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La
crise algérienne est la crise du mode de distribution rentier qui a dominé,
depuis des décennies, la formation sociale algérienne. Et cette dernière est en
crise parce que le mode de distribution rentier (i. e. le monde ancien qui ne
veut pas mourir) a apparemment atteint ses limites objectives et que le mode de
production capitaliste (i. e. le monde nouveau qui ne parvient pas à naître)
n'a pas encore établi les conditions internes de sa reproduction autonome1.
1ère partie A priori, la crise algérienne soulèverait la problématique d'une transition du mode de distribution rentier au mode de production capitaliste. Et l'adhésion programmée de l'Algérie à l'Organisation mondiale du commerce (OMC) aurait pour conséquence ultime la mise en place de conditions appropriées à la reproduction et à la domination du mode de production capitaliste à l'échelle locale. En d'autres termes, l'adhésion à l'OMC généraliserait l'«économie de marché» grâce à laquelle l'économie algérienne se «développerait» en dépassant son statut actuel d'économie rentière. Cependant, cette vision repose sur des prémisses mécanistes qui font abstraction aussi bien de la dynamique de reproduction du système capitaliste à l'échelle mondiale que de la logique de survie du système rentier à l'échelle locale. Car, l'adhésion de l'Algérie à l'OMC peut ne pas aboutir à la domination du mode de production capitaliste au sein de la formation sociale algérienne mais risque plutôt de matérialiser une forme d'articulation entre un système capitaliste mondial dominant et un système rentier local dominant, laquelle articulation garantirait et favoriserait aussi bien les intérêts du premier que ceux du second. 1 SUR LE SYSTEME RENTIER EN ALGERIE A l'indépendance, la consolidation de l'Etat algérien émergea en tant que procès de son autonomisation de la « société civile ». Car, l'appropriation de la rente2 (énergétique) par l'Etat créa une situation où les couches sociales qui maîtrisaient la distribution de la rente pouvaient de fait s'autonomiser de la société civile. Cette appropriation mettait en exergue la capacité d'un Etat à fonctionner en dehors et, dans une certaine mesure, indépendamment de la logique interne de la structure économique. Et la société civile se retrouvait dès lors extériorisée des transformations que lui faisait subir un Etat omnipotent et ne pouvait occuper que le rôle de réceptacle des différentes décisions de l'Etat. Ainsi, le développement dans ses diverses dimensions pouvait être visualisé en tant que processus d'importation de technologie « moderne » et de coopérants techniques des pays industrialisés. L'Etat-rentier eut ainsi tendance à dévaloriser le travail effectif ou potentiel de la force de travail domestique (en faisant notamment appel aux techniciens étrangers) qui devint attirée par les postes de l'administration où le partage de la rente avait en général lieu. Dans ce mouvement, l'Etat-rentier élargissait sa base sociale (en multipliant le nombre de petits chefs et de sous-chefs) et hissait la rente au rang de rapport social dominant. Ainsi, pendant que l'Etat-rentier mettait l'accent sur la consolidation d'une soi-disant économie nationale et indépendante et augmentait le nombre de ses supporters (de ses clients) en racontant des histoires de socialisme spécifique, des couches prédatrices ayant des relais au sein de l'administration publique accumulaient, sans éclat particulier, des richesses en s'appropriant une partie de la rente pétrolière (à travers des subventions directes et indirectes, des dons à d'ex-membres du FLN et de l'armée et aux membres de leurs familles élargies, des surévaluations de contrat avec le secteur étatique, etc. ).3 Le processus de construction d'une économie dite nationale et indépendante exhibe alors une aberration remarquable. Le développement ne découle pas d'une mobilisation de la force de travail autour du travail productif (i. e. le travail producteur de plus value) mais est offert à la société civile par un Etat autonome (grâce à la rente pétrolière) dont le revenu dépend de sa plus grande insertion dans le marché mondial. Les contradictions internes ne sont donc pas dépassées en vue d'acheminer la formation sociale vers une étape qualitative supérieure. Au contraire, ces contradictions demeurent à l'état latent et plutôt que d'être transformée par les différentes réalisations économiques, l'idéologie dominante régresse à un niveau pré-capitaliste (le clientélisme, le régionalisme et le népotisme constituent, entre autres, les formes dominantes des relations sociales). Et à ce niveau apparaît un premier