
Pour sa première
répétition à Béni-Saf, le théâtre régional Sirat-Boumediene de Saïda a choisi
la pièce «Noura», adaptée de la pièce «Yerma» (stérile) du poète et dramaturge
espagnol, Federico Garcia Lorca et mise en scène par Abdelkrim Bouguetof. La
générale de cette nouvelle production a été jouée vendredi en fin d'après-midi
sur les planches de la salle des fêtes. La pièce se déroule dans un
environnement rural. Elle relate l'histoire d'une paysanne nommée Yerma
(Nesserine Maoujar Belhadj), qui mène une vie de frustration et d'ennui : elle
passe ses journées chez elle selon la volonté de son mari (Hamouda Bachir) et
attend désespérément de tomber enceinte. La pièce met au jour le conflit
intérieur d'une femme mariée qui espère en vain l'événement qui consacrera sa
féminité. Mais la protagoniste est en quelque sorte prédestinée à cette
stérilité (en espagnol «yerma») veut dire «dépeuplée», «stérile» (pour une
terre). En outre, elle ne peut pas attendre de consolation de la part de son
mari qui est un homme travailleur mais insensible à sa souffrance. De plus, il
ne souhaite pas réellement avoir d'enfants. Très attachée à ses convictions
morales, Yerma ne veut pas non plus tromper son mari malgré les incitations
plus ou moins explicites d'une vieille dame ou guérisseuse du village (Malika
Youssef), et malgré son attirance manifeste pour son ami d'enfance (Maoujar
Châabane, qui est dans la vie, son époux). L'atmosphère de la pièce se fait de
plus en plus étouffante. Soupçonnant Yerma de vouloir le tromper pour avoir un
enfant, son mari demande à deux de ses sœurs de venir habiter chez eux pour la
surveiller. Yerma finit par aller en cachette chez une dame dont on lui a dit
qu'elle pourrait soigner sa stérilité. Elle se retrouve alors malgré elle et à
sa grande surprise dans un lieu de débauche. Son mari l'a suivie en cachette
jusque-là, et alors qu'il essaie de l'étreindre, Yerma le tue, dévoilant la
profondeur et l'intensité de son mal-être. L'émotion, tout au long de
l'interprétation, a été bien servie par la musique achewiq, ce style musical
autrefois réservé aux femmes pour exprimer un sentiment de joie ou de deuil. La
scénographie est de Mourad Bouchehir, alors que les tableaux chorégraphiques
ont été conçus par Aïssa Chaouti. Enfin, le public a bien apprécié le
spectacle, ce qui n'a pas laissé sans réaction la grande comédienne Nesserine
Maoujar Belhadj : «Je serais très triste si cette magnifique pièce, une fois
son contrat terminé (il resterait 5 spectacles à jouer), serait mise au
placard» (comprendre, aux oubliettes).