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Considérée comme
un véritable fléau par les médecins spécialistes, le cancer de la vessie occupe
actuellement la première place dans les cancers urinaires en Algérie et au
Maghreb. Le lien entre la maladie et le tabagisme est très étroit. La
cigarette, estime le Pr Abderrahmane Attar, chef de service d'urologie au CHU
d'Oran, est un des facteurs incriminés dans la genèse et l'apparition de la
pathologie vésicale, en plus des facteurs alimentaires et génétiques. Le cancer
de la vessie touche plus les hommes que les femmes et plus les fumeurs que les
non-fumeurs. Il s'agit d'un cancer qui se manifeste vers 40 et 45 ans. La
lourdeur dans le traitement de cette maladie et les conséquences, parfois
dramatiques, sur la vie des malades incitent à sensibiliser le grand public sur
l'évolution inquiétante du cancer de la vessie dans notre pays et l'importance
du diagnostic précoce pour éviter le recours à la cystectomie, un traitement
chirurgical lourd visant à enlever la vessie soit en partiel, soit en total.
Selon le Pr Attar, le service d'urologie au CHU enregistre en moyenne deux
cystectomies par semaine, tandis qu'au niveau national, on opère entre trois à
quatre tumeurs de ce type par jour. C'est énorme, explique le chef de service
d'urologie pour une pathologie lourde de conséquences. Le diagnostic précoce
reste le meilleur moyen de prévention contre le recours à l'ablation de la
vessie. D'où le rôle des associations pour sensibiliser sur les risques de
cette maladie.
M.Lazadj Abdelkader, stomathérapeute, ayant subi lui-même une cystectomie, active actuellement comme bénévole dans le cadre d'une cellule d'écoute qu'il a créée pour la prise en charge de ces malades. Pour ce stomathérapeute, le constat le plus édifiant est que tous les malades stomisés qui sont passés par cette cellule d'écoute sont des anciens fumeurs. «Le tabac est responsable en grande partie dans l'apparition de cette maladie et je souhaite, en tant que malade concerné de près par cette pathologie, sensibiliser le grand public sur les risques qu'encourent les fumeurs», a souligné M.Lazadj Abdelkader. Parler de loin de ces malades peut laisser indifférent mais se rapprocher d'eux et voir le calvaire qu'ils vivent quotidiennement donne à réfléchir sur l'importance de préserver sa santé contre tous les facteurs de risque. L'ABLATION DE LA VESSIE, UN DRAME POUR LES MALADES Le recours à la cystectomie a été un drame pour la majorité des malades, nous confie le Pr Attar. Se retrouver du jour au lendemain avec une poche qui sert à collecter les urines est souvent traumatisant pour ces patients sans parler des conséquences sur l'entourage et sur la vie professionnelle, familiale et même intime des malades. Le même professeur nous explique qu'il existe deux types de tumeurs de la vessie, la tumeur superficielle, la plus fréquente et la tumeur profonde la plus compliquée. Pour la première, la racine ne s'enfonce que de façon superficielle dans la paroi de la vessie. On l'appelle polype superficiel, papillome, tumeur superficielle. Lorsque le chorion est franchi, on parle de tumeur profonde, a indiqué le Pr Attar. Le plus inquiétant est qu'il n'existe aucun élément, a tenu à préciser ce spécialiste, qui prédit que la tumeur superficielle devient une tumeur profonde. «Cette tumeur est imprévisible », nous dit ce professeur. Pour lui, la technique la moins mauvaise consiste à remplacer la vessie par un bout de l'intestin et permettre au malade d'uriner de façon «normale». Mais cette technique n'est possible que lorsque la tumeur est haute. Malgré les techniques, l'intervention est lourde au point où, nous dira le Pr Attar, certains malades âgés de la soixantaine refusent la chirurgie car ils ne supportent pas de perdre leurs capacités viriles. Ils préfèrent vivre avec la tumeur jusqu'à la mort et conserver ainsi leur dignité. PEU DE SPECIALISTES POUR PRATIQUER CETTE CHIRURGIE LOURDE Si les malades stomisés étaient confrontés il y a quelques mois au problème de pénurie de poches au point où certains ont eu recours à des sachets ordinaires avec tous les désagréments que cela occasionne, ils doivent faire face aussi au problème de manque de spécialistes. Le Pr Attar commente sur ce point que tous les chirurgiens formés ne pratiquent plus cette chirurgie après le service civil. Ils s'installent dans leurs cabinets délaissant ainsi cette spécialité qui ne se pratique que dans les établissements publics. «C'est regrettable », a souligné le même spécialiste, sachant que la prise en charge de cette maladie coûte très cher, en plus du suivi post-opératoire qui peut être lent et épuisant pour les malades. Pour une sensibilisation sur les risques de cette maladie, le chef de service d'urologie, ainsi que le fondateur de la cellule d'écoute insistent sur le rôle des associations de santé pour cette spécialité qui sont absentes sur le terrain. Pour M. Attar ces associations et spécialement celle créée dans la wilaya de Sidi Bel-Abbès doivent se relancer pour apporter aide à ces malades. Pour M. Lazadj, un appel est lancé aux autorités pour faciliter la création d'une nouvelle association à Oran pour prendre en charge les malades non assurés pour qu'ils bénéficient des poches. «Cette catégorie de malades est livrée à son sort et il est de notre devoir de leur apporter aide et assistance au même titre que les malades assurés», estime M.Lazadj. |