paradoxe historique qui prend pour théâtre la formation sociale algérienne. Alors que la période coloniale avait quasiment détruit les modes de production non capitalistes et avait permis au mode de production capitaliste de prendre racine4 (par la prolétarisation de la paysannerie, entre autres) et d'instaurer sa domination, alors que la formation sociale algérienne exhibait la condition fondamentale (existence du « travailleur libre ») pour une reproduction élargie du capital, l'existence de la rente et son appropriation par un Etat dominé par des couches prédatrices ont non seulement retardé la phase de maturation des contradictions de classes au sein de la formation sociale algérienne mais la rente (en tant que rapport non capitaliste) a remplacé, en tant que rapport social dominant, le capital. Ainsi la formation sociale algérienne semble tourner en rond. Car, la période postindépendance, malgré l'importation d'une grande quantité de quincaillerie, n'a pas été une phase d'accumulation du capital mais une phase d'accumulation de richesses (capital marchand) aux mains de couches rentières et prédatrices. Le paradoxe algérien peut ainsi être appréhendé en tant que régression (après l'indépendance) de la formation sociale algérienne vers un mode non capitaliste de reproduction où la distribution de la rente structure et alimente la formation sociale dans son ensemble. Cependant la réduction de la rente pétrolière appropriée par l'Etat à partir des années 80 devrait à priori remettre en cause la rente en tant que rapport social dominant et pourrait provoquer l'effondrement du système. Et l'effondrement de ce dernier devrait à priori favoriser l'expansion des rapports de production capitaliste au sein de la formation sociale algérienne. 2- LA CRISE DU SYSTEME RENTIER En effet, la réduction de la masse de rente appropriée par l'Etat devrait favoriser l'effondrement d'un paradoxe et de deux illusions particulières : · l'autonomie de l'Etat par rapport à la société civile · la construction d'une économie dite nationale et indépendante · le télescopage entre une économie rentière et la transition socialiste. La mise à nu de la deuxième illusion s'est matérialisée dans l'absence apparente de coloration politique de l'Etat algérien depuis l'adoption de la Constitution « aseptisée » de 1989. L'absence de coloration politique souligne que les couches rentières dominantes sont en attente alors que L'Etat (en tant que « comité exécutif chargé de gérer les affaires des rentiers ») qui les représente est en situation d'équilibre instable. Ainsi, le discours officiel se réduit à une suite de slogans creux où tout le monde peut trouver son compte et où personne n'y trouve le sien. Le retrait de l'Etat algérien du domaine économique prôné par les différentes réformes qui peinent à se matérialiser dans les faits réalise l'effondrement de la deuxième illusion. Ce retrait met de fait en relief la faillite d'une politique volontariste qui a perduré grâce à un saupoudrage de la rente appropriée par l'Etat. L'amenuisement de la rente dans les années 80 s'est de fait soldé par une faillite généralisée du système rentier. En effet, la faillite est d'abord une faillite agricole car la production de ce secteur continue à dépendre d'une manière quasi unique des aléas de Dame Nature. En outre, la facture alimentaire occupe une place relativement importante dans la structure des importations. Et l'agriculture algérienne est de fait incapable de subvenir aux besoins essentiels de la population indigène. La faillite est aussi une faillite industrielle dans la mesure où les usines achetées ?clés en main' tournent en général à moins de 50% de leur capacité théorique. En outre, contrairement à l'objectif annoncé d'indépendance vis-à-vis du marché mondial, ces usines sont non seulement dépendantes de l'extérieur en ce qui concerne leurs équipements mais aussi en ce qui concerne les matières premières. Enfin, leurs produits répondent rarement aux critères mondiaux en termes de qualité ou de prix. Elles sont de fait incapables de pénétrer le marché mondial. La faillite est aussi une faillite économique dans la mesure où la priorité accordée aux industries dites industrialisantes a généré peu d'emplois au regard de la croissance démographique. Les effets d'entraînement étant peu perceptibles, la stratégie suivie s'est plutôt soldée par un dépeuplement des campagnes, par une augmentation du chômage et par une « bidonvillisation » des grandes villes. La faillite la plus apparente est enfin la faillite financière qui résulte en partie de la dépendance de l'économie algérienne vis-à-vis de la rente pétrolière dont le volume