Devant ma télé. Je zappe de chaîne en chaîne à la recherche d'une information apaisant ma fierté d'Arabe. L'horreur maquille l'écran de ma télé. Il y a du rouge partout. Il me démange. Il me pousse sur le corps quantité d'épines, des ruches de chrysanthème et un immense espace de chagrin. El jazeera martèle le nombre de martyrs. Les Arabes savent compter les morts. Ils ont inventé les chiffres. Normal !

Près de 300 enfants tués selon l'Unicef. L'indice de fécondité passe de 5 à 3 enfants par femme, voire à néant dans quelques quartiers de Gaza. Israël détruit les tunnels et les futurs combattants.

Bonne nouvelle ! L'Algérie sort de son mutisme et condamne les actes barbares et les exactions commises par Israël. Bouteflika décide une aide de 25 millions de dollars à Gaza. Certainement pour reconstruire ce qui a été bombardé. Ceci irrite Israël qui va devoir tout redémolir dans quelques années. L'Algérie fatigue Israël et lui donne du boulot supplémentaire.

Je caresse ma télécommande. Entre France 24 en arabe et les guignols de l'info, le choix est fait.

J'ose le rire. J'ai beaucoup pleuré, intérieurement depuis le début du massacre de Gaza.

Hollande ne me fait plus rire depuis l'histoire de «si j'étais président !». D'ailleurs, il fait pleurer ces concitoyens. Son Valls valse avec le CRIF, qui valse avec le pseudo imam Chelghoumi.

Je retourne sur France 24. Une lueur de joie titille ma fierté. Eric Cantona, l'ex-Footballeur interpelle Hollande dans une vidéo et l'invite à lire la lettre d'Edwy Plenel de Mediapart. Je me sens écouté. Cantona invite les internautes à se filmer et à envoyer le message au président Hollande, lui rappelant qu'il égare la France. Je scande : Contona, président !

Ma fille entre en courant : «ça va, papa ?»

Non, ma fille, ça ne va pas ! Il n y a pas de connexion Internet. Djaweb ne répond plus et je dois absolument lire la lettre d'Edwy Plenel sur le site de Médiapart. Je dois absolument m'enregistrer et envoyer la vidéo au président Français. Pourquoi ne pas l'envoyer à Julie Gayet, l'invitant à Boycotter le lit de Hollande.

Je décide d'aller au Cyber d'en face ! Il fait une chaleur terrible. 48 degrés. Si les Israéliens étaient à Relizane, aucun de leurs soldats ne résisterait. Ils seront tous grillés comme des méchouis. Ils n'auront même pas le temps de respirer. Ils seront «napalmés».

A Relizane, comme à Gaza, nous résistons !

La tristesse et la chaleur provoquent mes délires. A la sueur se mêlent les larmes. Le climatiseur refroidit ma pensée.

Un poste se libère au cyber ! El Hamdoulilah. Je sollicite Google.

Le Muezzin appelle à la prière du Maghreb. Je décide d'aller

prier, le temps que la page de Mediapart se télécharge. Je demande au gérant du cyber de ne laisser personne toucher au PC, je prends en charge ce «temps vide», lui préciserai-je. J'ai l'habitude.

De retour au Cyber .Je lis sur le site de Mediapart : Monsieur le président, vous égarez la France ! Une fierté «Plénel-ment» me gagne ! Je t'aime Edwy ! Rassurez-vous, je ne le connais pas, mais je l'aime ! Un Dergaz de journaliste qui ne mâche pas ses mots .Je me concentre sur le message

d'Edwy Plenel qui critique ouvertement la gestion à distance du conflit israélo-palestinien du président français, et les interdictions de manifester. Selon lui, François Hollande est coupable de sept fautes majeures. Il lui rappelle :

«1. Vous avez d'abord commis une faute politique sidérante. Rompant avec la position traditionnellement équilibrée de la France face au conflit israélo-palestinien.

