour la paix, tout en se voulant des instruments adaptés aux besoins de reconstruction, furent, le résultat d'un compromis entre des tendances idéologiques contraires qui s'étaient affrontées au cours du dur débat et plus encore dans la lutte armée. C'est l'opacité sur l'action du pouvoir qui cache sa véritable orientation, son programme. Spontanément, il met donc en oeuvre différentes stratégies afin de masquer son authentique nature idéologique et éviter que les forces démocratiques se cristallisent à un niveau supérieur. «La doctrine de l'Etat n'est pas écrite, elle est dans ma tête», aurait même révélé le ministre des Affaires étrangères. Le pouvoir instrumentalise aussi les crises au sein de la classe politique. Il empêche ainsi le renouvellement au sein des partis tout en dénonçant leur incapacité à sortir d'une certaine forme de zaïmisme. Le pouvoir, justement, à cause de son réformisme qui laisserait de nouveaux espaces, laisse prétendre, qu'aujourd'hui, il faut accumuler, qu'il faut développer les luttes partielles ou locales plutôt que de mener la lutte politico-idéologique. En vérité, il ne laisse pas plus d'espace pour accumuler mais transforme les conditions d'une possible accumulation. Celle-ci restant totalement dépendante d'une véritable rupture qu'il s'acharne précisément à contrarier. Pour parvenir à ses fins, le pouvoir laisse aussi penser qu'il faudrait renoncer à toute idée d'un changement par le haut et n'espérer qu'un changement par le bas, c'est-à-dire qu'il faudrait renoncer à toute alliance avec un segment avancé au sein de l'Etat. Laisser les forces du changement radical isolées en son sein et les laisser soumises à son hégémonie politico-idéologique. Pour mieux détourner de la lutte politico-idéologique, le pouvoir empêche l'expression de la contradiction principale qui, seule, permet d'articuler, au niveau politique, les différentes luttes. Il oppose les intérêts des uns à ceux des autres afin de demeurer en position d'arbitre entre les uns et les autres. Enfin, le pouvoir veut faire croire que les démocrates sont totalement impuissants et qu'il reste le seul acteur décisif pour mener un éventuel changement. Seul, à son rythme et dans le sens qu'il souhaite. Un acteur décisif mais incapable de révolutionner les rapports de production ? Décisif, mais idéologiquement muet comme l'ANP astreinte au silence à cause autant des nombreuses erreurs politiques qu'elle a commises que de la recomposition de sa hiérarchie ? La réorientation idéologique du pouvoir a débuté à la fin des années 90 avec ce qu'on pourrait appeler la fin de l'unanimité contre le terrorisme et une volonté de démobiliser la société qui avait résisté victorieusement à la barbarie islamiste et au sein de laquelle les décantations imposées par l'ajustement structurel avaient commencé à apporter une nouvelle conscience. Afin de déjouer la manoeuvre, la société, à défaut de trouver une classe politique incarnant ses aspirations, trouvera un premier moyen, partiel, à travers une remobilisation rapide et spontanée sur un nouveau front. Ce front c'est celui de la protestation pacifique de masse, ouvert par le mouvement citoyen en Kabylie et les syndicats autonomes dans la fonction publique. La disparition du consensus idéologique, y compris du côté du pouvoir qui aura, dans un premier temps, donné naissance à un nouveau parti né avec des moustaches, n'est donc pas le fruit du seul travail des intellectuels critiques et de l'opposition politique. Cet effritement idéologique coïncide en fait avec le fractionnement même de la classe dirigeante, qui s'est spectaculairement clivée et polarisée dans l'affrontement avec l'islamisme et durant l'ajustement structurel qui devait répondre aux exigences contradictoires de sa propre reproduction et de la reproduction des nouveaux rapports de domination en voie d'instauration. C'est au nom de ces nouveaux rapports de domination qu'on a décrété, comme le réclamait Louisa Hanoune, que la paix était retrouvée. L'idéologie est donc venue au secours de la nouvelle alliance qui réunit une partie des forces du passé et celles qui incarnent les intérêts qui ont émergé à l'occasion de la mise en oeuvre des réformes. «Elle permet de ré-asseoir, sans déchoir, leur domination», pourrait-on écrire en paraphrasant Antoine Pelletier dans un article consacré au despotisme éclairé en France. Les ajustements idéologiques se traduisent par un changement dans l'accent placé sur les différents éléments que ce soit l'authenticité et la tolérance ou encore l'éradication du terrorisme et la réconciliation. Le dernier message de Bouteflika, lu par Belkhadem à l'occasion de la célébration du 20 Août au cercle de l'armée, est l'illustration de la manière dont le pouvoir peut moduler son discours. A suivre * Membre du Mouvement Démocratique et Social |
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