fluctue avec le prix du baril de brut au niveau mondial. Etant donné l'état de mono-exportateur de l'économie domestique, toute fluctuation à la baisse du prix du brut requiert un endettement systématique pour répondre aux besoins généralement incompressibles d'importations. Le rééchelonnement de la dette au début des années 90 devrait à priori finaliser une période où la gabegie faisait office de politique économique. Enfin, l'effondrement du paradoxe (i. e. l'autonomie de l'Etat par rapport à la société civile) qui synthétise l'effondrement des deux illusions implique que l'Etat algérien est à prendre. La confusion entretenue par les idéologues de l'Etat-rentier entre le mouvement d'une économie rentière et la transition socialiste a ainsi permis à certains courants politiques de s'attaquer à un ennemi virtuel et de proposer en retour l'alternative néolibérale et/ou islamiste. L'alternative islamiste ne peut dans les faits que relever du vœu pieux car son discours développe une vision (utopie) réactionnaire historiquement déphasée qui est dans l'incapacité théorique et pratique à relever les défis du moment. Dans son essence, le discours islamiste est en fait identique au discours de l'Etat-rentier dans son utilisation du populisme, de la négation des contradictions de classes et de son mépris à l'égard de la masse qui a, semble-t-il, constamment besoin d'être guidée. Bien qu'il soulève des questions relevant souvent de la psychanalyse, le discours islamiste peut néanmoins être appréhendé comme couverture idéologique de remplacement pouvant servir les couches rentières et prédatrices dans leur tentative de pérenniser leur domination. L'alternative néolibérale, en revanche, semble répondre aux exigences du moment. Cependant, l'historique des couches sociales qui se sont enrichies en accaparant une partie de la rente sous la protection et l'impulsion de l'Etat-rentier suggère que ces dernières méconnaissent les règles de l'accumulation capitaliste. Leur apprentissage devrait néanmoins se réaliser à l'école du capitalisme mondial. Et cet apprentissage s'opérerait grâce à l'ouverture de l'économie algérienne au marché mondial ou, en d'autres termes, grâce à l'adhésion de l'Algérie à l'OMC. 3 SUR L'ADHESION DE L'ALGERIE A L'OMC La baisse relative de la masse de rente accaparée par l'Etat-rentier devrait ainsi permettre de clore une phase historique où le volontarisme naïf et la gabegie faisaient office de stratégie et de politique économique. La formation sociale algérienne doit cependant affronter des contraintes inédites pour autant que le mode de production capitaliste (MPC) traverse au stade actuel de son développement une phase de remise en cause aussi bien des relations entre « économies centrales » et « économies périphériques » que des rapports de force entre dynamique de l'accumulation du capital à l'échelle mondiale et régulation politique5 (i. e. l'encadrement institutionnel particulier défini par chaque Etat national). 3-1 SUR LA DYNAMIQUE DU MPC A L'ECHELLE MONDIALE La remise en cause du premier aspect transparaît dans la nouvelle configuration de l'économie-monde6 au sein de laquelle s'articulent des foyers (des régions ou des métropoles) d'accumulation et de croissance qui ne recoupent ni entités nationales homogènes ni régions spécifiques. En fait, la dissociation entre l'espace de la reproduction du capital, i. e. l'espace occupé par le capital financier mondial et les firmes transnationales et les espaces de régulation politique, i. e. les espaces contrôlés par les différents Etats, souligne un enchevêtrement certain entre entités centrales et entités périphériques. En effet, l'industrialisation de régions précédemment classées dans la périphérie (la région constituée par un certain nombre de formations sociales du Sud-Est asiatique par exemple) suggère que les formations sociales qui forment cette région peuvent non seulement s'affranchir de la relation traditionnelle de domination entre « pays développés » et « pays sous-développés » mais, paradoxalement, ces économies semblent dorénavant en mesure d'imposer aussi bien leur production au sein du marché mondial que d'influer sur les spécialisations et sur l'emploi au sein des formations sociales dites développées. En fait, le décloisonnement des marchés sous l'effet du GATT puis de l'OMC qui lui succède favorise en premier lieu la concurrence entre les divers Etats (espaces) nationaux qu'ils soient « classés » au centre ou à la périphérie. Car, le capital financier mondial dominant recherche une rentabilité maximale et ne peut être attiré que par les conditions de rentabilité les plus favorables. Par conséquent, dans ce