2. Vous avez ensuite commis une faute intellectuelle en confondant sciemment antisémitisme et antisionisme.

3. Vous avez aussi commis une faute démocratique en portant atteinte à une liberté fondamentale, celle de manifester.

4. Vous avez également commis une faute républicaine en donnant une dimension religieuse au débat français sur le conflit israélo-palestinien.

5. Vous avez surtout commis une faute historique en isolant la lutte contre l'antisémitisme des autres vigilances antiracistes. Comme s'il fallait la mettre à part, la sacraliser et la différencier.

6. Vous avez par-dessus tout commis une faute sociale en transformant la jeunesse des quartiers populaires en classe dangereuse.

7. Vous avez, pour finir, commis une faute morale en empruntant le chemin d'une guerre des mondes, à l'extérieur comme à l'intérieur.»

Comme à la «Plenel», Edwin, cet ami que je ne connais pas sait faire dans la conclusion :

«Monsieur le Président, cher François Hollande, vous avez eu raison d'affirmer qu'il ne fallait pas «importer» en France le conflit israélo-palestinien, en ce sens que la France ne doit pas entrer en guerre avec elle-même. Mais, hélas, vous avez vous-même donné le mauvais exemple en important,

par vos fautes, l'injustice, l'ignorance et l'indifférence qui en sont le ressort.»

Je scande : Plenel, président ! Les jeunes rivés sur leur PC se retournent. J'ai dérangé leur quiétude. Je leur souris.

Ça va, Aami ( Oncle) ? Là, il y a de la Clim, me dit un jeune. Mzia ma rakche Fel Zounka (heureusement que vous n'êtes pas dehors !). Je continue de sourire. Fier. Edwy vient de me venger contre Hollande.

Je quitte le cyber, sourire aux lèvres. Ma fille m'accueille : «Papa, Makache El Khobz !

Avec tout ce qui se passe à Gaza, vous ne devez même pas manger Ya Benti ! Dis à ta mère que je suis triste. Je mange sans pain aujourd'hui. Et nous, papa ? S'inquiète ma fille. Faites comme moi, dis- je ? Aujourd'hui, nous allons faire comme les occidentaux. Nous Boycottons «El Khabbaz» ! Pas de Khobz ! On ne sait même pas d'où vient sa Farine et sa levure ! Et puis, dis à ta mère : Ses mains sont-elles coupées ? Qu'elle arrête de rêvasser devant les films Turcs pour faire du pain.

El Jazeera diffuse les mêmes atrocités. L'holocauste à Gaza. Des enfants décapités. Il pleut des bombes. Israël accuse le Hamas d'utiliser la population comme bouclier. Cela suppose, dans le cas vrai, qu'Israël tire sur des otages. Drôle de démocratie !

 Les carnages se bousculent dans ma pensée. Abdelfatah El «Khabbaz**» exhibe sa bravoure .Il ne se contente plus de la destruction des tunnels, source d'approvisionnement principale pour le 1,7 millions de Gazaouis mais ordonne la fermeture du poste frontière de Rafah. Gaza est une prison à ciel ouvert. Le roi d'Arabie sort ses griffes bien «manucurées». Grand comploteur devant l'éternel. Il a fustigé le silence de ces «maitres» devant l'hécatombe de Gaza. Quel réveil ! Le Qatar prépare la coupe du monde et rassure la Fifa, promettant de nouveaux stades climatisés. Il rassure que les 10 millions de dollars promis pour la reconstruction de Gaza n'affecteront en rien les 200 milliards «d'investissement» que s'apprête à réaliser l'émirat pour accueillir la coupe du monde 2022. Quand on aime on ne compte pas ! La Syrie plonge dans le chaos. La Lybie regrette Kadhafi et l'Irak s'enlise dans la barbarie totale.

Je dors. Blotti contre un absent. Je raconte nos pouilleries scrofuleuses. Nos bourrasques.

Nos endurances et la vie tumultueuse de mon arabité condamnée à l'inquiétude.

J'observe, amorphe mon corps voué à l'humiliation.

* Enseignant-Paris

** El Khabbaz : allusion au qualificatif donné par les chaînes de télé Israéliennes au président Egyptiens.