nouveau contexte, les règles du jeu semblent beaucoup plus dictées par la dynamique du capital financier qui opère au niveau mondial que par les Etats nationaux. Et les rapports de force entre logique de reproduction du capital et régulation politique se déplacent de fait en faveur de la première. Ainsi, la phase où l'alliance entre les Etats et les marchands indigènes s'est mise en place dans le cadre de l'accumulation primitive7 du capital et lors de la métamorphose du capital marchand en capital productif semble déboucher sur son contraire (remise en cause du deuxième aspect). Cette phase qui se caractérisait par un encadrement institutionnel de l'accumulation du capital au sein de chaque formation sociale et qui culmina avec l'adoption du modèle keynésien (modèle basé particulièrement sur le compromis social) de régulation des relations économiques et sociales à partir du new deal américain de 1933 a apparemment atteint ses limites. Ainsi, les Etats nationaux du noyau capitaliste qui ont soutenu la percée internationale des capitaux nationaux (à travers l'expansion coloniale) et qui ont administré la suppression des entraves (féodales en particulier)8 à l'accumulation du capital au niveau interne deviennent, dans la phase actuelle, eux-mêmes des entraves à la dynamique de reproduction du capital à l'échelle mondiale. Par conséquent, ces Etats qui sont historiquement les produits de la dynamique du capitalisme dans des cadres nationaux confrontent au même titre que les Etats produits par l'expansion coloniale, i. e. les Etats de la périphérie, la dynamique du capital financier comme fraction dominante du capital mondial. Les Etats du noyau capitaliste devraient ainsi remettre en cause (par la réduction des services sociaux, les privatisations, la réduction des impôts, etc.) les compromis sociaux dont le modèle keynésien a facilité et justifié la mise en place (notamment après la Deuxième Guerre mondiale) alors que les Etats de la périphérie devraient, à priori, s'atteler à détruire les « survivances » des rapports sociaux non capitalistes dont la destruction n'a pas été achevée par la phase coloniale. Il semble, selon la logique du discours néolibéral dominant, que ce soit là le prix à payer aussi bien pour les Etats du noyau capitaliste que pour les Etats de la périphérie pour éviter la marginalisation ou la désertification. 3-2 DE LA POLITIQUE DE L'ETAT-RENTIER Au niveau économique, l'Etat algérien devrait donc avoir pour tâche principale de restructurer la sphère économique nationale de manière à offrir les conditions les plus favorables à l'intervention du capital mondial. Ceci nécessite néanmoins que cet Etat, en tant qu'Etat national, ait une appréhension juste des enjeux du moment. Or, les tergiversations actuelles sur les réformes à entreprendre soulignent une absence flagrante de vision à moyen et à long terme sur le devenir de la formation sociale algérienne. Et cette absence de vision découle en partie de la lutte sourde à laquelle s'adonnent les couches sociales qui dominent cette formation. En effet, si la domination du capital marchand au sein de la formation sociale algérienne caractérise, en premier lieu, un état de sous-développement des forces productives locales, alors la première tâche historique que l'Etat national devrait entreprendre est la mise en place de conditions aptes à favoriser la métamorphose du capital marchand en capital productif. Or, cette métamorphose suppose que l'investissement productif devienne plus attractif en terme de rendement que le mouvement du capital marchand. Et le rôle de l'Etat national se résumerait dans ce contexte en la promulgation d'une réglementation et de mesures appropriées dont l'objectif premier serait de pénaliser les mouvements du capital marchand et d'inciter la métamorphose de ce dernier en capital productif. Cependant, le capital marchand dans son essence est, d'abord et avant tout, la matérialisation de la rente en tant que rapport social. Par conséquent, les couches rentières ne peuvent que s'opposer à cette dynamique qui aboutirait à terme à leur disparition en tant que telles. Il s'agit dès lors de s'interroger sur les réponses que l'Etat-rentier avance pour dépasser la crise qu'il affronte tout en pérennisant la domination des couches dont il synthétise les aspirations. Ainsi, deux discours en rapport avec l'évolution apparemment inéluctable de la formation sociale algérienne vers le capitalisme en tant que mode de production dominant émergent et ne trouvent aucune opposition explicite à leurs argumentations. L'économie de marché et l'intégration à l'OMC, d'une part, et la démocratie, d'autre part, constituent les deux discours dominants de l'heure et sont présentées comme les solutions complémentaires à la crise que traverse la formation sociale algérienne. 3-2-1 DE L'ECONOMIE DE MARCHE SPECIFIQUE La notion d'économie de marché renferme cependant un non-dit dans la mesure où cette notion évite de poser le problème de la production en tant que moment déterminant du procès réel de production, i. e. l'ensemble du procès de production immédiat et du procès de circulation9. En fait, cette notion d'économie de marché ne renvoie pas nécessairement à une économie capitaliste mais peut aussi bien couvrir une quelconque économie marchande pré-capitaliste. Elle peut dès lors répondre aux aspirations avouées ou inavouées de toutes les couches sociales qui ont monopolisé le saupoudrage de la rente et qui ne peuvent survivre en tant que couches dominantes que pour autant que la rente demeure le rapport social dominant. Ainsi, la métamorphose surprenante des rentiers du système en fervents adeptes de l'économie de marché constitue un paradoxe certain mais peut néanmoins trouver une explication appropriée si l'économie de marché proposée est appréhendée comme relevant beaucoup plus de l'économie de bazar (économie proto-capitaliste où le capital marchand est dominant) que de l'économie capitaliste. Car, les mesures (le désengagement progressif de l'Etat de la sphère économique et la libéralisation des échanges avec l'extérieur qui s'accentuera avec l'intégration à l'OMC, en particulier) prises pour asseoir une soi-disant économie de marché ne peuvent à moyen terme que détruire les capacités de production domestiques. Si l'économie domestique est divisée en trois grands secteurs10, le secteur progressif (pétrole et gaz), le secteur retardant (industrie et agriculture) et le secteur non marchand (services en général), alors, une analyse prospective de moyen terme permet de cerner la destinée de chacun des secteurs précités. Au regard des besoins croissants de l'économie mondiale en fuels fossiles, le secteur des hydrocarbures ne peut que continuer à se développer (l'engouement des sociétés étrangères à investir dans ce secteur et l'euphorie qu'exhibent les dirigeants algériens après la découverte d'un nouveau puits de pétrole ou de gaz sont des faits certains) et à générer une rente substantielle. Bien que la part de rente qui revienne à l'Etat-rentier dépend d'une manière cruciale des conditions du marché en général et de la politique des USA en tant que puissance dominante de l'heure en particulier, il n'en demeure pas moins que l'Etat-rentier empochera constamment une portion conséquente de la rente. Etant donné la nature du secteur retardant (technologie désuète en général et management archaïque), son entrée dans la compétition internationale ne peut aboutir qu'à sa quasi-disparition. En effet, l'ouverture quasi anarchique du commerce extérieur aux marchandises produites ailleurs ne peut que hisser les firmes étrangères et les importateurs-importateurs domestiques au rang de pourvoyeurs exclusifs du marché algérien. Les producteurs domestiques, ayant prospéré sous la protection de l'Etat-rentier au faîte de sa gloire, ne peuvent dès lors que se reconvertir en marchands de zalabia produite avec de la semoule ou de la farine importée (ceux qui gravitent autour des centres de décision auront certainement la chance de se reconvertir rapidement en importateurs-importateurs). A suivre *Département d'économie Université de Annaba Notes: 1 Le lecteur averti aura reconnu l'adaptation d'une expression de Gramsci au contexte algérien. 2 Sur le concept de rente voir Bendib R., 1995, rente pétrolière et crise de l'ordre rentier en Algérie, OPU, Alger. 3 Liabes D., 1984, Capital privé et patron d'industrie en Algérie, 1962-1982, CREA, Alger. 4 K. Marx, Le capital, 1969, critique de l'économie politique, L.II, t.I, Eds sociales, Paris, p.37-38 5 Pour plus de détails, voir, par exemple, Adda J., 1998, La mondialisation de l'économie, 2 tomes, Casbah Editions, Alger. 6 Braudel F., 1985, La dynamique du capitalisme, Flammarion, Paris, p.84. 7 K. Marx, 1969, op.cit., L.I, t.III, Paris, p. 156. 8 Sur l'articulation du mode de production féodal et du mode de production capitaliste voir par exemple REY, P.P., 1973, les alliances de classe, sur l'articulation des modes de production suivi de matérialisme et luttes de classes, Eds Maspéro, Paris. 9 K. Marx, op. cit., L.III, t.III, p206. 10 Cette terminologie est extraite de la « macro-économie du syndrome hollandais ». Pour plus de détails, voir par exemple NEARY, J.P. and WIJNBERGEN, S.V., 1986, (edited by), Natural resources and the macro-economy, Basil Blackwell Ltd, Oxford, UK. |